Orphelins et Enfants Trouvés

Chapitre 7

2338 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 27/09/2021 18:51

Dès l’instant où le docteur MacTaggert entra dans la cuisine, elle sut que quelque chose se tramait. Une tension subtile mais nette crépitait au sein du groupe. Tous les élèves affichaient un air morose, même angoissé chez certains, tout en essayant de donner le change.

« Ils sont au courant », constata-t-elle.

Ce n’est qu’après s’être installés dans le salon et avoir siroté une bonne partie de leurs chocolats que la glace fut brisée.

-Docteur MacTaggert..., commença Illyana pratiquement dans un murmure. J’ai... surpris une conversation entre vous et monsieur Worthington. 

Moira MacTaggert se figea après avoir siroté la moitié du contenu de son mug, se força à avaler et ensuite, après mûre réflexion, reposa sa tasse sur la table basse.

-Ne vous énervez pas, s’il vous plaît, implora Illyana. Je sais que, d’habitude, je fais exprès de faire ma fouineuse. Mais là, c’était un accident. Je vous le jure. Ne vous mettez pas en colère, s'il vous plaît. 

Le docteur MacTaggert joignit doucement les mains avant de les décroiser.

-Qu’est-ce ce que tu as entendu exactement ? 

-Je suis pas vraiment sûre, mais je crois que j’ai entendu l’essentiel. 

Le docteur MacTaggert plissa les yeux de désapprobation.

-Et, naturellement, tu as jugé bon d’aller en parler à tout le monde. 

-Elle se fait seulement du souci, intervint Dani. Comme nous tous.

-C’est bon, Dani. Merci, l'interrompit le docteur MacTaggert.

La jeune chercheuse poussa ensuite un soupir.

-J’imagine que dans un sens, cela va faciliter les choses. Je dois vous mettre au courant de certains évènements à venir et, puisque vous êtes, au moins en partie, au courant de la situation, je vais aller droit au but.

Elle poussa un autre soupir afin d’éclaircir ses idées puis reprit la parole :

-L’école va rester ouverte. Quant à moi, je vais rester avec vous. Quand monsieur Worthington arrivera la semaine prochaine, nous entamerons des recherches afin d’engager des professeurs ainsi que du personnel de soutien venant de l’extérieur. 

Un murmure général de soulagement se fit entendre dans la pièce.

-Ceux qui viendront travailler ici n’auront jamais eu affaire à une école comme la nôtre. C’est la première fois que nous sommes confrontés à ce genre de contrainte mais, vu la situation, je crois pas que nous ayons vraiment le choix. Il ne s'agira pas d'engager de baby-sitter : vous avez déjà prouvé que vous êtes capables de vous débrouiller tout seuls sans que je sois constamment derrière vous. Mais il vous faut des professeurs, des conseillers, des gens qui seront plus qualifiés que moi pour vous guider. Monsieur Worthington et moi allons personnellement passer en revue tous les candidats. Toutes les personnes engagées seront des gens dont nous approuverons sincèrement leurs capacités à vous aider. J’attends donc de vous que vous leur laissiez une chance. Cela vaut surtout pour toi, Illy. 

-Oui, madame, répondit docilement la jeune blonde.

-Je crois que je vous dois à tous des excuses. C'est une situation que j'ai trop longtemps laissé durer. J’aurais dû prendre ces dispositions plus tôt. C’est... seulement que... 

Sa voix se brisa. Elle marqua une pause pendant un moment, les lèvres serrées.

Ce fut Rahne qui acheva sa phrase :

-Vous espériez que le professeur et les X-Men reviennent.

-Oui.

Sur le moment, le docteur MacTaggert n’osa rien dire d’autre. Elle prit de nouveau sa tasse et but une longue gorgée de son chocolat.

-On est contents que vous restiez, dit Sam.

-C’est vrai, acquiesça Dani. Que vous vouliez rester avec nous.

-On pouvait pas rêver mieux, déclara Roberto.

Rahne se jeta dans les bras du docteur MacTaggert et la serra fort. Moira posa sa tasse et lui rendit l’étreinte. Au moins une larme, qu'elle avait juré de ne pas verser devant les élèves, coula sur sa joue.

-Il y a autre que je veux que vous sachiez, dit-elle, une fois qu’elle retrouva l'usage de la parole. Et je veux que vous l’entendiez de ma bouche afin qu’il n’y ait pas de malentendu. J’ai fait mon possible pour garder avec chacun d’entre vous une relation à un niveau professionnel, car je pensais que ce serait le mieux pour nous tous. Mais je veux vous le dire : je vous aime. Je vous aime tous. Je ne pourrais pas être plus heureuse ou fière de la façon dont vous vous êtes comportés pendant tout ce temps ; vous êtes comme mes enfants. Je ne vous abandonnerai JAMAIS. Je vous le promets.

Elle expira difficilement avant de continuer :

-Viendra un moment, pour certains d’entre vous, plus tôt qu’ils ne l’imaginent, où vous serez prêts à quitter l’école et trouver votre place dans le monde. Mais avant que ce jour n’arrive, je serai là pour vous. Et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour vous guider dans cette transition. 

-On vous aime, docteur MacTaggert, dit Dani d’un ton franc.

Un fort murmure d’assentiment se répandit à travers la pièce.

-Maintenant, il reste un dernier point à régler, dit le docteur MacTaggert en s’essuyant discrètement les yeux. Je pense qu’avant d'entreprendre quoi que ce soit, nous avons la possibilité de nous installer dans le manoir pour diriger les affaires de l’école de là-bas. Est-ce que l’un de vous a un avis à émettre ? 

Les élèves se regardèrent.

-On en a déjà discuté entre nous, dit Dani. Et si ça ne vous ennuie pas, on préférerait rester ici. On s’y sent un peu comme chez nous. 

-Il n’y a aucun problème, lui assura le docteur MacTaggert. Je voulais seulement m'en assurer. Dans ce cas, je vais m'arranger pour faire transporter des équipements du manoir ici, au ranch. J’aurai probablement besoin que vous m’aidiez. 

Elle se laissa tomber sur son siège et soupira lourdement, avant de se redresser et de sourire.

-Très bien. Je crois que Rahne a parlé de jeux de plateau. Est-ce que l’un d’entre vous a une idée en tête ? 

* * *

Bien qu’Illyana souhaitait rester avec ses amis, la jeune blonde, encore affaiblie par les effets de sa maladie, dut très vite retourner au lit. Toutefois, à peine était-elle rentrée dans sa chambre qu’on toqua doucement à la porte. Elle se retourna et vit Dani qui lui souriait. Elle tenait un petit verre contenant un liquide sirupeux.

-Hé, t’as oublié ton médicament. 

Illyana lui adressa un pâle sourire.

-Merci.

Elle engloutit le liquide amer puis se hissa sur son lit avant de se coucher en poussant un soupir. Dani attrapa les couvertures et la recouvrit avec. La jeune Amérindienne s’assit ensuite au bord du lit.

-T’es pas obligée de me border. Je n’ai plus six ans, protesta Illyana.

-Je voulais juste te dire que ce que tu as dit ce soir... 

-Je ne vais pas retirer les conneries que j’ai dites, dit-elle d’un ton hargneux.

Ses traits se radoucirent néanmoins.

-Mais je vais vraiment essayer de me calmer avec ma manie d’envoyer les autres se faire foutre, dit-elle d’un air contrit. Je sais que c’était pas très sympa. 

Dani afficha un sourire patient.

-T’as fini ? Je peux parler maintenant ? 

-Excuse. Vas-y. 

-Ce que tu as dit tout à l’heure, c’était vraiment courageux, Illy. Tu ne t’étais jamais autant ouverte à nous, jamais. 

-Oh, s’te plaît..., gémit Illyana embarrassée.

-C’était super, insista Dani. Tout le monde a adoré. Tu commences enfin à nous montrer ta vraie nature, et c’est la chose la plus géniale qui soit. 

-Dixit la chef des inadaptés. 

-Illy, la seule raison qui fait que ce n’est pas toi la leader du groupe, c’est parce que tu repousses tout le monde, répliqua Dani. Alors, arrête ça. Laisse les autres t’approcher. S'il te plaît. On sait qu’il y a des trucs qui ne vont pas bien chez toi. Mais on s’en fiche ! C’est pareil pour nous tous, ici. On n’a pas besoin que tu sois parfaite, c’est pas ce qu’on attend de toi. On veut simplement la vraie Illy. Avec ses défauts, ses délires sur les dragons et les démons. Sois avec nous. Sois forte avec nous. Tu m’as dit que tu voulais vraiment rester humaine. Je te garantis que c'est le meilleur moyen pour y arriver, ma grande. 

Illyana jaugea attentivement Dani pendant un long moment.

-En fait, t’es vraiment douée, finit-elle par dire. T’es une bien meilleure leader que moi j’aurais fait. Tu sais comment t’y prendre avec les autres. 

-Merci, lui dit Dani en souriant. Mais faut pas que tu te sous-estimes. Tu as d’incroyables qualités de leader. T’es une chef née, quand tu veux bien. Qui sait ? Peut-être qu’un jour, tu seras professeur à l’Institut.

Illyana grogna.

-Plutôt crever la gueule ouverte que de me retrouver maîtresse d’école, déclara-t-elle d’un ton catégorique.

-Un autre truc qu’il faut qu'on aborde puisqu’on est en plein dans le sujet : apprends à accepter les compliments qu'on peut te faire, ma cocotte. 

Les deux jeunes femmes se regardèrent d’un air ébahi pendant un long moment, avant d’éclater de rire. Malheureusement pour Illyana, cela déclencha une nouvelle quinte de toux et elle dût se redresser quelques instants jusqu’à ce que les spasmes cessent.

-Je suis désolée, pardon, s’excusa Dani qui continua à rire avant de lui tendre un mouchoir. Je te jure que j'ai pas fait exprès. 

Après qu’Illyana ait jeté le mouchoir et se soit recouchée, elle leva la tête vers Dani.

-Merci, dit-elle d’une voix rauque.

-Je t’en prie, lui répondit la jeune brune en souriant.

-Continue de me reprendre, j’en ai besoin. Puis, c'est pas si mal. 

-Avec plaisir, lui promit Dani d’un ton solennel. Alors, on est cool ? 

Illyana leva une main que Dani serra fermement. Il y avait quelque chose d’indéchiffrable dans l’expression de la jeune blonde, mais une chose était sûre : une partie de son cœur, gelé depuis trop longtemps, venait finalement de se réchauffer.

-On est très cool, promit-elle.

-Ok. Repose-toi un peu, Illy. Je viendrai te voir demain matin.

-Ok. 

-Tu veux que je ferme la porte ? 

-Je veux bien que tu la laisses un peu ouverte. Je sais que Rahne aime faire sa petite ronde quand tout le monde est couché. J’aime bien quand elle vient me voir. 

-Ça marche, répondit Dani qui éteignit la lumière et commença à tirer la porte. Fais de beaux rêves. 

Illyana soupira, ferma les yeux, puis se laissa aller dans son lit et sur son oreiller. Non, le monde n’était pas parfait, mais elle était en sécurité et entourée par des gens qui tenaient à elle. Il était temps de commencer à les aimer en retour. Tandis qu’elle commençait à songer à toutes les façons dont elle pourrait changer son comportement, elle s’endormît sans le réaliser.

* * *

Peu de temps après, tout le monde avait décidé d’aller se coucher. Il n’était pas tard, mais la nuit était tombée depuis plusieurs heures et le son aigu et régulier du vent d’hiver rappela à tout le monde qu’une énorme chute de neige était prévue pour le lendemain matin. Sam raccompagna Amara à sa chambre. La jeune élève lui offrit un sourire approbateur.

-C’est vraiment gentil de me raccompagner à ma chambre, Sam. Tu es un vrai gentleman. 

Le jeune homme rougit légèrement.

-C’est rien. 

-Ça compte pour moi. Et merci de m’avoir laissée pleurer sur ton épaule, tout à l’heure. Ça m’a vraiment fait du bien. 

-À ton service. Alors, comment as-tu trouvé ta première vraie journée à l’Institut ?

-C’était un peu difficile, admit Amara. Rien à voir avec des trucs que vous avez dit ou fait, bien sûr. Mais... il faut que je sache... est-ce qu’Illy est toujours aussi bizarre ? 

-Oh. On l’est tout autant, avoua Sam. C’est juste qu’Illy, c’est celle qui le montre le plus. 

-Ok. Je crois que ça me va. Je crois que… ça pourrait être justement le genre de dingueries dont j’ai besoin.

Elle lui adressa un sourire.

-J’étais terrifiée en venant ici, confessa-t-elle. Mais maintenant que je vous ai rencontrés… toi, Rahne, Dani, les autres... je n’ai plus peur. Plus autant qu’avant, en tout cas. C’est bon de se dire qu’on est avec des gens qui traversent les mêmes choses. Je crois que je vais me plaire ici. 

Timidement, elle se pencha en avant et déposa un bisou sur la joue de son camarade.

-Bonne nuit, Sam. À demain matin. 

-Bonne nuit, Amara. 

Tandis que la jeune blonde ferma la porte de sa chambre, un sourire stupéfait commença à se dessiner sur les coins de la bouche de Sam. Lorsque le jeune homme atteignit la porte de sa propre chambre, ce sourire s'était étiré d'une oreille à l'autre.

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