Orphelins et Enfants Trouvés
Amara se tenait près de la fenêtre du salon et contemplait la neige qui tombait. Bien que l’après-midi touchât tout juste à sa fin, le ciel était déjà presque entièrement noir. La lumière du porche extérieur illuminait les épais flocons qui commençaient à s’accumuler sur le patio. Sam vint vers la jeune femme.
-Amara ? On va bientôt commencer le Cercle de Vérité.
La jeune blonde se tourna vers son camarade. Elle lui sourit, mais ses yeux étaient embués de larmes.
-Ok.
-Hé, ça ne va pas ? demanda Sam, aussitôt inquiet.
-Je..., balbutia Amara, hésitante. Non. Ça ne va pas.
-Je peux faire quelque chose ?
La jeune blonde poussa un long et profond soupir.
-Est-ce que... tu pourrais... me prendre dans tes bras ? Juste deux minutes ?
-Bien sûr, Amara. Bien sûr.
Sam la prit dans ses bras et Amara pressa sa joue contre la poitrine du jeune homme, le regard toujours vers la fenêtre.
Il n’avait pas fallu longtemps pour que la nouvelle apportée par Illyana se répande parmi les élèves. Après une série de brèves discussions paniquées, Dani avait décidé d’aborder directement le sujet. Elle avait alors convoqué les autres pour former un Cercle de Vérité. Les élèves avaient informé le docteur MacTaggert de leurs intentions en prétextant une sorte de cérémonie d’initiation pour leur nouvelle camarade. Elle avait consenti à leur laisser la salle de séjour un moment afin qu’ils puissent parler entre eux en toute tranquillité.
-Je n’avais jamais vu de neige, avant, murmura Amara.
-C’est vrai ? Sam sembla surpris. C’est la première fois ?
-Oui.
-Il doit faire bien chaud, chez toi.
-Oui. C’est clair.
-Dans ce cas, demain, on ira dehors. Comme ça, tu pourras mieux découvrir.
-C’est comment ?
-La neige ? Ce qu’on s’imagine déjà. C’est froid et humide. D’ailleurs, il faudra que tu essayes les batailles de boules de neige ou de faire des anges, vu que ce sera ta première expérience. C’est génial, ça vaut vraiment le coup.
Amara ferma les yeux et poussa un soupir mélancolique.
-Ça fait du bien. Merci, Sam.
-À ton service.
Les autres commencèrent à se rassembler dans le salon.
-Hé ! Les tourtereaux ! Le Cercle, c’est par ici, les appela Illyana. Elle était toujours en robe de chambre mais portait également un survêtement et d’épaisses chaussettes en laine aux pieds. Une épaisse couverture était drapée sur ses épaules.
-Viens t’asseoir près du feu, suggéra Rahne. Tu seras mieux.
Illyana sourit, reconnaissante.
-Merci, Rahne.
Elle s’assit par terre, assez près de l’âtre de la cheminée pour que la chaleur rayonnante atteigne son visage. Roberto prit place sur le canapé juste à côté d’elle. Rahne et Dani s’affalèrent sur l’autre canapé.
-Tu es prête ? demanda Sam à Amara.
Elle leva les yeux et lui offrit un sourire sincère.
-Oui. Je te remercie.
Ils marchèrent vers le milieu de la pièce et s’assirent par terre, entre les canapés.
-Très bien, le Cercle de Vérité peut commencer, annonça Dani. Ce soir, on va faire les choses un peu différemment. Comme Amara vient d’arriver, j’ai pensé qu’on pourrait d’abord se présenter chacun notre tour. On dit nos noms, d’où on vient, on explique en quoi consistent nos pouvoirs. On peut aussi raconter peut-être un truc ou deux sur nos familles et, bien sûr, le plus important : on partage une vérité unique que vous n’êtes pas sûrs de vouloir que les autres sachent.
-Oublie pas le compteur de meurtres, lança Illyana.
Dani grimaça :
-C’est pas nécessaire d’en parler…
La blonde sourit malicieusement :
-Je sais, mais c’est plus marrant.
Sam secoua la tête :
-Bon... notre Illy est de retour.
Dani fixa son amie :
-C’est vrai que tu as meilleure mine ce soir. Comment tu te sens ?
-Pas génial, admit la jeune malade. Mais, bon… j’ai pris un bain et j’ai enfilé des vêtements propres, donc je pense qu’on peut tous rester ensemble dans la même pièce.
Dani sourit et reporta son regard sur Amara.
-Amara, puisque tu es nouvelle ici, je vais t’expliquer le principe : quand tu participes au Cercle de la Vérité, s’il y a quelque chose dont tu ne veux pas parler, tu n’es pas obligée de nous le dire. Par contre, quoique que tu nous confies, il faut que ça soit vrai. Et tout ce qui se dit dans le Cercle reste dans le Cercle. Motus et bouche cousue, et personne n’émettra de jugement.
La nouvelle venue acquiesça :
-Compris.
-Après ça, on enchaînera sur une discussion de groupe pour parler de la mauvaise nouvelle qu’Illy nous a appris cet après-midi.
-J’espère que tu ne vas pas me reprocher de vous avoir prévenus, protesta Illyana.
-Oh, je ne te reproche rien, Illy. C’est une bonne chose que tu aies écouté aux portes.
-Je confirme, ajouta résolument Roberto avant qu’un murmure d’approbation ne circule dans le Cercle.
-La vraie question qu’il va falloir se poser, c’est de savoir ce qu’on va faire. Mais comme nous avons une nouvelle parmi nous depuis presque deux jours, on va commencer par les présentations.
Elle se tourna vers Rahne :
-Rahne, tu veux commencer ?
-Euh... ok. Salut tout le monde. Je m’appelle Rahne. Rahne Sinclair. J’imagine que vous savez tous ce que je suis capable de faire. La louve, c’est moi..., dit-elle en bredouillant un peu.
-Et d’où est-ce que tu viens ? lui demanda gentiment Dani.
-Oh. Euh. Je viens d’Écosse. Je suis à l’Institut Xavier depuis un peu moins de deux ans. Dani est ma petite-amie, même si je pense que tout le monde est au courant.
-Et quelle est ta vérité, Rahne ?
-Alors ..., émit Rahne en se tortillant un peu, visiblement gênée d’être le centre de l’attention. En fait, je ne sais pas si c’est intéressant mais lorsque les gens me rencontrent pour la première fois, d’habitude, ils veulent savoir si je suis toujours moi-même quand je me transforme en loup. Et... non. C’est pas le cas. Pas vraiment. En fait, je vous vois et je me rappelle de vous. Mais quand je me change en louve, je suis vraiment une louve. Je ne pense plus comme un humain. Je ne vais pas tout d’un coup commencer à me lever sur mes pattes arrière et à parler. J’ai un cerveau de loup, comme le dit Illy.
-C’est super, mais il faut que tu nous dises une vérité. Quelque chose que tu n’es pas sûre de vouloir partager.
Rahne réfléchit longuement.
-J’aime bien être toute nue, finit-elle par admettre. Et j’aime bien qu’on me touche.
Honteuse, la jeune Écossaise rougit aussitôt.
-Il n’y a absolument pas de quoi avoir honte, ma grande, lui assura Illyana.
-En fait, c’est pour ça que je suis tout le temps changée en loup, expliqua Rahne. Quand je me transforme, je n’ai plus aucun complexe. Et j’aime bien que vous caressiez ma fourrure...
-Ça, c’est le boulot de ta copine, dit Illyana avant d’éclater de rire.
-Ce que je veux dire, c’est que ça ne me dérange pas d’être le loup de thérapie du groupe. Si vous voulez me faire un câlin, me caresser, ou n’importe quoi, il y a aucun problème. Juste... évitez de faire l’idiot en repensant à ce que je viens de vous dire lorsque vous me touchez. C’était bien ? demanda-t-elle à Dani.
-C’était parfait, lui assura cette dernière. Berto, à ton tour ?
-Attend une minute, fit Illyana en agitant la main. Rahne n’a pas fini.
-J’ai dit une vérité, objecta la mutante.
-Ouais, mais pas ton compteur de victimes.
Consternée, Dani afficha une grimace :
-Oh, pour l’amour de Dieu, Illy...
-Allez, Rahne, insista la jeune Russe. T’es un prédateur né. T’as tué combien de personnes ?
-De ce que j’en sais, aucune, répondit Rahne sur un ton détaché. Par contre, j’ai déjà tué des lapins. Et aussi des mulots, et d’autres rongeurs. Ça compte comme des victimes. Non ?
-Et tu les manges ?
-Oui, bien sûr.
-Attend, tu les manges comme ça, crus ? grimaça Roberto.
-Non, Berto. Je me retransforme, puis après j’allume un feu et je les fais cuire. D’après toi ?
-Beurk !
-Oh, allez, Berto, le taquina malicieusement Illyana. Rien ne vaut ce bon goût de sang frais encore tout chaud dans la bouche, pas vrai Rahne ?
-Ben... c’est vrai que je dois aimer, vu que je le fais toujours, admit Rahne.
-Ah ! s’écria la blonde d’un air triomphant.
-Et avant que tu me le demandes, non, je n’ai pas le compte en tête. Les loups ne font pas les comptes des proies qu’ils chassent. Ce que je peux dire c’est qu’il y en a eu... beaucoup.
-Très bien, et on va s’arrêter là, déclara Dani avec vigueur. Roberto, à ton tour.
Le jeune brun se redressa sur son siège.
-Ok. Salut tout le monde. Roberto Da Costa. Mais pour les intimes, c’est Berto. Je suis brésilien. Comme Rahne, ça fait maintenant pratiquement deux ans que je suis à l’Institut Xavier. Et désolé Illy : zéro meurtre pour l’instant.
Il fronça les sourcils.
-Je ne sais pas du tout comment je pourrais décrire mon pouvoir. C’est..., s’interrompit-il en essayant de trouver les mots justes. En fait, je deviens beaucoup plus fort et plus ou moins invulnérable, mais avant... il faut que je... me transforme. Et je deviens sombre. Enfin, beaucoup plus sombre que je le suis en temps normal, si vous arrivez à vous l’imaginer. Et après, je ressemble à un... euh, vous avez déjà vu ces films de science-fiction nazes où le monstre est censé être composé d’antimatières ? Et que c’est seulement un négatif sur une plaque photographique ? Xavier a écrit une synthèse de genre trente pages sur la façon dont ma mutation est censée marcher, une liste de tous les changements métaboliques et toutes ces conneries. J’ai essayé de le lire une fois, j’ai rien compris.
-Quelle est ta vérité, Berto ? demanda Dani.
Le jeune homme expira fortement :
-En fait, j’suis pas sûr d’être prêt à la partager.
-Au contraire. C’est parfait pour le Cercle de Vérité.
Roberto posa les yeux sur Illyana.
-Je suis amoureux d’Illy.
Le Cercle entier émit un cri collectif. Au grand soulagement de Roberto, Illyana ne sembla ni surprise ni ennuyée. Au contraire, la jeune blonde lui souriait.
-On s’en doutait pas mal, souligna Sam. T’étais vraiment aux petits soins quand elle était malade.
-C’est vrai et je t’en suis reconnaissante, Berto, intervint Illyana en le considérant d’un œil inquisiteur. J’suis pas sûre de pouvoir dire que je suis amoureuse de toi. Mais j’ai décidé de vraiment tenir compte de l’attention que tu m’as témoignée. Et je ne suis pas contre l’idée de profiter de ta présence.
Elle afficha un sourire prédateur.
Lorsque j’irai mieux, je serai plus que ravie de te baiser jusqu’à ce que tu pisses le sang.
Le Cercle émit un autre cri collectif.
-Oh, mon Dieu, Illy, se plaignit Dani sans pouvoir s’empêcher de rire. Tu n’as vraiment AUCUN filtre !
-Hé, je vous avais prévenus : j’ai été élevée par des démons. Vous n’avez aucune idée d’à quel point je peux devenir diabolique. Vous, par contre, vous êtes tellement prudes. Il faut vraiment que vous vous décoinciez.
-Bon, allez, on avance, déclara Dani. Sam ?
-Euh, ok, acquiesça le jeune homme. Sam Guthrie. Je suis né aux États-Unis. Je viens du Kentucky. J’ai travaillé dans les mines avec mon père jusqu’à l’année dernière. Je...
Le jeune mutant marqua une pause.
-Vous connaissez déjà ma vérité. Mais je vais encore la partager pour Amara car je crois que ça pourrait l’aider, reprit-il en regardant sa nouvelle camarade qui l’interrogeait du regard.
Le jeune homme à la casquette se pinça les lèvres.
-Putain... ça va pas être facile, gémit-il.
Puis, il poussa un soupir et se redressa.
-Le jour où mes pouvoirs sont apparus a été le pire de ma vie, déclara-t-il. J’étais dans les mines avec mon père et le reste de l’équipe. Ce matin-là, je me sentais vraiment bizarre. Pas malade, mais... j’étais pas dans mon état normal. On est descendus et on a commencé notre travail. Puis, je me suis mis à avoir des vertiges, c’était comme si je n’arrivais plus à respirer, et là... tout mon corps... s’est mis à trembler. Mais pas à trembler normalement. J’étais en train de... vibrer. C’était horrible. Ensuite, je me suis retrouvé propulsé hors du puits de la mine, comme si j’étais devenu une espèce de boulet de canon humain. Et mon père, il...
Sam marqua une pause et avala difficilement sa salive. Amara le fixait avec des yeux larges comme des soucoupes.
-Il était en bas... tout au fond du puits. Enterré. Sous des tonnes de pierres. Il y avait trois hommes avec lui, ils étaient juste à côté de moi quand c’est arrivé. La paroi s’est effondrée quand je l’ai percutée et ils sont... morts.
Le jeune Américain prit une profonde inspiration pour essayer de se calmer.
-Je sais que c’était un accident. Mais ce n’est pas ça qui me fait me sentir mieux, même un petit peu. J’ai tué mon père. Cette culpabilité, c’est le pire qu’on puisse ressentir. Ça fait maintenant un peu plus d’un an et je ne sais toujours pas comment continuer à vivre avec ça.
Il adressa à Illyana un regard de reproche :
-J’ai fait quatre victimes, Illy. Si tu tiens vraiment à savoir…
Pour une fois, la jeune mutante ne trouva rien à ajouter. Elle baissa les yeux et fixa le sol.
Sam fixa ensuite Amara. La jeune femme était au bord des larmes et tout son corps tremblait.
-Je suis désolé, Amara, lui murmura Sam. J’aimerais savoir quoi dire ou quoi faire pour te remonter le moral. Mais si je le savais... eh ben, moi-même, je me sentirais mieux. Mais on a conscience que tu as traversé quelque chose de tout aussi horrible. Mais pour ce que ça vaut, je veux que tu saches que... tu n’es pas toute seule.
Amara se jeta dans ses bras et se mit à pleurer silencieusement. Pendant un long moment, il n’y eut aucun bruit dans le Cercle à part les sanglots de la jeune élève. Quand cette dernière eut enfin fini de pleurer et se rassit, Dani se tourna vers Illyana :
-Ok, Illy. À ton tour.
-Oh, génial… je passe juste après Sam.
-Eh oui. La punition appropriée.
Résignée, la blonde poussa un soupir :
-T’as pas tort.
Elle laissa tomber la couverture de ses épaules et, d’une voix blanche, procéda à une récitation rapide :
-Illyana Rasputin. Je viens de Russie. Mon frère, Piotr, fait partie des X-Men. Mais vous le savez probablement déjà. Il est plus gentil que moi. Ça aussi, vous devez déjà le savoir.
Sa voix, toujours rauque à cause de sa maladie, sonnait tout de même moins mécanique.
-Quand j’avais six ans, j’ai été kidnappée par un démon nommé Belasco et j’ai vécu dans son royaume pendant sept ans. Il m’a élevée pour faire de moi un monstre. Et il a réussi. Pour ce qui est de ma mutation, je peux me téléporter. Je créé un cercle de lumière et toute personne qui se trouve dans le cercle avec moi peut être transportée n'importe où. J’appelle ça des « disques de téléportation », expliqua Illyana avant de se mordiller la lèvre pendant un instant. Le seul hic, c’est qu’il faut d’abord passer par le royaume des démons. Et non, ce n’est le genre d’endroit que vous auriez envie de visiter. En plus de ma mutation, je possède des pouvoirs magiques que j’ai acquis quand je vivais dans le monde démoniaque, ce qui fait de moi une sorcière. Et j’ai aussi une épée magique, vous l’avez tous vu. Je peux l’invoquer quand j’en ai envie mais parfois, elle apparaît toute seule lorsqu’il y a une forte présence de magie dans les parages. Quant à mon compteur de meurtres...
Elle jeta un coup d’œil furtif à Sam.
-J’ai fait dix-huit victimes. Certaines que j’aie tuées par accident, d’autres non. Il y a en seulement deux que je regrette d’avoir tuée. Mais je ne préciserai pas lesquelles. Pour les autres, je n’ai pas de remord. Ma vérité...
Elle marqua une pause et réfléchit, avant de regarder Dani.
-Je suis obligée d’en dire qu’une ?
-Si tu veux en dire plusieurs, vas-y.
Illyana acquiesça d’un air pensif.
-Ok. Vérités. Une de mes meilleures amies s’appelle Katya. Elle fait aussi partie des X-Men. Lorsque je me suis échappé des Limbes, elle a été ma camarade de chambre à l’Institut Xavier. Elle a dû rester à l’école. Moi, j’ai été envoyée au domaine annexe parce que... enfin, je crois que j’ai pas besoin de vous faire un dessin, pas vrai ? Ce qui me fait le plus peur, c’est de ne plus jamais revoir mon frère, ni Katya. Autre chose qui me fait vraiment peur, c’est que l’école ferme ses portes et que les seules personnes qui croient un tant soit peu en moi disparaissent de ma vie. J’ai souvent le sentiment que le monde se porterait bien mieux si je n’en faisais pas partie. J’ai des pensées suicidaires, beaucoup même. Même si je n’ai jamais tenté de passer à l’acte, pas intentionnellement. Ma vérité la plus sincère..., commença-t-elle avant d’avaler sa salive avec difficulté. Vous êtes les seuls à rendre ma vie supportable. Vous êtes les seules personnes en qui je peux avoir confiance pour me reprendre sur mes conneries sans me détester pour autant. S'il y du bon en moi, ne serait-ce qu’un petit peu, vous êtes les seuls à pouvoir le trouver et le faire ressortir. Je... vous adore, tous. Voilà ! J’ai enfin réussi à le dire tout haut. Maintenant, j’ai l’impression d’être la personne la plus conne au monde.
Elle s’écroula sur sa chaise, honteuse.
-Nous aussi, on t’adore, Illy, dit Rahne.
-C’est vrai, approuva Dani. Et tu n’es pas un monstre. Tu as fait des sales trucs, mais tu n’es...
-Oh, non, arrête ! Ne me tapote surtout pas l’épaule en me disant que je suis quelqu’un de bien, grogna Illyana. Je ne supporte pas ce genre de trucs.
-On est en plein Cercle de Vérité. Je dis une vérité, rétorqua fermement Dani. Tu ne te rends pas compte à quel point tu nous donnes de la force, Illy. On compte vraiment là-dessus, on en dépend même. Et comme en ce moment, tout part dans tous les sens, on en a besoin aujourd’hui plus que jamais. Je vais te traduire ça dans une langue qui te parle plus : t’avise pas de nous lâcher, pétasse.
Surprise, Illyana fixa Dani puis sourit :
-Là, je comprends.
Rahne regarda Dani.
-C’est ton tour, maintenant.
-Ouais, ça m’en a tout l’air.
Dani garda ses mains fermées un moment, puis elle se pencha en avant, les coudes sur les genoux.
-Je m’appelle Danielle Moonstar. C’était moi la dernière arrivée avant Amara. Je suis cheyenne et j’ai grandi dans le Colorado et dans le Montana. Et aussi dans d’autres réserves. On peut dire que j’ai beaucoup déménagé. Quant à ma mutation... je suis capable de donner vie à vos pires cauchemars, littéralement. Le docteur MacTaggert m’injecte un sérum pour inhiber mes pouvoirs, autrement, le croque-mitaine vous rendrait visite la nuit pour tous vous emporter. Ma plus grande peur est de ne jamais réussir à contrôler mon pouvoir. J’ai failli tuer tout le monde lors de ma première semaine ici. Si jamais vous entendez quelqu’un me surnommer « Miss Ourse Démoniaque », vous comprendrez pourquoi.
Elle posa les yeux sur Amara.
-Moi aussi, mon père est mort à cause de moi. Comme pour Sam, c’était un accident mais j’ai beaucoup de mal à vivre avec. Il y a aussi de fortes chances que d’autres gens aient été tués par ma faute, mais je n’en suis pas certaine. Mon compteur de victime est à un, ça j’en suis sûre. Ma vérité..., commença-t-elle avant de reporter son regard sur Rahne. Rahne est la personne qui m’a empêchée de mettre fin à mes jours. Elle est entrée dans ma vie, et... ça ne veut pas dire que tous mes soucis se sont envolés comme par magie, mais... désormais, j’ai envie de vivre.
Elle regarda Rahne droit dans les yeux pour s’adresser directement à elle.
-Tu me soignes. Tu me guéris en étant simplement toi-même et en étant présente tous les jours, Rahne. Tu m’as sauvée. Tu es un don, un miracle dont je n’avais jamais osé rêver. Je t’aime. Je t’aimerai toujours. Tu es mon univers.
Rahne fixa Dani pendant un long moment, les yeux brillants de larmes, avant de l’attirer vers elle et de l’embrasser avec passion. Inspiré, Roberto se pencha lui aussi pour embrasser Illyana. Cette dernière accepta volontiers le baiser, avant de lui sourire tristement.
-Excuse-moi. Je suis encore toute dégoûtante, je sais. Promis, dès que mon rhume sera passé, tu seras pas déçu. Moi non plus, d’ailleurs.
-Je m’en fiche, dit simplement Roberto avant de l’embrasser de nouveau.
Amara et Sam se regardèrent et, cédant à la tentation, partagèrent un court mais tendre baiser.
Quelques minutes plus tard, les couples s’étaient tous séparés. Chacun souriait timidement à l’autre.
-Très bien, on a fait le tour des anciens, déclara Dani. Maintenant, c’est le moment d’entendre notre nouvelle recrue.
-Waouh. Après vous avoir tous entendu, je ne sais vraiment pas quoi dire, dit Amara. Mais ça fait vraiment du bien de savoir que je ne suis pas toute seule. Je n’avais du tout conscience que certains d’entre vous étaient passés par les mêmes choses que moi.
-Tu n’as pas idée, déclara Illyana d’un ton catégorique.
-Ok. C’est parti. Mon nom complet est Amara Juliana Olivians Aquilla...
-T’as un nom à trois lignes, marmonna Roberto.
La blonde sourit timidement.
-Ouais, je sais. Mais tout le monde m’appelle simplement « Amara ». Je suis née en Italie, mais j’ai vécu au Brésil, donc je me considère comme une Brésilienne.
-Génial ! Une sœur de patrie à l’Institut, exulta Roberto.
Amara lui sourit.
-J’ai des origines romaines. Je parle couramment italien, portugais et anglais. Ma famille est riche. Mon père...
Elle s’interrompit soudainement, puis ferma les yeux et prit une profonde inspiration.
-Excusez-moi, s’excusa-t-elle. Je... je n’arrive pas à en parler. C’est trop tôt.
-Tout va bien, Amara, lui assura Dani. Partage ce que tu peux.
Amara prit encore deux grandes bouffées d’air et reprit :
-Je n’arrive pas non plus à parler de ma mutation, avoua-t-elle. Je n’ai absolument aucun contrôle sur mon pouvoir et je ne sais pas ce qui l’a déclenché. Mais vous devez me promettre de ne jamais essayer de l’activer, supplia-t-elle. Sinon, je serais capable de réduire l’école en cendres... ou pire.
Dani fonça les sourcils :
-Quoi, tu veux dire… pour de vrai ?
-Toi aussi, t’es une torche humaine ? déduisit Roberto. Tu peux jeter des boules de feu ou un truc dans le genre ?
-En fait, ça se rapproche plus... d’un volcan en activité, répondit Amara.
-C’est vrai ? roucoula Illyana. Voilà qui est... fascinant.
-Promettez-le moi, supplia Amara à nouveau au bord des larmes.
-Amara, on n’essayera pas d’enclencher ton pouvoir, c’est promis, lui assura Dani. Mais tu as dit toi-même que tu ne savais pas ce qui l’activait.
-Je sais, soupira Amara d’un air malheureux.
-Ok. Une vérité et après, on ne t’embête plus.
-Pour l’instant, ajouta Illyana avec un sourire malveillant.
-Je crois que c’est évident, non ? rétorqua Amara. Je suis morte de peur, et je ne sais pas quand est-ce que je pourrai revoir mes amis et ma famille, ou même si je les reverrai un jour vu qu’apparemment, je suis une sorte de monstre, je suis un danger pour quiconque, et... tout ce que je veux, c’est redevenir normale, gémit-elle.
-Je connais ça, marmonna Sam d’un ton grave.
-Amara, on est vraiment contents de t’avoir parmi nous, lui assura Dani. Crois-moi, on va faire tout ce qui est possible pour que ta première semaine à l’Institut Xavier ne soit pas la dernière. Donc, à moins que quelqu’un ait envie de partager une autre vérité, il est temps qu’on aborde le vrai problème : comment est-ce qu’on va convaincre le docteur MacTaggert de ne pas fermer l’école ?