Bell de Bilgewater
- BELL ! BELL DEBOUT !
La yordle ouvrit brusquement les yeux, deux mains la secouaient avec force pour tenter de la sortir de sa torpeur. Cynthia se tenait au-dessus d’elle, un air affolé sur visage.
- Quoi… qu’est-ce qu’il se passe ?
- Tu dois te lever immédiatement, on doit lever le camp.
Sans plus attendre, elle s’activa, saisissant tout ce pouvait avant de tout jeter ses sacoches. Lorsqu’elle émergea de sa tente, elle découvrit le camp en proie à un effervescence. De tous côtés les voyageurs s’agitaient, pressés eux aussi de remballer leurs affaires tandis que les caravaniers réveillaient les Skallashis.
Une sensation dérangeant tira la yordle de sa rêverie, une vibration qu’elle ressentait à ses pieds. Le sol tremble ? Pensa-t-elle. Non, il vibre ?
- Dépêche-toi, lança Anna qui vint lui prêter main forte.
- Un problème ?
- Un éclaireur a repéré des Kmiros, ils passeront non loin avec un peu de chance on les évitera.
Bell esquissa une grimace, Mora avait évoqué la présence rare des essaims, parcourant le désert en quête de nourriture. Ils représentaient un des dangers les plus importants qu’une caravane rencontrerait.
En quelques minutes, le convoi avait fini de rassembler les affaires, et avait repris la route. Le Maître ordonna une marche soutenue, d’après leurs hôtes, l’essaim suivrait leurs traces quelques temps, avant de se détourner, à condition qu’ils aillent assez vite.
Les Skallashis, bêtes extrêmement intelligentes, avaient rapidement compris la situation, et acceptaient de forcer le pas. Le premier d’entre eux, celui du maître, lança un cri retentissant, repris en cœur par les autres, et soudain, leur marche s’accéléra jusqu’à presque atteindre un galop, jamais Bell n’aurait cru ces immenses créatures capables de se déplacer aussi vite. En formation, le groupe dépassait à toute vitesse les dunes en soulevant au passage un énorme nuage de poussière.
Jusqu’à la fin de la journée, l’atmosphère resta tendue, les visages des itinérants restaient fermés. Tout autour, les mercenaires sur leurs montures légères chevauchaient au travers du vent, guettant avec appréhension la venue d’insectes.
Le soir venu, à la grande surprise de la yordle, le convoi ne prit même pas le temps de s’arrêter, le rythme de marche revint à sa vitesse habituelle, tandis que les équipes de caravaniers et mercenaires se relayaient pour continuer à avancer. Sur leur Skallashi, Jolyne et son mari alternaient à la conduite, laissant l’autre se reposer et préparer de quoi se sustenter.
Malgré l’atmosphère tendue, Bell se sentait calme, au-dessus d’elle dans le ciel noir se dressait une magnifique fresque, où se distinguaient des centaines d’étoiles. L’occasion de dessiner un tel spectacle était trop belle, d’autant qu’elle peinait à dormir compte tenu de leur situation.
Durant trois jours supplémentaires, le convoi continua sa marche un rythme acharné. Le jour lorsque le terrain le leur permettait, les Skallashis répondaient au cri de leur meneur et traversaient le désert au galop, tandis que la nuit ils retrouvaient une marche normale, similaire à leur vitesse de croisière au départ de Nashramae. Les bêtes commençaient à fatiguer, et le manque de sommeil tant chez elles que chez les voyageurs commençaient à se faire sentir. Depuis la veille, les éclaireurs n’avaient relevé aucune trace de l’essaim, laissant présager que les Kmiros avaient cessé de les poursuivre.
- Nous sommes encore loin de la capitale ? Lança Bell à Mora qui tenait les rênes.
Le fils du maître observa les alentours quelques instants, cherchant à reconnaître le paysage et se situer.
- Je dirais que nous sommes à trois jours environ, si l’on calme le rythme. Il faudra demander à Jolyne quand elle sera réveillée.
La yordle acquiesça en souriant. La compagne de leur hôte se reposait dans l’une des cahutes attachées aux flancs de leur monture. Bell, ainsi que Nâmis, avaient dû ces dernières nuits prendre place dans une d’entre elles, pour tenter de trouver quelques heures de sommeil.
Depuis ces derniers jours, presque aucune communication n’avait été possible entre les groupes, la jeune fille n’avait donc pu ni voir ni parler à Ileae, dont la présence apaisante lui manquait cruellement. Enfin, il était complexe de parler d’apaiser alors que la seule existence de la vastaya suffisait pour provoquer chez Bell une panique et des émotions incontrôlables. Mais ce dont la yordle rêvait le plus, c’était d’un point d’eau pour se laver, entre la chaleur et le manque de repos, sa fourrure grise se faisait rêche, et ses longs cheveux bleutés devenaient de plus en plus secs, malgré la protection de sa cape et de sa capuche.
Conscient que les Skallashis commençaient à fatiguer, le maître caravanier ordonna un retour à une marche normale.
- Je connais les habitudes de père, sourit Mora, demain nous passerons non loin d’une oasis, je pense qu’il nous y dirige pour un arrêt dans la journée.
- Je vais enfin retrouver le sol, soupira la yordle.
- C’est une phrase étrange venant d’un marin habitué aux longs voyages en mer.
La yordle sourit, amusée. Bien que les vagues lui manquent, la caravane restait éloignée de ce qu’elle avait vécu, et le désert semblait plus impitoyable au quotidien que l’océan.
L’avantage des nuits courtes et agitées passées en mouvement, était qu’elles laissaient peu de place aux visions et cauchemars de la jeune fille, elle n’avait pour le moment plus expérimenté de rêves. Malgré cela, l’oasis approchant à grands pas s’avérait ardemment désiré par le groupe. La veille, un mercenaire venu porter quelques gourdes avait confirmé les dires de Mora, une halte serait imminente, afin de compléter les quelques jours de traversée restants.
Bell, levée tôt pour profiter des étoiles qui disparaissent et de la fraîcheur, passait sa matinée à dessiner et échanger avec Nâmis. Le vieux sage semblait malgré son âge s’acclimater du rythme et des conditions du désert sans soucis, attestant son origine shurimienne.
Alors que le soleil commençait à pointer au-dessus des dunes, un léger vrombissement se fit entendre, d’abord ténu, puis s’accentuant rapidement. En quelque secondes, l’air même vibrait tandis qu’un épais nuage de sable s’élevait non loin. Bien plus petit que la tempête de l’autre jour, Bell savait cependant qu’il ne s’agissait pas d’un phénomène météorologique.
- KMIROS ! Hurla un mercenaire.
Le cri fut repris immédiatement dans la foulée par plusieurs, passant l’information aux autres. Un vent de panique souffla sur le convoi, mais sans attendre le maître réagit, lui qui connaissait le désert comme sa poche avait une idée pour s’abriter de l’essaim à quelques lieues d’eux. D’un grand coup il tira les rênes de sa bête, en tête du convoi, qu’il fit bifurquer. Le Skallashi poussa un mugissement et entraîna à sa suite ses pairs.
Bell observa le nuage du mieux qu’elle put, et à mesure que les minutes s’écoulaient, elle pouvait voir une grande ombre informe planer au-dessus du sol. Tel un nuage, l’essaim évoluait à grande vitesse vers eux.
Un bruit attira son attention sur le côté, Amara le mercenaire était monté sur leur Skallashi par les cordages.
- Amara ! Salua Jolyne. Ce sont bien des Kmiros ? Je croyais qu’on les avait semés ?
- Aucun doute, marmonna-t-il, un petit essaim, ils ont dû nous contourner. Votre père se dirige vers les ruines du ciel ardent.
- Vous pensez qu’on leur échappera ? Demanda Bell inquiète.
- Leur échapper ? Impossible il est déjà trop tard, ils sont affamés et nous suivent depuis longtemps.
- Quel est le plan alors ?
Bell affichait un air résigné, elle avait bien compris la situation.
- Nous utiliserons les ruines à notre avantage, sourit le mercenaire. Vous avez des armes ?
Nâmis et la yordle acquiescèrent, tandis que Jolyne pointa du doigt un arc solidement attaché un peu plus loin.
Chaque minute qui passait accentuait la pression qui pesait sur le convoi. Derrière eux, le nuage qui les précédait ne cessait de gagner du terrain, petit à petit. Avec le vrombissement grandissant, des silhouettes commençaient à se distinguer au cœur de l’ombre qui planait au-dessus des dunes.
Au grand soulagement de la yordle, la caravane arriva rapidement sur les lieux que cherchait le maître. Autour d’eux, des ruines de pierre, abandonnées depuis de nombreuses décennies, formaient des abris de fortune.
Le chef fit bifurquer la colonne vers leur point d’arrivé, et immédiatement, les itinérants s’activèrent. Les plus grands bâtiments, troglodytes pour la plupart, serviraient à cacher les Skallashis, ainsi que les membres inaptes au combat. Le gros des force se retrouverait plus loin, et attirerait leurs ennemis pour les combattre.
- Combien sont-ils selon toi ? demanda Bell avec anxiété.
- Je dirais entre deux et trois centaines à en juger par la taille de l’essaim.
- Quelles sont nos chances ?
Le sage réfléchit tandis qu’il aidait à la mise en place de protections sur les montures. Il ferait partie de ceux restant dans le cas ou quelques insectes isolés parviendraient à les trouver.
- C’est une petite colonie, ils fonctionnent en groupe. Mettez- le plus de bazar possible, abattez en un bon nombre, et le reste fuira.
Bell regarda au loin le reste du groupe se préparer. Holly et Anna semblaient prêtes à en découdre, Reiner quant à lui ne laissait rien paraître de plus que son air renfrogné habituel. Enfin, Cynthia et Ileae affichaient toutes deux un air anxieux. La simple pensée de voir ses amis en danger fit peser un lourds poids sur le cœur de la jeune fille.
- Ne t’en fais pas, vous vous en sortirez très bien, sourit Nâmis.
Il posa sa main sur l’épaule de la yordle, en lui tendant une longue sacoche de cuir. Cette dernière renfermait le fusil qu’Ileae lui avait fabriqué à Zaun. L’objet était toujours aussi beau que la dernière fois qu’elle l’avait sorti, un bois d’un blanc éclatant, relié de pièces de métal chromées et dorées, serties de joyaux rouge sang. Ces derniers, minutieusement fabriqués par Ileae et similaires à ceux des anneaux qu’elle portait à l’oreille, permettaient de distribuer des décharges magiques non létales la plupart du temps. Puisque leur objectif était plus de désorganiser que de tuer, cette arme serait d’une grande aide.
Clapper sauta de son épaule, pour se placer aux côtés du shurimien. La navigatrice souhaitait qu’il reste à l’abris. Des insectes géants c’est un peu trop pour toi mon grand, pensa-t-elle en regardant son tout petit ami.
Bell empoigna le fusil, visa un mur, et tira une salve. Trois décharges d’énergie d’un rouge vif filèrent vers la pierre, s’y dispersant dans une gerbe de petits éclairs. Elle arma la culasse, laissant échapper les gaz. Parfait, comme toujours, sourit la navigatrice, Ileae est vraiment la meilleure.
Elle salua une dernière fois le sage, lui souhaitant bonne chance. Lui et quelques autres restaient aux côtés de quelques mercenaires, dont Amara. Le groupe de combat, mené par le Maître, s’engagea sous le soleil frappant du désert. Quelques minutes de marche leur suffirent pour arriver à une place, elle aussi en ruine.
Ileae empoignait un fusil quasi identique à celui de la yordle, plus long et lourd car non adapté à la taille d’un petit être. Anna avait revêtu une grande armure de cuir et empoignait deux haches, un sourire trahissant son engouement pour le combat à venir, tandis qu’à ses côtés Holly avait conservé son fusil habituel, bien conçu pour tuer, et son long manteau cousu de son matériau ultra résistant. Les itinérants et mercenaires avaient pour leur part enfilé des armures aux formes légères, et préparaient de grandes flèches.
- Ces arcs suffiront ? demanda la commandante de Piltover alors qu’ils se rassemblaient.
- Ils sont très spéciaux, sourit Anna. Tu serais étonnée de voir la puissance qu’ils développent, et leurs flèches ont des pointes taillées dans une pierre shurimienne, qu’ils trempent dans du poison paralysant.
Holly leva un sourcil, constatant la préparation et les précautions des habitants du désert. Leurs arcs étaient différents de ceux qu’elle avait pu voir jusque-là, plusieurs cordes se croisaient, tendues entre divers systèmes discrets de poulies. L’un des archers décocha un tir d’essai vers une pierre, la flèche parti d’un son sec, et vint perforer un mur plus épais qu’une tête.
- Intéressant.
Le bruit de l’essaim devenait de plus en plus fort, faisant vibrer le sol sous leurs pieds, à tel point que chacun pouvait le ressentir au plus profond de ses tripes.
Un bruit assourdissant avait fait sursauter le groupe. Quelque chose était passé à toute vitesse dans le ciel, dans un éclair doré, à quelques mètres à peine au-dessus de leurs têtes.
- ILS SONT LA ! cria un des mercenaires.
Immédiatement, les combattants bandèrent leurs arcs, surveillant partout. Au cœur du vacarme que faisait maintenant l’essaim qui les entourait, plusieurs autres éclairs surgirent.
Un bruit sourd se fit entendre, une masse venait de se poser avec violence non loin. Quelques cris, ainsi que des flèches fusèrent. Bell parvint à passer la tête par ce qui fut une fenêtre, et observer ce qu’ils affrontaient.
Par terre, un insecte se débattait en sifflant. La forme, de la taille d’un gros chien, agitait ses mandibules, gesticulant en direction de mercenaires. Trois flèches supplémentaires le firent s’écrouler lourdement au sol.
PAN
La détonation d’un fusil tira la yordle de ses rêveries, un insecte se dirigeait vers eux en voletant juste au-dessus du sol. Elle fut rapidement suivie de plusieurs autres, jusqu’à ce que l’insecte s’écroule lourdement à terre.
- Bell attention !
Des sifflements lui parvinrent de sa droite. Sans réfléchir plus longtemps, elle mit en joue le scarabée géant, et décocha une salve sur ce qui lui fonçait dessus. La puissance relative du premier tir ne suffit pas à l’arrêter, seulement à l’étourdir une seconde. La navigatrice tira alors un autre coup, puis un autre et encore un autre. L’insecte s’affala, paralysé. Derrière elle, la cible d’Holly s’était finalement relevée, ayant sensiblement envie de reprendre quelques balles de la commandante.
Rapidement, le groupe fut pris au cœur du nuage que formait l’essaim. Chaque groupe tentait tant bien que mal de contenir l’arrivée des Kmiros, utilisant au mieux les ruines pour retarder leur avancée, progressant au travers de la ville abandonnée. Le son des flèches, des coups de feu, et des décharges magiques perturbait celui des ailes fendant l’air, mêlés aux bruits des mandibules affrontant le cri des combattants.
Bell faisait autant attention que possible, veillant à toujours se tenir aux côtés de ses camarades. Ileae et Cynthia gardaient leur calme, tandis que Holly et Reiner conservaient un sang-froid remarquable, même si la piltovienne peinait à abattre ses cibles. Les balles de son fusil, petite et fines, manquaient d’infliger les dégâts nécessaires aux Kmiros.
- Je crois que sur ce coup-là je préfère les vôtres, dit-elle en désignant les fusil fabriqués par Ileae.
Un hurlement presque sauvage leur parvint. En temps normal, n’importe qui se serait inquiété, mais le groupe identifia instinctivement la provenance su cri, il leur indiquait simplement qu’Anna était en pleine santé, et certainement en pleine action.
De longues minutes de combat s’écoulèrent, chacun alternait avec un compagnon le temps de se reposer et de recharger ses armes. Tout comme les autres, Bell était déjà parvenue à abattre de nombreux insectes, pourtant rien ne semblait changer, l’essaim tournoyait autour de la ville.
Par-delà les ruines entourant le groupe de la yordle, un cri glaçant s’éleva, long. Un frisson parcourut le dos de la navigatrice, qui déglutit. Ileae lui lança un regard inquiet, sachant pertinemment ce qu’il venait de se passer. D’autres cris se firent entendre, de part et d’autre de l’antique cité.
- BELL ATTENTION !
Elle eut tout juste le temps de voir un Kmiros plonger en piquée sur elle. Instinctivement, elle voulut se jeter sur le côté, mais à la place, disparut dans une gerbe d’étincelle violette.
Elle reparut quelques mètres plus loin, chutant avec lourdeur sur le sol. Immédiatement, un insecte ayant repéré la jeune fille se jeta à son tour sur elle.
- RAAAAAAAAAAAAAAAAAH !
Alors qu’elle se pensant déjà découpée, une masse gigantesque s’était écrasée contre l’animal.
Anna, aux prises avec l’insecte, le souleva, avant de l’écraser à terre avec violence. Ce dernier, gisant sur le dos, ne parvint pas à se relever. Dans une rage guerrière, la freljordienne taillada de sa hache l’abdomen de son opposant.
- Le maître veut qu’on se rassemble, lança-t-elle en s’écartant. On a perdu plusieurs combattants.
Sans en dire plus, ses compagnons lui emboitèrent le pas. Chaque insecte ayant l’audace de s’approcher finissait criblé de balles, de flèches, de décharges, ou pire, aux prises avec la lieutenante qui dégoulinait de sang.
- Bell, tu te sens bien ? lança Ileae au travers du brouhaha.
La zaunienne marchait à ses côtés, un air inquiet sur le visage. Depuis leur entrée à Shurima, la yordle n’avait utilisé qu’une fois ses pouvoirs, menant à une perte de contrôle, et n’avait pas encore eu le temps d’essayer son Pas.
- Pour le moment oui, répondit la jeune fille en grimaçant.
La freljordienne mena son groupe jusqu’à une place, au centre de laquelle trônaient les ruines d’un ancien bâtiment, auquel il manquait une grande partie de son toit. Les caravaniers et mercenaires s’étaient retranchés en son sein, tandis que les corps d’insectes jonchaient le sol autour.
Une bouteille vola en direction d’un groupe de Kmiros, avant de se briser en l’air. Son contenu aspergea les cibles, progressaient vers l’édifice. Un trait lumineux surgit d’une ouverture, filant vers les insectes. En une fraction de seconde, l’huile sur ces dernier prit feu, éblouissant les observateur. Dans un bruit de sifflement et de mandibules, ils de débattirent autant que possible, en vain, et s’effondrèrent au sol.
D’autres bouteilles volèrent, d’autres insectes prirent feu, tandis que le groupe pénétrait à son tour le semblant de bâtiment.
Le spectacle qui s’offrit aux yeux de la navigatrice lui serra le cœur. Autour d’eux, une vingtaine de shurimiens s’affairaient à repousser les insectes, tandis que quelques-uns aidaient les blessés. Malgré le sang-froid, la mine sombre de certains laissaient comprendre le poids de l’absence de certains de leurs camarades. Le Maître tentait d’orchestrer leur résistance, avec calme et sérieux.
Sans plus attendre, Bell et ses compagnons se placèrent en renfort aux ouvertures. Malgré leur présence, les insectes toujours aussi nombreux continuaient d’affluer en nombre. Bien que les fusils magiques aient une durabilité extraordinaire, les flèches viendraient rapidement à manquer, et l’assaut ne semblait pas s’amenuir. Chaque Kmiros qui pénétrait le périmètre était minutieusement éradiqué par Anna, qui se faisait un malin plaisir de leur apprendre son concept de la chaîne alimentaire.
- Alors, plutôt Kmiros, ou rebelles zauniens ? lança Holly qui se plaça aux côtés de Bell.
Entre deux décharges magiques, la yordle réfléchit. La situation dans Zaun, et les combat, étaient radicalement différents de ce qu’il se passait. Leurs adversaires cette fois n’avaient rien d’humains, ne se battaient pour aucune cause, sinon celle de se nourrir.
Un cri perçant retentit dans l’édifice, attirant l’attention des combattants. Deux insectes étaient parvenus à se saisir d’un caravanier, et l’entrainaient dehors par l’ouverture. Anna se précipita, tentant de le dégager à coups de hache, en vain. Le premier Kmiros finit en charpie, mais le second ressortit avec entre ses mandibules le pauvre homme qui disparut. De frénétiques bruits d’insectes accueillirent le hurlement glaçant qui déchira le champ de bataille.
- Je préfère affronter tous les Ratels un a un, gémit Bell.
L’atmosphère, bruyante et pesante, continua de se dégrader à mesure que le moral diminuait rapidement. Les voyageurs perdaient du terrain, et devaient maintenant se battre pour défendre la moindre ouverture. Le stock de flèche était si bas que beaucoup utilisaient désormais des lames, au risque d’être entrainés dehors.
Les Kmiros étaient sur le point de les exterminer.
A ce rythme nous ne tiendrons plus longtemps, pensa Bell.
Elle se plaça aux côtés de Cynthia et Ileae. Si elle devait mourir, elle voulait que ce soit à leurs côtés. Sa meilleure amie l’avait accompagnée sans hésiter dans ce périple, et c’était un peu sa faute si la vastaya se trouvait avec eux.
Les Kmiros rognaient les derniers mètres de défense que les voyageurs pouvaient tenir, progressant inexorablement. Les mercenaires, combattaient avec férocité, résigné, aux côtés d’Anna et Holly. Les caravaniers semblaient pour leur part à deux doigts de céder à la panique, mais s’efforçaient de tenir bon. Au centre, le Maître Caravanier dirigeait le balais, organisant tant bien que mal la résistance, exhortant ses hommes avec fierté.
En plein combat, une drôle de sensation vint titiller la yordle. Elle ressentait comme un son, qui ressortait du tumulte des combats alentours. Elle se plaça près d’une ouverture tentant d’identifier la provenance de cette sensation.
Petit à petit, une mélodie vint résonner dans l’air. La jeune fille le sentait, la musique n’avait rien de naturel, mais était imprégnée de magie. Curieusement, tout le monde autour semblait entendre la mélopée qui s’élevait désormais plus fort encore. Je ne suis pas la seule à l’entendre.
Cette magie lui fit un effet étrange, comme si elle l’avait déjà ressentie… mais légèrement différemment. Petit à petit, le vol des Kmiros se fit plus confus, tandis que leurs mouvements se firent plus lents.
La musique a un effet sur eux, souffla Bell en distribuant quelques décharges méritées. En effet, les attaques diminuèrent petit à petit, tandis que les insectes se posaient au sol. De loin, ils semblaient entourer quelque chose…
Amara ?
Le mercenaire shurimien se dressait au centre de la place, entouré de bêtes. Ces dernières n’attaquaient pas, restant au sol, les ailes frétillantes. Bell vit de loin un drôle d’instrument dans ses mains, et se concentra. Comme elle le pensait, elle distingua un nombre affolant de filaments magiques qui voletaient autour de l’homme, frayant un chemin partout autour comme une toile, touchant chaque insecte. Petit à petit, des dizaines de ces derniers se posèrent, cessant toute attaque, jusqu’à ce que l’intégralité des assaillants soient au sol. Les itinérants s’approchèrent de la scène, observant avec stupéfaction, ne laissant que la musique du mercenaire comme seul son.
A la fin de la musique, un silence de quelques secondes pesa, avant d’être perturbé par le bruit des ailes. Un à un, les Kmiros s’élevèrent, formant à nouveau leur essaim. Cette fois, ils ne portèrent pas leur attention sur les voyageurs, mais s’éloignèrent en direction du désert, laissant derrière eux une scène de combat désormais terminé.
***