Bell de Bilgewater

Chapitre 76 : Partie 5 - Chapitre 6

5032 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 11/08/2024 15:45

     Près d’une semaine après leur départ de Nashramae, le groupe avait tant bien que mal finit par s’habituer aux températures du désert, certains plus facilement que d’autres. Bell était et Holly étaient les plus touchées, la fourrure de la jeune yordle était évidemment désavantageuse dans ce cas, tandis que la commandante n’avait encore jamais eu affaire à de telles températures aussi longtemps. Pour ne pas arranger les choses, les cauchemars de la yordle se multipliaient, l’empêchant de dormir correctement. Son humeur changeait parfois en pleine journée, sans qu’elle ne sache si cela provenait du manque de sommeil ou non.

         Le reste de la troupe s’acclimatait plus aisément, surtout Ileae, qui ne semblait qu’à peine sentir les effets de la chaleur. Bell la regardait, de son Skallashi, elle discutait avec les caravaniers, passait de monture en monture grâce aux cordages le lui permettant.

         La timide scientifique est loin désormais, sourit Bell.

         Son amie avait obtenu l’autorisation de Nâmis de se joindre à eux de temps en temps, lors des séances d’instruction de la jeune navigatrice. Cette dernière était ravie d’avoir auprès d’elle la vastaya, qui portait un grand intérêt à la culture shurimienne. Elle appréciait aussi passer un peu de temps avec Clapper, qui roupillait paisiblement sous un tissu, caché du soleil de plomb. Le rat des quais était habitué au climat marin, bien moins intense que les chaleurs sèches du désert, mais il semblait paisible.

         Dans la journée, peu après leur repas pris sans s’arrêter, comme toujours, l’un des hommes du convoi les avait rejoints, il s’agissait d’un membre de leur escorte, qui avait parlé au maître. Mora leur expliqua après coup qu’une tempête s’avançait vers eux, et serait sur eux d’ici quelques heures. Malgré l’inquiétude qui commençait à étreindre les jeunes filles, le caravanier se voulut rassurant, de tels phénomènes étaient courant dans cette partie du désert.

 - Elles ne sont pas si dangereuses, sourit l’homme, du moment que l’on s’abrite à temps.

 - En mer les tempêtes s’avèrent parfois de puissants ennemis, répondit Nâmis, les éviter est parfois impossible, mais aucun moyen de se cacher pour attendre.

 - Mais dans le désert on peut, sourit Mora, Père connait un endroit qui nous apportera protection.

         Bell et Ileae soupirèrent soulagées, elles étaient heureuses de traverser avec des gens ayant une telle connaissance du désert.

 - Comment avez-vous su qu’une tempête se préparait ? lança la yordle au mercenaire.

 - Skellia, ma monture, dit-il en pointant la créature qui glissait sur le sable en contrebas. Elle ressent mieux que nous humains les phénomènes.

 - Et toi tu saurais me prédire la météo ? demanda Ileae au petit Clapper qui regardait très attentivement la créature en bas.

         Le petit rat des quais se détourna de son observation pour se jeter sur les genoux de la vastaya, à qui il réclama des gratouilles, au moyen de ses claquements de mâchoire caractéristiques.

 - C’est la première fois que je vois un rat des quais se laisser apprivoiser, dit l’homme intrigué.

         Ce dernier était un homme assez jeune, sensiblement dans la trentaine, il était vêtu d’une tenue du désert, d’apparence très sobre. A ses pieds, Bell observa une étrange paire de souliers, très légers.

 - Je m’appelle Amara, compléta-t-il, je fais partie de l’escorte, on m’a dit que vous veniez de loin.

 - Nous sommes d’un peu partout, sourit Nâmis, et c’est aussi là que nous allons.

         Le mercenaire sourit, amusé par la polie méfiance dont le sage faisait preuve.

 - J’ai rencontré ton amie aux cheveux roses, adressa-t-il à la yordle, dans la boutique de vêtements. N’hésitez pas à lui passer le bonjour de ma part !

 - Nous n’y manquerons pas, sourit Bell qui comprenait enfin d’où elle connaissait son visage et son accoutrement.

         L’homme descendit agilement par les cordages, grimpant d’une pirouette sur sa monture qui glissa au loin.

 

         Comme attendu, le groupe changea de trajectoire, bifurquant légèrement vers une autre direction. Sous un ordre du maître, la caravane accéléra légèrement, les braves Skallashis forçant le pas.

         Peut-être ont-ils eux aussi senti la tempête, se dit Bell. Elle se tourna vers Clapper, qui ressentait quant à lui l’agitation de sa maîtresse, et vint s’y coller. La yordle sentit une douce sensation sur sa main, et manqua de sursauter lorsqu’elle remarqua qu’Ileae s’était assise à côté d’elle en silence, et avait posé sa main sur la sienne. Son amie lui offrit un sourire magnifique, qui fit battre son cœur un peu trop rapidement à son goût.

         A mesure que le temps passait, le paysage évoluait, devenant de plus en plus rocailleux. Les dunes autour étaient percées de grandes piques de pierre, d’arches rocheuses donnant l’impression de voir une miniature de l’archipel de la Flamme Bleue.

         Bilgewater me manque, et papy aussi… pensa la yordle. Depuis combien de temps ne l’avait-elle pas revu ? Son départ remontait déjà à plusieurs mois, et malgré son envie de voyage, un certain mal du pays se faisait sentir. Ileae sentit qu’elle était en proie à quelques tourments, elle s’approcha, se collant à la navigatrice, qui appuya sa tête sur son épaule.

 - Décrivez-moi un peu d’où vous venez, dit Jolyne en s’asseyant aux côtés du trio de voyageurs.

         La femme avait laissé son mari aux commandes, prenant une pause bien méritée. Quelles que soient les tâches, elle et Mora se les partageaient à une égalité totale, faisant face à tous les évènements du voyage d’un front unique.

 - Nous avons des arches de pierre similaires à celles-ci, sourit Bell, qui composent l’archipel entier. Mais là-bas, elles ne font pas une dizaine, mais plutôt une à plusieurs centaines de mètres de haut. Bilgewater nichée dans cet archipel, c’est la ville la plus importante, les autres sont plus des villages de pêche.

 - C’est si grand que ça !? souffla la caravanière. Ce doit être très différent de nos dunes ici.

 - On y grimpait très souvent avec Cynthia et Jay, ça nous donnait une vue magnifique sur tout l’océan.

         Le cœur de la jeune fille se serra lorsqu’elle prononça le nom de son ami d’enfance. Elle n’avait que peu de nouvelles de lui depuis son départ pour Ixtal avec une partie de leur équipage.

 - On m’a toujours dit que l’archipel était dangereux, dit Jolyne pensivement.

 - Pas tant que ça, il faut juste savoir y faire. Je m’y sens chez moi, et tant qu’on ne trempe pas dans de sordides affaires, le mal reste généralement loin, et derrière si l’on court assez vite !

 - Tu me fera visiter !? demanda Ileae en serrant la jeune fille contre elle.

         La caravanière sourit en regardant le duo souriant.

- Et toi ? Demanda-t-elle à la vastaya.

- J’ai grandi à Zaun, mes parents étaient de simples ouvriers. Là-bas on est sous terre, entouré par les parois, des maisons faites d’acier et de verre. On marche et respire dans la pénombre, et le nuage de pollution qu’on appelle le Gris.

- Les rumeurs sur Zaun sont aussi inquiétantes que celles que Bilgewater, sourit tristement la shurimienne.

-  On y vit de drôles de choses c’est certain… mais tout n’est pas à jeter !

- Comment vous êtes-vous rencontrées ?

- Par hasard dans le laboratoire du médecin chez qui je travaillais, à Piltover.

- Deux jeunes filles, des deux cités les plus dangereuses de Runeterra, vous formez un adorable couple.

         Les deux rougirent de concert, ne sachant que répondre à la remarque de la caravanière.

 

         Autour du groupe, le vent se faisait de plus en plus puissant, à mesure que le soleil commençait à chuter vers l’horizon. De fins nuages couvraient le ciel, que Nâmis expliqua être composés de sable emporté dans l’atmosphère par les vents.

         La navigatrice continua de griffonner dans son carnet, quelques notes et croquis sur la région qu’ils traversaient. Leurs hôtes avaient expliqué qu’ils étaient sur le point de franchir le point culminant des dunes sur plusieurs centaines de kilomètres, avant de rejoindre une vallée rocheuse dont les grottes leur offriraient un abri pour les prochaines heures.

 - Préparez-vous-vous allez pouvoir la voir, dit Mora à l’avant en souriant.

         Intriguée, Bell et Ileae se placèrent à leur côté, s’attendant à être éblouis par le soleil couchant. Cependant, lorsque le groupe de Skallashi eut finit de grimper la pente, un tout autre spectacle les accueillit.

         Devant eux, le désert s’étalait, à parte de vue, les dunes ondulaient doucement sur des centaines de kilomètres à la ronde. Les reflets d’or faisaient penser à un trésor, le désert s’étendait presque à l’infini, comme si rien d’autre que le sable et la roche les attendaient. En contrebas, Bell vit une succession de canyons rocheux, à fond sec, que la troupe allait probablement emprunter pour s’abriter. Un peu partout, de petites zones semblant être de probables oasis parsemaient l’étendue désertique, cependant un spectacle bien plus captivant attira l’attention de la jeune fille.

         Au loin, le soleil ne les éblouissait pas, bien au contraire, étant caché derrière un phénomène nouveau pour la Bell. Au loin, l’horizon semblait comme… se soulever. Des dunes, s’élevait un énorme mur de sable, emporté par les vents. LA tempête, identifia Bell.

         Cette dernière ne ressemblait à rien qu’elle n’ait vu jusqu’ici, elle prenait la forme d’une vague, absolument gigantesque. La première chose qui choqua la yordle fut la taille du phénomène, même à des dizaines de kilomètres il surplombait tout et de très loin, si bien que les formations rocheuses si grandes soient-elles, paraissaient minuscules.

 - Si une telle tempête s’abattait sur Bilgewater, elle engloutirait l’archipel entier, souffla Bell.

 - Et bien plus encore, répondit Nâmis, même les arches les plus grandes disparaîtraient. Elle est certes impressionnante mais n’est pas aussi dangereuse qu’elle en a l’air.

         Ileae restait silencieuse, observant non sans une certaine inquiétude le mur de sable probablement haut de plus d’un kilomètre. Dans l’immense masse, des éclairs provoquaient de petits flashs de lumière, tandis qu’elle continuait d’engloutir le Shurima leur faisant face.

         Comme convenu, le groupe amorça sa descente dans les canyons en contrebas, cherchant l’abris parfait. Mora avait indiqué qu’ils avaient entre trois et quatre heures avant que la tempête ne soit sur eux, aussi n’avaient-ils pas besoin de s’inquiéter. Autour d’eux, Bell et Ileae purent découvrir une magnifique vallée rocheuse, tandis qu’ils s’engouffraient dans une ravine creusée par les vents et l’érosion des tempêtes successives.

         La roche jaune-orangée, taillée et presque polie par le souffle de l’air, donnait un paysage très arrondi, lisse. Bell se sentit presque apaisée en observant les reliefs autour d’elle. Les arches géantes de Bilgewater bénéficiaient de la protection de la terre et de la végétation s’y trouvant, d’autant que l’eau et les habitants s’ajoutaient au processus de transformation des reliefs, ici la pierre était à nu, livrée aux affres de la météo.

         Ileae quant à elle se remémora les ravines et souterrain de Zaun, sa ville natale. Les cavités avaient été pour une petite partie creusée à la main, mais une majorité étaient apparues des suites à d’un cataclysme technologique des Piltoviens. Leur aspect, plus rêche, saillant et désordonné, était plus proche d’une blessure infligée à la terre, ce qui contrastait avec l’aspect naturel et paisible des roches désertiques. Elle nota cependant la présence de ce qui lui sembla être des traces laissées par des voyageurs, de modifications artificielles, notamment proche des grottes.

 - Cet endroit a-t-il été habité ? lança-t-elle à Mora.

 - Cela remonte à des siècles, sourit Mora depuis la tête de son Skallashi. D’anciennes tribus vénérant les célestes de Targon je crois, ils ont été chassés du pays par les empereurs shurimiens qui ne croyaient qu’en le Disque Solaire.

 - Je vois. Je n’aime pas trop cet empire je crois, soupira Bell.

 - Il est tombé il y a très longtemps, Azir l’empereur de l’époque a été trahi par son esclave et ami sous le disque solaire, réduisant à néant la ville entière. Il serait d’ailleurs ressuscité et de retour, ce qui expliquerait pourquoi le disque est de nouveau debout et la capitale habitée depuis quelques années.

         Ça me dit quelque chose, pensa la yordle.

 - On va bientôt arriver, lança Jolyne, préparez-vous.

         Comme indiqué par la jeune caravanière, le convoi bifurqua, avant de s’engager dans un long couloir rocheux. Un a un, les Skallashis s’engagèrent dans un espace similaire à une sorte de clairière, entourée de remparts naturels qui les protègeraient du vent. Au-dessus d’eux, ces derniers soufflaient déjà assez fort pour gêner la marche.

         Les hautes roches autour du groupe abritaient des grottes, capables d’accueillir les voyageurs par petits groupes. Naturellement, Bell resta avec les siens, qui furent rejoint par Amara, et le couple qui guidait la monture de la yordle.

         Tandis que les pèlerins montaient les tentes au creux des roches, un doux son monta tout autour d’eux. Les violents vents, entrainés entre les complexes ravines, se mirent à chanter une douce mélodie, au milieu du désert. Pour Bell, c’était la première fois qu’elle entendait un son naturel aussi beau, il était harmonieux, magnifique. Jolyne lui adressa un sourire, constatant la joie et l’ivresse que ressentait la yordle à la découverte de cette mélodie inattendue. Sur le côté non loin de sa tente, Amara était assis sur une roche, méditant au son du désert tandis que la nuit finissait de tomber.

 

 - Bell ! Viens voir ça !

         Dans la pénombre de la cavité, Ileae faisait de grands signes à la jeune fille, la pressant de la rejoindre. Elle attrapa Clapper sans ses bras, et trottina jusqu’à la vastaya, accroupie aux côtés de Cynthia. De nombreuses galeries quittaient leur campement pour d’enfoncer dans le sol, de sombres tunnels plongeant vers l’inconnu.

 - Jette un œil à ça, sourit la scientifique.

         Bell regarda ce que son amie lui indiquait. Sur les grosses pierres éparses, des dessins et complexes motifs étaient gravés, révélés par ma lumière de leur torche.

 - Ces gravures sont anciennes, murmura la zaunienne. Tu ne trouves pas qu’elles ressemblent à celles de la Décharge ?

         La navigatrice réfléchit quelques instants. Devant ses yeux se déroulaient des scènes de rites, de chasses, de récoltes et de constructions, dont les ombres ondulaient avec la lumière fluctuante.

         Dans les Tréfonds de Zaun, la yordle qui les avait accueillis durant la révolte contre Piltover gardait une ancienne grotte shurimienne dont les gravures étaient assez similaires, comme le disait son amie Ileae.

 - Ici ça ressemble à la fameuse capitale, dit Cynthia debout face à un mur.

         La yordle se leva et rejoint son amie d’enfance, suivant du regard les témoignages laissés dans la pierre. Sur un grand pan, une gigantesque taillée fresque représentait un paysage, une ville aux hauts remparts, entourés par une rivière dont la cité était la source. Au-dessus, un énorme disque planait, aussi large que la ville en dessous, rayonnant sur ce qui était la région autour.

 - Le Disque Solaire, dit une voix qui s’approchait. Et la capitale, source du fleuve qui alimente tout Shurima, la Mère de la Vie.

         Amara se plaça à leurs côtés, scrutant les dessins avec un sourire qui laissait transparaître une certaine tristesse.

 - Les termes ici sont soit complexes soit très évasifs, remarqua Bell, où sont passés les jolis noms comme Nashramae ou Zuretta ?

 - La capitale est simplement désignée comme telle, et le fleuve est aussi appelé Mère, c’est plus simple.

 - Vous voyagez depuis longtemps ?

         Le mercenaire s’assit, continuant de scruter les gravures avec soudain un air agacé sur le visage. Sur un pan, des sortes de divinités étaient représentées, autour d’un pic montagneux étonnamment verticale. Certaines des représentations dépeignaient un animal géant semblant comme les autres composé d’étoiles, tandis qu’un autre montrait une fille endormie dans une bulle, entourée de bras qui volaient tels des rubans.

 - Depuis plus longtemps que je m’en souvienne, répond-t-il. Je vais où le vent me porte.

 - Et l’argent, fit remarquer Cynthia qui semblait se méfier de l’homme.

 - Nous sommes tous mercenaires ici, sourit-il, cependant mon chemin n’est pas tracé par l’argent jeune fille, et j’ai la conviction que ce n’est pas non plus votre cas. Le destin seul me mène où il le veut.

 - Nous avons tous nos objectifs, personne ne voyage sans but.

         Le mercenaire se leva en souriant, prenant la direction des caravaniers.

 - Pour certains, l’objectif vient au cours du voyage, comme une quête apportée en chemin.

         L’homme s’éloigna d’un pas léger, élégant et agile. Sa démarche était fluide, comme s’il maîtrisait chacun de ses mouvements.

 - Tu te méfie de lui, remarqua la yordle.

 - Justement vous deux pas assez, rétorqua la jeune mage. Vous devriez faire plus attention aux gens, vous savez où ça peut mener.

         Bell et Ileae affichèrent une expression boudeuse. Leur confiance les avait amenées à être capturées une fois, Cynthia avait raison.

 

         Après de longues observations et croquis des motifs trouvés, le trio s’en retourna auprès de leurs camarades. Leur groupe était assis autour d’un feu qui crépitait chaudement, tandis que le couple de caravaniers se restaurait plus loin aux côtés de leur père et d’Amara.

         À l’entrée de la grotte, Bell put entendre le grondement des vents, qui soufflaient avec force dehors. Je suis bien contente d’être à l’abri, pensa-t-elle.

         Le trio s’assit près de leurs compères, qui distribuèrent un potage préparé avec les itinérants. La nourriture en Shurima plaisait énormément à la yordle, et Ileae, ravis de pouvoir découvrir la culture culinaire du pays. Clapper quant à lui, dormait près des autres, attendant que sa maîtresse le nourrisse.

 - Nous sommes à environ deux jours de Zuretta, dit Anna entre deux gorgées. La tempête devrait passer dans la nuit d’après Victor.

 - C’est quel genre de ville ? Demanda Cynthia curieuse.

 - La Zuretta que l’on connaît est assez récente, expliqua la freljordienne, elle a été détruite plusieurs fois dans son histoire, mais elle s’inscrit dans la même veine des autres villes, basée sur le commerce l’artisanat. A l’instar de Zaun elle a été conquise par plusieurs empires.

 - Sa position sur la route entre Nashramae et la capitale en font une étape pour les caravanes, compléta Nâmis. Ils en vivent beaucoup. Elle cependant n’a pas subi la folie de ses scientifiques.

         À l’évocation de Zaun, Bell eut un léger rictus, tentant d’effacer les souvenirs de la ville souterraine. Ileae, remarquant l’air tourmenté de son amie, lui tendit la main en souriant.

 - À propos de Zaun, il y a quelque chose qui m’intrigue, lança Holly. Si ce sont bien les expériences de Krenn qui ont provoqué les changements et développement de ses pouvoirs chez notre jeune navigatrice, quel était leur but ? Pourquoi auraient-ils eu un intérêt à donner autant de pouvoir à leur prisonnière ?

 - Peut-être simplement une erreur ? Tenta Anna.

         Un léger silence régna, perturbé par le bruit du feu crépitant, laissant chacun réfléchir.

 - Ils avaient l’air sûr d’eux, soupira Bell. Et entièrement satisfaits de ce qu’ils m’ont fait subir.

 - As-tu une idée de leur objectif ? Continua la commandante Bertillon.

 - Krenn avait parlé d’éveil, quand il évoquait la personne pour qui il travaillait.

 - Tu n’as rien trouvé d’autre ? Rien qui puisse nous guider ?

         Bell resta silencieuse, et détourna la tête. Elle n’avait que peu envie d’évoquer ces moments dans les Tréfonds. Ileae sentit sa main se serrer, comme si elle avait besoin de soutien.

 - Tu ne nous as pas tout dit, sourit Anna, mais au vu des évènements c’est normal. Tu as besoin de temps, quand tu te sentiras prête n’hésite pas à nous en parler.

         La yordle croisa le regard de la freljordienne, qui s’avéra plein de compassion. Au fond d’elle, elle sentait monter des larmes, d’une part de joie, mais aussi de peur. Elle savait que quelque chose sommeillait en elle, mais avait besoin de temps pour y faire face.

 - Les expériences ont entraîné beaucoup de changements, lâcha Ileae. Si nous avions pu nous aurions dû la laisser voir quelques professeurs de Piltover.

 - Je doute qu’ils aient les compétences et connaissances requises, grimaça Nâmis.

         Un court silence s’installa de nouveau. Alors que le groupe fixait les flammes pensivement, un bruit de pas vint troubler leur réflexion.

 - Vous m’avez l’air préoccupés, sourit le Maître en s’approchant. Permettez que je me joigne à vous ?

         Nâmis désigna un rondin de bois à son ami en souriant.

 - Votre quête et son objectif sont vôtres, mais n’oubliez pas qu’un peu d’aide ne fait pas de mal.

 - Nous avons quelques problèmes d’ordre… magique, expliqua le sage. Nous sommes inquiets.

         Le caravanier resta silencieux lui aussi, grattant sa barbe épaisse en réfléchissant.

 - Peu de gens ont assez de connaissances ici pour vous aider, dit-il le regard dans le vide. Mais un nom me vient en tête.

         Le groupe resta accroché à ses lèvres, attendant qu’il désigne la personne susceptible de les aider. Il se tourna, et désigna de la main l’autre petit groupe près de leur feu.

 - Amara a de bonnes connaissances, il sait beaucoup de choses dans ce domaine, et même s’il ne parvenait pas à vous aider, il serait en mesure de vous présenter des mages compétents.

 - Je ne lui fais pas confiance, intervint Holly. Il a un comportement étrange.

 - Comment ça ? Demanda Anna intriguée.

 - Il est différent des gens, ça se sent. Il cache quelque chose.

 - Votre intuition et votre méfiance sont compréhensibles dame Bertillon, sourit le caravanier. Mais cet homme est digne de confiance.

         Holly fixait discrètement le mercenaire qui mangeait calmement, aux côtés du couple de caravaniers.

 - Mon instinct ne me fait jamais défaut, insista-t-elle. Il y a quelque chose en lui de différent.

 - Me faites-vous confiance ? Demanda poliment le maître.

         La commandante se tourna vers le caravanier, et planta son regard froid dans le sien. Ce dernier était souriant, et semblait sincère.

 - Oui.

 - Alors je vous demande de faire confiance à mes amis.

 - Confierez-vous votre vie à cet homme ?

 - Sans aucun doute, affirma le shurimien.

         La réponse directe et franche de ce dernier sembla convaincre Holly, qui se redressa, arborant toujours la même expression froide sur le visage.

 - De toute manière la décision me revient, s’agaça la yordle. Il s’agit de mes problèmes et j’entends les gérer comme je le souhaite. Merci Maître pour ces informations.

         La jeune fille se leva, salua l’assemblée et s’éloigna d’un pas pressé.

 

 - Bell, attends !

         La yordle se retourna, Ileae courrait dans sa direction alors qu’elle se dirigeait vers sa tente.

 - Tu n’as pas l’air bien… marmonna-t-elle en lui attrapant la main, tu ne parles plus beaucoup depuis quelques jours. Dis-moi si quelque chose ne va pas.

         La jeune fille sourit. Depuis leur capture à Zaun, Ileae et elle n’avaient cessé de veiller l’une sur l’autre, mais cette fois la situation était différente.

Je dois la préserver de ce qui est en moi, se convainc Bell, je ne dois pas la blesser.

 - Je vais bien, sourit-elle en serrant sa main. Entre la fatigue la chaleur et le mal du pays, c’est un peu dur.

 - Je suis là, je serais toujours là pour toi.

         Bell sourit en fixant le regard attristé de la vastaya. Elle était inquiète, cela se lisait sur son visage et dans ses yeux. Elle finit par lâcher la douce main de son amie, caressant les écailles qui lui en recouvrait le dessus.

         Elle s’éloigna vers sa tente, seule.

 

***


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