Bell de Bilgewater

Chapitre 26 : Partie 3 - Chapitre 13

2589 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 26/08/2021 00:02

           Chapitre 13

         Bell ne parvenait pas à comprendre ce qu’il se passait, mais une chose était sûre, c’est qu’il valait mieux qu’elle fiche le camp, et en vitesse. Entre ces zauniens sortis de nulle part, et cette militaire accompagnée de soldats qui avait voulu l’attraper, la jeune fille avait d’instinct fait appel à ses pouvoirs, et sauté.

         N’ayant pas réussi à faire attention, elle reparut dans une ruelle adjacente, et atterrit directement dans un tas de caisses qu’elle ne parvint pas à éviter. En réalité, aussi pratique que soit son « saut », il permettait de se transporter sans pour autant réduire la vitesse d’entrée, ou alors très peu.

         Elle grimaça, tout son corps était endolori, elle souffrait le martyr et sa respiration était saccadée. Pour ne rien arranger, sa vue était rendue trouble par le sang qui lui coulait sur le visage. De plus, son équilibre instable, et son état de choc, l’empêchaient d’avoir les idées claires. La vue de ce pauvre Clapper évanoui dans ses bras lui rendit un souffle de courage, et elle s’élança tant bien que mal vers le manoir.

         Comme pour ponctuer la journée, une fine pluie accompagna Bell dans la nuit, vers sa destination. L’eau ruisselait sur ses cheveux et contre sa peau, nettoyant un peu la crasse et le sang qui recouvraient sa fourrure. L’humidité et la fraicheur de la bruine permirent à Bell de recouvrer légèrement ses esprits, la soulageant un peu.

         Malgré son état, elle parvint à retrouver son chemin jusqu’au manoir, et sentit comme un poids se lever de ses épaules lorsqu’elle arriva dans l’allée de l’édifice, rassurée de pouvoir enfin rentrer se reposer. Elle avait probablement plusieurs os cassés, des bleus partout, et elle n’osait même pas penser à l’état général dans lequel son corps devait se trouver.

         Elle passa péniblement la porte, et parcourut les couloirs en claudiquant, jusqu’au réfectoire, d’où elle entendant une certaine agitation. Seul endroit éclairé dans le manoir à une heure si tardive, la salle semblait regorger d’effervescence. Elle franchit le seuil de l’entrée, et débarqua au milieu de l’agitation. Des tas de gens parlaient fort, répartis en petits groupes. Bell reconnut une bonne partie de l’équipage, tous semblaient comme prêts à partir, avec des tas d’équipements et d’armes posés çà et là.

         Cynthia fut la première à apercevoir l’arrivée de la yordle, et lâcha petit cri de soulagement. Un silence de mort pesa sur l’assemblée, rompu par son amie, qui se précipita sur elle, fondant en larme. Sans un mot, l’enserra dans ses bras, si fort que Bell lâcha un gémissement.

 - Oh je suis désolée, souffla la soigneuse en reculant légèrement.

         Morgan s’approcha, écarta légèrement Cynthia au visage larmoyant, pour récupérer dans ses bras Clapper, inanimé.

 - Tu nous a fait sacrément peur petite, lâcha-t-il en posant sa main sur la tête de la yordle, t’es sacrément solide tu sais.

         Malgré le soulagement de voir leur navigatrice de retour, tous s’inquiétaient de son état. Déjà malmenée par sa blessure en mer l’autre jour, elle n’était pas encore totalement remise, et cette fois c’en était trop, il fallait la garder au repos.

 - Bell ? lança Cynthia. Bell ça va ?

         Son objectif atteint, le corps de la jeune fille profita du retour en sécurité pour relâcher la pression, et alors que sa vue se noircissait, la jeune fille s’effondra sur le sol.

 

***

 

         Bell avait déjà été apportée à sa chambre, portée jusqu’à son lit. Les premières heures Johan passa régulièrement lui administrer des médicaments divers, en compagnie de Cynthia, qui s’inquiétait grandement pour son amie. Voir son corps recouvert de bleus donnait à la jeune soigneuse un immense coup au moral.

         Durant les jours qui suivirent, Bell, n’émergeait qu’à de rares occasions, son corps ayant besoin de se remettre de l’affrontement avec les zauniens. Les médicaments et traitements de Johan faisaient cependant des merveilles, et aidaient la yordle à retrouver petit à petit une mine décente. Durant un de ses courts moments de lucidité, elle se dit qu’elle devait absolument faire un tour par les ateliers, et en savoir plus sur les études de son hôte.

         Plusieurs autres personnes passèrent à son chevet durant ses jours de rémission, Anna et Morgan, qui discutaient doucement, en s’excusant de ce qu’il s’était passé, Jay qui lui racontait un peu ce que lui et le reste de l’équipage faisaient, leurs préparations pour l’excursion en Ixtal. Ileae passait aussi très régulièrement, Bell ne s’en aperçut que très rarement lorsqu’elle émergeait. La vastaya restait silencieusement à côté d’elle, lui tenant un peu la main parfois même, avant de lui dire au revoir avec un timide sourire.

 

***

 

         Quelques rayons de lumière pointèrent au travers des ouvertures laissées par les rideaux, venant caresser la peau blanche de la yordle. Cette dernière papillonna des yeux, avant de se redresser, et de s’étirer longuement. Elle faillit lâcher un petit cri de surprise lorsqu’elle s’aperçut que quelqu’un était affalé sur le côté du lit, la tête dans les bras. Bell poussa un peu du pied, et Cynthia se redressa brusquement.

 - Bell ! s’écria-t-elle en se jetant sur elle pour l’enlacer... Tu es enfin réveillée !

 - Doucement, gémit la yordle, j’ai encore un peu mal.

 - Oh excuse-moi.

         Cynthia reprit place sur son fauteuil à côté du lit, confuse. Elle remit en ordre sa chevelure et ses vêtements. Elle a dû dormir ici, se dit Bell.

 - J’ai manqué des choses depuis mon retour ?

 - Tout le monde est passé te voir, expliqua son amie, certains ont passé des heures à ton chevet.

 - Et je suis restée endormie combien de temps au juste ?

 - Eh bien… plusieurs jours, un bon paquet même. Après t’être évanouie, on t’a portée à ton lit, et Johan a commencé à te soigner. Il t’a administré des sédatifs pour que tu restes endormie et récupère. Tu ne te souviens de rien ?

 - J’ai quelques visions, des bribes de petits moments, mais le reste des souvenirs datent de… l’autre jour…

 - Je vois…

         Quelqu’un frappa à la porte, qui s’ouvrit doucement, avant qu’une tête ne pointe timidement par l’embrasure.

 - Ah je vois que tu es de retour parmi nous ! s’exclama Morgan en franchissant le pas de la porte. Faudrait pas non plus dormir trop longtemps !

 - Capitaine ! lança la yordle avec un grand sourire. Heureuse de vous revoir !

 - Cynthia tu pourrais aller me chercher Maria, on doit parler rapidement.

         La jeune femme acquiesça en se levant, tandis que Morgan prenait place sur un tabouret aux côtés de sa navigatrice.

 - Alors petite, tu nous as fait une sacrée frayeur, tu te sens comment ?

 - Eh bien… J’ai l’impression d’avoir fait une grosse grasse matinée, mais je me sens mieux.

 - Tu sais… commença-t-il sans son engouement habituel, c’est pas vraiment comme ça que j’imaginais ton premier voyage… Un monstre marin infecté qui manque de détruire mon navire, et maintenant une attaque de zauniens. J’ai promis à ton vieux que je veillerais sur toi, et j’ai failli à ma promesse, par deux fois. Je te demande pardon.

         La mine décomposée du capitaine manqua de mettre les larmes aux yeux de la jeune fille, qui posa sa petite main sur son bras.

 - On doit une fière chandelle à Holly, sans elle on aurait eu bien du mal à te retrouver…

 - Lorsque je suis rentrée, vous étiez tous à m’attendre dans le réfectoire ?

 - Cynthia est venue nous prévenir à la taverne, quand nos camarades ont su ce qu’il t’arrivait ils ont insisté pour se préparer à lancer des recherches.

 - Oh je vois… mais vous n’êtes pas venus.

 - Maria nous en a empêché, elle t’expliquera bien mieux que moi.

         Ce que le capitaine lui disait contrariait la yordle, qui commençait à se demander ce qu’il se tramait.

 - J’ai cru comprendre que tu t’étais fait un nouvel ami ?

 - Oh Clapper ? C’est le rat des quais qui s’était échappé à notre arrivée. Il vient me voir régulièrement, alors je lui donne un peu à manger. Où est-il ?

 - Les assistants de Johan s’en sont chargés, il est en sécurité. Tout comme toi il était assez mal en point, je pense qu’il sera ravi de te retrouver. Cependant, tu dois te reposer. Tu es résistante, peut-être est-ce dû au fait que tu es une yordle, et je connais peu de gens qui auraient tenu aussi longtemps que toi l’autre soir.

 - Il m’a énormément aidé, j’espère qu’il va bien…

 - Je n’en doute pas. En tout cas la seule personne qui parvient à l’approcher c’est la jeune assistante vastaya, Ileae. Elle l’a amadoué avec de petites lanières de viande séchée.

         Bell regarda distraitement autour d’elle, elle avait hâte de retrouver ses vêtements, et de prendre un peu l’air. Sa sacoche où elle range la nourriture de son compagnon avait en effet disparue. Quelqu’un d’autre frappa à la porte, et pénétrèrent dans la pièce deux personnes : Maria, dans son élégante tenue habituelle, ainsi qu’une grande femme aux cheveux violets. C’est elle, se dit Bell, elle était là l’autre soir.

 

***

 

 - Bonjour jeune fille ! On m’a dit que tu étais enfin éveillée.

 - Bonjour madame, répondit Bell poliment.

 - Je suis sûre que tu as plein de questions, alors n’attendons pas, je me permet.

         L’armatrice prit prestement place dans un grand fauteuil qui craqua terriblement sous son poids. Elle croisa ses bras massifs contre son torse, tandis que la femme qui l’accompagnait s’appuya contre le bureau à côté.

         Cette dernière était vêtue d’un élégant uniforme militaire serré, bleu et or, rappelant les couleurs de la tenue que Bell avait achetée en arrivant en ville. Une expression froide et sérieuse couvrait le visage de l’inconnue, tandis qu’elle recoiffait la toison qui lui arrivait au milieu des cuisses. Elle croisa les bras et braqua son regard glacial sur Bell, qui frissonna.

 - Jeune fille, je te présente Mademoiselle Bertillon, commandante des forces de régulation de Piltover. C’est elle qui est intervenue l’autre jours lors de la rixe avec les zauniens.

 - Enchantée, et merci… dit timidement Bell.

         La femme se redressa légèrement, et un léger sourire satisfait apparut sur son visage.

 - Je t’en prie Bell, répondit-elle d’une voix dont la douceur tranchait avec la froideur de son attitude. J’aurais cependant voulu arriver plus tôt, cela t’a mis en danger, j’en suis navrée.

 - Vous me connaissez ?

 - Les services de la commandante travaillent régulièrement avec monsieur Hekins de l’académie, expliqua Maria. Elle pourrait aussi nous prêter main forte.

 - L’ancien m’a demandé de veiller sur toi de loin, continua l’officier, en échange de quoi j’aurais accès à des informations.

 - En attendant, on continue d’enquêter sur la bande qui s’en est pris à toi, ajouta l’armatrice. La plupart se sont tirés rapidement. J’ai moi-même dû empêcher tes camarades de se jeter armes aux poings dans les rues pour te porter secours.

 - Pourquoi les avoir arrêtés ? demanda la jeune fille, contrariée.

 - Je comprends ta frustration, intervint la commandante en se redressant, mais c’est sur ma demande qu’elle a agi. Toute action de tes camarades aurait perturbé le travail de mes équipes. Nous connaissons le terrain, et nos opposants, laisser des mercenaires affronter une bande organisée aurait pu être très dangereux.

 - Je vois…

         Bell apprit que certains de ses ravisseurs avaient été capturés, mais que la plupart s’étaient enfuis. Les services de renseignements piltoviens espéraient tirer d’eux des informations utiles.

         La militaire se dirigea vers la porte, qu’elle ouvrit. Avant de passer l’embrasure, elle regarda une dernière fois la yordle alitée, et ajouta qu’elle pouvait passer à son quartier général si elle le souhaitait.

 - Je ne suis pas la mieux placée pour te dire cela, dit Maria en se levant à son tour, mais si tu as besoin de parler de ce qu’il s’est passé l’autre soir, nous sommes tous là, surtout Anna, elle se faisait un sang d’encre.

 - Oh et tu devrais aller voir Johan, ajouta le capitaine en se dirigeant vers la porte, il mérite bien un peu de compagnie après t’avoir remise sur pieds, et je connais un petit compagnon qui t’attend avec impatience !

 

***


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