Bell de Bilgewater

Chapitre 20 : Partie 3 - Chapitre 7

4615 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 25/08/2021 23:55

           Chapitre 7

         Tout comme la veille, Bell prit soin d’enfiler son uniforme piltovien pour sa première journée à l’académie. Le fait qu’elle l’eut portée au moins une fois suffit à lui donner un peu de confiance, et elle savait qu’il lui en faudrait pour affronter seule l’effervescence de la ville dehors. Cynthia qui se préparait à rejoindre Johan ne manqua pas de complimenter son amie sur sa tenue, insistant sur le fait que la yordle fut ravissante et encore plus adorable avec un habit qui la mettait en valeur.

         Elle n’emprunta pas le même chemin que la veille, et préféra découvrir de nouvelles rues, et observer un temps la mer après qu’elle eut atteint la plus haute des gigantesques écluses. Elle pris aussi le temps de s’arrêter à l’un de ces gigantesques passages du canal, pour observer son fonctionnement. Un navire tout aussi grand que le Somua avait payé son droit de passage, probablement exorbitant, et avançait jusque dans l’écluse par la première porte, qui se referma. Il fallut de très longues minutes pour que le niveau de l’eau baisse jusqu’à celui de l’écluse suivante, laissant ainsi la seconde porte s’ouvrir, pour que le navire puisse avancer dans l’enceinte suivante. Impressionnant, souffla la jeune fille, pas étonnant qu’ils en soient si fiers ces piltos.

         Bell mit fin à sa contemplation pour se diriger vers l’académie, qu’elle atteignit par une passerelle différente de la veille. Cependant, elle remarqua que sans guide, se diriger au sein des bâtiments de l’île serait bien plus ardu, avec une telle foule autour d’elle. La yordle ne parvenait pas à se repérer, et elle ne voulait surtout pas attirer l’attention en grimpant partout comme elle le faisait à Bilgewater. Je ne pense pas que les piltoviens soient habitués à voir des gens se promener sur les corniches et les toits de leur ville, admit-elle pensivement, je suis navigatrice je devrais pouvoir m’y retrouver.

         Après un temps qui lui parut être interminable, elle finit par admettre qu’elle était perdue, cocasse pour une navigatrice. Elle pouvait toujours se diriger vers la bibliothèque, mais elle souhaitait trouver le bâtiment où les enseignements sur la maîtrise de la magie étaient dispensés. Elle finit par se résigner, et tenta d’approcher un groupe de jeunes piltoviens qui discutait non loin.

 - Hum… Excusez-moi, je suis perdue pourriez-vous m’aider ?

         L’un des garçons du groupe se retourna, cherchant d’abord à sa hauteur qui s’adressait à lui, mais ne put retenir un rire lorsqu’il vit que son interlocutrice ne lui arrivait qu’à la hanche.

 - Excuses-moi je t’avais pas vu, ricana-t-il, t’es quoi toi, la fille du professeur Heimer ?

 - Je cherche un cours de magie sensé être donné quelque part ici… vous sauriez où c’est… ?

 - Regardez ses oreilles on dirait celles d’un chat, pouffa une fille du groupe, mais en dix fois plus grosses !

 - T’as perdu ton maître ? renchérit un autre. Je ne savais pas qu’on acceptait les animaux de compagnie ici.

 - Vu ton apparence tu viens sûrement de Zaun, dit le garçon que Bell avait abordé, il y a d’autres choses comme toi là-bas.

 - Pas vraiment en réalité…

         Bell tentait par tous les moyens de discuter avec le groupe de piltoviens, sans que ceux-ci ne semble y prêter attention, trop préoccupés par l’apparence de la jeune fille. Cette dernière voulut laisser tomber et tenta de s’éloigner, mais le garçon qui semblait être leader du groupe la suivit en continuant de lui parler.

 - D’ailleurs t’as quel âge ? Vu ta taille t’es sûrement une sorte d’enfant, mais trop blanche avec d’énormes oreilles. T’as une maladie ?

 - Cette jeune fille est actuellement mon invitée jeunes gens, tonna une voix sur le côté, et je vous prierais de bien vouloir la laisser tranquille.

         Bell aperçut du coin de l’œil le doyen Hekins s’approcher, toujours habillé d’une grande robe, aujourd’hui pourpre et dorée cependant. Les étudiants s’étaient immédiatement arrêtés et s’inclinaient légèrement, ce que la yordle s’empressa de faire à son tour.

 - Bonjour jeune Bell, sourit le directeur, ravi de te revoir.

         Le vieil homme se retourna vers le groupe d’étudiants, tous devenus blême - quant à vous, jeunes gens votre comportement me désole. Tous de première année je devine, je vous prierais de respecter vos ainés, dit-il en montrant Bell de la main. Je connais vos clans et maisons, je ferais remonter votre comportement, déguerpissez maintenant.

         Les piltoviens qui jusqu’alors faisaient preuve de leur caractère plutôt fort, s’en retournèrent sans oser dire mot au directeur. Ils craignent les répercussions des clans, devina la jeune fille, ils perdront gros si ces derniers les rejettent.

 - Serais-tu perdue jeune Bell, demanda gentiment Horace en souriant.

 - Je… merci.

 - Mais de rien ! Laisse-moi deviner, cours de magie, je vais t’y mener.

 - Vous lisez dans les pensées ? demanda la yordle suspicieuse.

 - Pas du tout, s’amusa-t-il, Nâmis m’a parlé de tes capacités, j’ai aussi fait la connaissance de ton amie aquamancienne.

         Le directeur accompagna la jeune fille au travers du dédale qu’était l’académie, et ne manqua pas de lui faire une petite visite en passant, de sorte qu’elle puisse elle-même trouver son chemin dans le complexe enchevêtrement de la cité universitaire.

 - Puis-je vous poser une question… ? demanda timidement Bell.

 - Mais je t’en prie.

 - Pourquoi les gens n’aiment-ils pas les yordles ?

 - Ce n’est pas tant qu’ils n’aiment pas les tiens jeune fille, expliqua le doyen, mais qu’une grande partie n’en connaisse que des racontars. Les tiens sont rares, plus à Zaun qu’ici, et le peu qu’ils en connaissent sont soit des individus qu’ils méprisent, soit des talents qu’ils jalousent.

 - Vous sauriez quand le professeur Heimerdinger sera de retour ?

 - Malheureusement non je n’en ai pas la moindre idée, mais tu as tout le temps ne t’inquiètes pas, après tout Heimer doit avoir déjà plus de trois siècles.

 - Ils sont vieux…

 - Et pourtant paraissent si jeune ! dit le doyen, admiratif. Et toi jeune Bell, ignorerais-tu ton âge ?

 - C’est exact…

 - Si cela peut t’aider, indiqua-t-il, j’échange régulièrement avec Nâmis depuis que nous sommes jeunes, nous sommes des amis de longue date, et j’ai même rencontré ton grand père une fois.

 - Comment ? réagit la yordle. Comment est-ce arrivé ?

 - Ça c’est une autre histoire jeune fille ! Reste que les premières traces de toi dans les lettres de Nâmis datent d’il y a au moins deux décennies, cela devait faire quelques temps que tu devais avoir été recueillie. J’ai d’ailleurs été très étonné d’apprendre que tu sois une yordle.

 - Je me doute…

 - Tu as du comprendre rapidement ta condition d’orpheline j’imagine ?

 - C’est-à-dire ?

 - Ton grand père est humain, tu as bien dû te douter qu’il n’était pas ton grand père biologique. T’a-t-il parlé de tes parents ?

 - Il ne voulait pas… C’est Nâmis qui m’en a parlé le plus. Sauriez-vous pourquoi ?

 - Malheureusement je n’en sais pas plus que toi aujourd’hui jeune Bell, mais je suis sûr que tu trouveras tes réponses.

         Au travers du dédale de couloirs dans des bâtiments parfois bien cachés, le doyen mena son invitée jusqu’à une série de salles dans lesquelles un auditoire écoutait attentivement un ou plusieurs professeurs.

 - Voici un des cours de magie, Dame Arda est ici professeure, elle est très qualifiée !

 - Je vous remercie, répondit la yordle en inclinant la tête, merci pour tout.

 - Je t’en prie jeune Bell, dit-il en s’inclinant à son tour, passe une agréable journée.

         Le doyen s’éloigna calmement dans le couloir, le bruit de ses chaussures résonnant doucement contre les murs, à peine perceptibles entre deux phrases de la professeure qui donnait ses explications dans la salle à côté.

 

***

 

         Bell pénétra dans la grande salle, adressant timidement un salut à la professeure qui l’accueillit avec un grand sourire, l’invitant à prendre place parmi les autres étudiants. Elle s’exécuta sans oser regarder les autres élèves, elle savait que ceux-ci devaient être en train de la dévisager, la plupart n’eurent probablement rencontré guère plus d’un ou deux yordles avant cela.

         Elle s’assit à une table tandis que la professeure reprenait le cours de ses explications d’une forte voix. Bell écoutait attentivement, et après avoir jeté un rapide coup d’œil aux gens autour d’elle, se trouva rapidement un peu bête de ne pas avoir emporté de quoi noter ce qui pouvait l’intéresser. Une jeune fille à sa droite sembla remarquer sa détresse, et lui tendit une sorte de stylo et un petit calepin en souriant.

 - Tiens la nouvelle, souffla-t-elle, t’as pas l’air d’avoir d’affaires, prends ça pour suivre.

         Bell la remercia, soulagée d’être maintenant équipée, et se concentra sur la compréhension des cours de la professeure. Comme elle s’en doutait, elle n’était pas arrivée dans un cours de débutant, et encore moins tombée sur une séance revoyant les bases. Elle tenta malgré tout de suivre au maximum.

         Durant les quelques heures qui suivirent, la yordle parvint à comprendre quelques explications sur la manière dont fonctionnent les flux magiques, comment les individus s’en servent pour tisser leurs sorts, pour modifier leur environnement, voir eux-mêmes. Elle nota que la pratique de la magie apparaissait chez certains comme une capacité à comprendre et manipuler des flux extérieurs, tandis que d’autres pouvaient en émettre naturellement, pour parvenir à leurs fins. Dans tous les cas, et bien que très différentes, les méthodes requéraient une maîtrise et un apprentissage certain.

         Tout en écoutant attentivement, enregistrant les précieuses informations qu’elle entendait, la jeune fille griffonnait sur le papier tout ce qui serait susceptible de l’aider à mieux maîtriser son « saut ». Dompter cette capacité lui serait extrêmement pratique, et son grand-père serait fier d’elle s’il apprenait qu’elle maîtrisait la magie. Elle nota précieusement quelques informations sur le ressenti des flux, et comment les percevoir, restait maintenant à attendre les explications sur la manière de les exploiter.

         Plusieurs fois la professeure proposa à ses étudiants de mettre directement à l’épreuve la théorie, et la majorité d’entre eux, dont les pouvoirs pouvaient être déployés en intérieur, en firent l’étalage. Certains faisaient léviter des objets, changeaient des couleurs, transformaient des choses, ou traçaient des formes avec de l’eau, voir plus impressionnant, des flammes. Le plus intéressant pour Bell fut un jeune garçon qui assembla un tas de pièces en une petite machine, les faisant léviter et s’imbriquer. Elle cependant, se voyait mal se lever et courir vite pour tenter de se téléporter comme elle l’avait déjà fait plusieurs fois sans contrôle, et préféra rester assise à observer.

         Le cours toucha à sa fin, la plupart des élèves se levèrent et se dirigèrent vers la sortie. Bell rendit son stylo à la jeune fille qui lui laissa le calepin en souriant. Alors que la salle se vidait, elle finit elle aussi par prendre la direction de la porte, mais fut interrompue par la professeure qui l’invita à lui parler.

 - Bonjour jeune fille ! lui dit-elle en souriant. Tu dois être l’élève de passage dont monsieur Hekins m’a parlé. Je ne m’attendais pas à voir une yordle. Bell c’est ça ?

 - Exact Dame Arda. Et, oui j’ai un peu l’habitude, répondit la jeune fille gênée, je suis ici pour tenter d’apprendre des choses qui pourraient m’être utiles.

 - Oh je me doute, désolée si le cours est à un niveau un peu élevé, nous avons un programme à tenir.

 - Dans la globalité j’ai pu suivre, et j’espère pouvoir continuer à apprendre si cela ne vous dérange pas.

 - Je ne vois aucun inconvénient à ce que tu passes quelques jours parmi nous, tu n’as pas l’air d’être un élément perturbateur, malgré les quelques regards curieux les autres se feront vite à ta présence.

         La professeure rangeait quelques affaires distraitement en parlant à la jeune fille, empaquetant ses affaires dans une sacoche et fermant les tiroirs de son bureau.

 - Contrairement aux autres, tu n’as pas participé aux exercices pratiques, lâcha la dame en regardant la jeune fille dans les yeux. Pouvoir impossible à déployer en intérieur j’imagine ? J’ai en mémoire le fait que les yordles sont parmi les espèces ayant une bonne affinité avec la magie.

 - Un peu des deux… admit Bell en rougissant, mais je n’ai jamais eu l’occasion d’avoir quelqu’un pour m’aider, j’espérais pouvoir requérir la vôtre.

         Les yeux de la professeure se mirent à briller, un sourire lui barrant le visage. Elle marmonna à toute vitesse un charabia incompréhensible, perdue dans ses pensées.

 - Laisse-moi deviner… Explosions ? Non trop violent… Manipulation soniques ! Trop rare… Contrôle mental ! Ta tête m’indique que non.

         Dame Arda était passé d’une professeure tranquille et sérieuse à une femme agitée, qui gigotait ses mains dans tous les sens, tandis qu’elle ouvrait un tiroir en trombe dont elle fit surgir un carnet qu’elle feuilleta à toute vitesse, devant le regard dubitatif de la yordle.

 - Quelque chose de plus spécifique peut-être, du genre manipulation de sable ou de brume… Ou plus générique ? Je sais, tu peux voler ! Oh je touche au but n’est-ce pas ? Du déplacement, j’en ai déjà vu quelques écrits, tu peux créer des portails ?

 - En réalité… admit Bell, je suis capable de disparaitre, et de réapparaitre quelque part, dans une sorte de flash coloré.

 - Je vois, et à quoi ça ressemble ? Demanda dame Arda, pressée d’en savoir plus.

 - De l’extérieur seule une amie l’a vu une fois, c’est comme si en une fraction de seconde je disparaissais dans une gerbe d’étincelles, en émettant une lumière violacée. Un instant après je suis à un autre endroit.

 - Quel genre d’endroit ? Tu as déjà essayé d’aller dans de l’eau, ou d’en sortir ?

 - A vrai dire, répondit la yordle gênée, je n’ai aucun contrôle, je « saute » par instinct.

 - Je vois… Des capacités en rapport avec le mouvement, le transport, c’est assez peu commun, mais plutôt bien documenté, et leur maîtrise à un niveau décent ne requiert pas une vie entière d’apprentissage. Tu devrais jeter un œil à la bibliothèque, et n’hésite pas à revenir pour en apprendre plus ! Je serais ravie de t’aider, et surtout de te voir à l’œuvre !

 - Les quelques heures de votre cours m’ont déjà donné quelques pistes, dit gentiment Bell, je vous remercie.

         La professeure congédia sa nouvelle élève, visiblement ravie d’avoir une étudiante aussi intrigante. Bell pouvait lire dans ses yeux l’avidité de la curiosité rayonner. La jeune fille profita de la fin du cours pour récupérer un petit encas dans une cantine de l’académie. Elle prit le temps de visiter les enceintes de l’île, afin de graver dans sa mémoire une carte mentale qui lui permettrait de se repérer aisément.

         Elle étendit son exploration jusqu’aux quartiers portuaires, par-delà la passerelle du retour. Elle s’extasiait toujours devant l’effervescence et la beauté des quartiers prestigieux de Piltover, et se délecta de l’air marin. Bien décidée à rentrer se reposer, elle reprit en début de soirée le chemin du manoir, pour retrouver, comme à son habitude, son camarade rat des quais sur le toit du manoir, avant de se plonger dans sans lit.

 

** **

 

         Au fur et à mesure que Bell passait du temps à suivre les cours de Dame Arda, elle approfondissait ses connaissances théoriques sur les pratiques et capacités magiques que pouvaient avoir certains êtres, et souhaitait en savoir le maximum possible, afin de peut-être un jour maîtriser son pouvoir. Elle était probablement loin d’avoir le potentiel de son amie Cynthia, qui jouissait déjà d’une petite renommée parmi certains professeurs et élèves les plus sérieux de son cours. Il faut dire que la jeune femme avait fait erreur de parler à Dame Arda de leur affrontement avec l’Hyyathan en mer, et de la manière dont elle avait protégé le navire en manipulant l’eau. La professeure, curieuse, n’avait pu s’empêcher de poser tout un tas de question, et d’en parler à ses collègues et élèves.

         Bell quant à elle furetait curieusement, en parcourant les étagères de la bibliothèque, choisissant les ouvrages susceptibles de l’aider dans ses recherches. Elle avait dégoté une encyclopédie très intéressante sur les cultes et clans Targoniens, et se réjouissant de pouvoir en savoir un peu plus sur leur objectif de voyage.

         Comme à leurs habitudes, ses camarades Cynthia et Jay étaient bien trop occupés de leur côté pour avoir le temps de passer une journée avec la yordle, qui se retrouvait régulièrement seule, mettant à profit sa tranquillité pour lire et dessiner. Elle voyait aussi régulièrement Vira, et sa jeune sœur Ileae, discutaient de la ville, des clans et de la vie à Piltover, ou Zaun. Lorsqu’elle se promenait dans les rues, Clapper se joignait souvent à elle, ne la laissant jamais se sentir trop seule, l’animal écoutait tranquillement ce que Bell lui racontait en mâchouillant la viande séchée qui lui était offerte.

         Malgré le rythme effréné de la cité, qui avait pris ses camarades, la laissant de côté, elle croisa régulièrement les membres de l’équipage durant les jours qui passaient, avec qui elle échangeait volontiers, avant de retourner étudier. Elle nourrissait l’espoir de trouver la moindre information sur ces parents, ou sur le moindre élément qui la rapprocherait d’eux.

 

** **

 

         Au sein de l’université, Bell avait pu croiser énormément de gens, tous très différents. Malgré le fait qu’une grande partie d’entre eux furent de simples humains, elle croisa quelques créatures, parfois humanoïdes, parfois extrêmement étranges. Cela rassura la yordle, ravie que d’autres non-humains soient présents dans le paysage urbain de Piltover. Elle rencontrait aussi pas mal de personnes originaires de nations étrangères, elle reconnut quelques ioniens par leurs vêtements traditionnels, des freljordiens et shurimiens à leur dialecte, et même quelques zauniens, identifiables aux modifications corporelles qu’ils arboraient, dont le style et la conception étaient la signature des artisans de la ville basse.

         La jeune fille commençait à prendre l’habitude de la vie au sein de Piltover, se faisant à son rythme si particulier. Désormais, certaines personnes qu’elle croisait dans le manoir, et parfois même dans l’académie, la saluaient, elle qui était devenue une habituée, surtout de la bibliothèque. Elle discutait parfois avec le doyen, mais aussi avec des professeurs, et d’autres élèves qu’elle côtoyait, elle croisa même la route de dame Anxia, la diplomate de Noxus, qui lui adressa un grand signe accompagné d’un sourire lorsqu’elle reconnut la yordle. La jeune fille, en pleine recherche de livres sur les magies de transport, aperçut un grand homme en blouse qui entrait dans la bibliothèque, les bras pleins d’ouvrages en tous genres. Drôle de personnage, il semble tout le temps pressé, se dit-elle pensivement, c’est un habitué je parie. Il déposa les livres uns pas uns, avant de se décider à approcher de la jeune fille lorsqu’il remarqua que cette dernière le regardait.

 - Bonjour jeune fille ! lança-t-il. Tu dois être Bell n’est-ce pas ?

 - C’est exact, répondit-elle méfiante.

 - La yordle récemment arrivée de la ville de Bilgewater, dit-il en passant sa main distraitement dans sa chevelure. Tes recherches avancent ?

 - Exact, elles avancent. Vous êtes bien renseigné.

         La yordle s’assit à une table en posant l’ouvrage qu’elle avait dans les mains, sans quitter l’homme des yeux. Assez grand, maigre, vêtu d’une blouse blanche, il regardait la yordle de ses yeux gris acier, qui accompagnaient à merveille sa tignasse grise en bataille. Il s’assit en face d’elle avant de reprendre la conversation nonchalamment.

 - J’aime être renseigné sur mes collaborateurs, expliqua-t-il. Mais où sont passé mes bonnes manières ? Je suis le professeur Krenn.

 - Il ne me semble pas avoir entendu votre nom, demanda Bell. Quelle est votre discipline ?

 - A vrai dire je ne suis pas enseignant ici, répondit l’homme en souriant, je donne parfois quelques conférences mais rien de plus. Je suis le scientifique qui gère la clinique qui traite la Ruine, dont Horace a dû te parler. Appelle moi professeur, ou docteur, peu m’importe.

 - Oh c’est donc vous ! dit Bell avec étonnement. Ravie de faire votre connaissance.

 - Moi de même jeune fille. Je suis très heureux de croiser une yordle, tu es née à Bilgewater c’est bien ça ?

 - Pas vraiment, j’y ai grandi cependant.

 - Oh je vois, répondit le professeur Krenn pensif. Y avait-il d’autres yordles avec toi là-bas ? Ta famille j’imagine.

 - Pas du tout, répondit-elle. Ils m’ont laissé à un marin, qui en savait très peu sur eux, mais en qui ils avaient sensiblement confiance.

 - Je vois ça ne fait rien.

         L’homme semblait pensif, et passait sa main dans sa courte barbe, après avoir remis ses lunettes, distraitement. Il jeta un œil aux ouvrages que la yordle avait laissée sur la table, haussant un sourcil en lisant les titres.

 - Cours de 3e cycle sur « Les flux magiques élémentaires », et « Us & Coutumes des tribus Solaris, Histoire d’un voyage en la terre de Targon », lectures intéressantes, on se prépare pour le prochain voyage ?

 - En effet. Moi aussi j’aime me renseigner.

 - Je ne comprends pas, soupira-t-il bruyamment. Les taux d’infection sont démesurés à Piltover et Zaun, et au lieu de se concentrer sur le problème, les diplomates acceptent de financer des expéditions chez des peuplades arriérées.

 - Vous doutez que l’on trouve de quoi vous aider ? demanda Bell curieuse du discours du professeur.

 - Bien sûr ! rétorqua-t-il. Nous sommes à Piltover, et Zaun est en dessous de nos pieds, s’il nous faut inventer un remède, nous sommes les plus à même de réussir. De pauvres innocents souffrent, se plaignit Krenn, et j’ai besoin du soutien des clans, des autres scientifiques comme des étrangers. Cependant la recherche est toujours moins intéressante que de bonnes vieilles expéditions qui rapportent argent, marchés, et renommée.

 - Malgré vos doutes, je suis sûre que l’on trouvera les réponses vous verrez.

 - Les mercenaires de Bilgewater ne sont pas des scientifiques, soupira le professeur, vous ne savez même pas quoi chercher.

 - Je préfère ça à rester passive, rétorqua Bell, je n’aime pas l’idée d’abandonner alors que la solution se trouve peut être là où nous allons.

 - Tirons le positif de la situation, lâcha Krenn en se levant, tout cela t’aura permis de sortir de ton archipel, et à moi de faire ta connaissance. Je vais maintenant te laisser, j’ai du travail à la clinique, passe me voir si l’occasion se présente.

 - J’y penserais. Au revoir professeur !

 - Au revoir et à bientôt jeune Bell.

 

***


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