Vaer aen birke - the Witcher
Année 1275, Mahakam, Mont Carbone
La montagne offre un spectacle des plus saisissants au plus fort du printemps. Les prairies, couvertes de fleurs sauvages, s'étendent à perte de vue alors que les lacs de montagnes étincèlent sous le soleil. Les forêts baignent dans une lumière dorée. Ici et là, surgissent des troupeaux de chamois, bouquetins et cervidés. Depuis sa fenêtre au flanc de la montagne, Calened admire le panorama, des vallées qui s'étendent aussi loin que l’œil peut voir. Si beaux, si sauvages, pense l'elfe, appuyé sur le rebord de sa fenêtre. Le monde a l'air si tranquille vu d'ici. Une faible brise balaye le flanc de la montagne à travers les champs de bruyères où gloussent des lagopèdes invisibles. Calened se considère chanceux, les appartements avec une fenêtre vers l'extérieur sont peu nombreux, les nains préférant vivre dans les profondeurs. Ceux-ci sont généralement réservés aux ambassadeurs d'autres espèces et Calened n'en est pas un. Toutefois, en tant que membre de la délégation elfique pour la réunion de Hen Uniade, on lui a aménagé une suite. On lui a même apporté du rosé de Mettinna au lieu de l'habituel bière de Mahakam. Brouver s'est mis en quatre pour assurer le confort des délégations ce qui est inhabituel pour lui. Calened y voit le signe que l'Ancien-en-Chef espère beaucoup de cette alliance des Races Anciennes. De légers coups résonnent contre le bois de la porte.
– Entrez, dit il en se redressant.
La porte s'ouvre et laisse passer un jeune nain en livrée.
– Aen Saevherne, dit il, d'une voix mal assurée, la réunion est sur le point de commencer.
– Ah très bien, guidez moi, je vous prie fait l'elfe. Parce que si j'y vais moi-même, je vais me perdre et je ne reverrai jamais le soleil.
Le nain le conduit à travers les couloirs de pierre jusqu'à déboucher sur la caverne de la cité ou du moins une partie. Ils slaloment entre les maisons sortant du sol, voir même du plafond, avant d'arriver au palais des Anciens, au cœur de la cité. Broover a décidé que la prochaine session se passerait ouvertement au palais, au vu et au su de tous afin que Hen Uniade prenne enfin un air officiel. Personne n'y avait trouvé à redire et ainsi toute la cité était au courant. Arrivé au palais, Calened trotte derrière le jeune nain, esquivant des nains peu attentifs à ce qui se passe autour d'eux. Alors qu'il esquive deux femmes naines à la barbe élégamment lissée, un autre nain à la barbe blanche arrive au pas de charge et Calened ne réagit pas assez vite. Ils se rentrent dedans, l'elfe presque propulsé dans les airs par le nain costaud.
– Par mes ancêtres, fait ce dernier, furibond, vous ne pouvez pas faire attention ?
– Pardonnez moi, dit Calened en se massant les jambes. Je ne vous avais pas vu.
– Je ne suis pourtant pas invisible, grommelle l'ancien, il réajuste de petites lunettes sur un nez épais et toise sévèrement le Sage. Un elfe ?! Qu'est ce que vous faites ici ? Minute, vous êtes arrivé avec cette délégation des elfes sauvages des Monts Bleus ?
– C'est la délégation de Dol Blathanna, en fait, rectifie Calened. Mais oui, je suis bien arrivé avec eux.
– Un malotru et un fauteur de trouble. Le nain visiblement irrité, crache puissamment aux pieds de Calened. Vous trouvez pas que votre race en a déjà assez fait ? Manipulez nos leaders pour mener une guerre pour vous et envoyer nos jeunes en pays étrangers. J'ai entendu parler de vous et du "nouvel âge" que vous voulez nous imposer. On ne vous avait rien demandé et voilà que nous sommes en guerre contre les humains. Vous avez apporté des temps troublés sur Mahakam, nous n'avions pas besoin de cette guerre !
Calened a déjà entendu d'autres anciens grommeler à propos des troubles amenés par Hen Uniade. Tous les nains ne sont pas favorables à cette alliance, à cette guerre et surtout aux changements que cela provoque. Ce sont des créatures d'habitudes qui aiment peu la nouveauté ou le risque.
– Ce n'est pas aussi simple que cela, fait il, ennuyé. Nous préparons un meilleur futur pour toutes les Races Anciennes. Nous ne pouvions laisser les choses comme elles étaient, mon peuple est en train de dépérir.
– Et il a fallu que vous nous entrainiez dans votre chute, Mon peuple ne s'en sortait pas si mal avant votre intgérance. Maintenant, nous allons devoir faire face à la colère des humains, vous avez apporté la mort sur notre seuil. Ôtez vous de mon passage et quittez ces montagnes au plus vite, vaurien.
Le nain pousse Calened hors de sa route d'un bras musclé et reprend son chemin après un dernier regard assassin. Calened laisse échapper un soupir, il savait que Hen Uniade aurait des réfractaires et que seule l'approbation de Broover était réellement importante. Néanmoins, une part de lui aurait voulu convaincre le nain de la justesse de sa cause. La mort, je n'espère pas. O Dieux, faites que ce ne soit pas pour rien.
– Aen Saevherne ? Appelle le jeune nain qui lui sert de guide.
– J'arrive, j'ai eu un... contretemps.
Ils arrivent à une vaste porte en pierre. Le jeune page salue le Sage et s'éloigne. Calened reste un moment devant la porte, mal à l'aise. C'est le moment, oh, comme je souhaiterais que mes visions m'en aient montré davantage, je n'aime pas m'aventurer ainsi dans l'inconnu, pense le Sage. Finalement, il saisit la poignée d'une des portes et pousse de tout son poids. La porte pivote lentement sur ses gonds et révèle une vaste salle. Une grande cheminée crépite dans un coin, la chaleur se diffuse dans l'air sec. Au centre se situe une large table de forme rectangulaire. Eithné, la reine des Dryades, Enid an Gleanna, la reine de Dol Blathanna, et Keral Vaäkssil, le Voïvode des Vrans sont à droite. Neoth Korm, le chef des anciens des Marmottins, Sh'eenaz, la maitresse des Sirènes et duchesse de Bremervood, Egdhimold Vrostchmil, la déléguée des Gnomes, ainsi que Dermin Biberveldt, représentant des Halfelins sont à la gauche. Brouver est à l'un des bouts de la table. Calened se dépêche de s'installer du côté opposé au chef des Nains.
– Enfin, fait ce dernier. Nous n'attendions plus que vous, Sage. La deuxième session d'Hen Uniade peut désormais commencer.
– Pour débuter, je pense que des félicitations sont à l'ordre du jour, dit Calened. Nous avons accompli tous nos objectifs, les terres entre les fleuves Pontar et Iaruga sont à nous avec un minimum de sang versé. Les humains qui se sont rendus ont bien été conduits en Rédania...
– À ce propos, j'aimerais qu'on mette les choses au clair avec nos amies sylvestres, interrompt Brouver Hoog. J'ai reçu des rapports comme quoi les nymphes ont attaqué et massacré des villages qui se sont rendues pacifiquement. J'aimerais beaucoup savoir ce que notre chère reine des forêts a à dire sur le sujet ?
Eithné se tend légèrement plus droite, ses yeux d'argent tels deux froids miroirs.
– Brokilone a repris ses terres et a lavé dans le sang les blessures inffligées pendant près de deux cent hivers. Fait la reine dryade, la tête haute.
– Ce n'est pas ce que ce conseil a convenu, dit Brouver Hoog, nous nous étions mis d'accord pour éviter les bains de sang inutiles. Les humains vont en entendre parler et ne pardonneront pas ces massacres inutiles.
– Beaucoup de mes nymphes ont une haine ancienne envers les humains, comme une vieille racine enfouie sous terre et nous suivons toutes la loi de Brokilone...
– Eh bien, faite en sorte qu'elles suivent aussi les lois de ce conseil, rugit l'Ancien-en-Chef en tapant violemment la table de son poing. Je ne m'associerai pas à ce genre de carnages. Ou bien vous suivez les consignes ou bien vous et vos nymphes vous débrouillerez seules à l'avenir. N'oubliez pas que la sécurité de votre forêt dépend de notre soutien.
Plusieurs membres du conseil murmurent leur assentiments. Enid regarde silencieusement sa coupe de ses yeux de verre tandis que son voisin Vran fixe l'échange, impavide. Egdhimold manifeste bruyamment son approbation. Le corps d'Eithné se tend encore plus, ses yeux brillants de colère.
– Soit, dit elle, lentement. Je ferai en sorte qu'elles suivent les directives de Hen Uniade à l'avenir.
– Pour votre bien, je l'espère vraiment, conclut Broover Hoog.
– Vos majestés, vos excellences, si nous en avons fini... Appelle Calened. Nous devons discuter de la seconde phase de notre plan.
– Oui, fait Enid, en détournant les yeux dans sa direction. Il s'agissait de rapatrier ceux d'entre nous qui vivent parmi les humains, n'est ce pas ?
– Et ceux qui vivent dans des réserves plus au Nord, confirme Calened. Après notre coup, il n'y aura plus de sécurité pour les non-humains dans les royaumes du nord. Ils devront déménager ici, sur nos nouvelles terres ou périr. L'aide de la Scoia'tael continue Calened en faisant un geste vers Isengrim, sera essentielle. Ils peuvent se déplacer rapidement et conduire notre peuple en sécurité grâce à leurs chemins cachés.
– Nous allons devoir prévoir de nombreux logements, remarque Dermin en faisant tourner distraitement l'une de ses nombreuses bagues. Je suppose que nous les répartirons par espèces ?
– Pour commencer, l'objectif d'Hen Uniade est d'assurer une population stable pour chacun de ses membres.
– Convaincre les Assimilés risque d'être difficile prévient Filavandrel, surtout si nous utilisons la Scoia'tael. Beaucoup les assimilent à des bouchers et ne veulent rien à voir à faire avec eux.
– Une réputation amplement méritée, grommelle Brouver Hoog en buvant un coup de sa chope de bière.
– C'est vrai, reconnait Calened, mais ils n'auront pas le choix. Déjà dans les grandes villes, on commence la chasse aux non-humains. Les buchers de Novigrad brûlent toujours, ils ont simplement remplacé les sorcières par les Anciennes Races. Nous ne devrions pas avoir trop de mal à les convaincre.
– Ceux des réserves risquent d'être réticents eux aussi, fait Dermin. Ils ont peu de contacts avec les humains et vivent en relative tranquillité depuis près de 200 ans.
– Alors il nous faudra être convaincants, rétorque Calened. Les réserves ne protégeront plus notre peuple, il faut absolument qu'ils partent et ce le plus vite possible
– Et après ? S'enquiert Enid, nous ne pouvons pas nous arrêter à simplement regrouper les nôtres. Radovid ne nous pardonnera pas notre rébellion. Il avait déjà fort peu de sympathie pour les Races Anciennes, je doute fort que les traités le retiennent désormais. Il va venir avec toute la force de son armée. Surtout que, contre tout espoir, il a réussi à pénétrer en Kovir et Poviss. Malgré l'aide des mages, ils ne lui résisteront plus longtemps, il reviendra à la tête d'une armée triomphante.
– En effet, nous allons devoir nous préparer. Nous aurons surtout besoin de votre aide, dit Calened en jetant un coup d'oeil vers Brouver Hoog et la déléguée des Gnomes. Nous allons avoir besoin d'établir de solides forteresses sur la frontière entre Redania et Temeria ainsi que sur la Passe d'Aedirn.
– Comme toujours, on en revient aux nains, grogne l'Ancien-en-Chef. Nous nous y attèlerons immédiatement à une condition: Que les renégats nains, ceux qui ont abandonné leurs valeurs ancestrales pour s'établir chez les humains, ne s'établissent pas à Mahakam.
– Il s'agit de votre peuple... Commence Calened.
– Non, plus de mon peuple, martèle Brouver Hoog. Ils se sont sauvés dans les royaumes humains pour échapper aux justes lois de Mahakam. Fort bien mais ils sont maintenant des exilés. Le lien entre eux et nous est rompu, définitivement. Trouvez leur un autre refuge, Mahakam n'en offre aucun à ceux qui l'ont abandonné.
– Il y a dans les montagnes d'Aedirn d'anciennes colonies naines, dit Enid, d'une voix égale. Certaines sont mêmes encore habitées. Nous pourrions déménager les exilés là.
– Excellente idée, approuve Brouver Hoog.
– Soit, nous pouvons donc commencer avec la seconde phase de notre plan, rapatrier et loger ceux qui vivent parmi les humains ainsi que préparer nos défenses sur la frontière. D'autres préoccupations ?
– Oui, se redresse l'Ancien-en-Chef, j'aimerais que nous discutions des échanges commerciaux qui doivent prendre place pour le développement de notre communauté. Puisque nous fournissons la plupart des ressources en pierre et en fer, je trouve que ce n'est que justice que l'on obtienne une diminution du prix du bois...
Sa proposition est aussitôt accueillie par un concert de protestations. Calened s'installe confortablement dans son fauteuil. Les discussions qui vont suivre ne le concernent nullement. Si on réussit à survivre aux prochaines années, il faudra que je me trouve une occupation. Pense t'il. Peut-être me faire engager en tant que conseiller ou me remettre à mes anciens travaux. Le Sage dérive dans ses pensées tandis que les discussions autour de lui atteignent de nouveaux volumes sonores.
Année 1275, Kovir et Poviss, camp redanien.
De fortes rafales de vent balaient le camp de l'aigle d'argent. Les tentes se ploient et se tordent sous ce souffle puissant. La pluie tombe fort, de grosses gouttes qui s'écrasent avec force sur les hommes et les bêtes. Des éclairs déchirent le ciel de leur lueur blanche. Non loin au Nord-Ouest se trouve la cité capitale de Kovir illuminé par les flammes d'incendies et d'étranges lumières. De grands trébuchets bombardent la ville avec d'énormes pierres et de projectiles enflammés. Sur ce qui reste des murs se découpent les silhouettes de soldats qui s'affrontent, simples ombres dans la distance. Les armées de Radovid continuent de se déverser dans la ville en dépit de la forte résistance. La ville est bien protéger avec de nombreuses compagnies mercenaires qui s'échinent à repousser l'envahisseur. Au début, un puissant et lumineux dôme d'énergies magiques avait protégé la ville des bombardements. La réponse de Radovid avait été simple et brutale : il avait chargé le plus gros bloc de diméritium pillé dans les mines de Kovir et catapulté sur la ville. Le résultat fut sans appel et le dôme fut dissipé à l'impact. Après quoi l'invasion put commencer.
Le diméritium est un métal rare que l'on trouve surtout dans le nord et qui a la particularité de dissiper la magie. À cause de sa rareté, seuls les généraux et le roi portent des amulettes en diméritium afin de se protéger des sorts lancés par les mages réfugiés à Kovir. Des armes ont également été façonnées avec un alliage de fer et de diméritium et fournies aux services secrets du roi. Ces agents spéciaux ont discrètement infiltré la ville et ont procédé à l'élimination de nombreux sorciers et sorcières, rendant l'invasion plus facile.
Un éclair s'abat brusquement sur une partie du camp dans un flash aveuglant. Les tentes au centre du phénomène sont proprement désintégrées tandis que leurs voisines prennent feu. Depuis le début de l'invasion, les mages ont convoqué cette tempête magique et tentent sans cesse d'éliminer les officiers et le roi. Pour cette raison, Radovid a insisté pour que lui et ses généraux dorment dans les mêmes tentes que les soldats. Le diméritium rendait également son possesseur indétectable par des moyens magiques ce qui a rendu vains les efforts des mages pour localiser le roi et ses officiers.
Près de la porte arrachée de la ville, deux monstrueux golems s'abattent sur les soldats, attaquant l'entrée. Les humains font front vaillamment mais leurs armes de métal rebondissent sur le derme de pierre de ces géants sans causer grand mal. Près du camp, des hommes préparent hâtivement des balistes, de gros engins de sièges armés d'immenses flèches de bois, à la tête renforcée de métal. Après avoir chargé les engins de siège, l'équipage se met à viser et tire. La première salve rate de plusieurs mètres, s'écrasant contre la muraille. La deuxième est mieux ciblée et s'abat à proximité des golems qui ne cessent de fendre les rangs des guerriers de leurs poings de pierre. La troisième fait mouche et l'un des golems s'effondre, le crâne et le torse transpercés par d'immenses carreaux. Le deuxième continue ses ravages jusqu'à ce qu'un homme intrépide l'escalade par l'arrière et lui enfonce dans l’œil une espèce de dague en diméritium. La brute cesse aussitôt de s'agiter et s'effondre, ses morceaux se détachant du corps.
Les soldats reprennent leur marche à travers la capitale. Dans le ciel, des fumerolles violettes et argentées apparaissent, tournoient un moment avant de se disperser en dizaines de petites créatures ailées. Les bêtes au profil de chauve-souris fondent sur les soldats, tentant de leur lacérer le visage de leurs serres. Les fantassins se protègent du mieux qu'ils peuvent tandis que les arbalétriers font feu vers les monstres. Certains, touchés par les carreaux, se dissipent dans une brume violacée mais des dizaines de leurs congénères continuent de harceler les soldats. Les fantassins continuent à entre dans la cité d’où résonne le rugissement des flammes et, parfois, celui d'une immense bête.
Près de l'entrée ouest du camp, sur une petite butte, Radovid observe le carnage, le visage ferme et froid. Son armée a dû faire face à de nombreux défis durant leur marche vers les capitales de Kovir et Poviss. Des monstres, invoqués par les mages, leur ont barré la route, la météo était devenu follement capricieuse et instable depuis leur entrée dans le royaume et des sortilèges de diverses sortes se sont abattus sur ses hommes, transformant certains en animaux, foudroyant d'autres ou les retournant contre leurs camarades. Radovid avait paré à ces problèmes avec l'aide de deux techniques: la première, un tour vieux comme l'humanité, l'avantage numérique et la deuxième en façonnant le diméritium pillé en armes et amulettes. Les pertes restaient importantes mais tolérable si cela permettait l'éradication de la magie perverse et surtout de la Loge des Magiciennes. Bientôt, il n'en restera plus une pour comploter et je pourrai enfin dormir en paix. Pense le roi. Il faudra s'occuper des mutants, des sorceleurs et des non-humains une fois de retour au pays.
Un nuage étincelant se forme au dessus de lui et ses officiers avant de se transformer en une conflagration de flammes vertes. Certains hommes se jettent à terre, les mains levées vers le ciel. Le sortilège s'abat sur le roi et son entourage, carbonisant l'herbe et la terre. De nombreux soldats regardent, épouvantés, la butte se changer en cratère noirci. Du fond du trou, Radovid se remet sur pieds, suivi par ses généraux, indemnes. Il émerge du trou sous le regard éberlué des témoins, sans une égratignure, pas un cheveu brulé. Tout autour, les soldats murmurent des prières aux dieux et regardent leur roi avec une toute nouvelle vénération.
– Il semble que nous soyons découverts, dit Radovid d'un ton égal. Il va falloir nous déplacer avant que les magiciens concentrent leurs pouvoirs sur cette zone, nos amulettes ont des limites.
Sans attendre, il se met en marche, suivit de près par ses officiers.
– Debolt, appelle t'il, quels sont les derniers rapports ?
– Nos troupes avancent, lentement mais sûrement. Répond un homme chauve, aux pommettes hautes et en armure. Leurs mercenaires opposent une farouche résistance mais leur nombre et entrainement sont bien inférieurs à celles des troupes disciplinées de votre majesté. La résistance se tient surtout autour du palais royal où le roi Tancred Thyssen s'est réfugié avec de nombreux mages. Nos agents n'ont toujours trouvé aucun signe d'activité de Philippa Eilhart ou aucun autre membre de la Loge des Magiciennes.
–Maudites sorcières, siffle Radovid, où se cachent elles ? Je les trouverai, même si je dois les poursuivre jusque dans les confins inconnus de la terre !
Entretemps, il continue de marcher, plus loin du champ de bataille, passant devant les balistes. Un objet compact surgit en sifflant et s'écrase contre la palissade du camp rédanien. Apparemment, l'ennemi a encore quelques engins de siège en état de marche. Derrière eux, un pilier de lumière orange apparait sur le terrain qu'ils viennent juste de quitter, nivelant l'endroit. Radovid ne se retourne pas contrairement à ses officiers et continue de marcher avant de s’arrêter non loin de la palissade du camp.
– Je veux qu'on redouble les recherches, je veux qu'on trouve ces maudites catins perfides, fait le roi, durement. Et apportez moi la tête de Thyssen et de ses enfants. Leur maudite lignée ne fera plus d'ombre à la maison royale de Rédania.
Des clameurs retentissent soudainement et Radovid se retourne pour voir un homme dans une sale tenue de messager se débattre avec deux de ses généraux.
– Je vous en prie, fait l'homme épuisé, je doit parler au roi, j'ai chevauché sans arrêt depuis Tretogor, J'ai une affaire de la plus haute importance à communiquer au roi.
D'un signe de la main, Radovid commande à ses officiers de laisser passer le pauvre diable. Celui-ci s'effondre aux pieds du roi.
– Eh bien, quelles sont les nouvelles de la capitale ? Demande t'il. Ta présence nous met en péril, tes nouvelles ont intérêt à être importantes.
– Votre majesté, il y a eu une révolte. Dit le messager. Les non-humains se sont soulevés et unis sous une même bannière. Ils ont envahis et conquis toutes les terres entre la Iaruga et le Pontar. Les réfugiés affluent en masse en Rédania et Kaedwen.
– Quoi ?! Tonne le roi. Comment est ce possible ?! Qui a organisé tout ça ?
– les elfes de Dol Blathanna, votre majesté, ils ont rallié les nains de Mahakam et les Dryades de Brokilone à leur cause. Il parait même qu'ils ont aussi recruté des Vrans et des Marmottins. Ils ont balayés les défenses d'Aedirn et Téméria et déporter les populations humaines dans les royaumes voisins. On rapporte qu'ils se sont unis sous une organisation appelés Hen Uniade. Tous les non-humains y participent, même les Halfelins.
Radovid regarde fixement le messager, ruminant sous sa barbe. Les officiers lui jettent un regard inquiet. Les plus proches s'écartent aussi discrètement que possible. D'un geste vif, le roi saisit sont épée et l'abat sur le pauvre homme, lui tranchant net la gorge. Le messager s'effondre dans un gargouillis, son sang gicle à grands bouillons par sa blessure.
– Porte-malheur, crache Radovid en essuyant sa lame sur sa cape. Il semble que nous ayons d'autres problèmes dit il à lui même sous le regard mal à l'aise de ses officiers. Il va falloir retourner vite au pays et sévir, oui, sévir sévèrement. Nous les avons trop longtemps tolérés, il est temps d'arracher ces plantes pourries par la racine.
Il se retourne pour contempler la ville en feu. Son visage est à nouveau serein tandis que les flammes se reflètent dans ses yeux.
– Général, pressez l'offensive, je veux en finir au plus vite ici et que les hommes se tiennent prêt à rentrer.