Vaer aen birke - the Witcher

-Admettons, dit Dermin Biberveldt, ses doigts tapotant contre la pierre de la table, le regard calculateur. Admettons que nous y arrivions, et ensuite? Comment seront départagés ces nouveaux territoires entre nous?

-J'y ai longuement réfléchit et ai des suggestions qui devraient satisfaire tout le monde: Je propose de donner Aedirn et Lyria aux Vrans qui y ont longtemps vécut. Pour les Marmottins, les terres vallonnés de de Rivia, Angren et Brugge si sa majesté Éithné y consent. Le Haut-Aedirn pour les elfes et Témeria pour les Halfelins...

-C'est un vaste territoire, dit un hobbit d'une voix sourde. Je ne sais pas si nous avons le nombre pour en surveiller les frontières.

-Vous aurez de l'aide, c'est le but de cette alliance, répond Calened d'un geste de la main. Brokilone pourra reprendre ses anciens territoires sur Cidaris, Verden et Kerack...

-Et ce ne sera toujours qu'une fraction de son ancienne gloire, fait la reine des dryades, ses yeux argentés perdus un instant dans de lointains souvenirs, emplis de tristesse et de mélancolie. Mais ce sera toujours mieux que notre situation actuelle. À condition que nos nouveaux voisins respectent nos frontière, ajoute t-elle en regardant avec insistance les Halfelins et les Marmottins, je n'y vois aucune objections. Mais ce sont là toutes les terres disponibles, qu'en est t'il des Nains, des Gnomes et du peuple des mers ?

-Mon peuple n'est pas intéressé par la possession de la terre sèche, notre domaine est bien plus grand et vaste que le Continent entier. Intervient Meli'saan, ses mains blanches occupées à faire tourner distraitement un rubis rond comme un œuf de poule. À quel moment et comment se l'est elle procuré, le Sage n'en a aucune idée. Nous souhaitons seulement que les humains partent et nous laissent tranquilles. Ma maitresse a toutefois déclarée être intéressée par l'idée d'échanger avec les terrestres. Vous avez tant de belles choses curieuses, sourit elle en soulevant le rubis dans un rayon de soleil. Sa bouche fit un "oh" silencieux devant le reflet rouge de la pierre dans la lumière. Et nous avons plein de belles choses aussi. Ma dame aimerait surtout l'assistance de vos magiciens, poursuit elle en regardant les elfes. Son mariage avec le duc Agloval a été... décevant mais a tout de même produit une précieuse perle: sa fille Lina. Mais la pauvre petite tient plus de son géniteur que de sa mère et est incapable de vivre sous l'eau. Nos sorcières des mers peuvent lui offrir une nageoire mais pas la capacité de respirer sous l'eau. L'art et le savoir magique des elfes sont très réputés, si vous pouvez aider la fille de ma maitresse, notre aide vous est acquise.

-Transformer complétement une créature pour un environnement complétement différent de celui dans lequel elle est née est un procédé difficile et délicat. Dit Ida avec mesure. Mais pas impossible. Nous pouvons certainement aider.

-Quand aux peuples de Mahakam, dit Calened en se tournant vers Brouver et Egdhimold. je maintiens les promesses que j'ai faites: plus d'interférence humaines, de nouveaux partenaires commerciaux... Et si malgré tout, de nouvelles terres vous intéressent, nous pouvons vous aider à retrouver vos anciennes colonies et en établir de nouvelles. Une assistance sans interférence.

-Hmm, c'est un début. Mais qu'adviendra t'il des humains? Et quel rôle joueront donc les rats? Demanda Brouver en pointant le chef Scoia'tael du pouce. Les lèvres d'Isengrim se plissèrent de colère devant l'insulte mais restèrent sagement fermés.

-J'y ai réfléchi. Je sais que bon nombre d'entre nous, y compris à cette table, considéreraient juste de massacrer les Dh'oines comme ils ont massacré les nôtres. Mais c'est précisément ce que nous devons éviter. Les humains sont dans ce monde pour y rester, tuer leurs civils ne fera que creuser un peu plus le fossé entre nous. Nous devons affirmer notre désir d'indépendance mais aussi montrer que nous sommes prêts à les accepter comme voisins et à négocier.

-Vous pensez vraiment que Radovid le Fou sera intéressé par des négociations? Demande l'Ancien Neoth des Marmottins, son nez frémissant nerveusement. Autour d'eux, les autres représentants échangent des regards dubitatifs. Même avant les rumeurs sur son instabilité mentale, Radovid était déjà connu comme un personnage inflexible.

-Lui, non. Il ne nous pardonnera jamais de lui prendre les terres qu'il vient juste de libérer et réduire son titre à Souverain de la Moitié du Nord. Mais ceux qui lui succéderont pourraient, nous devons prévoir au delà du danger immédiat. Nous déporterons les populations Dh'oines qui ne résisterons pas et ferons ainsi passer un message clair : Nous revendiquons ces terres mais nous ne sommes pas des meurtriers sans compassion. Quand aux Scoia'taels, leur rôle est important dans cette première partie comme dans la suivante. Ce sont des combattants et des éclaireurs chevronnés, habitués à combattre les humains. Ils ont de nombreuses caches et voies secrètes qui nous permettront de prendre les humains par surprise. Grâce à Isengrim Faoltirna ici présent. D'un geste, Calened désigne l'intéressé, qui reste stoïque. Nous pouvons déjà compter sur l'aide de tous les commandos ce qui représente quand même une petite armée.

-Une partie suivante? Relève l'émissaire gnome en ajustant ses lunettes sur son énorme nez. Votre plan a plusieurs phases? Ce serait bien de nous en faire part, jeune elfe.

-J'y viens, fait l'elfe en réprimant un gloussement au mot jeune. Une fois que nous aurons conquis ces terres, nous devrons les fortifier sans attendre. Il ne fait nul doute que Radovid en entendra rapidement parler. Mais il est certain que les représailles n'attendront pas qu'il arrive à nos frontières, il ordonnera une chasse aux non-humains partout dans le Nord. Il ordonnera une purge immédiate dans toutes les villes ou il a autorité et mettra le feu aux réserves. Des centaines, des milliers de nos frères et sœurs mourront... à moins qu'on puisse les rallier rapidement et les guider vers ces nouvelles terres, où ils seront en sécurités. Les Scoia'taels peuvent traverser les royaumes rapidement et discrètement. Avec le soutien de magiciens, ils sauveront de nombreuses vies. Ceci est la deuxième phase: rapatrier autant des nôtres que possible et fortifier notre nouveau territoire.

-Vous parlez beaucoup de Radovid. Observe Brouver, sa main gantée caressant sa barbe. Mais qu'en est il de Nilfgaard? Emhyr a toujours eu pour ambition de dominer tout le continent. Il ne changera pas d'avis parce que les nouveaux habitants ont les oreilles pointues ou qu'il doit se mettre à genoux pour les regarder dans les yeux. Prévoyez vous une guerre avec Nilfgaard? Ou de faire de ces nouveaux royaumes des états vassaux? Ce qui reviendrait à les placer sous la loi impériale.

-Je n'oublie pas Nilfgaard mais comparer à Radovid, la menace est moindre. Le mécontentement gronde dans l'empire, les guildes marchandes et la noblesse en ont plus qu'assez des guerres de l'empereur. Les deux premières ont été très coûteuses à l'empire, celle-ci ne fait pas exception. Si Emhyr ne parvient pas à la gagner, sa tête sera la prochaine à rouler. Il n'a pas d'héritier direct ou indirect, l'empire sombrera dans le chaos de l’interrègne jusqu'à ce que quelqu'un se démarque. Et si par miracle, l'empereur parvient à garder et sa tête et son trône, il sera bien trop occupé à chasser les dissidents et ramener la paix dans ses provinces pour songer à relancer ses projets de conquêtes de sitôt. Dans tous les cas, nous aurons le temps de nous organiser et de nous occuper de Radovid. Quand Nilfgaard reviendra, nous verrons alors si nous devons résister ou négocier.

Calened s'autorise un temps d'arrêt pour reprendre son souffle et observer les délégations. Eithné est... difficile à lire, détendue, ses yeux, reflets de la sagesse accumulé durant une très longue existence, lui donnent un air serein. Pourtant, ses mains tiennent fermement les accoudoirs, prêtes à agir.

Les Vrans sont indéchiffrables, ni leurs visages écailleux ni leur corps ne trahit une quelconque émotion. Tellement... dérangeant, c'est facile de comprendre pourquoi ils ont si mauvaise réputation. Pas étonnant que les Aen Seidhes n'aient pas voulu d'eux comme voisins. Mais ils devraient être partants, ils ont besoins de nouvelles terres, ils ont besoins des Vrans qui vivent dans les réserves, c'est leur dernier espoir... si ils sont même capables de ressentir cette émotion

Les Marmottins au contraire sont bien plus expressifs, leurs oreilles rejetées en arrières, signe d'inquiétude. Certains raclent leurs incisives l'une contre l'autre de nervosité, leurs petits yeux brillants d'hésitation quand ils se posent sur Calened.

Meli'saan passe distraitement la pierre précieuse entre ses mains, le visage déterminée. Calened connaissait le prix à payer pour le soutien de la sirène Sh'eenaz et de ses Vodyanoï bien avant cette réunion, la présence de son ambassadrice est presque une formalité.

Brouver est fermé comme un bloc de granit. Il réfléchit sûrement furieusement. Il est tenté mais l'est il assez? Les Nains sont la grande inconnue de cette équation et la part la plus vitale. Aucune des autres races anciennes n'a leur armée ni leur équipement militaire. Mais Ils ont peu à y gagner, comparé aux autres, tout ceci n'est pas aussi important pour eux. De nouvelles colonies... Est ce que ça l'intéresse même? Oh dieux, faites que sa cupidité soit plus forte que son désir d’isolation.

-Avant toute chose, finit par dire Neoth Korm. J'aimerais éclaircir un point : Le but de cette alliance est d'unir nos forces pour prendre les terres entre le Pontar et la Iaruga et monter une défense commune contre toute future invasion humaine, une sorte de conseil de toutes les Races Anciennes, c'est cela?

-Oui, répond Calened, avec un brin d'impatience. Ou voulez vous en venir?

-Qu'en est il des affaires internes? Que se passe t'il si l'envahisseur ne vient pas de l'extérieur mais de l'intérieur, demande l'Ancien en jetant un regard oblique vers la délégation elfique.

-Vous essayez de sous-entendre quelque chose, Bobolak? Fait Filavandrel d'une voix froide comme la Reine de l'Hiver.

-Vous savez parfaitement ce que je sous-entend, Aen Seidhe! Siffle l'homme-marmotte en pointant un doigt accusateur sur le seigneur elfe. Les humains sont peut-être le pire fléau que mon peuple ait jamais affronté mais ils ne sont pas les premiers à nous avoir chassés de nos terres.

Oh non, oh non non non...

-Mes seigneurs, je vous en prie. Intervient le Sage, les mains levés en signe d'apaisement. Nous ne sauverons pas notre future en réveillant de vieilles blessures.

-Néanmoins, fait le Voïvode Keral d'une voix grave et légèrement sifflante. L'honorable ancien Neoth a raison. Comparé à l'occupation humaine, il y a eu peu de conflits entre les Races Anciennes mais conflits il y a eu. Si cette alliance doit durer dans le temps, alors Nous devons pouvoir nous faire confiance. Ce conseil doit garantir la paix et le respect des frontières de chaque royaume. Un tribunal devra être mis en place pour appliquer des sanctions envers qui les violera.

-Cela serait une bonne idée. Concède Calened d'un hochement de tête appréciateur. Quelqu'un objecte t'il?

Les représentants consultèrent leurs conseillers à voix basse ou bien jetèrent un coup d’œil à leur voisins pour voir qui oserait objecter. Mais il n'y eu aucune contestation.

-Bien, si cela est réglé, reprit le Sage. Je crois qu'il est temps de prendre une décision: Qui est prêt à mettre ce grand projet en marche? Qui est prêt à fonder l'Hen Uniade? Le temps nous est compté, mes seigneurs et dames, il nous faut prendre cette décision maintenant.

Aucun son ne se fait entendre pendant un instant, l'atmosphère comme figé dans l'ambre. Puis avec un sifflement étrangement similaire à un soupir, le Voïvode Vran se redresse de toute sa hauteur et pose la pointe de sa lame sur la table de pierre.

- Les Vrans y participeront, Fit il de sa voix monocorde. Nous n'avons pas le choix.

-Brokilone également, Dit Éithné en posant son arc sur la table d'un geste brutal. La forêt attend ce moment depuis plus de 200 hivers, il est temps de lui rendre ce qui lui appartient.

-Les Elfes Libres rejoindront Hen Uniade, Promit Enid en se levant à son tour. Tournant la tête, elle scrute Isengrim de ses yeux bleus océans. Le chef Scoia'tael fit un simple hochement de la tête et la reine revint sur Calened. Tous les Elfes Libres.

-Selon les souhaits de ma maitresse, vous pourrez comptez sur son armée, Bondit la sirène, tellement prise dans l'intensité du moment qu'elle renverse sa coupe sur sa robe.

-Pour un avenir ou nous serons nos propres maitres! Proclame solennellement Dermin Biberveldt en brandissant son poing couvert de graisse.

-Nous avons assez abusé de l'hospitalité des nains, Annonce l'ancien Neoth en se levant, sa main tremblante tendue en avant. Si nous pouvons reprendre nos anciennes terres, vous pouvez compter sur les Marmotins.

-Les Gnomes aideront, Fait Egdhimold en restant assise, privilège de l'âge. Ceci est un moment historique et un tournant dans la politique du monde. Les miens ne resteront pas en arrière... Sauf en tant que forgerons.

Brouver Hoog, qui était resté silencieux, s'élève à son tour. L'assemblée l'observe, certains calmes tandis que d'autres sont plus anxieux. Que faire si il refuse? Pense Calened, son esprit en effervescence. Il faudra revoir nos objectifs, impossible de prendre Temeria sans les Nains... ça va provoquer des problèmes lors du partage des territoires... et donner une grosse porte d'entrée à Radovid...

-En voilà une belle brochette de révolutionnaires, non pardon, de conquérants, des exilés en guenilles et des reclus armés de bâtons, essoufflés et désespérés... Et vous iriez jusqu’où sans le muscle et l'acier nain? ça ne prendra pas une saison à Radovid pour reprendre ce qu'il considère comme sien et écarteler tous ce petit monde comme spectacle pour ses soldats. Un soupir lourd et grave lui échappe, ses yeux acérés scrutent chaque membre du conseil. Vous êtes conscients qu'il n'y aura pas de retour après ça, pas vrai? Si tout échoue, nous autres Nains et Gnomes pourrons nous replier dans nos montages, le peuple marin dans les profondeurs des mers, nous survivrons mais le reste d'entre vous? Vous ne pourrez pas fuir, vous ne pourrez pas vous cacher et après tout ça, il est même certain que vos races seront condamnées. Vous êtes vraiment prêts à prendre le risque?

-Nous mourront déjà à petits feux, Siffle Keral Vaäkssil, sans émotions, la main ferme sur son épée. Entre une mort rapide et une lente agonie, je choisis la première.

-Comme vous l'avez dit, Ancien, nous n'avons nulle part ou nous replier, nul part ou nous cacher. Dit Enid, le regard triste et pesant, reflet d'un destin fatal. Les torches des D'hoines viendront pour nous que nous agissions ou non. Ceci est notre seule chance.

-Nous avons déjà refusé une telle initiative il y a 200 ans. Fait Egdhimold en rajustant son coussin. Les circonstances étaient différentes à l'époque. Le Chapitre des Mages existait et les humains étaient moins nombreux, moins forts, plus ouverts à la diplomatie. Maintenant... le Chapitre n'existe plus et les humains se noient dans le fanatisme. Nous ne resterons pas passifs face à ce... ces génocides. Et qui d'autres à part nous, fit elle en regardant Brouver de manière appuyée. se préoccupe désormais du sort des Anciennes Races et peut encore intervenir? Qui est plus concerné?

Dermin Biberveldt se mord la lèvre nerveusement en regardant de droite à gauche mais n'ouvrit pas la bouche. Les autres ne dirent rien non plus. L'Ancien des Nains embrasse l'assemblée du regard, avant de poser ses mains à plat sur la table dont les runes luisent presque devant le feu.

-Qui d'autre en effet? Grogne t'il comme devant un mauvais brouet. Soit, les Nains participeront à cette comédie, il faut bien que quelqu'un veille sur les Gnomes. Vous avez intérêt à honorer vos engagements, Sage. Poursuit il en pointant du doigt vers Calened. Je veux bien faire campagne pour empêcher un génocide mais je refuse d'être l'artisan d'un autre. Quand à vous autres, vous avez une dette envers nous et je peux vous assurer que nous ne l'oublierons pas.

-Ainsi soit il. Répondit l'elfe roux en relâchant enfin son souffle, les battements de son cœur plus raisonnables. Maintenant, pour ce qui est de la date...