Elfe des Ténèbres
Le lendemain, quand ils se réveillent, la neige les entoure de partout. Ils sont cernés par un mur blanc, plus haut que les hobbits. Lylwing regarde autour d’elle, émerveillée. Elle n’avait encore jamais vu autant de neige… mais elle se reprend vite quand Aragorn dit à Gandalf:
- Pas question de passer par là !
- Nous sommes bien obligés, répond le magicien. Vous voyez aussi bien que moi la couche de neige devant nous! Nous ne pouvons pas continuer à gravir le col! Sauf si vous tenez à mourir, bien sûr…
Aragorn soupire, puis dit:
- Très bien. Allons-y, alors.
- Je peux aller voir où la neige s’arrête, dit Legolas. Lylwing, tu viens?
La jeune elfe le regarde.
- D’accord, murmure-t-elle.
Ils grimpent sur la neige. Lylwing regarde autour d’elle.
- Ça te dirait de courir? lui propose l’elfe.
La jeune fille acquiesce. Legolas part devant en courant. Il s’enfonce à peine dans la neige fraîche. Lylwing le suit, puis finit par le rattraper. Ils vont si vite qu’ils ont l’impression de voler. La jeune elfe se met à rire. La neige recouvre tout, le ciel bleu semble leur dire que ce sera une bonne journée, et Legolas lui prend la main. Ils s’arrêtent lorsque la neige cède la place à l’herbe verte, légèrement gelée. Lylwing regarde alors derrière elle. Il sont presque au pied de la montagne. Legolas lui dit:
- Et bien, le chemin risque d’être long, avec les autres… surtout le nain et les hobbits!
Lylwing éclate de rire. Puis ils commencent à remonter en courant. Legolas dit à Lylwing:
- Je me demande lequel de nous deux est le plus rapide…
Lylwing accélère l’allure. Legolas crie, puis fonce à sa suite dans la neige. Ils ne sentent pas le froid mordant autour d’eux. Lylwing atteint le campement la première. Legolas la rejoint deux secondes plus tard. Quand il arrive, elle lui dit:
- C’est moi la plus rapide!
Legolas se met à rire.
- J’en ai bien l’impression, répond-il. Maintenant, nous devons y aller. La neige occupe tout le chemin. Ça va être dur de redescendre, mais moins que de monter, je pense.
- Alors va pour la descente… grogne Aragorn.
Ils commencent à prendre le chemin. Les deux hommes ouvrent la marche, permettant ainsi aux hobbits et au nain de passer. Les deux elfes marchent d’un bon pas devant eux. Pour la première fois de sa vie, Lylwing se sent acceptée, même si elle n’aime pas les regards soupçonneux d'Aragorn, de Boromir et de Gimli.
Quand ils arrivent en bas, Lylwing regarde la montagne, derrière elle. Le pic a l’air menaçant.
- Où allons-nous? demande alors Frodon.
- Nous allons passer par les mines de la Moria, répond Boromir. Nous n’avons plus le choix. Nous devons passer par là.
- Ces mines sont donc si terrifiantes? demande Sam en frissonnant.
- J’en ai entendu parler, intervient Lylwing. Apparemment, de sombres créatures y vivent, dont une dont le monde pourrait se passer….
- Et de quoi s’agit-il ? demande Aragorn.
- Je ne sais pas. Je sais juste que ce monstre existe, et que passer par ces mines doit être terrifiant.
- Mais nous devons passer par là, dit Gandalf. Nous ne pouvons pas passer par le col, ni par le sud. Et il est hors de question de passer par le nord. C’est le territoire de nombreuses créatures démoniaques.
- Alors nous prendrons par les mines, soupire Legolas. Mais je préfèrerais éviter, si je le pouvais.
Le groupe reprend la route. Quelques jours plus tard, ils arrivent dans une vallée remplie par un lac. Un petit chemin longe ce dernier pour rejoindre une petite berge caillouteuse et sombre. La communauté de l'Anneau emprunte ce chemin. De temps en temps, l’un d’entre eux pose un pied dans l’eau froide. Lylwing frissonne dans le silence trop pesant. Tous semblent inquiets. Une fois de l’autre côté, Gandalf inspecte le mur et dit:
- La porte est ici.
Il désigne des dessins, à environ deux mètres du sol.
- C’est de l’elfique, remarque Lylwing.
- Très logique sur une porte naine, renchérit Legolas.
- Qu’y a-t-il de marqué? demande Pippin.
- Parlez, ami, et entrez, répond Gandalf. C’est une énigme.
- Il suffit de prononcer le mot de passe et la porte s’ouvrira, dit Gimli en haussant les épaules.
- Et quel est-il? demande Merry.
- Je l’ignore, répond Gandalf. Mais je suppose qu’il doit être facile à trouver.
Il commence à essayer plusieurs mots, dans différentes langues. Lylwing en reconnaît quelques-unes, et s’étonne même que le magicien sache parler en langue noire. Au bout d’un certain temps, tout le monde finit par laisser le magicien chercher. Lylwing s’approche du lac et s’assoit sur un rocher, juste au bord de l’eau. Cette dernière est étrangement immobile, jusqu’à ce que Merry et Pippin commencent à faire des ricochets. Aragorn leur dit alors:
- Vous êtes fous! Arrêtez cela tout de suite!
- Pourquoi? fait Pippin. Nous ne faisons rien de mal!
- Une sombre présence rôde sous cette eau, répond Legolas. Vous risquez de la réveiller avec vos ricochets.
Les deux hobbits s’éloignent de l’eau avec un air apeuré. Legolas va s’asseoir près de Lylwing. La jeune fille le regarde discrètement. L’elfe finit par sourire et lui demande:
- Tu n’as jamais vu aucun autre elfe pour me fixer comme cela?
Lylwing rougit légèrement, ce qui fait rire Legolas. Elle relève la tête et le fixe droit dans les yeux.
- Ma vie ne vous regarde en rien.
Legolas perd son sourire. Il fronce les sourcils et lui dit:
- Sais-tu à qui tu t’adresse, jeune fille?
- A un elfe trop curieux.
Sa remarque fait rire Legolas.
- On ne t’a jamais appris à respecter tes aînés?
- Je ne respecte que ceux qui méritent mon respect.
Là-dessus, la jeune fille se relève et s’en va vers les falaises abruptes, près de la porte. Elle commence à escalader la roche pour atteindre une corniche située à une dizaine de mètres du sol. Elle veut être seule. Elle a peur que cet elfe ne découvre qui elle est…
Une fois au sommet, elle s’assoit en tailleur et laisse son regard vagabonder. Ses yeux finissent par se poser sur Legolas. Elle ne comprend pas pourquoi son coeur s’emballe dès qu’il s’approche d’elle. Elle ne comprend pas non plus pourquoi elle a tant envie d’être près de lui, tout en voulant l’éviter le plus possible… Elle se perd dans ses pensées. C’est à peine si elle remarque que les deux hommes, Aragorn et Boromir, discutent à voix basse en la regardant du coin de l’oeil. Elle soupire. A tous les coups, ils doivent être en train de dire du mal d’elle. Les hobbits sont en train de décharger le poney, avec l’aide du nain. De toute la Communauté, c’est lui le plus méfiant. Peut être parce qu’elle est une elfe. La jeune fille regarde dans le vague. Un mouvement sur sa droite la fait sursauter et elle dégaine une dague cachée dans sa botte d’un mouvement brusque. Legolas lève les mains en s’écartant vivement.
- Hé, du calme! Je ne voulais pas te faire peur!
La jeune fille le fixe pendant quelques secondes, sa dague toujours pointée vers lui. Puis, lentement, elle baisse sa garde et la range dans sa botte.
- Vous m’avez fichu une de ces peurs! dit-elle.
- Je t’ai dit que ce n’était pas mon intention! répète-t-il. Je voulais voir ce que tu as. J’ai vu tes yeux briller à cause des larmes…
La jeune fille se fige. Elle ne s’était pas rendue compte qu’elle pleurait...Elle essuie rapidement ses larmes.
- Ce n’est rien, réplique-t-elle.
- Non, répond Legolas. Je n’aime pas cette tristesse dans ton regard…
Il tend la main vers elle. Lylwing recule légèrement. Legolas pose sa main sur son bras tout en la regardant fixement.
- Lylwing… murmure-t-il à la jeune elfe, que t'arrive-t-il ? C’est rare de voir une elfe aussi renfermée…
La jeune fille ne répond rien. Elle se contente de regarder la main de l’elfe posée sur son bras. Un instant, elle est tentée de tout lui dire… mais se ravise en se rappelant les paroles du Maître: “ne me déçois pas…”
- C’est juste que je ne veux pas abandonner mon cheval, répond la jeune fille en se dégageant.
C’était vrai. Lylwing sait que Diablo peut se débrouiller tout seul, mais il est son meilleur ami, et la seule créature à qui elle peut parler sans crainte. Et elle ne veut pas mentir encore une fois à Legolas. Elle sent qu'il lui ferait confiance, sans les hommes ou le nain pour émettre des doutes.
Elle s’éloigne de l’elfe. Legolas la regarde, légèrement blessé et désorienté par les sautes d’humeur de la jeune fille. Il la trouve si étrange… et pourtant… quelque chose en lui veut la protéger et gagner sa confiance. “Que s’est il donc passé pour qu’elle soit si méfiante?” se demande-t-il en la regardant descendre en souplesse de la falaise.