Jeux de Nains

Chapitre 21 : Guerriers

Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/11/2016 19:24

Les nains attendaient. Gandalf était plié en deux à cause du plafond bas, et grommelait dans un coin. Soudain, ils entendirent le cri de Bilbo, puis le virent plonger dans la fissure qui l'avait vu disparaître. Dans sa main, il tenait la couronne où l'Akenstone avait été encastrée. Ils se mirent alors à courir dans un joyeux brouhaha. Derrière eux, des griffes crissèrent sur la pierre alors que le dragon s'ouvrait comme il pouvait une ouverture pour les rattraper. Un jet de flamme roussit les cheveux de Gandalf et de Bofur, mais ils réussirent à ressortir sur le flanc de la montagne sans trop de dommages. Mais c'était sans compter sur la ténacité de Smaug qui, s'élançant par un trou de la montagne, jaillit dans une averse de pierre et de neige, faisant trembler la montagne entière sous ses pattes musculeuses.

« Nous avions dit d'être discrets ! » hurla Thorin, pas vraiment fâché de pouvoir enfin en découdre avec Smaug, alors qu'il sortait une hache.

« J'aurais voulu vous y voir, moi ! » rugit Bilbo alors qu'il prenait en tremblant son épée.

« Etes-vous fous ? Descendons, nous ne pouvons pas nous battre contre ce dragon sur une si fine corniche ! Dépêchons-nous ! »

Gandalf venait de faire entendre la voix de la sagesse. Ils se mirent à courir de nouveau, leurs armes sorties. Le dragon, perché sur un piton rocheux, essaya de les attraper, de les enflammer de son souffle putride, mais il n'arrivait à rien et lorsqu'ils furent en face de l'ancienne porte d'Erebor, il s'envola, dévoilant des ailes d'écailles et de cuir rouge, ses grands yeux d'or sombre posés sur ses ennemis.

« Kili, ton arc ! » s'écria Thorin.

Le jeune nain hocha la tête, encocha un trait puis décocha sa flèche qui ricocha, inutile, sur l'épaisse peau du dragon.

« Je dois lui mettre une flèche dans l'oeil ! Mais à cette distance, je ne pourrais pas ! Il faut l'obliger à se poser au sol ! Et faire diversion pendant que je vise ! Allez ! »

Kili n'avait jamais été un leader, mais en cet instant où tout reposait sur une simple flèche, il se sentait l'obligation d'ordonner aux autres, de leur montrer ce qu'ils devaient faire. Dwalin lança sa hache de jet, mais l'arme fut négligemment repoussée par la patte du dragon. Inspirant, sa large poitrine se gonflant, le reptile passa au-dessus d'eux en balançant une averse de feu. Ils se protégèrent sous les rochers des alentour, mais certains chapeaux prirent feu et ils durent les enfoncer dans la neige des alentour, qui éteignit le feu dans un sifflement aigu.

« Gandalf, ne pouvez-vous pas jeter un sort ? » demanda Bilbo, serrant la couronne contre son torse, tremblant.

« Les dragons sont de nobles créatures, qui ont été pourvues du don de renvoyer la magie. Mes sorts ne seront d'aucun secours. »

« Lanka, que fais-tu ? »

La question de Thorin, qui semblait tellement étrange, leur fit tous tourner les regards vers la naine. Cette dernière était en train de lier des écharpes et des liens de cuir ensemble. Ils la regardèrent, fronçant les sourcils.

« J'essaye de faire un filet, quelque chose, pour l'attirer à nous. »

« Quand bien même nous réussirions à lui serrer cet ensemble de chiffons autour du cou, notre force sera t-elle assez ? »

Lenka lança un regard noir au roi ; ils n'avaient pas d'autre plan de toute façon. Kili tentait tant bien que mal de viser l'un des yeux du dragon, mais le gigantesque saurien esquivait les flèches. Il passa au ras du sol, essayant d'attraper de ses crocs le sac de Bofur, et ils en profitèrent alors. Dwalin sauta sur le long cou du Dragon et essaya d'y planter sa hache. D'un coup de tête, la bête envoya valser le nain, mais ce qu'il avait essayé de faire était tout autre : arrêter le dragon dans son envol et l'empêcher de reprendre les airs. Bloqué dans son élan, le dragon était à présent au sol, et les nains se mirent à le houspiller pour qu'il ne puisse s'envoler. Bofur reçut un coup de patte qui l'entailla profondément au torse, et Dwalin gisait dans la neige qui se teintait de sang sous sa tête. Thorin essaya d'enfoncer la lame d'Orcrist dans la gueule du dragon, mais il souffla le feu, et la main droite de Thorin se couvrit de cloques, rouge écarlate, alors qu'il retirait son bras dans un cri de douleur.

Kili avait réussi à encocher une flèche et à s'approcher assez vite. Il décocha une flèche, et le trait siffla aux oreilles de Lenka pour se ficher dans l'oeil du dragon. Tous les nains reculèrent alors, tandis que rendu fou de douleur, Smaug ruait tel une bête en furie. Sa queue hérissée de piquants atteignit Bombur et Balin à la tête, et ils tombèrent sur le dos, sonnés, tandis que la joue de Balin saignait abondamment. Le dragon s'envola, tentant de retirer la flèche de son oeil, mais sa patte aux longues griffes n'était pas faite pour autant de précision.

« Tout le monde va bien ? » murmura Thorin, essayant de couvrir sa main gravement blessée de neige.

Balin, sa joue contusionnée, était parti réveiller Dwalin, qui révéla un éclat au niveau de la tempe. Beaucoup étaient couvert de suie, de sang, et chacun d'eux avait reçu au moins une blessure. Ils auraient voulu s'asseoir, Fili avait les mains tremblantes, son front rougi par le feu du dragon, mais il leva un bras en direction opposée à Erebor.

« Mon oncle ... »

Son murmure était appeuré, et Fili, s'approchant de son frère cadet, inquiet pour lui, se tourna vers le point montré. Tous firent de même, et ils retinrent un hoquet : une gigantesque armée avançait sur eux, composée d'orcs aux teintes diverses. L'avant des troupes étaient montée sur des Wargs et, à leur tête, avançait l'orc Blanc. Il riait de voir que le dragon leur avait mâché le travail. Il rit moins fort quand, de son oeil valide, Smaug vit approcher cette armée, il se mit en tête de s'approvisionner en viande d'orc. Passant au ras du sol, ignorant les lances et les hallebardes, il piocha parmi les orcs et les dévora, rageusement, soufflant son haleine brûlante sur eux. Pour Smaug, tous étaient des ennemis, nains ou orcs. Alors, décidant de prendre l'avantage tant qu'il le pouvait encore, Azog lança ses troupes sur les nains épuisés.

Bilbo poussa un cri et recula d'un pas. Gandalf soupira et leva son bâton. Un éclair blanc jaillit du ciel et brûla les premiers assaillants, mais les autres continuaient d'avancer, derrière. L'armée se jeta sur les nains et le magicien, mais seuls ceux du premier rang - voire du deuxième - pouvaient espérer toucher les nains. Ceux de derrière ne faisaient finalement que les gêner. Heureusement pour la troupe, les orcs étaient tous des idiots, et ils réussirent à tuer ceux de la première vague, des fantassins. L'orc blanc grimaça et s'élança sur son warg, bien décidé à tuer Thorin. Puis, comme changeant d'avis, il recula, ses troupes avec lui, laissant place à un rang d'archer. Les nains frissonnèrent alors que les archers tirèrent. Les nains reculèrent pour s'abriter derrière un rocher. Thorin sentit alors une main lui prendre la cheville : un orc au sol, ayant fait semblant de mourir, le retenait à présent. Un millier de flèches, semblables à des oiseaux au bec de fer, approchaient à une vitesse ahurissante. Lenka se retourna pour voir ce qu'il faisait. Voyant la mort approcher pour l'homme qu'elle aimait, elle hurla.

« THORIN ! »

Elle courut. Aussi vite qu'il était possible. Ses poumons la brûlaient. Elle savait qu'elle n'aurait pas le temps de le traîner à l'abri. Alors, approchant de son roi, elle se jeta en travers de lui pour le protéger. Thorin avait réussi à tuer l'orc, mais trop tard. Les flèches tombèrent. La plupart s'enfoncèrent soit dans la boue, soit dans les cadavres d'orcs. Mais une dizaine d'entre elles avaient touché Lenka et Thorin. Ils ressemblaient à des porc-épic. Lenka avait le dos criblé de flèche, et l'une d'elle avait été décoché avec tant de force qu'elle avait transpercé le torse de la naine pour se figer dans celui du nain.

« THORIN ! LENKA ! »

Les hurlements plus loin leur parvenait avec beaucoup de mal. Lenka redressa difficilement la tête, la respiration sifflante. Thorin était là, contre elle ; le sang qui se déversait de leurs blessures tâchait le sol boueux. Leurs yeux se croisèrent, et Lenka vit des larmes couler sur les joues de son roi.

« Pourquoi ? Pourquoi, grands dieux ? »

La naine aurait voulu retenir ses larmes, mais elle ne contrôlait plus vraiment son corps. Elle grimaça, et voulu hausser les épaules, mais elle ne put que poser sa tête dans le cou de Thorin, le souffle court.

« Je ne voulais pas te laisser mourir » articula t-elle douloureusement.

« Et maintenant nous allons mourir tous les deux ! C'est du gâchis, espèce d'idiote ! Regarde-moi ! Lenka ? »

La naine souriait doucement, les yeux à moitié fermés. Qu'il la comprenne : elle était épuisée. Elle ne ressentait plus que cela, de la fatigue. Son corps entier était lourd, et la douleur fulgurante d'il y avait quelques minutes avait disparue. Elle se laissa aller, doucement, dans les bras de son roi.

« Lenka ? » croassa t-il, et il se rendit compte qu'un organe interne avait dû être touché. Il avait lui-même du mal à parler. Il leva sa main où des flèches avait cassée, et il caressa le visage de la naine. Il pleurait, doucement.

« Attends-moi, mon amour. Attends moi ... » réussit-il à dire, puis, lâchant tout ce qui restait, il se laissa sombrer dans le noir, tandis que du coin de l'oeil, il voyait des silhouettes bouger. Amis, ou ennemis ? Aucune idée. Il n'en avait plus rien à faire, alors que son amour mourrait contre lui.

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