Jeux de Nains

Chapitre 15 : Morragols

Catégorie: T

Dernière mise à jour 08/11/2016 13:09

[ Veuillez m'excuser, j'ai eu quelques soucis d'édition pour ce chapitre & j'ai du le supprimer pour le refaire. ;_; du coup le début ne sera peut-être pas exactement le même. Navrée ! Pour me faire pardonner, deux petits croquis que j'ai fait de Lenka & Mliwyn. J'ai fait avec mes petits talents, si vous préférez les imaginer autrement, faites donc ! :) [url=https://fbcdn-sphotos-d-a.akamaihd.net/hphotos-ak-ash3/536879_10200096416684998_386003244_n.jpg] Lenka [/url] & [url=http://img15.hostingpics.net/pics/216668Mliwyn1.png] Mliwyn [/url] En espérant que ces dessins vous plaisent ! N'hésitez pas à donner vos avis sur la fanfiction en cours :D ]

 

Thorin se réveilla attaché à un rondin de bois. Ligoté, bâillonné, il dût se dévisser le cou pour voir autour de lui. Deux Morragols le portaient ; créatures sombres, méprisables ; il remarqua deux moignons d'ailes dans le dos de celui de devant, deux morceaux de chair membraneuses, qui n'auraient jamais pu le porter en vol ou même s'étirer. Vestige de leur ancienne race avant qu'elle ne soit damnée, songea t-il. Les autres prisonniers étaient transportés pareillement ; Thorin se fit du souci pour les quatre victimes des imposteurs. Qu'était-il arrivés aux trois nains et au hobbit ? Ils traversèrent des rideaux de lianes et de feuilles, pour s'enfoncer sur des pistes sauvages qui n'étaient plus des sentiers. 

Thorin se mit à se débattre, pour se débarrasser de ses liens, mais ce fut peine perdue. Il attira l'attention d'un Morragol qui ricana.

« Le roi des petits est réveillé » fit-il d'une voix sifflante, et ils éclatèrent d'un rire de gorge, profond et humide, comme si ils respiraient de la boue.

Le roi aurait aimé poser des questions, mais le torchon sale enfoncé dans sa bouche lui interdisait le moindre mot. Il sentait son sang battre dans ses tempes alors qu'ils pénétraient plus loin dans la forêt. Il réalisa alors que ce n'était pas le bruit de son sang mais bien des instruments, lents, d'un rythme hypnotique, que son corps suivait avec une passion morbide. C'était des tambours que l'on battait, et Thorin eut un frisson en devinant de quoi ils étaient fait : ossements, crânes d'hommes, de nains, d'elfes.

Ils pénétrèrent enfin sur le territoire Morragol, et le nain remarqua la différence : une grande clairière au sol caillouteux, d'une terre sombre comme le sang, aux arbres squelettiques, à la végétation noire et vénéneuse. Rien n'y poussait qui fut comestible, et nul son d'animaux ne parvenait aux oreilles de nain.

Ils furent déposés près d'un feu où dansaient des formes inquiétantes, aux silhouettes floues. Les regarder donnait mal aux yeux, à la tête, donnait envie de vomir ; il y avait comme un malaise de voir ces êtres discontinues, dansant autour du feu, sans limites de corps. Thorin avait l'impression de voir des fantômes aux corps flous. Il s'agissait des Morragols femelles, des sorte de Harpies aux sombres pouvoirs magiques. Les Morragols mâles mirent genou à terre, et Thorin entendit indistinctement des bruits ; était-ce les femelles qui parlaient ? Apparemment oui. Le son était comme un cri et un murmure à la fois, donnant une impression de distorsion du temps. Le nain se sentait au bord de la nausée. On lui retira son bâillon, et il essaya de crier, sa voix fêlée résonnant difficilement dans cet endroit aux magies chaotiques.

« Ne m'oblige pas à te donner de bonnes raisons de crier » murmura une voix près de son oreille, mais il n'y avait personne. Chargée de menace, elle était basse, rauque, et en même temps c'était comme si on hurlait près de lui. Thorin ne comprenait pas, et la colère en lui montait en même temps que la panique. Près d'un arbre aux formes effrayantes, il vit les quatre victimes qu'avaient remplacé les Morragols. Seul Bilbo était éveillé, et ses joues maculées de suie montraient des traces pâles, là où il avait pleuré. Thorin sentit son coeur s'arrêter de battre quand, devant lui, se dressa une forme gigantesque, noire, aux contours flous ; c'était comme regarder un soleil sombre. Il n'arrivait pas à voir la forme, et pourtant, c'était comme si il avait à la fois une chauve-souris, une araignée, un peu des deux en face de lui, comme si ces deux images se superposaient.

« Celui-là m'est réservé » fit-elle, et bien que sa voix ne fut que sifflements, cris, gargouillements, le nain comprit ce qu'elle disait.

Les Morragols le soulevèrent et ne firent pas attention à ses cris, le menant jusqu'à une hutte de peaux qui semblaient humaine. Régnait sous la tente une odeur étouffante de sueur inhumaine et de fleurs fanées, d'excréments, de viande avariées, d'urine. La nausée qu'il avait se renforça, et il se pencha pour vomir. Qu'il salisse ce sol ne le dérangeait pas ; l'endroit était souillé jusqu'à la moelle.

« Sais-tu qui je suis ? »

Gargouillements, hurlements, mots sans queue ni tête, et pourtant, le sens était là, comme imprégné au fer rouge dans le crâne du nain. Il aurait voulu se prendre la tête, pour essayer de calmer la douleur, mais il était toujours attaché. Un rire, glacé, le fit frissonner ; la Morragol s'approcha et il sentit sur la peau de sa joue une chair glacée. Une chair morte, et pourtant vivante. Ce contact était si immonde, si contre-nature, qu'il eut un spasme violent, comme si tout son corps refusait ce lien que cette femelle lui imposait.

« Je suis leur reine. Alors je te mangerais, petit roi. »

Nouveau rire ; Thorin vomit encore, de la bile, son estomac révulsé. Sa peau était couverte d'une sueur froide, il frissonnait comme si il était malade. Il tenta dans ses dernières forces de retirer ses liens, mais ils étaient fortement serrés et lui entaillèrent la peau. Il tenta de résister mais il se sentit vaciller, épuisé, désespéré. Il tomba sur le sol souillé d'immondices et s'évanouit.

***

« Vous êtes plutôt mal barrés, hein ? »

Thorin s'éveillait petit à petit, et avec sa conscience il espéra que ce n'était pas la Morragol ; il ne supporterait pas cette douleur dans son crâne encore. Il banda les muscles, pour y résister, mais ce ne fut pas la peine. Une main fraîche se posa sur son front brûlant, et il eut malgré lui un soupir de soulagement. Il ouvrit les yeux, papillonna des paupières, leu peu de lumière lui faisant mal aux rétines.

« Buvez ça, ça vous fera du bien. »

On porta une coupe à ses lèvres, et il serra les dents ; une volonté farouche s'éveillait en lui également, et il refuserait ce qu'on lui donnerait. La personne enfonça plus fortement la coupe jusqu'à lui cisailler les lèvres, et un liquide amer lui coula dans la gorge. Thorin s'étouffa à moitié et toussa ; on lui passa un chiffon sur sa barbe humide et poisseuse.

« Qui êtes-vous ? » grogna t-il, en essayant de voir la silhouette agenouillée près de lui. Mais ses yeux ne s'étaient pas encore habitué à la pénombre, et son mal de tête était encore là ; sa vue était loin d'être aussi bonne qu'en temps normal. Il ne voyait qu'une masse pâle, avec des endroits sombres. En tout cas, il devinait à l'odeur que ce n'était pas une Morragol. Mais quoi, alors ?

« Je n'ai plus de nom. »

« Vous êtes quoi alors ? »

« Ce que je suis importe peu » et à la voix, Thorin comprit que c'était une femelle, une femme, et qu'elle était amusée de ce petit jeu de devinette. Il n'appréciait pas, cependant, et il se retourna difficilement ; ses mains étaient toujours attachées, mais on lui avait libéré les pieds, et il s'assit sur son séant, la tête lui tournant un moment.

« Reposez-vous avant ce soir. »

Et la silhouette sortit. Thorin ne se sentait pas bien, mais il fit un effort pour se redresser ; d'abord un genou en terre, puis l'autre, et d'une poussée, se mit debout. Il chancela, mais réussit à tenir debout et passa l'épaule à travers la tenture qui maintenait la tente fermée ; il jeta un coup d'oeil dehors.

Sur le feu grillait de la viande, et il espéra que ce ne fût pas l'un de ses amis. Il retint son souffle, et regarda aux alentours ; aucun des nains n'était en vue ; Gandalf était attaché à un poteau, où les Morragols l'avait couvert de fruits putrides et volé son chapeau. Il semblait abattu, vieux, ses cheveux pendant autour de son visage en filet poisseux. Bilbo était pendu par les pieds à un arbre, et le sang lui étant monté au visage, il était évanoui. Les Morragols avaient parlé de dîner ...

Il vit alors la femme qui était venue lui donner à boire. C'était une Brahal. Une race à part des hommes, à la base tailleurs de pierres magiques. Ils avaient pour particularité d'avoir une taille plutôt moyenne, une corpulence forte mais aussi des ongles noirs, des bouts de doigts noirs en écaille, comme la peau d'un serpent, et enfin des cornes sur le front. Leur étrange physique les avait rendu méfiant à l'égard des autres hommes, et ils avaient décidé de se tenir à l'écart des autres races. Que faisait-elle ici ?

Elle était en train de nettoyer Gandalf ; ses gestes étaient doux, mais hélas, ses griffes et sa peau écailleuses tirait sur les cheveux et la barbe du magicien. Deux petits cornes noires saillaient de son front pâle. Elle se retourna pour tremper un linge dans de l'eau et Thorin croisa son regard. Elle fronça les sourcils et secoua la tête, puis reprit son travail. Thorin repoussa  ce mystère ; peu importait cette fille, il devait sauver ses amis. Mais seul, que pourrait-il faire face aux Morragols ?

Il retourna s'allonger dans la tente, travaillant à un plan ; pouvait-il faire diversion pendant que ses amis s'enfuyaient ? Mais il ne savait pas où ils étaient ; sûrement dans les autres tentes. Les ferait-on sortir avant le soir, avant le dîner ? Aurait-il une chance d'agir avant qu'on ne les tue pour le repas ? Thorin grogna de rage et secoua la tête. Il devait trouver une solution !

« Vous êtes plutôt agité pour quelqu'un qui va mourir. D'habitude, ils ne se débattent pas autant. Et la curiosité est mauvaise conseillère » fit la voix de la Brahal. Elle se tenait à côté de l'entrée, à moitié cachée par la tenture ; elle était en train de changer des seaux contenant les dieux savaient quoi. Thorin l'observa, et tenta une approche.

« Nous ne sommes pas obligés de mourir. Nous devons sortir de là. Aidez-nous. »

Il avait tenté de retirer toute panique ou ordre de sa voix, mais son ton restait impérieux. De près, la Brahal ressemblait à une hybride de femme et de cerf, avec ses cornes et son nez aplati, son teint brun, ses yeux noisettes aux pupilles verticales. Elle eut un sourire sans joie dévoilant des dents fines, pointues.

« Qui vous dit que je ne sers pas les Mères pour le plaisir ? »

« Personne ne servirait de telles créatures pour le plaisir. »

« C'est vrai. Mais au moins, moi, je reste en vie. »

Et elle s'en alla. Thorin grogna de rage ; il n'obtiendrait rien d'elle. Comment avait-elle atterrit là ? Ce n'était pas la question. Le nain chercha furieusement des idées, mais toutes étaient trop impossibles pour être réalisées. Surtout seul. Si il avait eu à son côté Dwalin, Balin, ou même un seul des nains, il aurait peut-être essayé quelque chose. Mais là, c'était peine perdue. Il serra les dents et posa sa tête sur un tas de bois. La peur et la colère avaient épuisé ses réserves, et sans s'en rendre compte, il s'endormit.

Le bruit de tambours le réveilla. La nuit était tombé ; les lumières d'un feu luisaient dehors. Thorin aurait voulu se mettre des claques. Il s'était endormi alors qu'ils allaient mourir, dévoré par des créatures perverties ! Quel roi il faisait ! S'abandonnant à un instant de désespoir, il songea au fardeau qu'il portait. Il était prince, mais il ne serait jamais roi tant qu'il n'aurait pas retrouvé l'Akenstone. Il ne serait jamais couronné ; il ne régnerait jamais. Mais là n'était pas le pire ; il avait voulu mener une quête pour ramener son peuple à son lieu d'origine. Il voulait offrir à sa race un nouvel endroit où habiter, reprendre ce qui avait été à eux. Et il allait échouer. L'échec lui avait toujours fait peur, bien qu'il ne le montra pas, mais en cet instant, tout semblait perdu, et il aurait voulu pleurer sur ses erreurs.

« S'apitoyer ne servira à rien. Venez avec moi, je dois vous laver. Vous êtes comme des légumes : meilleurs propres. »

La Brahal se tenait devant lui, et attendit qu'il se lève. Il la suivit le long d'un sentier menant à une rivière. Elle tira de l'eau dans un seau moisi et la jeta dans un baquet ; Thorin se vit déshabillé sans autre forme de procès et dût entrer dans l'eau glaciale. Sa peau se couvrit de chair de poule. Sans aucun souci de l'intimité, la Brahal se mit à laver ses épaules, ses cheveux, sa barbe. Thorin avait les mains liées dans le dos, et ne pouvait pas les bouger.

« Pourquoi vouloir partir ? Vous finirez ici. Ce n'est pas un pire destin qu'un autre ; vous serez dévoré rapidement. »

Essayait-elle de le réconforter ?

« Je dois mener une quête importante. Pas seulement pour moi mais pour mon peuple. Je ne voulais pas entraîner mes amis dans tout cela. N'y a t-il aucun moyen de s'en aller ? »

Il leva les yeux et se mit debout, la Brahal le couva du regard et rougit ; bien qu'il eut de l'eau jusqu'à hauteur de poitrine, elle semblait effarouché par le nain. Il essaya de pousser son avantage.

« Aidez-nous ! Nous vous aiderons à partir, à retrouver votre peuple. »

« Ne parlez pas d'un peuple qui m'a vendue comme offrande à ces créatures ! » rugit-elle, et elle lui prit les cheveux pour tirer sa tête en arrière. Thorin crut qu'elle allait le noyer, mais non. Elle le lava, sans gêne, puis sans le sécher, le rhabilla et le ramena au camp. Thorin garda le silence, devinant la colère de la jeune femme. Quand ils arrivèrent, les prisonniers étaient alignés sur une table de pierre, ficelés comme des jambons. Il ne manquait plus que lui, apparemment.

« Mettez les à bouillir » ordonna un Morragol, et Thorin chercha des yeux ses amis. Il croisa bien des regards effrayés.

C'était la fin. Ils allaient mourir, dévorés.

Laisser un commentaire ?