Jeux de Nains

Chapitre 2 : Du vin et du pain.

Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 19:20

« Lenka ! Approche donc ! »

Sandor sourit à sa fille, en ignorant son regard dur qu'elle posait sur les invités. Il était explicite qu'elle les prenait pour des voleurs, des indésirables. Et elle avait l'air prête à les écraser comme on tue un moustique qui vous tourne autour. La naine vint vers son père et, posant ses poings sur ses larges hanches, grogna :

« Qui c'est ? »

« Des voyageurs. Ils nous demandent asile pour la nuit et je ... »

« Hors de question. »

Gandalf se leva alors et s'inclina devant la naine, avec un sourire gêné sur le visage. Lenka se tourna vers lui, plissant les paupières.

« Noble dame, ayez l'obligeance de nous aider et de nous offrir un toit. Nous sommes épuisés, et notre ami est blessé. »

« Les gens comme vous ne sont que des voleurs. Je refuse d'ouvrir la porte aux gens que je ne connais pas. Si vous aviez été moins nombreux, peut-être aurais-je pu accepter. Mais si vous prenez les armes contre nous pour nous dépouiller, je ne serais pas en mesure de protéger notre ferme ou mon père. »

« Que fait une naine dans ces terres désolées ? Ne devriez-vous pas être avec votre famille, votre clan ? »

Thorin les avait interrompu sans souci de l'étiquette : sa surprise n'avait d'égal que le nombre si peu élevé de naine encore en vie après la terrible attaque du dragon sur Erebor. Peu de naines avaient réussi à s'en sortir, et beaucoup d'entre elles étaient âgées. La race des nains périclitait doucement. Thorin se planta devant la naine, la fixa de son regard bleu d'acier puis continua avant qu'elle puisse répliquer :

« Je suis Thorin, fils de Thrain, lui-même fils de Thror. Je suis un descendant de la lignée de Durin et suis le dernier membre de la lignée royale des nains encore en vie. »

« Et je devrais vous croire à cause de vos beaux yeux ? Vous vous prenez pour qui ? Vous apparaissez comme ça sans raison. Tout le monde sait que les nains n'ont plus de roi. »

Lenka s'était avancée, de telle sorte que son visage touchait presque celui du Prince ; ses yeux plissés et méfiants le dévisageait. Son visage exprimait une haine franche, ouverte et une méfiance de ceux qui ont vécu des événements atroces et ne souhaitent pas les revivre. Gandalf, sentant monter la tension et ne voulant pas que les nains en arrivent aux mains, s'avança de nouveau vers eux et fit un signe vers Lenka.

« Nous pouvons vous payer. Nous n'avons pas grand chose, mais du bon or peut vous être offert pour votre aide. Il serait tout à fait normal de vous rémunérer pour vos efforts. »

Le regard de Lenka brilla un instant et se tourna vers son père : ce n'était pas de la cupidité qui la faisait hésiter soudain, mais l'idée de posséder quelques richesses pour offrir une vie meilleure à son père. Gandalf eut un sourire puis sortit sa propre bourse de cuir et offrit à la naine plusieurs pièces d'or, d'un joli éclat jaune. La naine hésita encore, malgré la présence de l'argent dans sa main, puis haussa une épaule d'un air bougond.

« D'accord. Mais vous dormirez dans la grande, et vous n'aurez pour souper que du vin et du pain. Nous avons peu de vivres, et je ne souhaite pas nourrir ... 14 nains avec ce que nous avons de meilleur, connaissant leur appétit insatiable de bonne chère. »

« Excusez-moi, gente damoiselle, mais vous vous trompez ; nous sommes en tout 15, dont un magicien et moi, qui suis non pas un nain mais un hobbit. Cela se voit, mais je ne vous en tiens pas rigueur. »

« Et c'est quoi ton petit nom, monsieur le hobbit ? » fit Lenka avec un sourire.

« Bilbo, mademoiselle. Bilbo Sacquet. » fit fièrement le hobbit en souriant de toutes ses dents.

« C'est noté. Papa, pas de pain pour le hobbit insolent, monsieur Sacquet. »

Bilbo cessa de sourire pour prendre un air contrit ; Thorin n'eut pas un sourire et les autres nains du groupe ne savaient guère comment réagir face à l'une des leur au caractère si sensible. Elle leur tourna alors le dos et pénétra dans la ferme. Sandor poussa un soupir et sourit.

« J'avais peur que cela se passe mal mais, dieux merci, cela a été à merveille ! Elle vous adore ! »

« Vous plaisantez ? » s'étrangla Thorin.

Comment cette fille si méfiante, au caractère si horrible, pouvait les apprécier ? Ne venait-elle pas d'interdire le dîner de Bilbo juste parce qu'il avait osé lui répliquer ? Ce n'était qu'une petite pédante, et il la haïssait déjà, elle et ses airs sûrs d'elle.

« Pas du tout. Si elle avait été au bout de sa méfiance, certains d'entre vous seraient à terre, après avoir reçu une bonne correction. Elle est comme ça, ma Lenka. »

« Comment est-elle arrivée ici ? Ce ne peut pas être votre fille ! »

« Je vous raconterai ce soir. Installez-vous dans la grande ; il y a du bois mort et bien sec sur les côtés, vous pouvez faire un feu mais faites attention à ne pas allumer un incendie. Je vais vous chercher des vivres, du bon vin, et je reviens. »

Sur ces bonnes paroles, il leur fit signe de la main et rentra dans la ferme à la suite de sa fille. Les nains restèrent un instant indécis, puis prirent la direction de la grande un peu plus loin. Bilbo gardait le silence, les joues et les oreilles cramoisies. Thorin se mit à sa hauteur puis lui donna une claque vigoureuse dans le dos.

« Ne t'en fais pas, mon ami. Cette fille là est une femme du feu. Ne crois pas ce qu'elle t'as dit ; tu n'es en rien un insolent. Laisse la cracher son venin. »

Bilbo soupira puis caressa du bout des doigts la poche de sa veste ; il y avait caché l'anneau dérobé à la créature pâle de la montagne. Il pénétra dans la grange à la suite des autres, et choisit un coin près du feu pour s'y installer ce soir. Son estomac criait famine ; aurait-il à manger ce soir ? Il allait devoir attendre le retour du fermier pour le savoir.

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