Retour à l'océan

Chapitre 7 : Mauvaise graine et nouvelle rencontre

3038 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 17/12/2021 00:17

Il s'était écoulée un peu plus d'une heure depuis que Mélodie avait fait la connaissance de la bande à Calypso et elle s'était rendue à l'évidence qu'elle aimaient bien se moquer ou jouer des tours aux poissons et autres animaux marins.


Peu de temps après qu'Ariel avait pris la route du palais, la troupe avait imposé un bizutage à Mélodie consistant à taguer sur la carapace d'une vieille tortue de mer endormie avec un morceau de corail sans se faire surprendre. Bien que réticente à l'idée d'approcher une pauvre tortue et de souiller sa carapace, la jeune sirène avait dû se résigner à s'exécuter si elle voulait une chance de faire officiellement partie de la bande. Tout en veillant à ne pas réveiller le reptile et ne sachant quoi inscrire sur sa carapace, elle se contenta de dessiner grossièrement un papillon, ce qu'elle savait faire de mieux, avant de filer en catimini.

Une réussite selon ses nouvelles copines, la tortue n'ayant même pas remarqué la présence de Mélodie à son réveil, bien qu'elles durent lui demander ce qu'elle avait inscrit sur la carapace, ne reconnaissant pas du tout cette forme. Mélodie avait dû donc leur expliquer ce qu'était un papillon, comme étant un équivalent aux crevettes sous la mer mais avec des ailes et plus de couleurs, laissant ses camarades de plus en plus perplexes.

Calypso en avait finalement déduit que Mélodie avait passé le test avec succès et qu'elle avait officiellement intégré la bande.


Elles passèrent l'heure suivante à se moquer de Sébastien, bien qu'étant leur professeur de chant, en imitant grossièrement son accent des îles caractéristique.

— Heureusement qu'il nous écrit ses textes, se plaignit Calypso. Autrement on passerait des heures à comprendre ce qu'il nous fait chanter plus qu'à vraiment chanter. Je te jure, Mélo, si un jour tu songes à intégrer ses cours, il faudra t'accrocher. Parce que c'est un cauchemar de déchiffrer ses indications avec le dialecte qu'il a.

Mélodie ne savait quoi répondre à ça. Elle n'avait rien contre le crabe ou son accent, il le trouvait même plutôt rigolo et que son dialecte lui donnait un certain charisme. Quant à suivre des cours de chant, elle ne se sentait pas du tout être prête à chanter en public. Elle osait à peine chanter en présence de sa propre mère, réputée pour chanter comme une déesse, de peur de ne pas pouvoir lui arriver à la cheville et celui faire honte.


Finalement, une des sirènes vint annoncer à la bande qu'un certain Mr Boule était de sortie.

La bande s'en alla alors se cacher à la sortie d'un ravin d'où était supposé sortie le prénommé Mr Boule. Mélodie, qui jusque-là n'avait fait que suivre le mouvement sans comprendre de quoi il en retournait, voulut demander à ses nouvelles copines qui était ce "Mr Boule" et pourquoi elles devaient se cacher. Elle n'eut droit qu'à des "chut" de la part de ses copines pour réponse.

Finalement, un poisson tout ce qu'il y avait de plus ordinaire sorti du canyon et ce fut à ce moment précis que les jeunes sirènes sortirent de leur cachette et hurlèrent à l'unisson "Attention !". Le poisson pris de peur se gonfla instantanément d'eau jusqu'à devenir tout rond comme un ballon devant les sirènes goguenardes.

Mélodie comprit alors qui était ce fameux Mr Boule. Un poisson-globe.

— Il se fait avoir à chaque fois ! lui expliqua une des sirènes toujours pliée de rire.

Il s'avérait que sous cette forme de ballon, Mr Boule avait du mal à nager et semblait même se laisser emporter par le courant.

— Sales petites pestes ! s'énerva le poisson-globe. Vous et vos jeux débiles ! Vous n'avez rien d'autre à faire de vos journées ?

— Mmh... Non ! répondit Calypso d'un ton méprisant en poussant le poisson d'un coup de hanche.

La bande joua aussitôt au ballon avec le malheureux poisson-globe qui se plaignit des jeunes d'aujourd'hui et de leur manque de respect tout en se faisant ballotter par les coup de nageoires des sirènes.

Mélodie hésita à prendre part au jeu de ses nouvelles copines, ressentant de la peine pour le pauvre Mr Boule.

— Hé, Mélodie ! cria une des sirènes en lui lançant le poisson d'un coup de queue. Attrape !

Face à cette invitation, Mélodie fut bien contrainte de jouer le jeu.

En temps normal, elle aurait manqué le ballon en se couvrant la tête pour ne pas se le prendre en pleine figure. Mais sous l'eau, c'était comme si ça se passait au ralenti.

Elle eut par conséquent le temps de calculer son coup avant d'attraper Mr Boule avec ses deux mains. Le poisson était tout mou et avait la peau rugueuse, comme de petites pointes qui s'y étaient hérissées en se gonflant.

Mélodie fut toute contente. C'était la première fois qu'elle arrivait à réceptionner une balle durant une partie. Mais elle dut vite calmer sa joie en remarquant l'air dépitée de ses nouvelles copines et que sous la pression de ses mains, Mr Boule était parvenu à se dégonfler et à filer furax.

— On aurait peut-être dû lui expliquer qu'on ne jouait pas avec les mains, murmura une des sirènes honteuse.


Mélodie voulut s'excuser auprès de ses copines d'avoir ainsi gâché leur jeu quand elle vit une silhouette menaçante nager lentement vers le groupe. Une silhouette de...

— REQUIN !!!

Prise de panique, Mélodie alla se réfugier à l'intérieur du ravin. Elle avait déjà eu l'occasion de voir des requins de toutes sortes, ramenés de la mer par des pêcheurs aguerris mais c'était la première fois qu'elle en voyait un aussi gros. Il était deux fois plus long que le grand requin blanc, le plus gros et terrifiant squale qu'elle connaissait. Quand elle le vit ouvrir la bouche, elle devina que la gueule était suffisamment énorme pour l'engloutir en une seule bouchée.

Mélodie tremblait de peur à mesure que le squale approchait, mais à sa grande surprise, aucune de ses copines ne prit peur et n'alla se cacher ou prendre la fuite. Elle semblait plutôt rigoler de l'attitude de Mélodie.

— Mais pourquoi vous riez ? leur demanda cette dernière a la fois perplexe et nerveuse. Le requin ! Il fonce droit sur nous !

— Relax, Mélo ! la calma Calypso. Tu vois bien que c'est une espèce inoffensive.

En regardant plus attentivement le squale de couleur gris-brun qui n'était plus qu'à deux coups de nageoire de la bande, Mélodie se rendit compte qu'effectivement, le requin n'avait rien d'aggressif. Contrairement à ce qu'elle disait à l'instant, il ne fonçait pas du tout vers le groupe de sirène, il se contentait de nager lentement et même paresseusement à côté du groupe sans y prêter davantage attention, comme s'il prenait son temps. Et surtout, plus surprenant, il n'avait pas de dents.

Même le regard du squale n'avait rien d'un prédateur sauvage et assoiffée de sang. Plus celle d'un animal tout ce qu'il y avait de plus placide.

Seules sa taille et sa bouche béante mais édentée le rendaient intimidant.

Rassurée, Mélodie sortit lentement de sa cachette. Elle vit alors Calypso se saisir d'un oursin agrippé sur la paroi rocheuse.

— Tu veux voir à quel point ce gros poisson n'est pas cap de faire du mal à une crevette ? lui dit-elle en affichant un sourire malicieux.

Mélodie n'eut pas le temps de répondre que ni une ni deux, Calypso jeta son oursin sur le requin. Les autres l'imitèrent et l'inoffensif squale fut assailli d'oursins puis de coquillages et de cailloux. Il fléchi sous les projectiles mais ne chercha pas pour autant à se défendre ou à contre-attaquer. Il se contenta seulement de prendre la fuite. Même au "pas de course", l'animal ne nageait pas plus vite qu'une sirène à son rythme de croisière.

Mélodie ressentit de la peine pour ce requin qui ne faisait que passer. Elle avait eu le temps de lire la détresse dans son regard avant qu'il ne prît la fuite. Elle s'en voulait même de l'avoir pris pour un monstre quelques minutes plus tôt. Elle se tourna alors furax vers ses "copines" en train de se moquer de l'animal.

— Quel gros naze, ce requin ! Vous avez vu ?

— Un colosse mis en déroute par cinq pauvres petites sirènes !

— Et c'est supposée être une terreur des mers !

— Si vous voulez mon avis, c'est plus une erreur des mers !

— MAIS C'EST QUOI VOTRE PROBLÈME ? lâcha enfin Mélodie.

— Ben quoi ? Il t'as effrayé, on l'a chassé ! se défendit une des sirènes.

— Ne nous remercie pas, surtout ! se plaignit une autre.

— Mais il ne faisait rien de mal ! les gronda Mélodie. Vous avez dit vous même qu'il était inoffensif. Alors pourquoi l'avoir attaqué ?

— Ben... Justement par qu'il trop placide pour riposter ! répondit Calypso. Tu préfères qu'on s'attaque à ceux qui sont vraiment dangereux ? Qui ont de vrais dents pointues, tranchantes et qui bouffent les petites sirènes ?

— Au moins, ce serait justifié ! rétorqua Mélodie.

— Hé ! Si t'es pas contente, t'as qu'à retourner à la surface et y rester ! lui lança méchamment Calypso.

Mélodie prit cette remarque comme une claque. Elle brûlait d'une envie furieuse de hurler ou de sauter à la gorge à cette sirène prétentieuse. Elle n'en fit rien. Et elle ne saurait expliquer si c'était de la retenue ou de la peur. Elle se contenta de fixer Calypso tremblante de fureur. Cette dernière finit par se lasser.

— Venez, les filles ! ordonna-t-elle à ses copines. Allons là où personne ne viendra nous casser les nageoires !

— Peut même plus s'amuser tranquille ! marmonna une de ses copines. Quelle rabat-joie !

— Tu m'étonnes qu'elle n'ait aucun ami a la surface ! murmura une autre.

Mélodie laissa les sirènes s'en aller et attendit qu'elles soient toute partie pour s'en aller en pleur dans la direction opposée.


Elle finit par trouver refuge dans une épave, en périphérie de la cité d'Atlantica, faisant office de dépotoir pour les citadins aquatiques.

À l'abri des regards indiscrets, elle pleura à chaudes larmes pendant une bonne heure.

Elle avait honte. Honte d'avoir pensé une seconde qu'elles pouvaient être amie avec de telles pestes, qu'elle pouvait intégré le groupe. Elle y avait pourtant cru pendant un moment, cru que les choses seraient différentes en tant que sirène. Mais finalement, qu'elle fût humaine ou sirène, elle n'arrivera jamais à s'intégrer ni à se faire des amis.

Et qu'allait-elle dire à sa mère ? Ne risquerait-elle pas de la décevoir ? La jeune sirène avait bien conscience que c'était pour elle que sa mère avait décidé de retourner à l'océan alors que dans sa jeunesse, son rêve était de vivre à la surface parmi les humains. Elle avait le pressentiment d'avoir tout gâché. Et pas seulement sa chance de se faire des amis et de s'intégrer.

— Tu n'as rien ?

Mélodie sursauta au son de cette petite voix fragile et fut surprise de se trouver nez à nez avec une nouvelle sirène, également de son âge. Et qui fut aussi surprise qu'elle.

— Pardon, je ne voulais pas te faire peur ! dit-elle en essayant de se rattraper face à la réaction effrayée de Mélodie. Je passais dans le coin, j'ai entendu quelqu'un pleurer et je voulais voir ce qui n'allait pas... Mais ne t'en fais pas, je ne vais pas te faire du mal.

Une chose était sûre, elle ne faisait pas partie de la bande de Calypso, autrement Mélodie l'aurait de suite reconnu. Elle avait la peau basanée, les cheveux noirs mi-longs, frisés et sa queue de poisson était de couleur orange carotte. Elle portait sur son épaule une besace apparemment chargé. Et surtout, Mélodie ressentait la sincérité et la gentillesse de cette sirène inconnue, autant dans voix que dans son regard. Elle devina par conséquent qu'elle n'avait rien à voir avec celles qu'elle venait de larguer.

— Au fait, j'en oublie mes bonnes manières avec tout ça, je m'appelle Morgane, se présenta la nouvelle.

— Mélodie.

— Alors, Mélodie, qu'est-ce qui t'arrive ? demanda Morgane. Qu'est ce tu fais toute seule dans cette épave ? T'es pas blessée, au moins ?

— Non non, j'suis pas blessée, je me cache c'est tout.

— Tu te caches ? D'un requin, j'imagine ?

— Au non, pire que les requins.

— Euh... Je ne te suis pas, désolée.

— Je viens de me disputer avec des enfants-sirènes avec lesquelles je pensais devenir copine mais elles se sont révélées odieuse et mesquines.

— Oh laisse moi deviner ! Calypso et sa bande ?

— Tu les connais ?

— Si je les connais ?... T'es nouvelle dans le coin, n'est-ce pas ?

— On vient de s'installer hier avec ma mère.

— D'accord !... Parce qu'à Atlantica, on les connait bien, Calypso et sa clique. Et pas vraiment en bien. Crois-moi, tu ne fais pas plus pimbêche et plus garce que Calypso !

— J'avais remarqué, ouais !

— Sous prétexte que ses parents sont les plus riches et les plus influents d'Atlantica après le Roi Triton en personne, elle se croit tout permis. Et elle a une très mauvaise influence sur celles qui veulent être amie avec elle.

— Ça aussi, j'avais remarqué !

— Je ne sais pas ce qui s'est passé entre elles et toi, mais tu fais bien de les larguer. Elles t'auraient rendue aussi débile qu'elles.

Mélodie laissa échapper un rire gêné, se rendant compte que Morgane n'avait peut-être pas tort la dessus. Puis le rire jaune fit place à un rire plus sincère et finalement les deux petites sirènes se mirent à rire comme des baleines.

— Et au fait, Morgane, qu'est ce qui t'amène ici ? demanda Mélodie. C'est pourtant pas un lieu de rencontre idéal.

— Ah ! Et bien... Hum... Tu me promets de ne pas te moquer ? demanda à son tour Morgane un peu gênée.

— Promis !

— Alors il faut que tu saches que je viens d'une famille nombreuse et... Disons que financièrement... On est un peu à sec.

— Oh ! Tu m'en vois navrée.

— Bah, ne t'en fais pas pour ça ! Du coup, pour arrondir nos fins de mois, je traîne dans les épaves à la recherche d'objets de la surface en pas trop mauvais état que je récupère pour les vendre à la foire à ceux qui en trouveront une utilité. Tu dois trouver ça bizarre...

— En quoi ? Si toi et ta famille avez des problèmes financiers, il est normal que vous vous fassiez un peu d'argent...

— Je veux dire, que j'accorde autant d'intérêt à des objets créés par les humains et dont aucune sirène sensée ne voudrait dans sa hutte...

— Ah, ça ! Ben non, je ne vois pas du tout où est le problème ! Et tu sais quoi ? Quand elle était jeune, ma mère avait toute une collection de ce qu'elle trouvait dans les épaves. Elle me l'a raconté il y a peu de temps.

— Vraiment ? Alors il faut que tu me la présentes, que je lui demande si ça l'intéresse toujours.

— Et alors, ce que tu as dans ton sac... ?

— Ceux sont mes dernières trouvailles, oui ! Tu veux les voir ?

Mélodie, curieuse et satisfaite d'oublier sa mésaventure avec Calypso et sa clique, répondit d'un hochement de tête. Morgane déballa donc le contenu de son sac, révélant ainsi un chandelier à trois branches à qui il manquait les bougies, une horloge à pendule, une théière et une tasse de thé. Tous étaient en très mauvais état et même légèrement oxydes par l'eau de mer, mais Mélodie les reconnut au premier coup d'œil.

— Tu ne dois avoir aucune idée de ce que ça peut bien être, lui dit Morgane. Ou de à quoi ça peut servir.

— Ben... Tu vas rire, mais... J'ai vécu pendant un temps à la surface, lui répondit Mélodie.

— Tu as... À LA SURFACE ??? s'écria Morgane qui en tombait des nues. Mais comment ? C'est impossible de vivre à la surface ! À moins de...

— C'est une longue histoire, ne te la raconterai plus tard ! la calma Mélodie. Ce que je veux dire c'est que je connais bien le nom et l'utilité de tes dernières trouvailles. Par contre, je doute qu'elles auront la même utilité qu'à la surface.

— Ah bon ?

Mélodie expliqua alors à sa nouvelle copine l'utilité qu'avaient les objets trouvés à la surface, en commandant par la théière et la tasse. Elle dût alors lui expliquer ce qu'était le thé qu'elle décrivit comme une boisson chaude mélangée avec de l'herbe séchée pour donner du goût et réchauffer.

— Une fois j'y voulu y goûter pour voir quel goût ça avait, raconta Mélodie. Et j'ai trouvé ça infect.

Elle enchaîna avec le chandelier et dût pour cela expliquer à Morgane le concept du feu, chose qu'elle ne risquait pas de trouver sous l'eau.

Elle termina avec l'horloge.

— Normalement, ce truc est censé indiqué l'heure, expliqua-t-elle. Mais avec les rouages noyés, elle risque de moins bien marcher (elle gloussa brièvement). Oh mon dieu ! L'heure ! Le soir tombe !

— Ah maintenant que tu le dis... On a pas vu le temps passé ! confirma son amie.

— Désolée, Morgane, mais il faut que je sois rentrée si maman va se faire un sang d'encre !

— Alors laisse-moi t'accompagner ! T'es encore nouvelle et c'est plus prudent qu'on fasse le voyage à deux.

Mélodie n'y vit aucune objection et accepta la compagnie de Morgane.


Note de l'auteur : La Morgane de cette fanfic n'a rien à voir la Morgana de la suite officielle. C'est un tout autre personnage qui est introduit dans ce chapitre.

Laisser un commentaire ?