Kingdom Hearts III : La quête des Cœurs perdus

Chapitre 12 : Nouvelle vie - À sa place

12481 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 08/02/2024 00:00

Les Gardiens ont pu sauver le Jardin Radieux et entrer en contact avec Sora, mais ce dernier a de nouveau disparu en leur confiant Roxas ; Riku a respecté le choix de son ami, laissant ainsi le Simili reprendre là où l’Élu s'était arrêté, mais… cela se passera-t-il comme prévu ?

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 Allongé sur "son" lit au colisée, Roxas fixait le plafond avec lassitude, un bras mollement rabattu sur le visage.

Une journée et demie était passée depuis l'invasion du Jardin Radieux suite au mystérieux piratage informatique. Malgré toutes leurs recherches, ni Cid, ni Even ni même Ienzo n'avaient pu déterminer d'où venait l'attaque ou qui l'avait provoquée. Mais savoir qui avait infiltré l'ordinateur n'avait plus d'importance à présent ; la ville avait été sauvée en évitant d'énormes dégâts. Le système aussi, bien que Tron ait mis plusieurs programmes en quarantaine pour s'assurer que tout soit rentré dans l'ordre.

Cependant, il restait un problème. Un énorme problème.

Les données d'Ansem n'étaient plus accessibles. Ce n'était pas leur décryptage qui posait problème, Tron l'avait assuré. Elles étaient tout simplement protégées par un mot de passe. Et bien sûr, personne ne l'avait trouvé, rendant le tout encore plus frustrant.

Mais au moins, elle étaient décodées et en sécurité. Il suffisait juste de trouver le bon mot de passe et…

On a quand même fait tout ce chemin pour rien. Et Sora nous a carrément laissés tomber.

L'adolescent soupira encore, puis s'assit sur le lit. Riku, voulant respecter la demande de son ami, avait sur ordre de Yen Sid envoyé le Simili reprendre l'entraînement au Colisée. C'était la meilleure chose à faire, et pouvait même encourager Sora à revenir parmi eux, selon le sorcier.

Comme si c'était ça le plus important, le retour de leur cher Élu.

Contrairement à ce que le garçon pensait, il fut facile de tromper Hercule et Philoctète ; Donald et Dingo justifièrent leur absence et l'humeur de l'adolescent par un besoin de changer d'air après l'accident du temple. Et si ça n'avait tenu qu'à lui, Roxas aurait presque affirmé que c'était vrai. Ce n'était peut-être pas lui qui avait bu la tasse ce jour-là, mais il avait tout vu. Vu Sora se débattre, s'acharner contre les rochers pour s'enfuir. Vu l’Élu de la Keyblade paniquer, appeler à l'aide des amis qui n'étaient jamais venus. Sentit le désespoir et la terreur étouffer le garçon encore mieux que l'eau, sentit la dernière bulle d'air quitter lâchement son corps en le laissant mourir seul, sans personne

Roxas se frappa la tempe ; il n'avait pas à se remémorer ces évènements. Il l'aurait fait volontiers si ça faisait revenir Sora, mais là, c'était juste un rappel désagréablement gratuit.

Poussant un nouveau soupir, l'adolescent se leva et rejoignit la cour d'entrée où l'attendait Donald et Dingo. C'était l'heure de leur "mission", comme disait Philoctète, et cette fois le satyre avait décidé d'envoyer le groupe au pied du Mont Olympe tabasser du Sans-cœur. Roxas enfourcha Pégase que chevauchait déjà Hercule, suivi par Donald et Dingo, et tous s'envolèrent vers leur destination.

Quelques minutes plus tard, le groupe atterrit dans un cirque naturel où coulait un petit ruisseau. Quelques installations grossières en pierre témoignaient d'un passage humain régulier, mais aucun autre être vivant n'était sur les lieux. Pas la moindre trace de vie animale, aucun son, pas même un paillon butinant les fleurs.

C'était étrange… et effrayant.

L'olympien raconta aux trois combattants que la faune y avait brusquement disparue quelques jours plus tôt, sans explications. Compte tenu du petit nombre de Sans-cœurs présents, il estimait la zone sans risques majeurs et laissa le groupe explorer de son côté, avant de partir dans la direction opposée.

Sans même attendre ses camarades, l'adolescent remonta le ruisseau, ignorant les remarques de Donald sur l'importance de s'entraîner ensemble, et décida même de partir tout seul devant, laissant sur place les deux amis de Sora.


Roxas élimina d'un coup de Souvenir Perdu une Ombre errante, avant de s'arrêter pour faire l'état des lieux : pour l'instant, seules ces dernières et des Soldats rodaient dans les coins ombragés qui commençaient à se faire plus fréquents par ici. Mais rien d'alarmant.

Dans ce cas, pourquoi la faune avait disparue ? Étaient-elle victime de ces faibles Sans-cœurs ? Même les insectes ?

C'était inhabituel que les créatures des Ténèbres se montrent aussi agressives. Certes, les animaux étaient eux aussi dotés d'un cœur, mais ceux des humains étaient plus attractifs avec leur part d'obscurité. Les bêtes d'ici n'étaient pas aussi complexes que dans d'autres mondes qu'avait visité Sora…

Plongé dans ses pensées, l'adolescent sursauta à un craquement non loin, et remarqua plusieurs Ombres se précipiter dans une fissure de la roche comme attirées par quelque chose. Intrigué, le jeune homme s'avança prudemment vers la faille, et s'aperçut qu'il ne s'agissait pas que d'un simple trou ; c'était en fait l'entrée d'une grotte au plafond plongé dans l'obscurité. Une autre ouverture que perçait la lumière était visible à l'autre bout, faisant des lieux un passage à travers la montagne.

Roxas plissa les yeux, essayant d'y voir un peu plus clair. Mais rien. Pas moyen d'en distinguer les détails, du moins… d'ici. L'adolescent hésita ; il ne savait pas où étaient passées les Ombres, et rien que l'idée d'un lieu aussi sombre lui inspirait méfiance. Mais la crevasse donnait sur un autre endroit qu'il faudrait explorer, et le chemin avait l'air très court d'ici à l'autre bout…

C'est donc avec précaution et Souvenir Perdu serrée dans sa main que le garçon pénétra dans la sinistre cavité.

Au début il n'y vit presque rien, aveuglé par la lumière du dehors. Un frisson lui parcourut l'échine, et il fit une pause juste à l'entrée pour être sûr de pouvoir déguerpir à la moindre attaque. Puis peu à peu sa vision s'habitua à l'obscurité ambiante, et il osa enfin s'avancer un peu plus dans les ténèbres, sentant doucement une atmosphère fraîche tomber sur lui. Au lieu de le mettre sur ses gardes, cette sensation le rassura presque, comme s'il était dans son élément ici…

Troublé par cette impression d'aise, le jeune homme secoua la tête et jeta un rapide coup d’œil aux alentours ; le passage était étroit mais un peu circulaire, comme un dôme informe. L'obscurité empêchait l'observation des hauteurs, mais rien ne troublait l'immobilité des Ténèbres qui y siégeaient. Aucune trace des Ombres ayant pénétré sur les lieux… Sans doute avaient-elles atteint l'autre c-

Roxas fut soudain happé haut dans les airs. Alors qu'il sursautait, ses membres se raidirent par réflexe (et par force) contre ses flancs ; il sentit en même temps une chose poisseuse se coller à lui, et tourna la tête pour voir ce qui l'avait attrapé.

Ses iris couleur de ciel croisèrent deux orbes jaunes et luisants qui le fixaient, affamés. Ceux d'un Sans-cœur.

Dans un réflexe, le garçon leva Souvenir Perdu vers le monstre… pour se rendre compte qu'il ne pouvait pas bouger d'un pouce. Écarquillant les yeux, Roxas baissa le regard vers s-le corps de Sora et constata avec horreur que des fils gluants l'entravait, plaquant sa Keyblade contre sa jambe. Un autre fil lui avait couvert la bouche et coupa court au cri de détresse qu'il essaya de pousser.

Roxas se débattit de toutes ses forces, mais rien à faire : les liens étaient non seulement collants mais aussi élastiques, rendant ses tentatives d'échappatoires vaines et épuisantes.

Redirigeant ses yeux écarquillés vers le Sans-cœur araignée, l'adolescent ne put que futilement tenter de reculer quand la créature approcha son énorme tête de lui.

Quel idiot, pourquoi était-il parti tout seul ? Comment il allait s'en sortir maintenant ?

Sans réfléchir, le garçon invoqua un sort au hasard pour tenter de toucher les fils ou le monstre ; mais le Glacier conjuré en panique ne fit qu'égratigner sa jambe dans une morsure glaciale, sa Keyblade restant collée contre lui sans pouvoir modifier sa trajectoire.

Il était seul, et sans défense.

L'affreuse réalisation lui broya les tripes alors qu'un frisson horrible lui parcourut l'échine, tandis que le Sans-cœur poussait un grondement sourd, prêt à lui dévorer le cœur.

- ROXAS ! RAMÈNE-TOI ICI TOUT DE SUITE OÙ QUE TU SOIS !

La voix nasillarde fit sursauter à la fois le garçon et la créature, laquelle se retira prestement dans les hauteurs couvertes de toiles en emportant sa précieuse proie. Le jeune homme eut presque un sursaut d'espoir et se débattit de toutes ses forces, criant aussi fort qu'il le pouvait derrière son bâillon ; s'il faisait assez de bruit, il avait une chance que Donald et Dingo le repèrent.

Qui te dis qu'ils vont t'aider toi ?

…S'il ne l'aidaient pas, alors Sora où qu'il puisse être ne survivrait pas. Ils n'allaient quand même pas le laisser redevenir Sans-cœur, n'est-ce pas ?

Alors qu'il se débattait, Roxas sentit le monstre resserrer ses entraves pour freiner ses tentatives. À ce rythme-là, il n'aurait plus aucune force pour se défendre, même libéré.

- Tu crois vraiment qu'il serait entré là-dedans ? râla la voix du canard, plus proche.

- Il faut au moins qu'on aille voir, Donald ! Si ça se trouve il est de l'autre côté, fit celle inquiète de Dingo.

Un soupir agacé lui répondit, et quelques instants plus tard les deux compagnons de Sora entraient dans la grotte. L'adolescent se débattit de plus belle, poussant de misérables cris étouffés pour attirer leur attention vers les hauteurs où le monstre le cachait. Mais à son désespoir, les combattants n'entendirent rien et poursuivirent leur chemin vers la sortie qu'il n'avait pu atteindre. Il fallait qu'il attire leur attention avant qu'ils ne sortent, ou il était perdu.

Alors qu'il essayait de se dégager, Roxas réalisa que sa seconde main était restée libre. Il ne pouvait peut-être pas se défendre, mais… Sans plus attendre, il invoqua Tendre Promesse et la laissa tomber au sol, priant pour qu'elle tombe en faisant du bruit.

Mais l'épée se figea net en l'air. L'adolescent réalisa alors avec horreur qu'elle s'était emmêlée dans des toiles, sans attirer l'attention des deux compagnons qui avaient presque atteint l'autre côté. Un faible sifflement le fit se retourner lentement vers le Sans-cœur derrière lui, qui le fixait de ses yeux sans vie.

Alors qu'il se recroquevillait pour s'éloigner du monstre, quelque chose frôla sa main en émettant un reflet lumineux. Tournant un instant les yeux vers la chose, il vit distinctement un petit objet familier chuter entre les toiles et dépasser sa Keyblade.

Le porte-bonheur de Kairi.

La petite étoile tomba au sol en un petit tintement… juste derrière Dingo. Un frisson d'horreur envahit l'adolescent ; mais presque aussitôt, le capitaine s'arrêta, une oreille levée comme ayant entendu quelque chose :

- …Qu'est-ce que t'as encore ? fit son camarade en le voyant s'arrêter.

Le chevalier se retourna alors et vit au sol le précieux objet, qu'il ramassa :

- Attends… c'est le porte-bonheur de Sora ! Il était pas là avant !

Les deux compagnons se regardèrent brièvement, avant d'avoir la même idée et de lever les yeux au plafond.

- ROXAS !

Juste quand l'adolescent soupirait de soulagement en voyant les amis de Sora le remarquer enfin, un sifflement agressif lui rappela soudain la présence du monstre juste derrière lui. Il se retourna avec horreur pour voir le Sans-cœur abattre une griffe dans sa direction, avant qu'un bouclier ne le frappe en pleine tête ; Roxas sentit une douleur aiguë lui traverser la jambe quand il pivota son corps pour esquiver le coup. Un Brasier X le frôla et toucha l'araignée géante qui recula prestement. Se débattant pour se libérer, l'adolescent vit des braises ronger les fils le maintenant en l'air, et quelques instants plus tard la gravité exerça à nouveau son attraction sur lui. Poussant un cri de peur réflexe, le garçon sentit sa chute s'arrêter doucement alors qu'un long objet dur entrait en contact avec son dos, avant que les toiles qui avaient retenues Tendre Promesse ne lâchent à leur tour, le faisant définitivement tomber au sol.

Lâchant un grognement de douleur, le jeune homme se remit de la chute et reprit sa lutte ; Dingo le rejoignit bien vite et déchira les fils entravant ses bras, l'aidant à s'asseoir :

- Roxas, tu vas bien ?

- Je m'en tire ! fit l'adolescent en arrachant la toile qui le bâillonnait. Occupe-toi de ce truc !

Le chevalier resta néanmoins à ses côtés pour retirer le reste des entraves et l'aida à se relever, alors que Donald envoyait un autre Brasier X sur le Sans-cœur qui disparaissait dans les ombres de sa cachette. Roxas lança lui aussi un sort de feu, avant de tirer par le bras les compagnons de Sora vers l'extérieur, ne voulant pas rester sur ces satanés lieux plus longtemps.

Le garçon ne consentit à s'arrêter que lorsqu'ils furent sortis et suffisamment loin de la grotte. Épuisé par l'effort et l'adrénaline, il peina étrangement à reprendre son souffle, haletant et tremblant. Non, ce n'était pas lui qui tremblait, c'était sa jambe. Y jetant un coup d’œil, il remarqua la déchirure du tissu là où le monstre l'avait griffé et posa par réflexe sa main sur la plaie, lançant machinalement un Soin alors que Donald s'écriait enfin :

- Mais qu'est-ce qui t'as pris, à la fin ?

- Calme-toi, Donald ! Il pouvait pas savoir qu'il y avait un Sans-cœur là-dedans !

- Il pouvait faire plus atten-

- Donald, j'ai besoin que tu me soignes.

La réplique du garçon surprit les deux amis qui arrêtèrent aussitôt leur dispute pour le fixer avec stupeur.

- Pourquoi, tu sais pas te soigner tout seul ? grogna le canard, toujours de mauvaise humeur.

- Te poses pas de question et soigne-moi, se contenta de dire l'adolescent en comprimant encore sa plaie au sang noir.

- Je pose des questions si je veux ! répliqua le magicien en pointant un bâton se voulant menaçant vers Roxas.

- Il me reste une potion, si tu veux, fit alors Dingo en lui tendant l'objet.

Ce dernier prit aussitôt la bouteille et la vida d'un trait, avant de jeter à nouveau un coup d’œil sur sa griffure.

- J'ai besoin que tu me soignes, c'est tout, fit-il à nouveau en fixant sa blessure qu'il compressait toujours.

- Mais je-

- Donald…

Le magicien tourna alors la tête vers le capitaine qui avait posé la main sur son épaule, le suppliant du regard de faire comme l'adolescent lui disait. Le canard bougonna, mais s'exécuta. Roxas jeta à nouveau un œil à la blessure, puis se redressa et resta là sans rien dire, semblant réfléchir profondément. Le magicien croisa les bras et tapa du pied impatiemment, tandis que son camarade se tordait les mains inquiet. Donald ouvrit la bouche pour demander ce que l'adolescent comptait faire à rester là immobile quand Roxas parla enfin :

- Il faut qu'on parle à Maître Yen Sid.


À peine quelques heures plus tard, le Vaisseau Gummi s'arrêta près de la Tour Mystérieuse. Roxas n'eut même pas le temps de se lever de son siège que Donald frappa rageusement un bouton qui les fit instantanément disparaître du cockpit ; le Simili manqua de se vautrer par terre lors de la téléportation dans le bureau du mage, et se tourna aussitôt vers le canard :

- Pourquoi t'as fait ça ?

- Tu voulais voir Maître Yen Sid, on y est ! répliqua le magicien en croisant les bras.

L'adolescent l'ignora et se tourna vers le sorcier, lequel fixait l'horizon et se retourna vers le groupe, étonné :

- Je ne m'attendais pas à une visite de si tôt, fit-il en s'asseyant. Avez-vous du nouveau à propos de Sora, ou…

- Maître Yen Sid, pardonnez mon empressement mais j'ignore s'il nous reste beaucoup de temps, le coupa Roxas d'un ton navré en s'inclinant avec respect.

Donald et Dingo levèrent des sourcils confus, alors que le magicien ne s'offusquait pas de son léger manque de respect :

- Que se passe-t-il donc de si urgent, Roxas ?

- Et qu'est-ce que tu veux dire par "ne pas avoir beaucoup de temps devant nous" ? s'inquiéta le chevalier.

Le garçon baissa le regard en serrant les poings, comme hésitant et étrangement nerveux. Donald se mit à taper impatiemment du pied, mais ne fit pas plus de remarque sur un geste de Dingo. Enfin, Roxas releva la tête vers Yen Sid, une lueur anxieuse mais résignée dans ses yeux couleur de ciel, et, inspirant un grand coup, dit d'un ton solennel :

- Maître Yen Sid. Il y a-t-il une chance, une seule, que Xehanort ait réussi à s'emparer de l'un de nous sans que nous le sachions ?

Un lourd silence s'abattit dans la salle suite à cette déclaration, alors que Roxas fixait sans ciller le maître des lieux. Alors que Donald se demandait ce qu'il voulait dire, Dingo comprit et se figea, mains sur la bouche :

- Non ! Non ! Roxas, tu ne crois quand même pas dire que…

- Que quoi ? fit froidement l'adolescent en se retournant vers lui. Que c'est moi ou Sora ? Que l'un de nous est le treizième Chercheur des Ténèbres ?

À ces mots, Donald sursauta alors que le chevalier secouait la tête, anéanti. Yen Sid, étant resté silencieux jusque là, s'adressa alors au jeune garçon d'un ton grave :

- Roxas. Avant toute chose, peux-tu nous dire ce qui te pousse à envisager cette option ?

- Oui, qu'est-ce qui te fait croire un truc pareil ? s'exclama Donald. Riku a sauvé Sora lors de l'Examen, on était tous là pour le voir !

- Et s'il avait juste pu réveiller Sora, pas empêcher que Xehanort ne place un fragment de lui dans son cœur ?

Un nouveau silence s'abattit sur le groupe alors que Roxas rivait son regard au sol, poings serrés :

- Roxas… Pourquoi tu penses ça ? demanda le capitaine dévasté.

- Vous n'avez vraiment rien vu ? cracha l'adolescent d'un ton de reproche. Sora l'a dit lui-même ! Il passe trois mois à s'entraîner sans relâche sans retrouver aucun de ses pouvoirs, les Sans-cœurs s'acharnent sur lui au point que dès qu'il est seul une armée ou un monstre géant l'attaque, et depuis la fin de l'Examen il peut à peine se reposer ou dormir correctement sans faire de cauchemar ! Vous croyez vraiment que tout ça arrive par pur hasard ?

- Mais il a retrouvé des pouvoirs juste avant que tu reviennes ! protesta Donald.

- Lui ou un autre ? De ce qu'on sait, c'était peut-être même pas lui qui s'est battu contre Lea quand vous êtes rentrés !

- Et son truc avec les "mangeurs de rêves" et le train volant, c'était pas lui aussi ?

Le garçon ne répondit rien, se contentant de fixer durement le magicien.

- Roxas, je comprends que tu t'inquiètes des Sans-cœurs, commença doucement Dingo, mais ils sont plus nombreux à cause de Xehanort. Et Sora est un Porteur de Keyblade, ils sont très agressifs envers eux.

- Ils sont aussi très agressifs envers les cœurs emplis de Ténèbres, trancha le Simili en lui lançant un regard acéré.

Le sous-entendu fit se rétracter le chevalier, alors que Yen Sid reprenait la parole :

- Il est vrai qu'un cœur pourvu de puissantes Ténèbres attise le désir des Sans-cœurs, cependant rien ne nous démontre que le cœur de Sora en abrite une telle quantité, soit-elles siennes ou non…

- Si. Les Sans-cœurs s'acharnent encore plus sur lui qu'avant, et où qu'il aille ils apparaissent pour l'attaquer. Sur la Grille, au Jardin Radieux, et même au Colisée tout à l'heure ! Pourquoi s'en prennent-ils plus à lui qu'à vous ? Porter la Keyblade les attirerait pas à ce point !

- C'est n'importe quoi, s'écria Donald, Sora a toujours été très attaqué par les Sans-cœurs depuis qu'on le connaît ! T'es juste en train de te faire des idées av-

- Et ses cauchemars c'est moi qui me fait des idées, peut-être ? répliqua l'adolescent en lui jetant un regard noir.

- Quels cauchemars ? demanda Yen Sid.

- …Aucune idée. Mais je savais que Sora n'allait pas bien. Il avait du mal à dormir, et quand il y arrivait il rêvait beaucoup, et c'était souvent désagréable. Je sais pas ce qu'il voyait, mais je sentais qu'il aimait pas. C'est pour ça que j'essayais de le contacter.

- Tu essayais de le contacter ?

- Oui. Quand Sora a dit avoir l'impression que je lui parlais, il avait raison. On y est jamais vraiment arrivé, mais j'essayais de le contacter pour le rassurer.

- Ça allait si mal que ça ? fit le magicien.

L'adolescent lui jeta un autre regard noir, avant de remarquer que Dingo se triturait les mains, tracassé. Le garçon leva un sourcil, avant d'écarquiller les yeux en comprenant :

- Tu savais. Tu le savais qu'il n'allait pas bien, réalisa-t-il d'une voix effarée.

Le capitaine se tordit encore un peu les doigts, penaud, avant de lever un regard désolé vers le garçon :

- Sora n'aime pas vraiment qu'on s'inquiète pour lui, mais je sais s'il ne va pas même quand il essaye de le cacher. J-

- Tu le savais et tu n'as rien fait.

Les mots retentirent comme une sentence dans la salle. Roxas fixait à présent le chevalier d'un regard empli de reproches, et l'espace d'un instant le chevalier crut que c'était Sora qui le dévisageait de cet air blessé.

- Je voulais lui en parler, se défendit doucement Dingo, c'est juste que j'ai pas trouvé le bon moment pour-

- Tu savais qu'il allait mal et tu n'as absolument rien fait, répéta Roxas, chaque mot sonnant comme un coup de lame au cœur.

Le chevalier baissa les yeux, honteux :

- Je suis désolé.

- C'est pas à moi de le dire, cracha le Simili.

Un nouveau silence s'installa, avant que Donald ne le rompe :

- Bon OK, Sora allait pas bien, c'est vrai, mais c'est pas forcément parce que Xehanort a réussi à le posséder ! On est tous très occupés à essayer de trouver un moyen pour contrer ce type ou sauver les gens liés à Sora, alors c'est un peu normal qu'il soit pas de bonne humeur tout le temps, non ? C'est normal à son âge, quand même !

Roxas fixa alors le sol, comme s'il ne savait pas quoi répondre à cela. Mais alors que le sorcier allait reprendre la parole, l'adolescent releva doucement les yeux, refusant néanmoins tout contact visuel :

- Il y a autre chose… dont j'ai toujours pas parlé.

Le duo leva des sourcil intrigués, alors que le vieux mage fixait le jeune homme d'un air grave mais attentif. Inspirant à nouveau un grand coup, le garçon avoua d'une voix basse et honteuse :

- Le jour où je suis revenu… le jour où j'ai utilisé un Couloir des Ténèbres par pur réflexe… Quelqu'un d'autre m'a trouvé avant Axel.

- Qui ? demanda doucement Yen Sid.

Il y eut un silence insoutenable, avant qu'une phrase unique ne brise le silence :

- Ansem et Xemnas.

Les deux amis de Sora sursautèrent à cette annonce, avant que le canard ne hurle de colère :

- QUOI ? T'AS ÉTÉ VU PAR ANSEM ET XEMNAS ET TU NOUS AS RIEN DIT DU TOUT ?

- Que s'est-il donc passé ? demanda le mage en calmant d'un geste le canard.

- …Ils m'ont abordé près du vieux manoir, poursuivit Roxas d'une voix tremblante. I-Ils… ils m'ont rien fait, et j-j'ai tout fait pour qu'ils découvrent pas mon secret, mais… je sais pas pourquoi, mais j'arrête pas de me demander comment ils ont su que j… que Sora était ce jour précis, comment ils l'ont trouvé aussi vite… et plus j'y repense, plus je me demande si c'est pas parce qu'ils y cherchaient quelqu'un d'autre que Sora.

Un silence pesant s'abattit dans la salle, alors que le sous-entendu de Roxas laissa tout le monde pétrifié. Puis, après avoir médité un long moment, Yen Sid planta son regard sévère sur le jeune homme qui se tenait devant lui, droit et résigné.

- Donald, Dingo. Venez derrière moi.

- Quoi ? fit le magicien en ouvrant des yeux ronds. Pourquoi faire ?

- Aussi horrifiant que cela m'est de devoir le dire, il se peut que Roxas ait raison.

- Oh non, non… Maître Yen Sid, c'est peut-êt-

- Dingo, il existe effectivement de multiples explications aux évènements qu'on subit Sora et Roxas, mais le fait d'en voir autant arriver en si peu de temps, et avec cette hypothèse… Je le regrette, mais il y a effectivement une chance que Xehanort ait accompli ce qu'il prévoyait pour Sora.»

Le chevalier refusa d'y croire, dévasté, alors que Donald ne savait visiblement plus où se mettre. Roxas, qui avait parut l'espace d'une brève seconde choqué, avait retrouvé son calme et expression stoïque d'auparavant.

- Je ne peux voir ce que contient un cœur, seulement déduire le mal qui le ronge. Les Ténèbres et la Lumière qui s'y cachent me sont totalement inaccessibles, mais je peux cependant tenter d'en débusquer une partie.

D'un geste, le mage ordonna aux deux amis de Sora de le rejoindre. Dingo, toujours en plein déni, secoua la tête, mais Donald le poussa doucement derrière le bureau, semblant refuser tout contact visuel avec Roxas qui leur fit signe d'obéir à l'ancien Maître. Une fois cela fait, le sage leva lentement la main, sans quitter des yeux l'adolescent qui lui faisait face :

- Roxas. Je vais te faire passer un test qui nous révélera si des Ténèbres appartenant à Xehanort se cachent en Sora. Tout ce que tu dois faire est rester à ta place et attendre que j'ai fini. Ce qu'il adviendra nous éclairera sur la question. Sache cependant que, dans le cas où une partie de Xehanort serait dissimulé en Sora, ce que je m'apprête à faire pourrait très bien le réveiller à ta place. Es-tu prêt ?

Les derniers mots figèrent le jeune homme, mais il serra les poings, résigné. Un coup d’œil vers les deux amis de Sora lui fit cependant comprendre qu'eux n'étaient visiblement pas prêts.

- Donald, Dingo, écoutez-moi bien : si jamais j'ai raison, et que Xehanort arrive à posséder Sora… N'hésitez pas.

- M-

- Cette chose ça sera pas Sora ! Quoi qu'il arrive, quoi qu'il advienne, vous ne devez pas hésiter. Arrêtez-le avant qu'il fasse plus de mal qu'il en a déjà fait.

La réplique froide mais résigné du jeune homme figea les deux amis qui se concertèrent du regard, puis hochèrent la tête, tristes mais déterminés, avant de fixer le garçon avec appréhension. Ce dernier tourna alors son attention vers l'ancien Maître, serra les poings pour arrêter les tremblements qui agitaient tout son corps, puis inspira un grand coup :

- Allez-y. Je suis prêt.

Une grand lumière scintilla alors dans la paume levée du magicien, faisant aussitôt reculer l'adolescent devant son intensité alors qu'il essayait de protéger ses yeux de cette lueur impitoyable.

Est-ce que j'ai peur ? Est-ce que la Lumière me fait mal ?

Puis, comme voulant affronter ce halo qui faisait pleurer ses iris, Roxas baissa doucement les bras devant cet éclat qui ne faisait que luire davantage face à lui. Et d'un coup, il fut comme… intrigué par cette lueur. Sans savoir pourquoi, il baissa complètement les bras, fixant sans ciller la Lumière qui envahit sa vision, ne laissant rien derrière elle excepté du blanc.


Roxas cligna des yeux, et tout devint brillant et immaculé autour de lui. L'espace devant lui luisait d'un éclat intense, rayonnant de vie et de bonté. Ses iris bleu du ciel s'emplissaient de cette lueur accueillante et rassurante qui l'attirait dans sa douce chaleur. Il fit un geste en avant, prêt à se laisser glisser dans cette étreinte qui l'appelait ; quelque chose derrière lui attira son attention. Il tourna quelque peu la tête, mais la Lumière qui l'appelait était la plus forte et il ne la quitta pas des yeux. Il sentait sa présence derrière lui, il était là…

Mais alors, pourquoi il ne bougeait pas ? N'était-il pas attiré lui aussi par la Lumière ? Pourquoi lui tournait-il le dos ? À moins que…

La Lumière l'appela à nouveau, telle un tintement doux et secret. Il tourna à nouveau son regard vers elle, captivé. Elle était si belle…

Il aurait voulu les emmener avec lui, les entraîner dans son étreinte rassurante, qu'ils connaissent eux aussi sa chaleur réconfortante et douce…

Mais ils restaient en arrière, comme apeurés ou… tout simplement pas intéressés par elle.

C'était dommage, mais si tel était leur choix…

Sans attendre et sans un regard vers ceux qu'il laissait derrière, il s'avança dans la Lumière et se laissait glisser dans son étreinte rassurante.


Lentement, Roxas ouvrit des paupières lourdes mais étonnement reposées et posa le regard sur un ciel d'étoiles et deux visages étranges qui le fixaient avec appréhension. Clignant des yeux quelques instants, sa vision s'accommoda enfin pour lui révéler Donald et Dingo penchés sur lui, morts d'inquiétude. Le jeune homme leva lentement la tête, se demandant comment il avait fait pour se retrouver étalé par terre.

Et soudain tout lui revint en mémoire, et le Simili se redressa d'un bond pour voir Yen Sid assis à son bureau, yeux fermés dans une expression grave.

Le garçon scruta fébrilement ses alentours, et comprit qu'ils étaient toujours dans le bureau du sorcier. Il semblait juste s'être écroulé par terre, comme s'il s'était assommé ou…

Soudain prit d'un doute, l'adolescent se tourna vers le mage toujours muet :

- M-Maître Yen Sid ? Qu'est-ce que… J-J'ai échoué, c'est ça ? Xehanort s'est emparé de m…

- Non, Roxas, dit alors gravement le vieux sage en ouvrant ses yeux sévères. Sois sans craintes. Le cœur de Sora n'a révélé aucune présence de lui en son sein.

Le garçon se figea, complètement pris de court. Il pensait vraiment, avait réellement cru être porteur de leur pire ennemi ; se faire annoncer le contraire était une surprise totale. Alors, tout ce qu'il avait cru être des signes de Xehanort, ce n'était juste que…

- Tu vois que c'était pas grave ces sautes d'humeur ! Pourquoi t'as voulu nous faire peur avec ça ? s'écria Donald, visiblement déjà débarrassé de son inquiétude.

- M-Mais je… qu'est-ce qui s'est passé, alors ? Pourquoi je me suis évanoui, si c'est pas à cause de Xehanort ? bafouilla l'adolescent, désemparé.

Tous fixèrent alors le sorcier avec insistance. Ce dernier médita encore quelques instants, avant de poser son regard sérieux sur les trois personnes au sol :

- Vous devez savoir que, bien qu'étant majoritairement bienveillante, la Lumière peut tout autant blesser que les Ténèbres si l'on en abuse. Roxas, ce que j'ai fait pour sonder le cœur de Sora a été de t'exposer à une Lumière extrêmement intense ; un être des Ténèbres n'aurait pu y résister et aurait immédiatement tenté de s'en cacher, et un habitant du Royaume de la Lumière aurait forcément subi des blessures légères.

Le mage fit une pause, laissant au groupe le temps d'assimiler ces nouvelles informations ; le Simili regarda aussitôt ses membres, et n'y vit aucune plaie apparente. Alors qu'il se remuait les méninges pour comprendre où étaient ses blessures obligatoires, le sorcier reprit la parole :

- Cependant, ce qu'il est arrivé est tout à fait inattendu. Lorsque je t'ai exposé à cette Lumière, Roxas, tu ne t'es pas contenté de la recevoir ; tu l'as absorbée en toi, sans en subir le moindre dommage. C'est un phénomène extrêmement curieux. À ce jour, seules les Princesses de Cœurs sont ainsi capables d'absorber une telle quantité de Lumière sans le moindre effet négatif.

- Mais alors, Maître Yen Sid, pourquoi Roxas s'est évanoui ? demanda Dingo.

- Je ne peux qu'émettre des hypothèses, mais je pense qu'il a instinctivement convertie cette Lumière en énergie curative. Étant donné la quantité, le sort a été suffisamment puissant pour engendrer un équivalent de Soin X, qui comme vous le savez peut provoquer des sensations de plénitude extrême s'ils ne sont pas totalement maîtrisés.

- Ah oui ! Tu te souviens Donald, quand Sora a lancé son tout premier Soin X ?

- Je m'en souviens, oui ! Surtout qu'à cause de ça, toi et Sora avez été tellement dans les nuages qu'on a dû rester DEUX HEURES chez Merlin le temps que ça passe ! fit le canard agacé.

L'adolescent leva un sourcil à cette information, tandis que le chevalier souriait face à ce qui était visiblement un très bon souvenir pour lui, au contraire de Donald.

- Mais alors… Qu'est-ce que ça veut dire ? Comment j'ai fait ça ? fit alors l'adolescent, complètement perdu.

- Cela… je l'ignore totalement, Roxas, soupira l'ancien Maître en secouant la tête. Je peux t'assurer que Xehanort n'a aucune emprise sur le cœur de Sora de quelque manière que ce soit, mais je ne peux expliquer pourquoi tu as réagi ainsi, tout comme j'ignore si cela est dû à toi ou à Sora.

Le garçon fixa le sol un moment, songeur, puis soupira et se releva ; Dingo lui soutint instinctivement le bras pour l'aider, mais Roxas s'en défit aussitôt et se redressa tout seul sans un regard vers lui.

- Je comprends. Je vous remercie de votre aide, Maître Yen Sid, fit-il en s'inclinant, et m'excuse de vous avoir inquiété pour rien.

- Ne t'en excuse pas, Roxas, répondit le mage d'un geste compatissant. Tu avais de justes raisons de penser que Xehanort avait pu nous tromper, et venir m'en parler était la meilleure chose à faire, plutôt que de rester dans le doute et risquer de mettre Sora ou toi en péril. Tu as bien agi.

L'adolescent parut surpris, mais se reprit et salua le sorcier avec respect. N'ayant plus rien à dire au sorcier, le groupe prit congé et retourna au vaisseau Gummi à pied, Donald refusant d'activer la téléportation directe au grand dam de Roxas et Dingo. De longues minutes et marches plus tard, les trois alliés revinrent enfin dans le cockpit, l'adolescent fermement assit à la place de pilote sous le regard agacé du magicien et celui consterné du chevalier, et le vaisseau s'envola enfin dans les étoiles.

- Ça valait bien la peine de se déplacer sans nous dire pourquoi av… Eh, mais où tu vas encore ? s'écria le canard.

Le garçon ne lui répondit pas et se contenta de voler à pleine vitesse.

- Eh ! Ça suffit de nous balader comme ça sans nous dire ce que tu fais ! explosa le magicien en se mettant debout sur son siège, prêt à sauter sur les commandes.

- …Truc à faire, marmonna l'adolescent, étrangement concentré sur ce qu'il faisait comme si quelque chose occupait son esprit.

- C'est pas une réponse ! Explique-toi ou je te téléporte dans l'espace !

- Roxas, on a juste besoin de savoir où tu veux aller, tu comprends ? fit d'un ton plus doux Dingo.

- …Le Jardin Radieux. C'est important, souffla Roxas sans lui accorder le moindre regard.

Cette réponse fit lever un sourcil aux deux amis, mais ils ne posèrent pas plus de questions tandis que le chevalier calmait d'un geste le magicien, qui obtempéra avec agacement. Le reste du voyage se passa en silence, Dingo observant inquiet le jeune homme et Donald ayant décidé de calmer ses nerfs en regardant le paysage infini. Roxas n'avait pas prononcé un seul mot depuis ; et ce n'était pas juste parce qu'il s'agissait de son deuxième voyage en tant que pilote. Quelque chose en lui le travaillait.

Il ne savait pas quoi, mais ça s'était réveillé pendant le retour vers le Gummi. Il se sentait bizarre, sans trop savoir comment le décrire. Toute cette histoire avec Xehanort qui le possédait peut-être, et puis finalement non, puis cet étrange pouvoir d'absorber une Lumière qui aurait dû le blesser, et toutes ces suspicions qui s'étaient révélées fausses comme s'il s'était inquiété pour rien, et la fatigue de s'habituer à ce corps en vie qui dormait à peine, et cette drôle de sensation de flotter dans le blanc, et pourquoi je suis là et pas lui

Et le Jardin Radieux qui est enfin en vue.

Le garçon s'approcha du monde, remarquant d'un œil distrait le bouton de téléportation afficher quelques mots. Sans trop y réfléchir, Roxas arrêta l'aéronef sur place sous le regard intrigué des deux copilotes, choisit l'option "Maison de Merlin" et appuya sans hésitation sur le bouton.


Roxas entrouvrit des paupières fatiguées, comme au sortir d'un rêve. Il se sentait un peu bizarre, sans trop savoir pourquoi. Levant sa joue de la surface qui l'écrasait mollement, il détailla lentement ses environs d'un air somnolent.

Il reconnu assez vite l'intérieur de la maison de Merlin, encore occupée par les installations du comité. Si se retrouver à cet endroit n'étonnait guère le garçon, le fait de voir le lieu désert l'était beaucoup plus. Où étaient donc passés Donald et Dingo ? Il s'était pourtant bien téléporté avec eux en arrivant, non ? Baissant distraitement le regard, le jeune homme se rendit compte qu'il avait atterrit dans un fauteuil confortable, couvert d'une douce couverture chaude.

Mais qu'est-ce qu'il s'était passé, bon sang ?

Juste à ce moment, une porte qu'il n'avait pas encore vue s'ouvrit, laissant entrer Aerith portant une tasse fumante. Son regard d'émeraude s'éclaira aussitôt en voyant le jeune adolescent perdu dans son fauteuil :

- Roxas ! Tu t'es enfin réveillé. Ça va, tu ne te sens pas trop mal ?

- H-Hein, qu-que, Aerith ? C-Comment ça ? P-Pourquoi ? Qu'est-ce qu…

La jeune femme sourit doucement devant ces bredouillements confus et s'assit non loin du garçon :

- Calme-toi, tout va bien. De quoi te souviens-tu avant ton réveil ?

- E-Euh… Ben… On était dans le Gummi, et j'ai appuyé sur le bouton de téléportation et… ben c'est tout, bafouilla Roxas. Je fais quoi ici ?

- Toi, Donald et Dingo êtes arrivés ici sans prévenir, expliqua-t-elle doucement. Léon allait vous demander ce que vous faisiez là quand tu es tombé d'un seul coup. En t'examinant, j'ai vu que c'était à cause d'un empoisonnement. Heureusement ce n'est pas très grave, mais tu nous as donné une bonne petite frayeur.

- J… J'ai été empoisonné ? s'écria Roxas en écarquillant les yeux.

- Oui, par une blessure, fit la soigneuse en soulevant doucement la couverture sur ses jambes.

Elle retroussa délicatement son pantalon du côté gauche, dévoilant une longue estafilade aux tons violet rougeâtre. Le Simili écarquilla les yeux : c'était là que le Sans-cœur araignée l'avait griffé un peu plus tôt. Il avait immédiatement compris que cette plaie n'était pas normale, ne s'étant pas cicatrisée malgré son propre Soin. C'était pour ça qu'il avait demandé à Donald de le soigner, ce qui avait enfin pu la refermer bien qu'elle soit restée vive et brûlante.

- Comme je te l'ai dit, ce n'était pas très grave. Mon Esuna a aussitôt calmé ta fièvre, mais comme tu étais déjà très fatigué, tu ne t'es pas réveillé tout de suite. Alors nous t'avons installé ici le temps que tu reprennes connaissance. Cependant, je pense que le poison ne s'est pas tout à fait dissipé, c'est pour ça que je t'ai fait ceci, conclut-elle en lui remettant la tasse fumante.

Un peu perplexe, le garçon l'accepta sans un mot, sentant le liquide réchauffer doucement ses mains à travers le récipient ; une odeur particulière, à la fois chaude et rafraîchissante, lui emplit les narines.

- M-merci… qu-qu'est-ce que c'est ? fit-il distraitement en fixant le liquide vert ambré.

- Un antidote. Normalement j'aurai dû le préparer avec ce qui t'as empoisonné, mais vu la situation, j'ai fait un concentré pour compenser, s'excusa la demoiselle d'un sourire gêné.

Roxas la fixa à demi confus, puis respira à nouveau les douces vapeurs de sa boisson avant d'en prendre une petite gorgée hésitante. C'était très chaud, mais il ne se brûla pas pour autant. Un goût sucré, mêlé à un parfum qu'il avait du mal à définir, envahi son palais d'une sensation rafraîchissante malgré la chaleur du liquide. C'était un goût qu'il connaissait, mais dont le nom lui restait sur le bout de la langue. Quelque chose comme… vibrant. "Quelque chose" vibrant.

- Ça va, ce n'est pas trop chaud ? s'inquiéta Aerith.

- N-Non, non, ça va, répondit le garçon sortit de ses pensées… c'est vraiment bon…

La jeune femme fit un immense sourire en entendant cela :

- Contente que ça te plaise. J'ai ajouté de la menthe pour adoucir le goût. Les herbes médicinales sont plutôt amères, alors j'espère que cette tisane n'est pas trop dure à avaler !

Le garçon sentit une esquisse de sourire au coin de ses lèvres, un peu confus, ne sachant pas si elle était due à son état désorienté actuel ou au sourire rassurant qu'affichait la jeune femme, et se contenta de baisser la tête pour boire à petites gorgées, yeux rivés timidement vers le liquide translucide.

Un très léger contact sur son front le fit reculer d'instinct, alors qu'il relevait le visage vers ce qui l'avait effleuré. Il croisa le regard surpris d'Aerith, qui retira doucement sa main d'un air navré :

- Oh, désolée. Je voulais juste vérifier ta température.

Roxas se tut, se contentant de fixer la jeune femme qui resta un instant immobile, avant de répéter son geste. Ses iris bleus suivirent instinctivement la paume qui l'approchait, comme inquiets, avant qu'elle ne se pose avec douceur sur son front. La soigneuse passa sa main sur sa tête, puis sur sa joue, avant de la retirer avec un sourire :

- Tout va bien, tu n'as pas de fièvre. Et on dirait que le poison s'est totalement dissipé, ajouta-t-elle en voyant l'estafilade de sa jambe disparaître avec un sort curatif. Tu n'as plus rien à craindre, Roxas.

- Alors on peut repartir ?

La jeune femme fronça les sourcils à cette question, comme si quelque chose la gênait. Se levant de sa chaise, elle fixa l'adolescent d'un air doux mais ferme :

- Tu es guéri, mais toujours fatigué. Il serait mieux que vous passiez la nuit ici, au moins pour s'assurer que tu récupères bien du choc.

Le garçon baissa la tête, songeur. Il réfléchit un moment, avant d'acquiescer lentement, l'air d'accord mais déçu :

- Si tu le dis…

La jeune femme eut encore un sourire rassurant, avant de s'éclipser par où elle était entrée pour préparer les chambres, laissant l'adolescent à ses pensées.

Un peu perturbé, il posa sa main sur sa joue, là où les doigts de la soigneuse l'avait caressé, troublé : il n'était pas habitué aux contacts, enfin… pas à ce genre de contact. Quelque chose d'autre le troublait, comme une pensée lointaine et éphémère qu'on aurait perdue dans le fil de sa mémoire.

Une autre main qui l'avait un jour touché avec autant de douceur… et un peu de tristesse.

Roxas secoua la tête en soupirant. Inutile de s'échiner à retrouver ce qui était sans aucun doute un souvenir de Sora et non l'un des rares siens. Le jeune homme s'enfonça dans son fauteuil, fermant les yeux sur ce qui avait été une longue et épuisante journée. Longue surtout.

- C'est une bien curieuse aventure que nous vivons, cette fois.

Roxas sursauta : une voix familière venait de parler. Regardant aux alentours, il ne vit pourtant personne.

- …Super, maintenant j'entends des voix, souffla tout haut l'adolescent en se renfonçant dans son fauteuil.

- Évidemment, je viens de parler !

Cette fois-ci, le garçon sauta sur place en entendant la même voix lui répondre, et inspecta chaque recoin de la pièce les yeux grands ouverts :

- M… Mais qu'est-ce qu… Qui me parle ? Qui est là ?

- C'est moi, Roxas !

Le jeune homme se tourna dans la direction de la voix, mais ne vit qu'un meuble couvert de livres.

- Qui ça ? Où ça ?

- Ici ! Sur le présentoir !

Le garçon se pencha un peu, avant d'écarquiller encore plus les yeux en distinguant enfin son minuscule interlocuteur sauter sur place sur un des ouvrages. Un tout petit insecte, qui n'aurait pas attiré l'attention s'il n'était vêtu d'un élégant ensemble redingote et haut-de-forme. Un nom particulier ressurgit aussitôt dans l'esprit du Simili :

- …Jiminy Criquet ?

- En personne ! salua le petit personnage en levant poliment son couvre-chef.

Le jeune homme s'agenouilla au pied du meuble, se mettant à hauteur du criquet. Ce dernier remit son chapeau et tendit une main minuscule au garçon qui la regarda d'un air perdu :

- Nous n'avons peut-être pas besoin de nous présenter, mais je suis ravi de faire ta connaissance, Roxas !

L'adolescent fixa un moment la toute petite paume tendue, avant de présenter un index perplexe en guise de poignée de main, que l'insecte accepta avec plaisir.

- Euh… Enchanté ? Qu'est-ce que tu fais ici ? fit-il un peu déconcerté.

- Pardi, je suis le chroniquer royal, je retrace les aventures de Sora bien sûr !

- Ah, oui… évidemment, lâcha froidement le garçon.

- Quoique… J'hésite à les appeler "aventures de Sora", vu que tu es là actuellement…

À ces mots, le jeune homme écarquilla brièvement les yeux, avant de froncer les sourcils et d'aller lentement se rasseoir sans un mot. Jiminy descendit aussitôt de son perchoir et sauta sur l'accoudoir, alors que Roxas se replongeait dans la dégustation de sa tasse sans lui accorder un regard. Un ange passa, avant que le garçon ne baisse les yeux vers l'insecte pour lui demander d'un ton détaché :

- Et ça fait longtemps que t'es là ?

- Oh, et bien… Je suis avec Sora et ses amis depuis le début de son entraînement au Colisée.

L'adolescent écarquilla les yeux à ces informations :

- …T'es là depuis tout ce temps ? Comment ça se fait que je t'ai jamais vu avant ?

- Oh, je suis plutôt quelqu'un de discret, mon garçon, et à vrai dire Sora ne faisait plus vraiment attention à grand-chose ces derniers temps, si ce n'était retrouver ses forces… Et j'avoue que j'hésitais à me présenter à toi en particulier, à cause de votre situation…

Le garçon se figea brièvement, avant de détourner le regard. Le criquet tritura nerveusement la canne de son parapluie, avant de demander :

- Aimerais-tu lire mon journal ? J'ai commencé à rédiger ce qu'il s'est passé depuis l'Olympe jusqu'à l'invasion du Jardin Radieux, si jamais tu…

- Non merci, je suis pas très intéressé, le coupa un peu brusquement le jeune homme.

- Oh, vraiment ? Je me disais juste que… Sora m'a toujours laissé rédiger ses aventures sans trop me donner son avis, mais je me demandais si toi, par hasard…

- Ce que j'en pense n'a pas d'importance, répliqua aussi sec Roxas en braquant son regard sur le criquet.

L'adolescent brisa rapidement le contact visuel, fixant le mur d'un air songeur et indifférent. Le chroniqueur resta muet un instant, mais ajouta bien vite :

- Et moi j'estime que cela en a. Toi et Sora vous trouvez dans une situation qui risque de durer jusqu'à ce nous comprenions comment vous en êtes arrivés là. Revenir sur les derniers évènements pourrait nous donner une piste, ce qui serait déjà une très grande avancée au point où nous en sommes. Et qui plus est, j'apprécie d'avoir tout les points de vue sur une situation avant d'écrire le déroulement des faits.

Le garçon ne répondit pas à cette tirade et continua de fixer le vide sans un mot. Jiminy soupira tristement avant de prendre congé, non sans avoir souhaité une bonne soirée au jeune homme toujours muré dans son silence.

Roxas le regarda s'éloigner et disparaître derrière la porte, à une vitesse surprenamment rapide pour un être de sa taille. Il laissa sa tête retomber contre le dossier et ferma les yeux, soupirant ; cela ne servirait à rien de lui demander son avis sur les évènements. Hormis ceux vécu en direct ou entre la quasi-noyade de Sora et son retour à la Tour Mystérieuse, il n'en avait que peu de souvenirs. Il n'avait pas assisté directement à la déchéance de Sora durant son entraînement ou même son Examen ; non, tout ce qu'il avait fait était de sentir le mal-être de son être d'origine à des moments particuliers, des moments s'étant fréquemment répétés durant les derniers mois. Il n'avait qu'entendu la détresse du garçon et avait voulu y répondre en essayant de communiquer avec lui, ce qui avait très peu marché.

Baissant les yeux vers sa tasse maintenant vide, le Simili soupira en espérant que cette situation allait bientôt s'arranger, autant pour le bien de Sora que celui de tous.


Pour la deuxième fois depuis son retour dans le corps de Sora, Roxas fit la grasse matinée. Était-ce à cause de l'entraînement intensif, du poison suite à l'attaque de la "Tarentule Vicieuse" (ainsi avait-il décidé d'appeler le Sans-cœur), du test de Maître Yen Sid ou de l'altercation avec Donald peu après son réveil de l'empoisonnement ?

Il n'en savait rien, et pour tout dire s'en fichait. Car il devait l'admettre, mais dormir si longtemps lui avait fait un bien fou.

S'étirant sous sa couverture, le jeune homme passa encore quelques minutes allongé là sans rien faire, avant d'enfin se lever, enfilant veste et chaps de Sora avant de quitter la chambre qu'on lui avait prêtée. Le garçon jeta un coup d’œil rapide à la salle commune donnant sur la rue et la maison de Merlin, mais ne vit personne. N'ayant pas plus envie de croiser quelqu'un, même la chaleureuse présence d'Aerith, il sortit et se dirigea vers le hangar à vaisseaux.

Ce qu'il découvrit sur le chemin le laissa sans voix : dans les rues, les placettes et autres endroits publics, se dressaient d'innombrables kiosques et banderoles de toutes formes et couleurs. Les yeux du Simili allaient d'une enseigne à l'autre, avançant lentement dans la foule en regardant de tout les côtés pour ne rien manquer du spectacle. Il y avait de tout : des établis jonchés d'armes et outils en tout genres, des boutiques d'armures et accessoires glissées entre celles de vêtements, des ateliers de synthèse offrants Potions et autres Éthers, et çà et là des magasins des plus ordinaires, sans oublier les quelques stands de nourriture éparpillées un peu partout et vantant leurs produits "frais et fait-maison", comme criaient la plupart d'entre eux.

Roxas jetait des coups d’œil partout, curieux : voir tant de vie et de mouvement était tout le contraire du Colisée et de la Tour, si vides d'habitants. C'était très différent de son existence antérieure, et aussi un peu effrayant ; il ne savait pourquoi, mais la foule le mettait mal à l'aise, comme s'il craignait de perdre tout ses moyens si on l'abordait. Ainsi, le jeune homme se contenta de regarder tout les étalages de loin, ou à demi caché derrière d'autres clients.

- AH ! Te voilà !

Roxas sursauta à l'éclat de voix nasillarde, à l'instar de tout les autres acheteurs, avant de se tourner vers le canard qui venait de crier depuis l'autre côté de la rue.

Donald traversa la foule en un clin d’œil, suivi de Dingo qui avait du mal à passer à cause de sa plus grande taille, et arriva au pieds du garçon avant qu'il n'ait pu quitter les lieux :

- Mais où t'étais passé ? On t'a cherché partout au QG ce matin !

- On s'est inquiétés quand on a vu que ta chambre était vide, mais les trois petites chasseuses de trésors ont dit que t'étais parti vers le marché, ajouta Dingo en atteignant enfin ses amis. Tu voulais prendre quelque chose avant de partir ?

- Peu importe, il aurait pas dû s'en aller comme ça sans nous prévenir ! s'égosilla son camarade. T'as bien vu ce qui lui est arrivé la dernière fois qu'il a fait ça !

Pendant un instant, Roxas eut presque envie de planter là les deux compagnons pour se perdre à nouveau dans la foule, mais les derniers mots de Donald lui rappelèrent les désagréables évènements, et une petite voix familière lui dit qu'il valait peut-être mieux ne plus s'éloigner d'eux comme il le faisait avant. Il se contenta alors d'attendre que Dingo ait fini de calmer le canard, de nouveau entré dans une de ses fameuses colère habituelles.

Alors qu'il fixait nonchalamment la populace, une brève lueur attira son attention : tournant son regard vers elle, il vit un attroupement massé autour d'une boutique de Synthèse. Roxas eut juste le temps de voir un Mog jeter dans une étrange marmite quelques matériaux, avant qu'une lueur arc-en-ciel ne l'aveugle un instant. La petite créature ressortit alors du récipient un Éther fraîchement préparé, sous les applaudissements du public ravi de cette démonstration.

Intrigué, l'adolescent s'approcha, pour se cogner par mégarde dans un étalage de bric-à-brac. Alors que le Mog de la boutique se ruait hors du magasin en lançant des "Attention kupo ! C'est des objets très rares kupo !", le jeune homme s'excusa en jetant un œil distrait vers les bricoles en vente ; l'une d'entre elles attira alors son regard.

Un carnet à la reliure rouge, qui lui rappelait étrangement les teintes du soleil couchant.

Feuilletant curieusement l'ouvrage vierge, il tourna la tête vers les deux amis de Sora pour voir où ils en étaient, remarquant au passage un étalage d'appareils audio annoté d'un papier disant : ÉCOUTE D'ÉCHANTILLONS GRATUITE.

Roxas fixa les lecteurs de musique, puis se dit que profiter d'une chanson gratuite ne ferait de mal à personne. Et, après avoir détaillé les divers albums, choisit un morceau nommé "PLANITb Remix" dont la jaquette montrait une jeune femme en sweater violet faisant un puzzle à même le sol, plaça le casque sur ses oreilles et écouta.

Au début il n'entendit rien ; et, croyant que la machine était mal enclenchée, leva son doigt vers le bouton lecture.

Mais alors un bruit répétitif se fit entendre, tel un battement de cœur ; une sorte de soupir, ou peut-être de pleur retentit dans le casque, bientôt accompagné de doux sons synthétiques comme une délicate mélodie.

Un deuxième battement, plus musical, vint s'ajouter au morceau, s'insérant progressivement alors que les pleurs se répétèrent, un peu plus intenses.

Un son artificiel vibra dans ses oreilles, et la mélodie entra enfin en scène.

Les battements et les pleurs revinrent un peu, cette fois accompagnés de vocalises douces et soupirantes. Le rythme entraîna Roxas dans une musique beaucoup plus rythmée, et les premiers mots retentirent dans tout son être.

C'était des paroles qu'il ne connaissait pas, dont il ne comprenant pas la signification ; mais qu'importe. Ces mots-là le berçaient et l'emportaient loin d'ici, dans un autre univers qu'il n'avait jamais connu ailleurs que dans ses songes. Il n'avait pas besoin de traducteur pour comprendre l'émotion dans la voix de la chanteuse ; ce langage-là était universel.

La voix l'emmena loin, loin, volant dans un espace sans fin et sans limites, là où personne ne pouvait lui faire de mal, là où rien ne pourrait le blesser…

Et une main emplie de chaleur se posa sur son épaule.

- Hééé, Roxas !

Sursauta autant à la voix qu'au contact, l'adolescent ouvrit brusquement les paupières, se rendant au passage compte qu'il les avait fermés pendant son écoute, et leva les yeux pour croiser ceux rayonnant d'Axel. Se figeant un instant en voyant son meilleur ami, le garçon retira rapidement le casque de ses oreilles alors que l'apprenti lui lançait un sourire éclatant :

- Alors, on traîne sur le marché à ce que je vois ! fit-il enjoué en s'appuyant sur l'épaule du plus jeune.

- Euh, oui… Qu'est-ce que tu fais ici ? bredouilla l'adolescent, un peu surpris.

- C'est notre jour de libre avec Kairi, alors on sort un peu voir la ville ! répliqua tout aussitôt l'adulte. D'ailleurs, tu devais pas t'exercer au Colisée, Roxas ? À moins que t'ai décidé de faire l'entraînement buissonnier, c'est ça ?

- M-Mais non ! On est juste de passage pour…

- Allez mon pote ! Détends-toi un peu, je rigole ! sourit le rouquin en donnant une bonne tape dans le dos du garçon.

Légèrement pris de court par le geste du plus âgé, le Simili esquissa tout de même un sourire en se frottant le bras, un peu gêné. Ce fut à ce moment-là que Donald et Dingo arrivèrent, coupant court à la discussion entre les deux anciens membres de l'Organisation XIII :

- Mais tu écoutes quand on te dit de pas partir tout seul ? s'écria le canard.

- Donald, il s'est juste écarté de quelques mètres…

- Quelques mètres qui auraient pu être de trop ! J'ai pas envie qu'on ait encore une catastrophe comme hier !

Axel se figea à ces paroles ::

- …Hier ?

- Oh, euh…

- C'est rien, c'est pas grave Axel, dit Roxas en coupant le chevalier dans son élan.

- C'est l'Organisation, c'est ça ? fit l'adulte en attrapant le garçon par les épaules. Ils t'ont attaqué ? …Non, ils savent que tu es là, c'est ça ? Dis-moi !

Pendant un instant, les yeux de Roxas croisèrent ceux d'Axel, et il vit une lueur féroce brûler dans ces iris verts. Cette flamme fit étrangement frissonner le garçon, comme s'il y avait quelque chose d'autre, quelque chose qui se cachait derrière ce regard brillant.

Mais la flamme mourut aussi vite qu'elle s'était allumée, alors que Dingo posait une main rassurante sur le bras du jeune adulte :

- Non, non, rien de tout ça. Roxas s'est juste fait attaqué par un gros Sans-cœur qui l'a empoisonné, mais Aerith s'est bien occupé de lui ! Et on a pas vu un seul signe de l'Organisation ! fit-il avec un grand sourire.

L'ancien Simili le fixa un moment, comme jugeant de la véracité de ses propos, avant d'acquiescer et lâcher l'adolescent, soulagé. Le duo ajouta qu'ils comptaient bientôt repartir, bien que le capitaine semble plus enclin à rester encore un peu que son camarade ; ils proposèrent à l'apprenti de les accompagner jusqu'au Gummi, mais celui-ci déclina l'offre, prétextant avoir quelques trucs "sur le feu" en faisant un clin d’œil au jeune garçon, avant de partir de son côté en leur souhaitant bonne route d'un signe de main. Roxas le regarda s'éloigner, se demandant s'il n'aurait pas dû le retenir encore un peu, avant que Donald ne lui dise de se dépêcher. Soupirant, l'adolescent reprit leur chemin à contrecœur ; mais une pensée fugace le fit s'arrêter, alors qu'il contemplait l'étalage juste à côté. Il fixa un moment un objet particulier, jeta un œil là où les deux amis de Sora l'attendaient de pied ferme, et prit sa décision.


Plusieurs minutes plus tard, le groupe arriva enfin en vue de la place centrale, elle aussi remplie de monde et d'étalages aux enseignes bariolées. Roxas suivait le duo en piétinant, jetant toujours des coups d’œil à toutes les enseignes qu'il pouvait voir au grand dam de Donald qui semblait en avoir assez d'être ici.

Un bruit sourd familier vint soudain briser le "silence" entre eux, et le magicien se retourna avec agacement vers le jeune homme dont l'estomac venait de gargouiller, lançant un regard qui disait "Quoi, t'as encore oublié de manger ?". Le plus jeune l'ignora et garda les yeux obstinément rivés sur les diverses banderoles et kiosques installés un peu partout.

Ses iris couleur de ciel se fixèrent soudain sur un étalage. Un petit stand ambulant au toit rayé de bleu et blanc, d'où une musique enfantine sortait, comme invitant les passant à venir choisir parmi le large panel derrière la vitre gelée.

- Roxas !

Le caquètement agacé sortit l'adolescent de sa transe alors qu'il quittait des yeux le vendeur de glace le faisant saliver depuis quelques minutes. Avant même que Roxas ne sorte une de ses énièmes répliques salées envers le canard, Dingo s'avança :

- Tu veux quelque chose, Roxas ?

Surpris par cette attention inattendue, le jeune garçon cligna des yeux en bafouillant, avant de secouer la tête en lâchant un "Non, non, rien…", très peu convainquant. Ne supportant plus l'air étrangement inquiet du chevalier, l'adolescent le dépassa en évitant son regard, rejoignant Donald qui attendait son camarade, quand ce dernier leur cria :

- Partez devant, je vous rejoins tout de suite !

Le garçon eut juste le temps de voir le chevalier disparaître dans la foule, avant de hausser les épaules et continuer sa route, serrant contre lui le précieux paquet qu'il avait depuis tout à l'heure.

- Sora ! Hé, Sora !

Le jeune homme leva les yeux pour voir apparaître dans son champ de vision une jeune rouquine qui lui faisait signe de la main en souriant, assise à un café éphémère. Roxas se figea tout seul en voyant Kairi, comme si une autre partie de lui état totalement paniquée par sa présence. Il n'eut pas le temps de faire autre chose que la Porteuse le rejoignit pour l'entraîner gentiment vers sa table :

- Bonjour, comment vas-tu ? fit-elle en l'invitant à s'asseoir. Toujours en entraînement ?

- Ah euh, j-j-je, hem…

La jeune fille se pencha alors vers lui d'un ton bas et plus naturel :

- Désolée de t'avoir abordé comme ça, mais je savais pas comment t'appeler sans griller ta couverture. Est-ce que ça va ? Je suis au courant pour ton attaque de Sans-cœur… Ah oui ! Aerith m'a demandé de vous donner ça, au cas où vous auriez un autre problème du genre, fit-elle en lui tendant un petit paquet. Ça va, tu tiens le coup ?

Le garçon mit quelques instants à intégrer tout ce qu'elle venait de dire, mais se reprit rapidement et hocha la tête :

- O-Oui, ça va… Tu sais, j'ai survécu un an dans l'Organisation en combattant ces trucs tout les jours, alors c'est la routine pour moi !

- Sauf que tu n'avais pas le choix, souffla Kairi tristement…

Cette réflexion figea l'adolescent, mais il secoua rapidement la tête.

- C'est pas grave, tu sais… C'était pareil pour Sora aussi, non ? Combattre les Sans-cœurs, sauver les mondes, tout ça ! La routine quoi !

La Princesse eut un petit sourire, mais son expression resta mélancolique ; ne supportant pas de voir cette émotion sur son visage pour une raison qui lui échappait, Roxas changea de sujet :

- Et toi ? Tu fais l'entraînement buissonnier aujourd'hui ? fit-il avec un sourire charmeur.

L'expression perplexe que lui renvoya la jeune fille le fit se rendre compte de son attitude, et il eut soudain l'envie de se gifler pour ce comportement sortit de nulle part… Ou peut-être pas après tout, quand on savait à qui appartenait véritablement ce corps. Il bredouilla une excuse en détournant le regard, avant qu'elle ne se remette à sourire doucement :

- C'est Lea qui t'as inspiré cette blague ? Ça lui ressemble bien.

- Euh… moui. Désolé.

- C'est pas grave, on se fait ça tout le temps lui et moi.

Pour une raison inconnue, Roxas se sentit faire la tête.

- Et pour répondre à ta question, non je ne chôme pas l'entraînement avec lui ! J'ai d'ailleurs réussi à maîtriser un nouveau sort hier, Esuna !

- Esu-quoi ?

- C'est une sorte de Soin spécial, pour guérir autre chose que les blessures, comme des brûlures ou des empoisonnements par exemple… Tu pourrais peut-être l'essayer toi aussi ! Mais je n'ai pas encore totalement la main, Aerith arrive aussi à soigner des plaies en même temps… Mais je ne vais pas laisser tomber ! Les Sans-cœurs n'auront qu'à bien se tenir le jour où j'aurais fini mon entraînement avec Lea !

Roxas tiqua à cette dernière phrase, avant de pencher la tête en levant un sourcil :

- …Tu n'as encore jamais affronté de Sans-cœur ?

- Oh, si ! Quelques-uns quand j'ai eu ma Keyblade à l'Illusiocitadelle avant qu'on rentre chez nous, Sora, Riku et moi. Mais sinon, non, pas depuis, admit-elle. Mais je serai prête à me battre contre eux quand le moment sera venu !

- …Alors qu'est-ce que vous faites pendant l'entraînement ? demanda lentement le Simili.

- Merlin nous apprend les sorts, et il nous aide un peu pour nous battre avec ses meubles. Léon est censé nous enseigner comment manier une arme, mais là c'est surtout Lea qui s'en occupe, ça nous évite de sortir en permanence de la salle temporelle…

- La "salle temporelle" ?

- Là où on s'entraîne ! Merlin nous emmène dans un lieu magique où le temps ne passe pas à la même vitesse que dehors, donc on peut s'entraîner tant qu'on veut sans avoir à s'inquiéter de voir arriver le jour J ! fit-elle avec un sourire.

Le jeune homme se contenta de froncer les sourcils, comme confus, et allait ouvrir la bouche quand une voix familière attira l'attention des deux adolescents :

- Et voilà, j'arrive !

Le garçon se retourna pour voir arriver Dingo portant des petits pots de glace en équilibre sur ses bras ; Roxas écarquilla les yeux, se demandant où il avait pu trouver tout ça et comment il faisait pour ne pas les faire tomber. Le chevalier débarrassa aussitôt ses précieuses charges devant le jeune homme, lui fit signe d'attendre, puis souleva son chapeau pour dévoiler un dernier récipient caché qu'il déposa avec délicatesse parmi ses semblables. Alors que Kairi s'émerveillait devant la quantité de glace, Roxas resta littéralement sans voix, à la fois subjugué par l'amoncellement de friandises et stupéfait par la situation. Il tourna le regard vers Dingo, qui se contenta de lui rendre ce même sourire qu'il avait fait lorsqu'il avait visité le Gummi. Alors que Donald semblait ne pas comprendre l'intérêt d'acheter autant de glaces pour une simple collation avant le départ, la jeune fille fixa tour à tour les divers boules entassées dans leurs pots d'un air gourmand puis l'adolescent, semblant lui demander s'il comptait tout finir par lui-même. Un peu perdu mais encouragé par le regard que lui portaient la Porteuse et le chevalier, le jeune homme prit une coupe au hasard et porta à ses lèvres une cuillerée de glace vert fluo.

Aussitôt une sensation glacée envahit son palais, exacerbée par la saveur rafraîchissante de la douceur ; c'était le même goût que celui de l'antidote d'Aerith de la veille, et un nom vint naturellement aux lèvres de l'adolescent :

- Menthe vibrante.

- Pardon ? fit Kairi en fronçant les sourcils, attirant l'attention de Donald et Dingo en pleine discussion sur la nécessité d'acheter autant de glaces.

- Ça a goût de Menthe vibrante, répéta Roxas, et… et Chocoplaisir aussi.

- Qu'est-ce que tu nous racontes encore ? grommela le canard les mains sur les hanches alors que le garçon goûtait une autre boule.

- Et ça c'est… Baietîse !

- C'est toi qui dit des bêtises ! râla le magicien pendant que Roxas l'ignorait pour déguster une autre glace qu'il nomma aussitôt "Chérie d'amour".

Le jeune homme se mit ainsi à décrire ses parfums, allant d'un "Citron dansant" à un "Yaourt balourd" puis un "Pétillant piquant", en passant par un "Café Mog", sous le regard circonspect des trois autres ; Kairi goûta la glace qu'il avait appelée "Baietîse", qui était en fait de la framboise, ce qui étonna encore plus le groupe :

- Qu'est-ce que t'as à leur donner des noms bizarres, à la fin ? fit Donald d'un ton impatient.

- C'est pas des noms bizarres, c'est comme ça qu'elles s'appellent, répliqua fermement le garçon en portant une cuillerée de crème bleutée à la bouche.

- Dingo, c'est comme ça qu'il les appelait le marchand ? souffla le canard en se tournant vers son camarade.

- Ben… Je pense pas mais j'en sais rien, j'ai juste demandé un peu de chaque.

- T'as demandé TOUT LES PARFUMS ?

- Ben oui ! Je savais pas ce qu'aimais R-euh Sora, alors j'ai tout prit au cas où ! fit le chien en haussant les épaules.

- C'est vraiment gentil à toi, Dingo, sourit Kairi pour détourner la conversation. Pas vrai ?

Un silence répondit à son appel, et le trio se tourna vers l'adolescent pour le voir figé dans une expression choquée, avant que son visage ne se renferme alors qu'il reposait lentement pot et cuillère, sous les regard à présent inquiets du groupe. Se levant de sa chaise, Roxas déclara d'un ton indifférent :

- On devrait y aller maintenant. Je vais au vaisseau.

Le groupe le fixa un instant, surpris par cette réplique, avant que Kairi ne se reprenne pour acquiescer, attristée :

- O-Oui. Tu as sans doute raison, c'est inutile de perdre plus de temps ici. Vous avez sans doute beaucoup à faire.

Le jeune homme osa lui jeter un regard navré, auquel elle répondit d'un hochement de tête compréhensif. Sans vraiment regarder en arrière, il tourna alors les talons et disparut dans la foule. Tout en le regardant partir, Kairi ne put s'empêcher de remarquer avec tristesse qu'il n'avait même pas prit le temps de finir ses glaces, qui fondaient maintenant toutes seules dans leurs coupes en cartons.

Un peu plus tard, lorsque le Gummi décolla enfin pour son rapide retour vers l'Olympe, Roxas se tourna vers la vitre qu'il toucha du doigt, fixant la jeune Princesse assister à leur départ, et lui fit un dernier geste d'adieu avant que le vaisseau ne disparaisse dans l'infini.

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