Kingdom Hearts III : La quête des Cœurs perdus

Chapitre 10 : Bienvenue sur la Grille - D-Ansem

8307 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 07/02/2024 22:55

Séparé du corps de Sora dans l'enceinte de l'ordinateur, Roxas a été grièvement blessé par les Sans-coeurs juste au moment où il recontrait un programme l'ayant emporté on ne sait où. De leur côté, Lea et Ienzo se sont retrouvés avec l'Élu dans un état comateux, à tenter de s'échapper d'un système envahi par les Ténèbres avant que ce dernier ne les détruisent. Y parviendront-ils ?

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 Le Voilier Solaire s'arrêta enfin dans un hangar similaire à celui d'où il était parti, et Ienzo téléporta le groupe sur le quai. Lea s'avança aussitôt vers la ville sans un mot, portant dans ses bras Sora, ou plutôt son corps inerte, tandis que le scientifique tardait à suivre. Se décidant finalement à rejoindre son camarade, le jeune adulte resta un instant silencieux, indécis, avant de se lancer :

- Hem… Lea ?

Pas de réponse.

- …J-Je… Je pense sincèrement que Roxas est dans de bonnes conditions…

- On vient tout juste de le voir se faire tabasser, et toi tout ce que tu trouves à dire c'est "Il est dans de bonnes conditions" ? explosa l'apprenti en foudroyant Ienzo du regard.

Le scientifique fit un bond en arrière, l'air réellement terrifié par le sursaut de colère du Porteur, et resta ainsi immobile, un bras brandit comme prêt à se protéger d'une attaque imminente. Lea se rendit compte de sa réaction et, quoique toujours furieux, détourna le regard et repris sa route sans un mot. Ienzo mit quelques secondes de plus à reprendre ses esprits et rejoignit son camarade, veillant toutefois à garder une certaine distance de sécurité. Un ange passa alors qu'ils entraient tout deux dans la ville noire, avant que le jeune homme ne se racle doucement la gorge :

- …Ce que je voulais exprimer par c… ce que j'ai dit sur Roxas est que… Je pense qu'il s'en sortira, bredouilla-t-il en osant lever les yeux vers Lea. Je le pense sincèrement.

Ce dernier tourna à peine la tête vers lui, avant de reporter son attention sur le chemin.

- …Merci, finit-il par souffler sans regarder son camarade.

Le scientifique hocha doucement la tête, espérant que cet échange avait quelque peu calmé l'apprenti.

Ienzo se savait très intelligent, calme et posé, mais dès qu'il s'agissait de parler d'émotions ou d'être social, il devenait maladroit et stupide. Une décennie passée transformé en Simili sans possibilité d'éprouver des sentiments, qui plus est arrivée alors qu'il n'était qu'un jeune enfant à l'époque, n'y aidait sans doute pas.

Alors qu'ils s'enfonçaient dans les rues ornées de néons blancs, des ombres mouvantes attirèrent leur attention. S'arrêtant un instant pour voir ce qu'il en était, les deux camarades virent surgirent des allées des individus aux casques noirs, vêtus de combinaisons de la même teinte aux circuits oranges.

- Ienzo, c'est quoi ça ? souffla Lea en direction de son camarade.

- …Je n'en sais strictement rien, mais je peux t'affirmer qu'ils ne font pas partie du système.

Sans dire un mot, les silhouettes noires sortirent des matraques au néons oranges, faisant se crisper le groupe.

- Et moi je peux affirmer qu'ils ne sont pas là pour nous indiquer la sortie, ajouta Lea en observant chacun des individus.

Soudain, deux gardes se jetèrent sur eux ; réagissant au quart de tour, Lea poussa le corps de Sora dans les bras d'Ienzo et invoqua Ardeur Flambante, tranchant au passage l'un des agresseurs en deux. Le second frappa, mais l'apprenti para l'assaut et le repoussa avant de reculer près de son camarade. Les autres inconnus se mirent en position et s'élancèrent à leur tour, pour se faire sauvagement brûler par le Porteur qui invoqua un cercle de flammes autour de lui.

Une fois les flammes éteintes, il ne restait plus que quelques tas de poussière oranges là où se tenaient les adversaires. Remettant sa Clé sur son épaule, l'adulte scruta les environs à la recherche du moindre ennemi potentiel ; mais rien en vue. Se tournant vers son camarade, il retint un sourire en voyant Ienzo se débattre avec le corps inerte de Sora qui semblait un peu trop lourd pour lui.

- Eh ben, Ienzo, on galère à soutenir ses camarades ? Je t'appellerais pas à l'aide le jour où je déménagerai !

- Contrairement à toi ou Aeleus, ma plus grande force réside dans l'intellectuel et non les muscles ! répliqua agacé le scientifique qui tentait désespérément de ne pas faire tomber sa précieuse charge. Qui plus est, tu aurais au moins pu me prévenir que tu comptais me confier Rox-je veux dire Sora, avant de me le jeter dessus sans ménagement !

- Tu m'excusera, mais entre t'expliquer pas à pas mon plan pour nous défendre et contrer une attaque imminente, je pense que la dernière option est la plus intelligente, pas vrai ? fit le rouquin goguenard.

Le scientifique se contenta de pousser un soupir d'exaspération en essayant de remettre à l'endroit un Sora ayant fini la tête plus bas que les jambes, avant que Lea ne lui vienne en aide en prenant le corps de l'adolescent sur son épaule. Le groupe reprit son chemin, scrutant chaque nouvelle rue, chaque nouveau recoin à l'affût des gardes noirs.

- Au fait, Ienzo, où est-ce qu'on est, maintenant ? demanda alors l'adulte.

- Hum… fit son camarade en prenant sa pose d'analyste. Cid ne m'a jamais parlé d'une telle cité virtuelle dans le système, et je ne pense pas que nous soyons au cœur de l'unité centrale. Qui plus est, nous avons vu que R… que Roxas se battait dans ce qui ressemblait à un stade, ce qui est étrange étant donné qu'aucune structure semblable n'est censé exister ici. Ce n'est qu'une hypothèse, mais je suppose que nous nous trouvons dans une toute nouvelle zone du système, potentiellement créée peu avant ou après notre arrivée.

Lea se crispa quelque peu en entendant la mention de son meilleur ami, se rappelant les violentes images du combat contre le garde noir. Mais il secoua la tête pour chasser ces pensées de son esprit ; s'il voulait aider le jeune homme, il ne devait pas se morfondre à son sujet.

Juste à ce moment-là, des Sans-cœurs à l'esthétique similaire aux lieux surgirent devant eux, leur coupant la route.

- C'est pas vrai, vous pouvez pas nous ficher la paix ? s'écria le Porteur. Ienzo, tu peux t'occuper de Sora pendant que je me charge d'eux, s'il te plaît ?

Le scientifique, quelque peu prit de court, hocha cependant la tête et prit comme il put l'adolescent sur son épaule, faisant de son mieux pour l'y garder tandis que Lea se jetait sur les ennemis. Il élimina quelques humanoïdes jaunes et lents, mais des motos aux circuits rouges lui tournèrent rapidement autour, le déconcentrant ; cela laissa une ouverture à une créature dorée qui le toucha d'un laser, avant qu'un véhicule ne lui fonce dessus. Agacé par les monstres, l'apprenti invoqua un cercle de feu qui brûla quelques motos venues trop près, avant de lacérer les Sans-cœurs jaunes restants en évitant leurs attaques.

Un monstre rouge fonça alors dans sa direction ; Lea s'apprêtait à contrer l'attaque quand la créature lui passa à côté en l'ignorant totalement. L'adulte le suivit des yeux pour le voir tourner en rond autour de rien, comme s'il s'était grillé un circuit. Ses camarades Sans-cœurs l'imitèrent et tous tournèrent autour du même point, comme attaquant une cible invisible. Complètement dérouté par ce comportement incompréhensible, le Porteur sentit qu'on le tirait par la manche et se retourna vers Ienzo lui faisant signe de le suivre, tenant comme il pouvait Sora :

- Je ne sais pas combien de temps je peux les leurrer, alors partons !

- Les leurrer ? Mais com… Attends, tu peux encore créer des illusions ? Pourquoi t'as pas fait ça avant ? s'écria Lea en le suivant, bouche bée.

- Contrairement à toi qui a passé son temps à se battre, je n'ai pas eut l'occasion de tester mes capacités combatives jusqu'à présent, répondit le scientifique. Je ne savait même pas si je pouvais encore créer une illusion avant aujourd'hui !

- Ça serait bien que t'essayes de faire ça la prochaine fois qu'on croise des ennemis ! répliqua l'adulte.

- Je ne suis pas sûr que cela soit aussi facile, fit Ienzo en jetant un regard vers leur point de départ.

Lea l'imita et remarqua bien vite que les Sans-cœurs s'étaient mis à regarder aux alentours avant de repérer le groupe et foncer sur eux, cette fois-ci accompagnés par deux grosses créatures aux circuits violets qui n'avaient pas l'air commodes.

- Super, et maintenant on fait quoi petit génie ? s'écria le Porteur en lançant un Brasier dans leur direction pour les retarder.

- Je te suggère de reprendre Sora et de me laisser me concentrer pour une autre illusion ! répliqua aussitôt le scientifique.

Mais avant qu'il n'ait pu passer sa charge à l'apprenti, un laser passa entre eux deux, les obligeant à poursuivre leur course tandis que Lea tentait de détruire à distance les Sans-cœurs violets qui étaient manifestement les plus dangereux, alors qu'ils s'enfonçaient encore plus dans la ville.


Un doux ronronnement continu accueillit Roxas à son réveil. L'esprit embrumé, le garçon sentit lentement les sensations revenir dans son corps, alors qu'il tentait de bouger ses membres devenus léthargiques. Il crut discerner sous ses doigts une matière informe, fluide, qui fuyait quand il refermait sa main dessus, un peu comme de l'eau… Que faisait-il dans de l'eau ?

Ouvrant doucement les yeux, il mit quelques instants à s'habituer à la luminosité ambiante ; sa vision encore floue distingua, au travers d'une vitre, un plafond immaculé illuminé par une source blanche inconnue. Encore fatigué, l'adolescent referma les yeux, essayant de faire le tri dans son esprit alors que la matière aqueuse disparaissait sous ses doigts et que le ronronnement s'intensifiait un peu avant de se calmer.

Où était-il ? Qu'est-ce qu'il faisait ici ?

Rouvrant des paupières qui lui semblaient moins lourdes, le jeune garçon revit le même plafond blanc immaculé, cette fois sans la paroi de verre. Levant un peu la tête, il découvrit qu'il se trouvait dans une salle toute aussi blanche et minimaliste, aux dalles éclairant la pièce d'une lueur diffuse. Se redressant sur les coudes, le Simili se rendit compte qu'il se trouvait lui-même sur ce qui semblait être un lit sortant du mur. Tout était blanc, chaud, très différent de l'aspect noir et froid de la ville numérique.

Une seconde…

Retrouvant soudain le fil de ses pensées, Roxas s'assit d'un bond sur le lit. Comment était-il arrivé ici ? Il se souvenait de la course contre les gardes, du combat contre cet homme dans l'arène, de sa fuite… et ?

Le garçon regarda ses mains, ses bras, tout son corps : rien, aucune trace des blessures subies auparavant. Pas même une tache de sang témoignant de ce qu'il avait enduré. Pris l'espace d'un instant d'un doute effroyable, le Simili porta la main à la tête, avant de se calmer aussitôt ; les épis dressés sur sa tête et le casque qui la cerclait prouvaient qu'il avait toujours son apparence propre. Cependant, rien n'expliquait comment il s'était retrouvé dans cet endroit ni ce qui avait soigné ses blessures.

- Ah, je vois que tu es réveillé.

La voix profonde figea l'adolescent sur place. Tournant lentement la tête vers la silhouette assise devant la baie vitrée, le jeune homme écarquilla les yeux à sa vue tandis que l'homme se levait de son siège et lui fit face, mains dans le dos. Le regard du Simili devint alors froid et perçant, alors que ses poings se serraient à lui faire mal.

- DiZ…

Il se souvenait maintenant. Cette silhouette qui s'était approchée de lui après sa fuite de l'arène, c'était celle d'Ansem dit le Sage, l'ancien Roi du Jardin Radieux banni par ses apprentis et ayant endossé le pseudonyme de DiZ en quête de vengeance. L'homme avait disparu alors qu'il tentait d'encoder le Kingdom Hearts de Xemnas, juste avant que Sora n'affronte le Supérieur ; et tout laissait à penser que le roi avait bel et bien péri dans l'explosion de sa machine.

Et pourtant, l'individu se tenant devant le garçon ressemblait en tout point au monarque, si l'on exceptait le fait que son physique et ses vêtements s'étaient accordés aux couleurs de la Grille.

Roxas crispa la mâchoire, sentant la rancœur bouillir en lui ; qu'est-ce que faisait cet homme ici ? Comment osait-il se montrer ainsi devant lui, comme si de rien n'était ? Incapable de retenir sa rage plus longtemps, l'adolescent cracha :

- Qu'est-ce que vous faites là ? Qu'est-ce que vous me voulez encore ?

Le roi eut un air étonné, comme s'il ne voyait pas où le jeune homme voulait en venir. Il s'avança néanmoins vers lui sereinement, faisait tout de suite réagir le Simili :

- Ne m'approchez pas ! fit-il prêt à appeler Souvenir Perdu en transperçant l'homme de son regard.

Le monarque s'arrêta aussitôt, fixant d'un air préoccupé le garçon. Un court silence passa, avant que l'individu ne prenne la parole :

- Je te conseillerais de ne pas trop t'agiter, tu viens tout juste de te remettre d'un état de dissolution imminente.

Roxas fronça les sourcils mais répliqua aussitôt, toujours sur ses gardes :

- Je sais pas ce que vous me racontez, mais c'est pas en me disant des belles paroles que je vais vous pardonner !

Ce fut au tour de l'homme de lever un sourcil, visiblement intrigué par les propos du jeune garçon. Surpris mais par dessus tout énervé par ce comportement, l'adolescent explosa :

- Faites pas comme si rien ne s'était passé, OK ? Si vous pensez que je vous aurai pardonné juste parce que j'avais accepté le fait de disparaître pour Sora, vous vous trompez lourdement !

Le monarque sembla réaliser ce qu'il disait, et reprit une façade sérieuse :

- Quel que soit le grief que tu possèdes envers mon concepteur, je ne peux y répondre à sa place.

Roxas écarquilla les yeux. Qu'est-ce qu'il lui racontait ?

C'était quoi ces salades ?

- Je peux savoir ce que vous me chantez, là ? siffla-t-il entre ses dents, perçant son interlocuteur d'un regard glacé.

- Que tu veuilles le croire ou non, je ne suis qu'un programme créé par Ansem et ayant son image, clama alors l'homme en fixant en retour le jeune adolescent. Je possède effectivement son apparence, ainsi que quantité de ses souvenirs, mais je ne suis qu'une pâle copie de mon concepteur. Mon identifiant réel est Digital-Ansem.

Le garçon se figea à l'annonce de ces informations ; un programme à l'image d'Ansem ? Pourquoi ? Pour quoi faire ? Le jeune homme se reprit cependant rapidement, fixant à nouveau ledit "Digital-Ansem" avec amertume :

- Et alors ? Vous avez ses souvenirs, donc c'est comme si vous étiez Ansem, non ? Qu'est-ce que ça change ?

- C'est effectivement ce que l'on pourrait croire, répondit l'individu. Cependant, mon identité exacte est toute autre. En l'état actuel, je suis la forme physique de l'ensemble des travaux et recherches qu'a faites mon concepteur. Je n'en possède l'apparence et les mémoires que par le biais de ces données, et non parce que j'ai été programmé pour être celui qui m'a créé. D'une certaine manière, je suis donc une version d'Ansem, conclut-il.

L'adolescent allait répliquer quand il tiqua ; la personne qui lui faisait face, si tant est qu'on pouvait l'appeler une personne, était les données d'Ansem. C'était ça qu'ils étaient venus chercher pour comprendre ce qu'il leur était arrivé, à Sora et à lui. Le jeune homme sauta aussitôt sur l'occasion :

- Qu'est-ce que vous savez sur Sora ? À propos de son cœur ? fit-il, battant d'espoir.

Le faux Ansem secoua lentement la tête, yeux fermés dans une expression navrée :

- Je ne peux malheureusement pas recourir à ta requête. J'ai beau posséder toutes les recherches de mon concepteur, leur consultation ne m'est pas accessible. Je ne peux que te confirmer détenir des informations sur ce que tu demandes.

La nouvelle fit l'effet d'un coup de massue sur les épaules de Roxas. Alors ils avaient fait tout ça pour rien ?

Encore ?

Le programme remarqua l'attitude du jeune homme, et s'éclaircit alors la voix :

- Mon accès est effectivement verrouillé, mais pas condamné. Si nous parvenons à le décrypter, les donnés seront à nouveau libres de consultation.

Le garçon releva la tête, prit entre une étrange sensation d'espoir et de rancœur. Cet homme devant lui représentait à la fois toutes ses espérances de réponse, et toutes ses amertumes d'avoir dû disparaître pour un autre. Serrant le poing et la mâchoire, il fixa le programme d'un regard tranchant, avant d'enfin déclarer :

- Et comment on peut décrypter cet accès ?

L'homme lui tourna alors le dos, s'avançant vers la baie vitrée devant laquelle il s'arrêta avant de lui demander d'approcher. Méfiant, mais prêt à tout pour avoir ses réponses, Roxas descendit lentement du lit et rejoignit prudemment le faux Ansem, sentant crépiter dans sa paume une étincelle noire prête à se changer en Souvenir Perdu dès qu'il le désirerait. Le programme lui désigna alors l'extérieur, poussant le jeune homme à regarder ce qu'il s'y passait ; au-dehors, dans les rues noires aux néons blancs, des gardes et des Sans-cœurs grouillaient à chaque coin, faisant frissonner le garçon à la vue de ces innombrables ennemis.

- Au cas où tu ne le saurais pas encore, déclara alors le programme, le système informatique a été piraté au moment de votre visite.

- Piraté ? s'exclama l'adolescent. Ça veut dire… qu'on a été attaqués ?

- En un sens, oui. Un programme malveillant a également été installé et provoque l'apparition infinie de ces créatures, ajouta le faux Ansem en désignant les Sans-cœurs. Je pense aussi avoir détecté de nombreux bugs qui perturbent le système et empêchent les protocoles de sécurité de s'activer correctement. Qui plus est, le programme de sécurité principal semble avoir été arrêté, ou peut-être même… supprimé.

Le garçon fronça les sourcils, un peu perdu dans la montagne de mots bizarres, mais répliqua :

- Donc en gros… on est dans le pétrin ?

- Je pense que je n'aurais pas dit mieux, acquiesça l'homme.

- Et c'est tout ? On est foutus ? fit l'adolescent.

Le faux Ansem leva alors le regard vers le sommet des immeubles, désignant une étrange tour au loin qui se démarquait des autres dans le ciel numérique.

- Vois-tu cette structure, là-bas ? C'est ici que se trouve le cœur de l'unité centrale. C'est le cœur de tout le système. Si nous parvenons à y accéder, je pourrais reprogrammer l'ordinateur et réinitialiser l'ensemble.

- Et ça résoudra tout ? Le décryptage des donnés inclus ? avança le jeune homme, méfiant.

- Cela ramènera le système à un état antérieur à l'attaque, ce qui permettra d'entamer un protocole de déverrouillage sans risque de piratage, répondit le programme. L'un ne peut être fait sans l'autre.

Le garçon jeta un regard tranchant à l'adulte, les poings serrés ; il avait tout sauf envie d'aider celui qui, avec Riku, était responsable de sa fusion forcée avec Sora. Mais il ne pourrait sans doute pas s'échapper de cet endroit tout seul, en tout cas pas sans directions précises. Jusqu'à présent, tout ce qu'il avait fait se résumait à courir dans tout les sens et éviter de se faire tue-détruire, et encore cela avait bien failli lui arriver. Qui plus est, et Roxas se détestait rien que d'avoir à l'admettre, mais ce "Digital-Ansem" l'avait sauvé juste à temps d'une disparition certaine et se montrait prêt à l'aider.

Et il n'a pas l'air de me considérer comme un "simple outil", au moins.

Qui te dit qu'il ne va pas le faire ?

L'adolescent se mordit la joue à cette pensée. Oui, rien ne lui disait que cette "version" d'Ansem n'allait pas le traiter comme son dit "concepteur". Mais entre partir seul de son côté et s'allier avec lui pour restaurer le système, il n'avait pas vraiment le choix.

Comme la dernière fois.

Roxas serra la mâchoire, sentant à nouveau la rage monter en lui, avant de se forcer à se tourner calmement vers le programme et de hocher la tête, à contrecœur.

- Très bien, D-Ansem. Allons-y avant que je ne change d'avis.


- Mais vous allez nous lâcher, à la fin ! jura Lea en cramant un énième Sans-cœur leur barrant la route.

L'apprenti lança sa Keyblade enflammée sur un tank violet (un Dévastator d'après Ienzo), détruisant le monstre sur le coup, avant de rattraper l'arme après qu'elle ait touché plusieurs autres créatures sur son chemin. Le groupe profita de l'ouverture pour quitter les lieux, alors que d'autres ennemis remplaçaient déjà leurs semblables tombés. Cela faisait ils ne savaient combien de temps qu'ils erraient en tout sens dans cette ville inconnue, se faisant toujours courser par des Sans-cœurs ou des gardes qui ne tenaient guère face au Porteur.

Et toujours aucun signe d'un terminal ni de Roxas.

Alors qu'ils atteignaient une rue débouchant sur un grand précipice, il virent devant eux une tour grisée rougeoyante bien distincte, se dressant seule au centre du gouffre. Son esthétique leur rappelait bien plus celle de leur point de départ que des bâtiments alentours.

- Lea ! s'écria Ienzo. Je crois que nous avons trouvé le cœur de l'unité centrale !

- T'es sûr ? répliqua l'autre en tenant d'autres monstres à distance.

- Je ne peux être sûr de rien ici ! Tout ce que j'observe, c'est un bâtiment bien trop caractéristique pour n'être qu'un simple lieu sans importance !

- Et comment tu serais plus sûr ?

- Le seul moyen de savoir ce qu'est cet endroit est de s'y rendre, mais…

- J'ai compris, ça va pas être facile ! Alors occupons-nous d'abord de ces Sans-cœurs, qu'on soit tranquilles ! conclut Lea en se tournant vers les créatures.

Ignorant la fatigue qui le prenait déjà depuis plusieurs minutes, l'apprenti se jeta au combat, faisant virevolter sa Keyblade parmi les rangs ennemis. À sa grande surprise, il vit certains monstres s'attaquer entre eux, et comprit d'un coup d’œil que Ienzo, main levée et regard concentré, lui donnait un coup de main. Adressant un bref sourire de gratitude à son camarade, le jeune homme repartit au combat, profitant de la confusion pour brûler les groupes s’entre-tuant.

Cependant, un groupe de gardes apparut soudain devant eux, encerclant Lea alors qu'il venait d'éliminer les derniers Sans-cœurs. L'apprenti se tourna vers le scientifique pour assistance, mais le vit s'effondrer à genoux avec Sora, visiblement épuisé ; comprenant qu'il devrait assurer seul, l'adulte se remit en garde alors que les ennemis sortaient des matraques et pour certains des disques de combat orangés.

Un garde lança un projectile qu'il renvoya aussitôt ; un autre profita de cette ouverture pour s'élancer vers lui, matraque en avant. Lea para l'assaut, mais fut touché par le disque d'un deuxième homme. Un troisième l'atteignit au genou, le faisant ployer sous le choc. Par réflexe, l'apprenti déploya un cercle de feu autour de lui, détruisant son assaillant, mais les autres évitèrent les flammes. L'adulte haleta, poing crispé sur sa lame ; l'épuisement l'avait rattrapé, et les divers coups reçus l'avait presque mis à terre. Les gardes se remirent en position, et repassèrent à l'assaut. Lea leva sa Keyblade, anticipant le choc qu'il ne pourrait pas éviter.

- Axel !

Et soudain une Clé brillante comme le jour perça les lignes ennemies en une traînée de lumière.

L'adulte cligna des yeux, stupéfait, avant de tourner la tête vers le sommet d'un immeuble voisin d'où venait la voix.

Perché sur le bord du toit, un pied sur le rebord et une Keyblade réapparaissant dans sa main gauche en un éclat de Lumière, se tenait Roxas. Derrière lui se détachait une autre silhouette indistincte à la posture droite et calme. Lea n'eut pas le temps de s'étonner que l'adolescent sauta droit dans le vide, tourna ses Clés et les planta à l'envers dans la paroi d'un bâtiment voisin, ralentissant ainsi sa chute en dessinant des traînées d'étincelles sur son passage, avant d'atterrir en une roulade souple. Sans même attendre d'être rétablit, le garçon se servit du mouvement pour lancer Souvenir Perdu sur un garde prêt à l'attaquer, le détruisant sur le coup. Un coup de Foudre réduisit en poussière un deuxième homme qui s'élançait matraque en avant, et une frappe bien placée de Tendre Promesse renvoya le disque d'un troisième en l'anéantissant. Un quatrième garde se fit détruire par surprise par le retour de Souvenir Perdu qui revint tel un boomerang dans la main du Simili.

Lea avait regardé toute la scène d'un air ahuri, ne remarquant qu'au dernier moment l'homme qui se jetait sur lui matraque en avant ; il n'eut même pas le temps de lever sa Clé que l'ennemi tomba en pixels, touché par un puissant estoc de Roxas, sous le regard sidéré de son ami.

L'adolescent s'arrêta enfin, reprenant son souffle, figé dans sa position. Il tourna alors le regard vers Axel, semblant enfin lui prêter attention, et un sourire soulagé se dessina lentement sur son visage.

L'apprenti mit quelques secondes pour réaliser ce qu'il venait de se passer, avant de murmurer, stupéfait :

- …Roxas ?

L'adolescent sourit un peu plus, une étincelle de joie pure brillant dans ses yeux grisés par l'esthétique du monde :

- Ça faisait longtemps, pas vrai Axel ?

L'adulte ne put s'empêcher de sourire en retour, soulagé de voir son meilleur ami en bonne santé. Leurs retrouvailles furent cependant interrompues par l'apparition de Dévastators accompagnés de Sans-cœurs plus petits.

Sans perdre une seconde, le garçon repassa en posture offensive et élimina deux montres rouges (des Mono-Magnums) venus les encercler. Une créature jaune (un Patrouilleur) tira quelques lasers, mais le jeune homme para et contre-attaqua aussitôt en l'éliminant. Lea parvint à se relever et brûla un autre monstre qui tournoyait dangereusement vers son ami. Seul restaient les deux tanks violets qui approchaient, l'air menaçants. Prêts à en finir une bonne fois pour toutes, les deux Porteurs prirent position, attendant le meilleur moment.

Soudain, les Sans-cœurs s'arrêtèrent net, comme figés dans le temps. Lea ne bougea pas, surpris et confus, mais Roxas n'hésita pas un seul instant et s'élança sur les deux monstres, les tranchant comme si de rien n'était. Les créatures tressautèrent, comme buggées, avant de disparaître pour de bon.

Encore troublé par ce qu'il s'était passé, Lea se reprit rapidement alors que Roxas le regarda brièvement pour voir comment il allait, avant de fixer un point derrière lui d'un air effroyablement glacial. L'adulte suivit alors son regard et vit s'avancer vers eux un homme d'âge mûr barbu, en capes et aux cheveux plaqués sur la nuque. L'apprenti n'eut pas plus le temps de s'étonner que Ienzo lui passa à côté, se dirigeant d'un pas tremblant vers l'individu :

- M… Maître Ansem…

L'homme tourna son attention vers le scientifique qui s'arrêta devant lui, hésitant, et baissa les yeux comme honteux. Le jeune adulte, d'habitude si calme et posé, semblait presque désemparé et incapable d'articuler une phrase complète. Ce fut l'homme qui parla :

- Ienzo.

L'intéressé leva aussitôt des yeux surpris mais remplis d'espoir à son appel, et attendit sans un mot la suite, le cœur battant :

- Je me souviens de toi, fit l'homme après avoir médité un instant les yeux fermés. Le plus jeune apprenti d'Ansem…

- M-Maître Ansem, put enfin s'exprimer l'adulte, j-je… J-Je souhaite m… m'excuser pour… pour ce qu…

Sa voix s'éteignit dans sa gorge alors qu'il baissait à nouveau la tête, honteux. Lea était surpris de le voir comme ça ; il savait qu'il faisait partie des membres fondateurs de l'Organisation et donc de ceux qui avaient trahi Ansem le Sage, mais il n'aurait jamais pu imaginer l'adulte dans un tel état.

- Avant que tu ne poursuives, dit alors l'homme, tu dois savoir que je ne suis malheureusement pas celui que tu crois.

Ienzo releva subitement la tête à ces mots, les yeux écarquillés.

- Mon identifiant est Digital-Ansem. Mon apparence est certes celle de ton maître, mais ma nature est numérique, poursuivit l'individu. Je ne suis qu'un programme, un ensemble de données qui ne fait que porter l'image et les souvenirs de mon concepteur.

Le jeune adulte baissa encore les yeux, semblant réfléchir, puis soupira, résigné, avant d'acquiescer, de nouveau calme et posé.

- Ahem… je voudrais pas avoir l'air de vous interrompre, fit alors Lea en s'approchant un peu, mais on pourrait avoir des explications sur la situation ?

D-Ansem hocha la tête, sur le point de répondre, quand Roxas répliqua sèchement :

- Je vous cherchais, je l'ai croisé, il m'a dit qu'il fallait restaurer la tour juste derrière vous pour décrypter les données qu'on étaient venu chercher, on est arrivés là, fin de l'histoire, conclut l'adolescent d'un air froid.

Lea le regarda un instant, sourcil levé ; vu les regards qu'il accordait (ou pas) au programme, l'adulte en conclut que son ami était aussi en froid avec la version réelle du sage qu'il ne l'était avec Riku et décida de ne pas insister. Le groupe se tourna alors vers le corps de Sora, resté là où Ienzo l'avait laissé, et le faux Ansem s'avança vers lui suivit du scientifique. Alors que l'homme s'agenouillait près du garçon, le Simili fixa la dépouille d'un regard vide, l'air entre choqué et inquiet, avant de murmurer :

- …Comment est-ce arrivé ?

- Nous ignorons ce qui cause son état, répondit aussitôt Ienzo autant pour le garçon que pour le programme. Tout ce que nous savons est qu'il est toujours vivant, qu'il n'est pas blessé, et qu'il est vraisemblablement arrivé comme cela ici. Nous l'avons trouvé dans cet état non loin de nous lorsque nous sommes arrivés dans ce monde.

Le faux Ansem ouvrit alors une fenêtre informatique au dessus du corps inanimé du garçon, et commença à pianoter sous les regards perplexes des adultes et celui méfiant de l'adolescent.

- Il est effectivement en parfait état physique, fit alors le programme en consultant les écrans qui s'ouvraient. Je ne saurai cependant pas diagnostiquer avec sûreté ce qui cause cette catatonie, mais il semble être plongé dans un état de non-conscience volontaire.

- Ce qui veut dire en français ? fit alors Lea.

- Je suppose que c'est comparable à un sommeil dont il ne veut pas se réveiller maintenant, simplifia Ienzo. Est-ce juste…?

D-Ansem approuva cette vulgarisation d'un hochement de tête, avant de fermer les fenêtres et de se relever.

- Il devrait retourner à son état normal une fois que nous aurons réinitialisé le système, dit-il en se tournant vers la tour derrière eux.

- Alors allons-y, fit sèchement Roxas qui semblait vouloir en finir au plus vite.

Le groupe se rassembla autour du faux Ansem qui approchait du bord, levant la main vers le cœur de l'unité centrale, quand une explosion retentit soudain près d'eux. Se mettant sur leurs gardes, il virent alors que d'autres Dévastators étaient apparus, n'ayant pas attendus pour les attaquer.

Alors qu'ils s'apprêtaient à répliquer, ils s'aperçurent que l'explosion précédente avait détruit la plate-forme non loin de là où se trouvait Sora toujours à terre, laquelle continuait de s'effriter sous lui. Comprenant la menace, tous se précipitèrent vers le garçon ; mais plusieurs lasers coupèrent la route à Lea et Ienzo. Roxas se jeta sur Sora, juste au moment où il tombait dans l'abîme. Le groupe les virent passer par dessus le rebord, droit dans le précipice.

- ROXAS ! NON !

Lea se précipita à l'endroit où ils avaient disparus, mais un Sans-cœur lui barra le chemin. D'un mouvement furieux, il enflamma sa Keyblade et trancha l'ennemi qui s'effondra ; l'adulte le contourna et reprit sa course, sur le point de se jeter dans le vide pour sauver son meilleur ami.

Mais au moment où il arrivait près du bord, une brève colonne de lumière bleue aveuglante jaillit de l'endroit où avaient chuté les deux garçons, disparaissant aussi vite qu'elle était venue. Surpris par ce phénomène, l'apprenti se figea un instant, permettant à un Mono-Magnum de lui barrer la route en lui tournant autour. Occupé par le nouvel adversaire, l'adulte quitta la scène des yeux pour éliminer le gêneur. Juste à cet instant, un bruit de moteur le fit à nouveau se retourner pour voir une machine noire volante aux néons bleu fluo surgir en piqué du gouffre. L'engin virevolta dans les airs sous le regard ahuri du groupe, avant de se rétablir et foncer droit dans leur direction. Méfiant, Lea leva sa Keyblade vers lui, ne sachant pas s'il était ami ou ennemi.

Il eut la réponse très vite ; des tirs aux couleurs de l'appareil jaillirent des ailes et désintégrèrent les Sans-cœurs restants. Alors que la machine arrivait au dessus d'eux, elle se désintégra en filaments bleutés tandis qu'une silhouette d'adolescent devenait visible depuis l'intérieur de l'engin, avant qu'elle n'atterrisse souplement devant eux.

C'était Sora.

Lea tourna aussitôt son attention sur lui :

- Sora ! Tu es…

Mais il s'arrêta net en voyant le regard que lui renvoyait le jeune garçon aux cheveux en pétard. Un regard négatif, blessé, déçu. Et il comprit.

- …Roxas ?

Le jeune homme lui répondit d'un hochement de tête, la mâchoire serrée.

- Mais… qu'est-ce qu'il s'est passé ?

- …J'ai agrippé Sora de toutes mes forces pendant la chute, et… nous n'avons plus fait qu'un, murmura d'une voix meurtrie le Simili après un silence.

Lea eut un regard navré envers son ami, mais ne sut pas quoi faire de plus pour le réconforter.

- Je vois que tu as su faire bon usage du véhicule que je t'ai confié, ajouta alors le faux Ansem en s'avançant vers eux.

- Le véhicule…?

Roxas lui montra alors un petit bâton noir aux circuits bleus qu'il tenait toujours dans sa main, non sans gratifier le programme d'un regard froid mais néanmoins pourvu d'une once de reconnaissance.

Sans perdre plus de temps, D-Ansem créa un passage entre leur emplacement et la tour ; une passerelle informatique se construisit progressivement, reliant les deux destinations.

Mais alors que le groupe allait l'emprunter, un disque orange surgit de nulle part et endommagea une partie du pont. Tous tournèrent la tête vers l'origine de l'attaque, et virent arriver lentement un garde noir, différent des autres. L'adversaire récupéra son arme et se remit en position offensive, ses deux disques brillant d'un éclat menaçant. Les yeux de Roxas s'écarquillèrent un instant, avant qu'il n'invoque ses Keyblades et ne s'avance vers l'homme, l'air froid et déterminé :

- Partez sans moi. Je vais le retenir, dit-il sans se retourner.

Lea ouvrit des yeux stupéfaits, avant de se tourner vers son ami, incrédule :

- Non, Roxas ! J'ai passé la moitié de mon temps ici à te chercher dans tout les sens, alors pas question que j'y aille sans toi ! Et je compte pas te laisser affronter ce mec tout s-

- J'AI DIT PARTEZ ! répliqua l'adolescent d'un ton sans appel en se tournant d'un bloc vers son meilleur ami.

Lea voulut protester encore, mais vit l'éclat dans ses yeux et comprit qu'il ne pourrait pas lui faire changer d'avis. Alors, à contrecœur et reculant lentement vers la tour tant recherchée, l'adulte fixa une dernière fois le garçon dans les yeux, avant que chacun ne rompent ce contact, l'un portant son attention sur son adversaire, l'autre tournant les talons en courant sans se retourner.


Roxas et l'inconnu restèrent un long moment sans bouger, attendant chacun le premier mouvement de l'autre. Puis, d'un même élan, il se jetèrent en avant, croisant enfin le fer.

Lames l'une contre l'autre, les deux adversaires se fixèrent l'un l'autre. Roxas vit son reflet dans le casque noir de l'homme, le reflet d'un jeune garçon au casque sans visière et aux cheveux en pétard se hérissant sur les côtés.

Le reflet de Sora.

Crispant la mâchoire face à ce reflet qui aurait dû être le sien, l'adolescent raffermit sa prise sur Souvenir Perdu et repoussa l'adversaire, tentant un revers de son autre Clé. Le garde para l'assaut de son deuxième disque et fit un salto arrière tout en lançant sa première arme sur le garçon. Ce dernier se baissa de justesse, alors que l'autre atterrissait souplement hors de sa portée. Courant de côté pour éviter le retour imminent du disque, Roxas lança Tendre Promesse sur l'ennemi, qui esquiva en faisant une pompe, avant de récupérer son projectile.

L'adolescent rappela à lui sa Clé et s'élança dans la direction de l'homme, faisant racler ses lames au sol. L'homme l'attendit, disques en position, et croisa à nouveau le fer avec lui. Les deux adversaires s'échangèrent plusieurs coups, faisant à chaque fois jaillir des étincelles, frappant de plus en plus fort.

À chaque assaut, Roxas voyait se refléter dans le casque du garde l'image de Sora ; une désagréable sensation de déjà-vu s'empara de lui, alors que l'inconnu continuait d'attaquer sans prononcer ne serait-ce qu'un seul son, telle une machine sans âme. À chaque vision de Sora dans le casque, une frustration grandissait dans la poitrine de l'adolescent, serrant sa cage thoracique dans un étau déplaisant.

Le Simili en avait plus qu'assez de ce combat. Plus qu'assez de voir Sora à sa place là où il aurait dû être lui. Plus qu'assez de ressentir cette poigne au cœur qui ne vous lâche pas jusqu'à vous étouffer. Plus qu'assez de ressentir les émotions de Sora.

D'un violent geste agressif, le jeune homme désarma l'homme d'un disque, le déroutant une seconde ; un revers de Souvenir Perdu dans le casque de l'inconnu l'étourdit encore plus longtemps, permettant au garçon de le pousser à terre d'un bon coup de pied. Déstabilisé mais pas sonné, le garde leva son second disque en protection, mais l'adolescent l'éjecta au loin d'un geste rageur avant de se jeter sur l'homme, Clés en avant.

Roxas plaqua l'individu au sol, Tendre Promesse sous sa gorge et Souvenir Perdu pointé sur sa tête, prêt à frapper. Tout deux restèrent ainsi un instant, figés ; malgré son casque fissuré, il sembla à Roxas que l'inconnu le fixait en retour, choqué de s'être fait battre ou de voir l'adolescent en face.

Un silence se fit, avant qu'un mot, un seul, ne retentisse dans la Grille :

- …S…o…ra…?

L'adolescent écarquilla les yeux, choqué d'entendre l'homme prononcer ce mot. Sa voix était si familière…

Mais soudain il réalisa qui l'homme venait d'appeler, et son regard se durcit de douleur et de rancune :

- Je ne suis pas Sora.

Crachant ces mots, le garçon leva haut sa Keyblade noire ; il crut presque voir l'homme se figer de peur, avant de planter son arme droit dans le sol, à quelques centimètres de sa tête.

L'adolescent resta quelques instants immobile, main sur la garde de Souvenir Perdu, le reflet de Sora se reflétant dans le casque noir du garde. Une partie de l'image était déformée, craquelé par une fissure dans le casque, donnant l'impression que la moitié du visage du garçon était tordue, défigurée par la colère.

Puis l'adolescent se calma, reprit un visage froid et distant, puis se releva lentement, fixant toujours le programme qui ne bougeait toujours pas.

Une image se superposa dans sa tête un instant, celle d'une arène futuriste et d'un corps noir semblable à celui devant lui flottant dans les airs, entouré d'un cercle de donnés. Roxas se tint la tête en gémissant, alors qu'une horrible sensation de déjà-vu l'envahissait. Secouant la tête pour retrouver ses esprits, il s'aperçut que l'homme s'était redressé, profitant sans doute de sa distraction. Le garçon se remit en posture de combat, prêt à répliquer, quand le garde ramassa un de ses disques et le jeta dans sa direction ; Roxas leva Tendre Promesse pour contrer l'assaut, mais l'arme lui passa à côté et sortit de son champ de vision. L'adolescent l'entendit heurter quelque chose avant de se retourner, prêt à le renvoyer.

Il n'eut pas besoin de le faire. L'arme repassa dans sa direction, le manquant de loin après avoir touché une Bombarde qui allait canonner l'adolescent en traître. Encore sous le choc, le garçon vit un autre disque lui passer à côté pour frapper à nouveau la créature, la renversant sur le dos dans la foulée, et tourna enfin la tête vers le garde noir qui rattrapa son disque avant de se tourner vers lui.

Les deux guerriers se fixèrent l'un l'autre un moment, et soudain un mot trouva son chemin jusqu'aux lèvres de Sora :

- Tron…

Roxas cligna des yeux, semblant reprendre ses esprits, puis retourna son attention vers le programme qui relançait son disque sur d'autres Sans-cœurs. Encore perdu dans ses pensées devant ce qu'il venait de lui arriver, le garçon resta un instant immobile, avant de tourner le regard vers l'unité centrale se dressant derrière eux. Il jeta un autre regard vers le programme affrontant les créatures, puis vers la tour, eut un dernier regard vers l'homme, avant d'enfin tourner les talons et s'engager sur la passerelle.


Lea jeta à nouveau un coup d’œil vers la ville en trépignant, puis reporta son attention vers D-Ansem et Ienzo occupés près d'un terminal non loin de la tour. Ayant enfin trouvé l'appareil tant recherché, les deux scientifiques avaient décidé de rétablir la connexion pour ramener les trois humains dans leur monde respectif et également laisser du temps à Roxas afin qu'il puisse revenir en même temps que ses camarades.

Cela faisait plusieurs minutes qu'ils tentaient de programmer la machine en attendant l'adolescent, et toujours aucun signe de lui. Il n'y avait pas non plus le moindre signe de Sans-cœurs ou d'ennemis, ce qui selon le programme était un très bon signe ; s'ils n'étaient pas attaqués, cela voulait dire qu'ils étaient sans doute dans une zone protégée de toute menace.

Mais Lea se fichait de se savoir en sécurité ou non. Roxas était resté derrière eux à affronter le garde qui leur avait barré la route et n'était toujours pas revenu. Tout pouvait être arrivé ; il avait pu gagner, ou se faire capturer, ou perdre, ou…

L'apprenti ne voulait pas y penser. Il s'en voulait déjà suffisamment d'avoir laissé son ami seul contre l'homme, sans en plus avoir à s'imaginer le pire à son sujet.

Même avec une Keyblade, je reste incapable d'aider mes amis… Pourquoi es-tu aussi impuissant, Lea ? Aurais-tu donc faibli ?

Tapant impatiemment du pied, l'adulte allait redemander s'ils en avaient pour longtemps, songeant brièvement à s'éclipser en douce pour retrouver Roxas, quand il remarqua une petite silhouette bleue courir dans leur direction. Retenant son souffle, l'apprenti se tourna vers elle, attendant de voir ce que c'était ; la figure se fit plus nette, pour devenir celle d'un jeune garçon au casque à antennes bleues basses d'où dépassait deux épis latéraux. Lea soupira de soulagement en reconnaissant la silhouette de Sora et s'avança vers l'adolescent, avant de s'arrêter, prit d'un doute ; est-ce que c'était toujours Roxas ? Il en eut rapidement confirmation lorsque le jeune homme l'appela "Axel" en arrivant à leur hauteur.

- Roxas ! Je suis soulagé de te revoir ! fit Ienzo en remarquant l'arrivée du garçon.

- Vous faites quoi ? C'est pour réparer l'ordinateur, ce truc ? répliqua le plus jeune en fixant le terminal sur lequel ils travaillaient.

- Indirectement, oui, dit le scientifique. Nous essayons de revenir dans le monde réel pour accélérer le processus de décryptage, mais je dois t'avouer que c'est majoritairement pour nous mettre en sécurité…

L'adolescent eut un regard perçant, comme agacé qu'on se concentre plus sur la sortie du monde que sur les précieuses données, mais ne fit aucune remarque. Ce fut à cet instant-là que D-Ansem se redressa, finissant de pianoter sur la machine :

- C'est fini. J'ai pu créer un contact avec l'extérieur, mais il sera très bref. Vous feriez mieux de partir immédiatement avant qu'il ne soit rompu.

Il appuya alors sur une touche et des cercles de données apparurent aussitôt autour des trois humains.

- Eh, c'est quoi ça ? s'écria Lea, mal à l'aise.

- Ceci est tout à fait normal. Posez simplement votre main sur la fenêtre devant vous et vous serez transférés de l'autre côté, expliqua le programme alors que lesdites fenêtres apparaissaient devant les intéressés.

D-Ansem se détourna d'eux et s'avança lentement vers la tour de l'unité centrale, serein.

- Attendez ! Qu'allez-vous faire ? demanda Ienzo, prit d'une surprenante inquiétude.

- Ne craignez rien pour moi, fit le programme en s'arrêtant brièvement. Je dois fusionner avec le cœur de l'unité centrale pour arrêter cette folie avant qu'elle ne détruise l'intégralité du système. J'ai besoin de vous de l'autre côté, alors partez. Je ne suis rien d'autre qu'un programme, et telle est ma fonction.

Le scientifique hésita, une main mi-tendue vers la silhouette de son maître comme pour le retenir, avant de finalement laisser retomber son bras en soupirant, résigné :

- Très bien.

Le programme se retourna un instant vers lui, lui adressa un sourire confiant, puis déclara :

- Je ne pense pas que ce soit à moi de te dire cela, Ienzo, mais… Je suis fier de toi.

Le jeune adulte se figea un instant, choqué, mais hocha vivement la tête, l'air sincèrement touché. D-Ansem se dirigea alors vers l'unité centrale sans se retourner, avant de disparaître au loin dans la lueur rougeâtre qui émanait de la tour. Le scientifique reporta alors son attention vers Lea :

- Allons-y. Nous ferions mieux d'enclencher le transfert tout en même temps pour éviter d'être séparés.

- D'accord, alors à trois : un, deux… Trois !

D'un même geste, les deux adultes actionnèrent leurs fenêtres respectives ; le cercle de données s'activa alors autour d'eux, et ils sentirent le sol sous leurs pieds perdre progressivement de sa tangibilité.

Mais, prit d'un doute soudain, Lea se retourna vers Roxas resté étrangement silencieux. Une lumière intense l'aveugla exactement au même moment.

La toute dernière chose qu'il cru voir avant que tout ne soit englouti dans un océan de lumière et de kaléidoscope bleuté fut la silhouette de Sora face au terminal, la main sur le clavier et fixant l'écran d'un air étrangement fasciné.

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