JoJo's Bizarre Adventure : Lost Baby

Chapitre 65 : Bye-Bye, Miss American Pie

2258 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 26/05/2024 21:45

Officier White : Alors McLean, encore en train de rêvasser ! Si tu crois qu’on libère un pays en regardant en l’air, tu te trompes lourdement ! 


Dans un pick-up militaire, un bataillon de soldats américains préparaient leurs armes pour les combats à venir. Parmi eux, un soldat se contentait de regarder les paysages plutôt que d’écouter les instructions de son supérieur.


McLean : Officier White, sauf votre respect, pour sauver un pays, il faut quand même savoir à quoi il ressemble. Si on a nos têtes dans nos fusils tous les jours, on risque pas de sauver grand-chose. 


Officier White : Si tu crois que Roosevelt vous a payé des vacances en Europe, tu te mets le doigt dans l'œil, gamin, alors tu m’obéis ou je te fais coffrer pour insubordination ! 


McLean, à contre-coeur, baissa la tête des champs verts de la Bretagne pour s’entraîner à recharger son arme. Sa mère lui avait dit de lui ramener un souvenir de la France ou au moins de se trouver une petite-amie. Il avait beau lui avoir expliqué qu’il n’y allait pas pour faire du tourisme, elle n’avait rien voulu savoir. Cependant, il n’avait pas trop peur des jours à venir. Le fameux “D-Day” avait été un succès plus d’un mois plus tôt, et il avait déjà libéré la majeure partie de la péninsule bretonne. D’ici deux ou trois semaines, Paris serait sûrement libérée et les nazis ne seraient plus que de l’histoire ancienne. 


Officier White: Bon, écoutez-moi bien ! On a fait une percée importante ces derniers jours !


Dans le camion, un brouhaha de joie se fit entendre.


Officier White : Donc, pour vous récompenser, vous aurez une permission de 3 jours ! Profitez-en parce qu’après, certains d’entre vous repartiront pour libérer Paris ! 


Un nouveau brouhaha apparut accompagné cette fois-ci d’accolades viriles, de rires et de chahuts. C’était leur première permission depuis qu’ils étaient arrivés et ils comptaient bien en profiter. Ils passèrent la nuit dans un petit village dont l’usine avait été réquisitionnée pour produire des obus. McLean se leva aux aurores pour faire le tour de la petite bourgade avant de s’enfoncer dans la forêt où une brume épaisse s’était levée. Il marcha quelques minutes avant de trébucher sur une racine et de tomber la tête dans la terre. Un petit rire résonna entre les arbres.


Mathusalem : On vous apprend pas à esquiver les racines en Amérique ? 


Une jeune femme d’une vingtaine d’années venait de sortir du labyrinthe végétal et dispersait la brume de sa simple présence. 


McLean : Non, désolé M’dame, si la racine est pas dirigée par un petit moustachu teigneux, on nous a rien dit dessus à l’entraînement ! 


La belle inconnue ne put se retenir de rire devant la répartie du soldat couvert de terre à ses pieds. Elle l’aida à se relever et se présenta.


Mathusalem : Je m’appelle Mathusalem Perec, j’habite dans une petite ferme pas très loin… ça vous dirait de m’accompagner…?


Ils arpentèrent la forêt couverte de brume matinale avant d’arriver à une petite ferme où les parents de la jeune femme s’affairaient en remarquant à peine le visiteur. Ils s’asseyèrent dans l’herbe à côté d’un cheval qui broutait calmement en ignorant leur existence. La fermière rêveuse et le soldat idéaliste discutèrent pendant des heures de tout et de rien, changeant de sujet comme la brise de direction. Le regard du jeune McLean se perdit vers les fleurs qui bordaient une des fenêtres de la ferme. 


McLean : C’est quoi le nom de ces fleurs ? Je suis presque sûr qu’on n’en a aucune qui y ressemble en Amérique. 


Mathusalem : Ce sont des glaïeuls, c’est vrai qu’elles sont très belles. Mes préférées quand j'étais petite, c'étaient les bleuets. Il y en avait un peu partout autour de la ferme mais depuis le début de la guerre, elles ont totalement arrêté de fleurir. 


McLean : Oh attend ! 


Le jeune américain fouilla dans sa poche et en sortit une petite fleur rouge au pistil imposant à moitié écrasée par les minutes de marche. La jeune femme rit.


McLean : J’ai cueilli celle-ci sur la route pour venir ici. Est-ce que c’en est un ? 


Mathusalem : Pas du tout, ça c’est un coquelicot ! On vous apprend pas le nom des fleurs en Amérique ?


McLean se gratta le cou en signe de gêne. Il avait toujours eu un bon niveau en français mais visiblement le nom des fleurs dépassait largement ses compétences. Par réflexe, il regarda sa montre.


McLean : Oh non, j’avais promis aux autres de jouer aux cartes avec eux ce soir… désolé, il faut que je file !


Il prit son sac à dos par ses fils et le posa sur son épaule en un geste étonnamment précis pour le maladroit qu’il était. Il se mit à courir avant de se retourner pour faire un signe à sa nouvelle connaissance. 


McLean : On se revoit demain et je t’apporterai un vrai bleuet cette fois-ci ! 


Au fur et à mesure que leurs corps s’éloignaient, leurs pensées se rapprochaient et aucun des deux ne pouvait effacer le visage de l’autre de son esprit. Le sourire de cette française était bien plus dûr à chasser que la brume que McLean traversait. Quand il arriva au camp, la partie avait déjà commencé. Des effluves de cigarette et d’alcool embaumaient la pièce.


Soldat : Alors McLean, tu t’es perdu ? Pour la peine, c’est toi qui paye la prochaine tournée ! 


Il les rejoignit et se mit à jouer avec eux sans prêter beaucoup d’attention à la partie. Un autre jeu occupait son esprit. 


Le lendemain, la jeune fermière était accroupie dans le poulailler quand elle aperçut, se dégageant péniblement des ronces, une silhouette familière. Il était revenu. 


McLean : Comme promis, voilà ton bouquet de bleuets…


Il lui tendit un bouquet contenant des fleurs collées les unes aux autres pour former une quasi-sphère. La proximité de toutes ses pétales s’étreignant avait quelque chose de romantique.


McLean : Tu ne peux pas savoir à quel point j’ai eu du mal à les récupérer… il y avait ce chien juste à côté et puis… 


Mathusalem rit à nouveau. D’abord, l’américain fut un peu déçu avant que le sourire de sa bien-aimée fasse tout disparaître. 


Mathusalem : Ce sont des hortensias. Ils sont bleus, certes… mais ça n’a rien de bleuets ! Mais viens ! Pour te consoler, j’ai préparé une tarte, elle sort du four !


La jeune femme prit une tarte aux pommes qui était posé sur le bord de la fenêtre et posa le plat dans l’herbe juste devant l’américain. L’odeur de la pomme légèrement caramélisée lui ravivait des souvenirs de son Kansas natal. 


McLean : C’est fou, elle a la même odeur que la tourte de ma mère même si elle n’y ressemble pas…


Mathusalem : Vous faîtes des tartes aux pommes en Amérique ?


McLean : Bien sûr, c’est même un de nos emblèmes ! On a même une expression pour ça : “American as Apple Pie” ! 


Mathusalem : American Pie ? Ça sonne bien… je veux que ça soit le nouveau surnom que tu me donnes ! 


McLean : Hein quoi ? Mais je vais quand même pas t'appeler comme ça, je-


Avant qu’il ne puisse finir sa phrase, elle lui posa un baiser sur la joue. Son visage prit une teinte vermeil bien plus prononcée encore que celle des coquelicots qu’il avait apportés la veille. Après plusieurs heures à discuter, à contre-cœur, le soldat dut quitter la fille qu’il aimait et retourner au camp. Il ignora les ricanements imbéciles des autres soldats en voyant les traces de lèvres sur sa joue car un seul rire occupait ses pensées. 


Le lendemain, la fermière était occupée à remplir les auges pour les cochons de la ferme quand elle aperçut, le pas décidé, émerger une silhouette familière. Dieu merci, il était revenu. 


McLean : Cette fois-ci, je suis sûr de mon coup, ce sont des…


Il sortit un bouquet de fleurs aux longues tiges rigides aux fleurs tubulaires qui ressemblaient à un orchestre de trompettes jouant une symphonie. La jeune femme rit. Il comprit son échec mais ça n’avait que peu d’importance.


Mathusalem : Tu dois t’en douter mais ce sont des agapanthes… pas des bleuets mais elles sont magnifiques ! 


Elle lui posa un nouveau baiser sur la joue en remerciement de ses efforts.


McLean : Miss American Pie, c’est vrai que ça te va bien… tu es douce comme les tartes que tu prépares.


Il avait préparé sa phrase d’accroche toute la nuit et, malgré le côté un peu niais de ce compliment, l’amour avait suffi à faire rougir le visage de la jeune Mathusalem. Cependant, le regard cerné de McLean était soudainement devenu triste et sombre.


McLean : J-je dois partir demain… on m’a choisi pour faire partie de ceux qui vont libérer Paris… j’ai supplié mon chef toute la nuit mais… ça n’a pas marché…


Mathusalem : M-mais tu ne peux pas me laisser ! On vient à peine de se rencontrer ! 


Des larmes rougissaient les yeux de Mathusalem qui ne pouvait pas se résoudre à laisser partir ainsi l’homme qu’elle aimait. Le soldat lui prit les mains et la regarda droit dans les yeux.


McLean : Ne t’inquiète pas, on va faire une promesse. Tu vas m’attendre et, quand je rentrerai, on se mariera et on fondera une famille ! Le pays est quasiment libéré, je serai de retour dans une ou deux semaines, ne t’inquiète pas ! 


Mathusalem passa son doigt sur ses larmes pour les sécher et se força à sourire une dernière fois avant que son amour ne parte. Les adieux furent déchirants quand il fallut que le soldat parte vers son nouveau champ de bataille loin des champs bretons. 


***


Plusieurs semaines passèrent qui parurent des années pour la jeune fille amourachée ; après toute cette attente, enfin arriva l’ultime libération, un bruit de main qui toque à la porte et elle accourut pour ouvrir, aussi vite qu’elle le pouvait. Il n’était pas revenu. Il n’y avait que deux soldats. Leurs mines étaient graves. 


Officier : Vous êtes mademoiselle Perec, c’est bien ça ? 


Elle savait où cette discussion allait mais elle ne voulait pas l’accepter. Elle pleurait. 


Officier : Je suis Simon White, j’étais le supérieur du caporal McLean. Il nous a dit que vous étiez la première personne à prévenir si… je crois que vous voyez.


Il s’arrêta et se contenta de faire un signe au soldat à ses côtés qui donna une lettre à la jeune fermière. Elle commença à la lire : 



“Cher Mathusalem,


Si tu lis ça, c’est que ça doit être le jour où je suis mort. J’espère que tu n’auras jamais à lire ça et je jure devant Dieu que la première chose que je ferai sera de brûler cette lettre après avoir revu ton sourire. Si cette lettre t’est parvenue, je suis désolé de ne pas avoir tenu notre promesse. Sache que je n’ai jamais cessé de penser à toi.


Bye, Bye Miss American Pie”


Officier White : Je crois que nous allons vous laisser. Mes sincères condoléances.


Il commença à se retourner avant que Mathusalem lui attrape le bras. 


Mathusalem : Attendez, dites-moi la vérité ! Comment il est mort ?! Je veux savoir ! 


L’officier sembla hésiter. 


Officier : Je ne pense vraiment pas que ça soit une bonne idée, mademoiselle. 


L’autre soldat l’interrompit et révéla ce qui était arrivé à son camarade.


Soldat : Une balle d’un de nos gars a rebondi. Elle l’aurait évité mais à ce moment-là, il était penché pour ramasser quelque chose. La balle a traversé sa tête de part en part, il est mort sur le coup. 


Elle se mordait les lèvres pour ne pas crier. Ses poings étaient serrés de toutes ses forces. Son cœur était rempli de tristesse, de rébellion, de rage. 


Soldat : Quand on l’a trouvé par terre, il tenait quelque chose dans la main. Ça avait l’air important pour lui alors je l’ai gardé… tenez. 


Le soldat sortit quelque chose de sa poche et le tendit à la jeune femme qui éclata en sanglot au moment où elle le vit. Elle le prit dans ses mains, tomba à genoux et cria de tout son corps libérant toutes les larmes qu’elle retenait. 


Mathusalem : C-c’est un bleuet. 


Laisser un commentaire ?