L'école des démons acte 1
Aérin est avec Degan et Opéra dans la salle de jeux. Ils n'ont pas vu quand Azael et les deux autres se sont isolés, alors ils les attendent tout simplement.
— Tiens Aérin, ça va aller pour cette nuit ? demande son frère, un petit sourire en coin.
— Ben oui, pourquoi ? dit la rousse, sans comprendre la soudaine remarque de Degan.
— Il va faire noir, rigole le rouge.
— Ça va, ce n’est pas comme si j’allais dormir seule, dit la rousse en détournant les yeux.
— Tu as peur du noir, demande Opéra, un léger sourire en coin.
— C’est leur faute ! Ils me bloquaient à la cave parce que j'étais trop petite pour atteindre la poignée de porte ou l'interrupteur ! demande-t-elle en pointant Degan du doigt.
Opéra tourne les yeux vers celui-ci tout en levant un sourcil. Quel drôle d’idée ? Le portable de la rousse se met à vibrer, elle le sort de sa poche et lit le message envoyé par Shichiro. Il lui demande de venir les rejoindre dans la chambre d'Azael ? En parlant du démon, il vient de les rejoindre à l'instant. La démone se lève en questionnant des yeux le bicolore qui ne change pas d’expression alors que sa main sur son épaule la dirige vers la porte.
Degan observe son frère dubitatif. C'est lui ou l'échange de regard qu'ils viennent d'avoir est encore plus étrange que cette fausse joie qu'elle manifeste depuis l'après-midi ? Azael vient s’asseoir à côté d’Opéra qui sirote son thé presque de manière agaçante.
— Qu'est-ce qui se passe ? Vous êtes bizarre, l’interroge le cadet.
— Pas moi, rectifie Opéra.
— Je ne parlais pas de toi, répond Degan.
— Je sais, conclus le félidé en reprenant une gorgée.
Azael esquisse un sourire en regardant le chat, puis reporte son regard sur son frère.
— Il y a eu un petit accrochage entre Callego et Shichiro, dit-il simplement.
Degan cligne des yeux abasourdit et dévisage son frère pensant dans un premier temps qu’il plaisante. Opéra a légèrement tourné la tête vers le bicolore en fronçant les sourcils.
— Callego, je n'en suis pas surpris, mais Shichiro ? dit le chat, étonné.
— Il n'a fait qu'encaisser, mais son masque est tordu, il ne sait plus le remettre.
— Callego en a mis une à Shichiro ? Je n’ai jamais compris son délire avec son masque, rajoute Degan.
— Il est défiguré abruti, donc tu évites de le narguer avec ça, dit Azael, sèchement.
Degan se racle la gorge en passant sa main dans ses cheveux, ça va, ce n'est pas dans ses habitudes ce genre de comportement.
— Pourquoi en sont-ils venus à se disputer ? Demande Degan.
— Histoire de cœur, répond le bicolore.
— Tu ne pourrais pas être plus précis, rajoute Degan, en levant un sourcil.
— Ça ne regarde qu’eux, ils en parleront s’ils le veulent.
— T'es un enfoiré, bro! Tu nous donnes des infos et tu ne lâches rien ! réplique le cadet.
Opéra les observe en continuant de boire… Il n’a rien compris de leur conversation.
Aérin a son cœur qui s'emballe au fur et à mesure qu'elle franchit les quatre marches qui donnent aux chambres. Ses jambes deviennent molles à un point tel, qu'elle a l'impression qu'elle pourrait tomber à tout moment. Figée devant la porte de son frère, elle prend une inspiration et l’ouvre, cachant comme elle le peut son malaise. Ses yeux se portent sur Callego qui vient de tomber sur ses genoux. Abasourdie, elle veut se précipiter vers lui, mais s’immobilise alors qu’il lui demande de rester sur place. Par ailleurs, elle se tourne sur Shichiro assis sur le lit, sans son masque et blessé ?
— Vous vous êtes disputé ? Callego ça va ?
— Pardon, c'est la première fois que ça m'arrive, je suis en plein stress, tremble le démon.
Il relève les yeux vers la rousse, un sourire mal assuré sur le visage. Même Shichiro n'en revient pas de lui voir une telle expression.
— J’ai des antistress, tu en veux ? propose la jeune.
— Ça va aller, j'ai les jambes molles, je reste là si ça ne pose pas de problème, dit Callego d’une voix étrangement calme.
Si la situation avait été tout autre, ils en auraient bien ri, mais ce n’est pas le cas. Il est surprenant de le voir, lui, craquer en premier. Aérin s'assied en tailleurs sur le sol et face au brun qui garde les yeux sur le tapis. Son regard se creuse, gêné par sa faiblesse, plus qu’autre chose. Shichiro les imite en se plaçant lui aussi à leur hauteur, le regard déviant.
— Il vaut mieux ne pas laisser le silence s'installer, alors je vais directement briser la glace. Je n'aime pas cette situation ! Je refuse qu'il y ait un froid entre vous à cause de moi. Je vais demander un transfert d'école, rétorque Aérin.
— Écoute-nous avant de prendre ce genre de décision ! dit le brun, la voix tremblant bien qu'elle soit également dure.
— Tu n’auras pas à faire de choix, intervient Shichiro, qui remonte les yeux vers Aérin.
— Tu fais presque peur avec ce regard, dit la rousse, peu convaincue.
— Ça ne fait pas longtemps que l’on est ensemble et je sais que Shichiro avait un faible pour toi. Tu ne sais pas faire de différence entre tes sentiments et je n’ai pas envie de m’écarter, déclare Callego, en s’énervant contre lui-même.
Aérin reste silencieuse et les regarde à tour de rôle tandis que le brun se décide à adopter leur posture.
— Attendez… dit-elle en secouant les mains. Je ne comprends pas, pourquoi je ne devrais pas faire de choix ?
— C’est un peu comme un harem… Ah non, c’est plusieurs filles pour un démon, ça, dit Shichiro.
— Pardon ? rétorque Aérin, en clignant des yeux.
— Un démon ne partage pas sa compagne, mais… Ça ne me dérange pas si c’est avec Shichiro, explique maladroitement Callego.
— Tu te contredis, remarque le blanc, qui garde sa tête penchée, comme s’il voulait se retirer de la conversation.
— Je le tolère, en revanche, ça va animer mon côté compétitif, dit le brun en se massant la nuque.
— Je ne suis pas un trophée ! Soyez francs avec moi… Vous ne faites pas ça, par pitié, parce que je vais mourir ? demande la démone, vexée.
— Bien sûr que non ! Callego et toi, vous m’aviez directement accepté en faisant fi des rumeurs qui circulaient sur moi. Tu es altruiste et compatissante, c’est ce que j’aime chez toi… Et je te trouve vraiment mignonne, confie Shichiro.
— Quand Shichiro m'a confié qu'il t'avait embrassé, j'ai éprouvé de la jalousie, parce que je crains de ne pas être à la hauteur, s’énerve Callego. J’ai toujours l’intention de rester à tes côtés peu importe ce qu’il peut se passer.
Aérin baisse les oreilles et s’attrape le bras, la pression dans son corps est vive et sa gorge nouée l’empêche de déglutir.
— Mais… Je ne suis même pas certaine de mes sentiments pour vous, dit-elle, en pleure.
La voir dans une telle détresse retourne Shichiro, il a envie de la serrer contre lui ! Callego ne semble pas se décider à le faire, les démons sont à l'antipode côté affectif. Shichiro adore le contact, Callego, non. Enlacer Aérin pour la réconforter ne lui est pas encore naturel. Tant pis, Shichiro se glisse jusqu’à la rousse et se blottit contre elle. Il regarde le brun, insistant en faisant un léger mouvement de tête pour le faire réagir. Celui-ci met quelques secondes avant de comprendre. Hésitant, il vient s'asseoir pour poser sa main sur le dos de la démone, qui se recroqueville, sans savoir que faire, si ce n’est qu’elle n’a pas envie de les repousser.
— Aérin, acceptes-tu ce que nous te proposons ? Demande Shichiro.
— Je refusais d'un quelconque relation à la base, alors deux… Mais, si cela vous va, c’est d’accord, répond-elle, rouge.
Shichiro et Callego ont aussi le regard au sol et le visage rouge, lentement, le brun remonte les yeux vers ses compères, qui en font de même. Ils s’échangent un regard gêné, souriant nerveusement avant de détourner une nouvelle fois leur visage des autres.
— On devrait retourner en bas, Degan va mettre Le Rôdeur, blanchit Aérin.
— Le rôdeur ? Demande Callego.
— Un film d'horreur, explique Shichiro.
— Il va me narguer donc je vous l'avoue… Ce film me fait flipper, dit-elle, honteuse.
Callego grimace puis éclate en fou-rire libérant d’un coup tout le stress qu’il a accumulé. Shichiro sourit et Aérin baisse les oreilles, ses joues rougies. Le froid se dissipe tranquillement alors qu'ils se rétablissent sur leurs jambes.
Ils retournent à la salle de repos et juste avant d’y entrer, la rousse se retourne et attrape les épaules de Callego qui se fige… Il la regarde sans réagir, ne se rendant pas compte du pourquoi, elle se retrouve sur la pointe de ses pieds, son visage tendu vers le sien.
— Merci pour le vent ! proteste-t-elle.
— Mais que fais-tu ? dit-il penaud.
— J’essaie de t'embrasser !
— Ah ! exclame-t-il après un court laps de temps.
Il se baisse sur elle et lui donne un coup dans les dents involontairement en posant ses lèvres sur les siennes. Aérin en rit de nervosité et se tourne sur Shichiro, qui bien qu’il en ait fortement envie, vient à faire un pas en arrière alors qu’il commence à avoir chaud.
— Toi, tu ne me fais pas pareil !
Il est plus petit que Callego, mais s'il se tend aussi, elle se sentira une nouvelle fois idiote. Le garçon coopère plus facilement, même s’il a peur de la mordre involontairement et qu’il interrompe rapidement le bisou. Elle rit d’embarras, puis alors qu’elle tourne la clinche pour rejoindre les autres, s’aperçoit qu’elle a crié ça tout haut !
Prise de conscience qui la fait définitivement gagner la teinte la plus écarlate possible.
Aérin inspire et passe la porte, un sourire crispé aux lèvres, elle se sent si nerveuse ! Est-ce qu'ils le sont eux ? Oui ! Ils le sont, il y en a juste un qui le cache mieux que son comparse. Callego garde son air renfrogné et s'assoit à côté de Degan, lui-même à la droite d’Azael et Opéra tout à gauche.
Le rouge les observe, ils sont tous les trois en train de les éviter du regard. Shichiro est resté derrière Aérin et Callego, il renverse les cheveux pour qu'il tombe devant son visage.
— Bon, on va avoir une explication ? demande le rouge.
— Pourquoi aurais-tu le droit à une explication ? rétorque Callego, le regard noir.
— Tu sais qu'elle me le dira ? continue Degan, un sourire agacé au visage.
— Elle fait ce qu'elle veut, lui répond le brun.
Azael est indécis quant à son comportement. Il parait toujours bougon, donc, là, est-ce qu'il l'est pour agir normalement où cela s'est-il mal passé ? Shichiro s'est un peu détendu, bien qu'il essaie de ne pas montrer son côté droit. Le démon est si certain de les déranger, qu'il ne remarque pas, qu'en vérité, personne n'y prête attention. Degan et Aérin s'échangent un regard, celle-ci baisse les oreilles et Degan écarquille dans un premier temps les yeux.
— Je vois, dit-il.
— Tu vois quoi ? demande Opéra, qui n'a toujours rien compris.
— On est jumeaux, je vous le rappelle, on n’a pas forcément besoin de parler pour comprendre certaines choses, explique Degan.
— Vous parlez par télépathie ? demande Shichiro.
— Pas vraiment, c’est plus de l’intuition, répond Aérin au pâle.
— Opéra, tu viens chercher les plats avec moi ? Coupe soudain Azael.
Le mentionner s’y attèle… Le repas de fini et la vaisselle de faite. Ils éteignent la lumière et joue le film. Rien que la musique la stresse déjà. Aérin regarde Shichiro qui est plus à l'aise maintenant qu'il est dans le noir, elle sait que la bestiole va sauter au visage de l'acteur, elle le sait ! Mais, elle a tout de même sursauté en se retenant de crier. Elle regarde discrètement vers Shichiro, Degan, Azael et Opéra qui n’ont rien remarqué, puis elle se tourne sur Callego qui la fixe avec un petit sourire en coin, lui oui. Elle sourit de gêne et se concentre sur le film, elle aimerait bien se rapprocher de l’un ou l’autre. Aérin craint de vexer Callego si elle va vers Shichiro ou de le gêner si elle vient vers lui. La démone a l'impression d'entendre le monstre derrière elle ! Bon d'accord, c'est juste Blase qui respire comme une wyverne… Ça y est, c’est l'instant où la bestiole va à surgir du noir.
— Ah ! Putain Blase ! Jure-t-elle.
Le renard voulait juste une caresse, il a glissé sa truffe fraîche sur sa nuque et fait bondir Aérin d'un coup, ce qui a fait sursauter tout le monde. Ils rigolent tous, sauf la rousse qui se renfrogne. Shichiro qui ne l’osait pas jusque-là, vient contre elle, glissant un bras dans sa nuque pour la blottir contre lui alors qu’ils sont allongés sur les futons, leurs têtes sur les oreillers.
— Tu connais le film pourtant, murmure-t-il.
— Blase me fait des coups bas, répond-elle, en se retournant sur le renard qui remue gaiement la queue.
Une fois le film de terminer, ils vont se laver et se changer, Aérin et Degan laissant le duo y aller en premier, tandis que Azael, laisse la sienne à Opéra. Les jumeaux étant les seuls à avoir deux cabines de douche. En attendant, Aérin utilise celle de la chambre d'amis et d’entrainement, les frères attendant simplement leur tour.
Prête Aérin retourne en bas ou elle croise Callego qui se tourne sur elle. Aérin baisse les yeux et racle sa gorge tout en serrant les jambes, alors qu’ils vont s’asseoir en attendant les autres.
Opéra est le second à arriver, il s’assoit, ses cheveux dégoulinent d’eau…
— Tu vas dormir avec tes cheveux trempés ? Tu vas attraper avoir froid, dit la rousse.
— J'ai toujours chaud quand je dors, ça me rafraîchit, répond simplement le félidé.
Les deux le regardent circonspect. Azael et Shichiro mettent plus de temps quant à eux. Degan vient de les rejoindre, Shichiro se bat avec sa chevelure dans la salle de bain et Azael doit en faire de même. Ils discutent en attendant les retardataires, qui ne tarde pas à arriver et de nouveau, le ventre de la rousse lui joue des tours. Comme pour Callego, elle réagit au fait que Shichiro ait les cheveux mouillés. Elle inspire un bon coup, confuse part cette sensation qui la traverse… Elle regarde alors Opéra, ça le lui fait un peu, mais pas aussi vivement qu’avec Callego et Shichiro ? Shichiro capte son regard et lui sourit doucement.
Ils lancent un dessin animé cette fois, Opéra et Azael sont adossés contre les édredons, Degan est allongé sur le ventre et se tient la tête entre les mains. Shichiro et Aérin sont assis contre les coussins avec les leurs bras croisés devant leurs jambes et l’un contre l’autre. Callego est sur son flanc, il tient sa tête dans sa main, le bras replié contre le sol.
Il regarde le film, mais il ne peut pas s’empêcher de remonter en permanence les yeux vers le duo. Aérin est plus proche de Shichiro ou il se fait des idées ? Son bras fatigue… Le brun se redresse pour s’adosser cette fois si à l’édredon, en croisant ces bras contre son torse, ses yeux se dirigeant une nouvelle fois sur Aérin et Shichiro.
Shichiro se laisse couler contre elle, son regard allant directement sur Callego, qui détourne aussi vite la tête, pour finalement revenir sur eux. Aérin qui a vu le mouvement de Shichiro, se tourne sur lui et lorsqu’elle capte son regard tend timidement le bras vers lui… Comme il ne réagit pas, elle baisse ces oreilles et se chipoter les doigts. Il soupire, s’énervant contre lui-même alors qu’il se glisse mine de rien près d’eux sans vraiment les coller. Le démon n’aime pas ce genre de démonstration et ce n’est pas comme s’il enviait Shichiro d’être plus audacieux !
« Aie ! » Degan vient de s’en prendre une d’Azael, il n’a même pas eu le temps de penser à une moquerie !
Le film se finit, Degan éteint la télé et ils se retrouvent dans le noir complet. Aérin sait qu’ils sont juste à côté, mais elle a l’habitude de se blottir contre son frère, qui colle Azael à défaut de sa sœur.
Elle ignore comment se mettre sans déranger les garçons… Elle sursaute alors que Shichiro l’enlace et la blottit sans aucune gêne contre lui. Son cœur s’emballe, son ventre lui fait une drôle d’impression et sa colonne est comme parcourue de picotement, néanmoins elle ressent également des sueurs froides qui continuent d’approfondir ces émotions contradictoires. Elle sent Callego remuer dans son dos. Le noir n’est plus sa préoccupation, son cœur s’affole comme si elle perdait le contrôle de quelque chose, mais quoi ?
Shichiro respire calmement, alors quand vérité, il a horriblement chaud. Il doit se maitriser pour ne pas se laisser emporter par ses envies tactiles et se concentre sur sa respiration pour calmer la tension dans son corps. Le démon sent le souffle d'Aérin caresser sa peau qui en frisonne de satisfaction. La démone ne sait pas quoi faire de son bras, qu'elle ignore où poser puisqu’elle n’est pas aussi audacieuse que le pâle. Shichiro lui propose une option en entremêlant ces doigts au sien, ce qui la fait sourire à la fois de gêne, mais de plaisir aussi. Tiens, il n’a pas enlevé ces gants ?
Callego reste dos à la rousse, dire qu'il a fait le premier pas et le voilà relégué au second rôle ! Il ne peut s’en prendre qu’à lui-même. Ce n’est pourtant pas compliqué. Dès qu’il pense à se retourner, son cœur déraille et l’excitation qui le prend le refroidit et l’immobilise. Il n’ose pas imiter Shichiro dans sa manœuvre, préférant rester tel qu’il l’est à ruminer dans son coin.