Le Prix à payer - Highlander Fanfiction

Chapitre 31 : Le Prix de l'Immortalité

5244 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/01/2025 18:23

Aélis exhala un souffle tremblant, savourant brièvement le goût de sa victoire. Chaque fibre de son être vibrait encore de la tension de ces derniers jours, mais elle sentit une pointe d’apaisement la gagner. Gorath n’était plus. Elle avait réussi. Faisant quelques pas vacillants, elle se dirigea lentement vers l’endroit où Methos devait l’attendre, là où son message dans la terre l’avait guidé.

Pourtant, en un instant, l’équilibre fragile qu’elle avait atteint s’effondra.

 

Son collier, son maudit collier, qui avait reprit sa teinte blanche quelques minutes plus tôt, s’illumina soudainement d’une lueur rouge écarlate, brûlante et invasive. Ses pulsations, régulières mais sinistres, semblaient battre au rythme d’une menace imminente. Le ciel s’assombrit davantage, un compte à rebours numérique apparaissant sous les deux cartes restantes. 720 minutes. Douze heures.

Aélis sentit une sueur froide couler le long de son dos. Quelque chose n’allait pas. Quelque chose d’énorme venait de basculer.

Elle leva les yeux lorsque, comme un couperet, une projection holographique fendit les cieux, dominant chaque recoin de cette réserve artificielle. Une voix familière s’éleva, glaçant le sang dans ses veines avant même qu’elle n’ait pu en identifier l’origine. Ce n’était pas la voix froide et impersonnelle qu’ils avaient entendue lors de la première manche. Non, cette voix-là… douce, presque caressante, mais trahissant une cruauté à peine voilée. Aélis sentit son cœur se figer.

Callestina.

Son esprit vacilla à la mention de ce nom. Elle la pensait morte, absente de la liste des adversaires de la première manche. Et pourtant, elle était là, ou du moins sa présence se faisait ressentir à travers cette voix mielleuse et perverse. Callestina, la manipulatrice insidieuse, celle qui avait tissé ses fils empoisonnés autour de sa vie, semblait avoir une place centrale dans ce cauchemar. Était-elle derrière le Jeu ? Depuis combien de temps tirait-elle les ficelles ? Des souvenirs ressurgirent avec violence : les mensonges, les pièges, et cette lueur cruelle dans ses yeux lorsqu’elle détruisait tout sur son passage.

— Mes chers immortels, débuta Callestina, chaque mot glissant comme du velours imprégné de poison, vous voilà les deux derniers en lice dans cette seconde manche du Jeu. Félicitations !

Aélis sentit son estomac se nouer tandis que l’hologramme changeait. Les chiffres rouges, menaçants, défilaient rapidement, accompagnés d’images terrifiantes : des charges explosives implantées aux quatre coins du globe. Les lieux étaient immédiatement reconnaissables : des capitales mondiales, des merveilles naturelles, des infrastructures stratégiques. Aélis frissonna. Cette technologie, à la fois avancée et brutale, portait une signature qu’elle ne comprenait pas mais dont l’efficacité semblait indéniable.

— La seconde manche touche à sa fin, poursuivit Callestina avec un calme glacial. Voici vos règles : vous avez douze heures. Douze heures pour vous affronter et décider qui mérite de survivre.

Aélis sentait chaque mot s’enfoncer comme une lame dans son esprit.

— Le vainqueur aura l’immense honneur de m’affronter dans une troisième et dernière manche, qui s’annonce déjà comme un duel mémorable, poursuivit-elle, son ton s’enveloppant d’une séduction perverse.

— Quant au perdant… Sachez que refuser de de jouer cette dernière partie entraînera une issue très simple.

L’hologramme montra à nouveau les charges explosives. Callestina marqua une pause, savante et calculée, avant de prononcer, d’une voix presque tendre :

— Ces dispositifs se déclencheront, annihilant tout sur leur passage. Vos colliers mettront également fin à vos existences, bien sûr. Mais avec vous, vous entraînerez la destruction totale de ces sites… et de millions de vies humaines. Une bien maigre consolation pour vos consciences immortelles, n’est-ce pas ?

Aélis sentit une nausée implacable monter en elle, son souffle se coupant sous le poids des implications. Des millions de vies… Leur combat n’était plus une question de survie personnelle, mais une responsabilité qui pesait sur eux comme une enclume. Callestina, fidèle à elle-même, ne laissait aucun choix.

— Il ne peut en rester qu’un, conclut Callestina avec une douceur perfide qui acheva d’ébranler Aélis.

L’hologramme s’éteignit, plongeant la réserve dans un silence assourdissant. Aélis chancela légèrement, le souffle court, tandis que les implications tourbillonnaient dans son esprit. Elle ferma les yeux un instant, tentant de retrouver un semblant de clarté. Mais une pensée, un nom, perça le chaos de son esprit : Methos. Elle devait le retrouver. Maintenant.

 

Aélis courait, ses jambes frappant le sol avec une violence désespérée, son souffle court déchirant l’air. Chaque battement de son cœur hurlait qu’elle devait arriver à temps, qu’elle devait le retrouver avant que le destin ne leur arrache toute possibilité de répit. Chaque seconde arrachée au temps semblait cruciale, comme si elle pouvait conjurer la fin inéluctable. Elle aperçut enfin la zone où ils s’étaient donné rendez-vous. Methos apparut, son visage grave, tendu, ses yeux rencontrant les siens dans un mélange de soulagement et de tension insoutenable. Mais avant qu’un mot ne puisse franchir leurs lèvres, un crépitement brusque envahit l’air, brisant l’intensité de leur échange.

Une voix s’éleva, hésitante, maladroite, tremblante comme un écho d’humanité dans cette forêt de désolation. Un jeune homme, clairement inexpérimenté, tâtonnait avec un système qui semblait trop complexe pour lui. Chaque mot qu’il prononçait était chargé d’une peur qu’il essayait de contenir.

— Je ne sais pas si ça fonctionne… Vous m’entendez ?

La voix hésitait. Un bruit métallique, peut-être un coup maladroit contre un micro, précéda la suite.

— Je… Je suis désolé, je ne sais pas comment…

Il inspira profondément, et sa voix revint, un peu plus ferme, mais toujours marquée par une panique contenue.

— J’ai tué… J’ai tué la femme responsable de tout ça. Celle qui a mis en place ce Jeu.

Aélis et Methos, déjà tendus à l’extrême, se rapprochèrent instinctivement, leur respiration suspendue, accrochés à chaque mot.

— On a… on a réussi à récupérer l’une des armes. Vous savez, celles qui servaient à… à décapiter les immortels réfractaires dans l’arène, pendant la première manche. Avec d’autres… on a utilisé cette arme contre elle.

Son ton vacillait entre la rage et une sorte de stupeur horrifiée, comme s’il avait encore du mal à croire à ses propres actes.

— Vous comprenez ? Je ne voulais pas qu’un immortel capable de concevoir… de réaliser quelque chose d’aussi monstrueux… puisse être le dernier.

Il marqua une pause, sa respiration saccadée trahissant l’effort qu’il faisait pour ne pas s’effondrer.

— Tout ce qu’elle a fait… tout ce sang, toutes ces horreurs. Pour quoi ? Pour être la dernière ? Ça ne peut pas justifier ce genre de barbarie.

Il s’interrompit, sa voix se réduisant à un murmure empreint de désespoir.

— J’ai eu peur. Peur qu’une personne capable de penser et de manigancer tout ça… peur qu’elle règne ensuite sur nous tous. Je ne pouvais pas laisser faire.

Un silence pesant suivit, comme si ses mots flottaient encore dans l’air.

— Elle est morte, conclut-il d’une voix presque éteinte. Mais… je ne sais pas si ça suffira.

 

Un silence pesant s’abattit, laissant les derniers mots du jeune homme flotter dans l’air comme des spectres insaisissables. Aélis sentit une vague de soulagement inattendue l’envahir à l’idée que Callestina ne pouvait plus nuire. La femme qui avait orchestré tant de souffrances n’était plus, et pourtant, ce soulagement était teinté d’une amertume douloureuse. Elle échangea un regard avec Methos, leurs pensées s’accordant dans une même conclusion : cela ne changeait rien.

Le compte à rebours continuait, implacable, comme une condamnation gravée dans la pierre. Peu importait que Callestina soit morte. Le mécanisme qu’elle avait mis en place, ou dont elle n’avait peut-être jamais eu le contrôle total, continuait de fonctionner, indifférent à sa disparition.

Aélis sentit ses épaules s’affaisser sous le poids de cette réalité. Les flammes de sa rage, alimentées par l’existence de Callestina, s’éteignirent, ne laissant qu’un vide oppressant. Elle regarda le ciel obscurci, ses pensées naviguaient entre espoir et désespoir. Methos posa une main sur son bras, un geste silencieux mais chargé de gravité.

Ils étaient seuls face à un ennemi invisible, une machine lancée sans pilote, qui les poussait inexorablement l’un contre l’autre.

Sans un mot, ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre. Leurs corps tendus cherchaient une ancre, une force, quelque chose à quoi se raccrocher dans cet abîme d’incertitudes. La tension qui les unissait semblait prête à exploser, mais ils s’accrochèrent, incapables de faire face à cette nouvelle horreur seuls. Ils s’assirent lentement sur le sol, leurs esprits vidés, leurs corps épuisés, entourés par le silence oppressant de la forêt.

 

Quelques minutes plus tard, des bruits de pas précipités et des voix solennelles s’élevèrent dans la forêt. Un groupe d’hommes apparut, armé, leurs visages marqués par l’épuisement mais déterminés. Leur chef, un homme aux traits durs et à la voix grave, s’adressa à eux :

— Les murs sont désactivés. Vous êtes libres de sortir. Mais nous devons agir vite.

Les deux immortels échangèrent un regard avant de les suivre. Ils furent escortés hors de la réserve jusqu’à un laboratoire, similaire à celui dans lequel ils avaient été emmenés avant de se réveiller au milieu de la réserve. Des scientifiques et techniciens s’y affairaient dans un chaos contrôlé, leurs regards tendus rivés sur des écrans saturés de données complexes.

Un homme portant une blouse de laboratoire, les traits tirés et les lunettes légèrement de travers, s’avança vers eux avec une démarche nerveuse. Il leur jeta un regard furtif avant de parler, sa voix trahissant une certaine incertitude.

— Nous allons essayer de retirer vos colliers, annonça-t-il, tentant maladroitement de masquer sa nervosité sous une façade professionnelle.

Sans un mot, Aélis et Methos se laissèrent guider chacun de leur côté par des groupes de scientifiques. Ils les installèrent sur des chaises froides et inconfortables, sous une lumière blanche crue qui semblait tout révéler, sans indulgence. Les chercheurs se mirent immédiatement au travail, approchant leurs outils avec une prudence presque excessive.

 

Les minutes s'étiraient, chaque instant alourdissant l'atmosphère dans le laboratoire exigu. Les premières tentatives échouèrent avec une constance décourageante. Les outils chirurgicaux glissaient inutilement contre le matériau des colliers, et les scanners révélaient des réactions biologiques complexes et imprévisibles chaque fois qu'une manipulation était tentée. Chaque échec semblait écraser non seulement l'espoir d'Aélis et Methos, mais celui de tout le personnel présent, dont les regards devenaient de plus en plus désespérés.

Le scientifique le plus âgé releva finalement la tête, ses traits tirés par la fatigue et l'incompréhension. Il s'appuya légèrement sur la table, comme pour chercher un soutien face au poids des mots qu'il s'apprêtait à prononcer.

— Ces colliers, murmura-t-il, sa voix tremblante, réagissent directement à vos spécificités biologiques. Ils semblent conçus pour anticiper et contrer toute tentative humaine de désactivation.

Il jeta un coup d'œil à ses collègues, cherchant leur approbation, qui vint sous forme de hochements de tête hésitants.

— Selon nos analyses, continua-t-il, les colliers ont deux modes de désactivation. Le premier... une autodétonation, ajouta-t-il avec une grimace, comme si le simple fait de prononcer ces mots ajoutait un poids supplémentaire à la pièce. Et le second…

Il inspira profondément avant de poursuivre, comme pour se donner du courage.

— Il semble qu’ils ne puissent être coupés que par une décharge énergétique spécifique.

Un silence glacial s'abattit, alourdi par le bourdonnement des machines en arrière-plan. Aélis fixa Methos, et dans son regard se lisait une compréhension immédiate, mêlée d'une terreur croissante. Elle savait déjà ce qui allait être dit avant même que le scientifique ne trouve les mots.

— Une décharge de quickening, murmura-t-il finalement, presque avec hésitation, comme si formuler cette hypothèse la rendait irréversible.

Ces mots tombèrent comme une sentence, lourds de conséquences. Methos ferma brièvement les yeux, comme pour contenir une vague d’émotions qu’il ne pouvait se permettre d’exprimer. Aélis sentit son estomac se nouer, un frisson glacial remontant le long de sa colonne vertébrale. Ce n’était pas seulement une question de technologie. Tout était conçu pour que leur propre nature immortelle devienne leur bourreau.

Le scientifique détourna le regard, incapable de soutenir les leurs.

— Je suis désolé, murmura-t-il d’une voix brisée. Nous n’avons pas la technologie nécessaire pour faire plus.

Le laboratoire sembla se figer, chaque respiration devenant un effort. La révélation pesait sur leurs épaules comme une enclume, tandis que les secondes s’écoulaient inexorablement. Aélis serra les poings, sentant ses ongles s'enfoncer dans ses paumes. Methos restait stoïque, mais elle pouvait lire dans son regard cette angoisse qu’il peinait à dissimuler.

Autour d’eux, les techniciens continuaient d’échanger des idées, mais les voix devenaient de plus en plus frénétiques. Des disputes éclataient, certains accusant leurs collègues de perdre un temps précieux sur des pistes inutiles.

— Continuez à chercher, ordonna le chef d’équipe, sa voix plus autoritaire que convaincue. On doit trouver un moyen.

Mais même cette injonction avait un goût d’aveu. Ils savaient tous que les chances de succès étaient minces.

Aélis, les yeux fermés, cherchait un fragment de calme dans ce chaos. Mais la question restait suspendue dans son esprit comme une menace : et s’ils ne trouvaient pas de solution ? Si cette impasse devenait leur tombeau ?

Methos posa une main légère sur son épaule, un geste discret mais chargé de sens. Ils avaient traversé trop d’épreuves pour abandonner maintenant. Mais même lui savait qu’ils s’approchaient dangereusement de l’impensable. Le temps était contre eux, et Callestina, même dans la mort, continuait de les manipuler.

 

Le tic-tac inexorable continuait de résonner, une mélodie funeste dans l’air saturé d’angoisse. Les minutes défilaient comme une lame invisible suspendue au-dessus d’eux. 610. 480. 360. Les visages autour d’eux étaient tendus, marqués par le désespoir. Aux quatre coins du monde, des équipes s’activaient, scientifiques, militaires, démineurs, tous s’efforçant de déjouer l’impossible. Mais rien ne fonctionnait. Chaque hypothèse, chaque tentative échouait face à la perfection impitoyable du système que Callestina avait laissé derrière elle.

Le laboratoire, autrefois une ruche d’efforts frénétiques, sombrait peu à peu dans une atmosphère lourde, presque résignée. Les discussions étaient devenues des murmures, puis des regards échangés, des sous-entendus qui s’insinuaient comme des ombres. Certains scientifiques, en jetant des coups d’œil furtifs vers Aélis et Methos, commencèrent à évoquer une solution plus radicale. Ils ne disaient rien à voix haute, mais leurs yeux parlaient pour eux. Les colliers pouvaient être désactivés d’une seule manière.

Aélis et Methos entendaient ces murmures, voyaient ces regards, et même s’ils avaient refusé d’y prêter attention au début, l’idée s’insinuait, lente, douloureuse, inexorable. Et s’il n’y avait vraiment pas d’autre issue ?

 

180 minutes.

 

Aélis se tenait à quelques pas de Methos, immobile, ses pensées tourbillonnant dans un chaos qu’elle peinait à contenir. Il observait les écrans saturés de données incompréhensibles, entouré de scientifiques épuisés qui s’agitaient sans conviction, leur désespoir presque palpable. Elle s’approcha lentement, chaque pas alourdi par ce qu’elle s’apprêtait à dire. Sa main tremblante glissa dans la sienne, sa prise ferme, désespérée, comme si ce contact était la seule chose qui la rattachait encore à ce monde. Methos sentit ce geste avant même qu’il ne relève les yeux. Il n’eut pas besoin qu’elle parle pour comprendre. Son cœur se serra, et une douleur sourde monta en lui, violente et inéluctable.

— Methos.

Sa voix brisa le silence, douce mais teintée d’une gravité insoutenable. Il tourna lentement la tête vers elle, croisant son regard. Cette flamme dans ses yeux, triste et résolue, il l’avait vue trop souvent chez ceux qui s’apprêtaient à prendre des décisions irréversibles.

— S’ils ne trouvent pas de solution… commença-t-elle.

— Non, répondit-il aussitôt, avec une violence presque instinctive.

Mais il savait. Il savait que cette réplique ne suffisait pas, que la réalité ne disparaîtrait pas par un simple refus. Aélis plongea son regard dans le sien, et la détermination qu’il y lut le désarma.

— Methos, écoute-moi.

Il ferma les yeux, cherchant un répit qui ne venait pas. Elle continua, lentement, chaque mot un coup qu’il voyait venir mais ne pouvait esquiver.

— S’ils ne trouvent pas de solution… Je souhaiterais que tu prennes ma tête.

Le cœur de Methos sembla exploser dans sa poitrine. La douleur le traversa comme un éclair, brutale et inarrêtable. Sa main se crispa autour de celle d’Aélis, comme s’il cherchait à la retenir, à la maintenir dans le présent, dans la vie.

— Non… non, Aélis… il reste encore du temps. Trois heures… peut-être qu’ils trouveront quelque chose au dernier moment.

Sa voix s’éteignit, manquant de conviction. Il savait qu’elle avait raison. Il détourna le regard, cherchant désespérément une issue qu’il ne trouvait pas.

— Pourquoi toi ? Pourquoi pas l’inverse ? Si tu peux te sacrifier pour moi, pourquoi ne pourrais-je pas le faire pour toi ?

Aélis baissa les yeux, et un sourire empreint de tristesse se dessina sur ses lèvres, fragile, comme si elle s’excusait de la vérité qu’elle s’apprêtait à révéler.

— Parce que je ne veux pas vivre dans un monde où ni toi, ni Soleman… ni Darius… n’existent.

Le nom, prononcé avec une douceur poignante, atteignit Methos comme un coup porté à l’âme. Il sentit une vague d’émotions déferler en lui. Ce n’était pas de la jalousie, ni de l’amertume. C’était une étrange paix mêlée à une douleur sourde, l’acceptation d’un amour qui n’avait jamais été destiné à lui appartenir entièrement. Pour la première fois, il comprenait pleinement l’ampleur de ce qu’Aélis avait perdu. Darius avait été une ancre pour elle, un pilier dans sa vie. Et maintenant, elle tentait simplement de rester debout parmi les débris.

— Darius… murmura-t-il, comme si le prononcer le rendait plus réel. Ça a toujours été lui, n’est-ce pas ?

Il n’y avait aucune rancune dans ses mots, seulement une tristesse profonde, une résignation teintée de compassion. Il voyait l’amour qu’Aélis portait encore à cet homme, et cela ne le diminuait pas. Au contraire, cela renforçait son respect pour elle, pour la capacité qu’elle avait à aimer si intensément.

— Methos…

Elle voulut protester, mais il la coupa doucement, ses mains entourant les siennes avec une tendresse qu’il peinait à contenir. Il voulait qu’elle comprenne, qu’elle ressente la vérité dans ses mots, qu’elle ne porte pas ce poids seule.

— Non. Je ne t’en veux pas. Ce que vous aviez trouvé, c’était rare, Aélis. Un amour immortel, quelque chose qui transcende le temps. Et je suis désolé… désolé que cela ait dû se terminer comme ça.

Il marqua une pause, cherchant les mots, mais aucune phrase ne pouvait combler ce vide. Son regard se plongea dans le sien, chargé d’une intensité qu’il ne savait plus masquer.

— J’ai de la peine pour toi. Parce qu’aimer de cette façon et perdre… c’est une souffrance que peu d’entre nous peuvent comprendre.

Aélis baissa les yeux un instant, laissant les souvenirs l’envahir, chaque image d’un passé révolu s’imposant à elle. Elle pensa à Darius, à sa sagesse, à sa chaleur, mais aussi à Methos, qui l’avait accompagnée dans les heures les plus sombres, qui avait tenté de panser ses plaies avec une patience infinie.

— J’ai été heureuse avec toi, finit-elle par murmurer, sa voix fragile mais sincère. Tu m’as tellement appris. J’ai grandi grâce à toi. Tu étais là, dans chaque moment difficile.

Methos hocha la tête, un sourire triste effleurant ses lèvres.

— Moi aussi, j’ai été heureux avec toi… Mais j’aurais voulu être plus. J’aurais voulu que ma présence puisse combler ce vide qu’il a laissé.

Il baissa légèrement la tête, reprenant d’un ton presque résigné.

— Mais j’ai compris. Ce vide était trop profond, trop vaste pour que quiconque puisse le remplir. Alors j’ai essayé.

Elle releva les yeux, et un soupir tremblant lui échappa.

— Tu as réussi, Methos. Pas à tout effacer, non… Mais à me rappeler que la vie pouvait encore être belle, même avec tout ce que j’ai perdu.

Ils se regardèrent, leurs silences disant ce que les mots ne pouvaient exprimer. L’air semblait chargé d’une gravité qui rendait chaque respiration plus lourde.

— Tu trouves que c’est égoïste, ce que je demande ? murmura-t-elle. Ne pas avoir à vivre avec ta perte, alors que toi, tu devras porter la mienne ?

Methos ferma les yeux un instant, luttant contre la marée d’émotions qui menaçait de l’engloutir. Il prit une profonde inspiration, cherchant un fragment de sérénité dans ce chaos intérieur.

— Tout est égoïste, Aélis. Même nos sacrifices. Ce sont toujours des choix que l’on fait pour nous-mêmes, pour ce que l’on pense être juste… ou supportable.

Il marqua une pause, fixant ses mains qui tremblaient légèrement. Chaque fibre de son être hurlait de rejeter sa demande, de refuser cet avenir qui se dessinait. Mais au fond, il savait qu’elle avait raison. Il savait qu’il n’y avait pas d’autre issue.

— Mais j’ai compris ta requête, finit-il par dire, sa voix un murmure chargé d’un amour désespéré. Et je l’accepte.

Ses mots semblaient sceller un pacte silencieux entre eux. Aélis sentit son cœur se serrer, et pourtant, une étrange paix s’immisça en elle. Methos serra légèrement ses mains, un dernier geste pour lui transmettre tout ce qu’il ne pouvait dire.

Le temps s’effaça autour d’eux, ne laissant que l’écho de leurs âmes liées dans une douleur partagée. Ils restèrent là, immobiles, leurs regards accrochés, unis dans cette terrible certitude. Leur amour n’avait jamais eu besoin de mots, et pourtant, dans cet instant, tout était dit.

Autours d’eux, les scientifiques s’agitaient encore, désespérément, autour des écrans et des machines, mais ces efforts semblaient lointains, flous, comme un écho dans une pièce vide.

 

60 minutes.

 

Le décompte affiché sur l’écran brillait avec une froideur impitoyable. Ils le savaient. Il était trop tard.

Ils échangèrent un regard, un accord silencieux. Il n’y avait qu’une seule solution, une solution qu’ils avaient redouté, retardé, mais qu’ils ne pouvaient plus éviter. Ils demandèrent à quitter le laboratoire, à passer l’heure qu’il leur restait loin du chaos, dans un endroit où ils pourraient se dire adieu. Certains s’opposèrent, craignant que ni l’un ni l’autre n’ait la force d’accomplir l’irréparable. Mais la majorité comprit. Ce choix leur appartenait. Ils avaient droit à cette intimité.

 

La nuit enveloppait le paysage d’une obscurité douce, percée par la lumière argentée d’une lune pleine. L’air était tiède, presque apaisant, et portait avec lui le parfum des herbes sauvages. Le temps semblait suspendu, moqueusement léger, en contraste cruel avec ce qui les attendait. Pas un bruit ne venait troubler le calme, hormis le léger froissement des feuilles agitées par une brise discrète.

Main dans la main, Aélis et Methos quittèrent le laboratoire, leurs pas étouffés par la terre meuble de la plaine. La nature semblait indifférente à leur sort, offrant une sérénité trompeuse, presque insultante. Au loin, des grillons chantaient, et quelques lucioles dansaient parmi les hautes herbes. Ils avancèrent en silence, comme s’ils craignaient de briser la fragile harmonie de cette nuit.

Ils s’arrêtèrent au pied d’un grand chêne, solitaire au bord de la forêt. Ses branches noueuses s’étiraient comme des bras protecteurs sous le ciel étoilé. Aélis se laissa tomber dans l’herbe moelleuse et tira légèrement Methos pour qu’il s’assoie à ses côtés. Elle se blottit dans ses bras, ses doigts s’accrochant doucement à sa veste, comme pour s’ancrer à lui, à cet instant.

Au-dessus d’eux, l’hologramme projetait toujours son compte à rebours. Les chiffres rouges brillaient faiblement, mais leur présence était écrasante, rappelant l’inexorabilité de leur situation. Methos, le regard perdu dans l’horizon nocturne, restait silencieux, comme s’il cherchait un fragment d’espoir dans les ombres mouvantes.

Ce fut elle qui brisa le silence, sa voix douce mais chargée de résignation :

— Tu penses pouvoir les sauver ?

Methos ne répondit pas immédiatement. Il inspira profondément, laissant le poids de sa réflexion l'envahir avant de murmurer :

— Je n’en sais rien.

Il tourna légèrement la tête vers elle, ses yeux capturant brièvement la lumière de la lune.

— Tu penses qu’ils sont capables d’écouter ? Pas seulement avec leurs oreilles, mais avec leur cœur ?

Aélis leva le regard, observant les traits fatigués mais déterminés de Methos. Elle sentit une vague d’affection et de tristesse la traverser.

— Je pense que si quelqu’un peut leur faire comprendre, c’est toi, répondit-elle avec une sincérité absolue.

Methos esquissa un sourire mélancolique, une expression teintée d’espoir et de résignation mêlés.

— Il faut garder espoir, dit-il simplement. C’est toi qui me l’as appris.

Aélis ferma les yeux, laissant ses pensées errer dans le flot des souvenirs. Elle revit les visages et les moments qui avaient marqué sa vie immortelle : Darius, avec sa sagesse infinie ; Richie, plein d’enthousiasme et d’innocence ; Duncan, son cœur noble ; Joe, toujours là, fidèle ; Amanda, lumineuse et insaisissable ; Soleman, son roc ; Aram, son amour mortel ; Thalia, sa sœur d’armes ; Astrid et Zafira, échos d’une époque qui lui semblait lointaine ; et Methos, l’homme auprès duquel elle avait appris que l’immortalité ne signifiait pas l’absence d’émotions.

Le prix de l’immortalité était clair à ses yeux : perdre tous ceux qu’on aime, un à un, en échange d’une vie sans fin.

Sa main glissa instinctivement vers son doigt, effleurant le tatouage qu’elle portait comme une promesse silencieuse. Un M et un A entrelacés, gravés à même sa peau, symboles de leur amour et de leur lien éternel. Ses doigts caressèrent lentement les lignes encrées, comme pour s’imprégner une dernière fois de ce qu’elles représentaient.

— C’était tout ce que je voulais, murmura-t-elle, sa voix à peine audible, presque pour elle-même. Juste un instant où tout semblait possible, même ici, même maintenant.

Methos serra légèrement son étreinte, son souffle effleurant ses cheveux. Ils restèrent là, immobiles, unis dans ce moment suspendu, savourant la douceur trompeuse de cette nuit, alors que le temps continuait son inexorable course vers l’inéluctable.

 

 

5 minutes.

 

Ils se levèrent ensemble, leurs mains toujours jointes, avançant lentement vers la lisière de la forêt. Chaque pas résonnait comme un adieu silencieux, chaque souffle portait le poids de tout ce qu’ils allaient perdre. Le décompte holographique, suspendu dans le ciel, semblait les narguer. Chaque seconde écoulée était un rappel cruel, implacable, de l’inéluctable. Le chant lointain des grillons et la brise douce contrastaient violemment avec l’intensité de l’instant.

 

1 minute.

 

Aélis s’agenouilla au pied d’un grand chêne, ses doigts effleurant le tronc rugueux couvert de mousse. Elle posa sa tête contre l’écorce, comme si elle cherchait à s’ancrer une dernière fois à cette terre qui l’avait vue naître, aimer et perdre tant de fois. Elle sentit Methos s’approcher, sa présence toujours immuable, un dernier refuge dans cet instant où tout basculait. Il s’agenouilla derrière elle, ses doigts glissant avec délicatesse dans ses cheveux, repoussant les mèches sauvages qui encadraient sa nuque. Dans ce geste, il dévoila un éclat sinistre : la lumière rouge du collier pulsait doucement contre sa peau, comme un cœur étranger, une présence froide et mécanique contrastant cruellement avec la chaleur humaine qui les unissait encore.

— Dire qu’en 2000 ans, tu n’as pas pris le temps d’apprendre à te couper les cheveux correctement…

Sa voix, empreinte d’une tristesse voilée par une tentative de légèreté, était un fragile écran pour contenir l’angoisse qui le dévorait.

Aélis ferma les yeux et laissa échapper un sourire, fragile mais sincère. Elle ne répondit pas, laissant le moment s'étirer, imprégnant son âme de tout ce qu’ils avaient partagé et de ce qu’ils allaient perdre.

 

30 secondes.

 

La lame froide effleura sa peau, une caresse d’acier qui promettait la fin. Une larme glissa lentement sur sa joue, se mêlant à la terre en une offrande silencieuse. Methos, sa main légèrement tremblante, resserra sa prise sur le manche de l’épée. Ils ne se dirent pas je t’aime. Ils n’en avaient pas besoin. Ces mots étaient inutiles face à la profondeur de ce qui les unissait, un lien qui transcendait les siècles et les mots eux-mêmes.

Puis, l’instant arriva. Un souffle suspendu. Une promesse silencieuse.

 

Et soudain, tout devint calme.

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