hawaï 5.0 : Stella

Chapitre 145

2598 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 04/02/2022 10:10

Tous les jours, Lou dépose Stella à l'hôpital. Elle reste une heure à parler avec son père à travers l'hautparleur, des discussions qui ne la concernent pas elle, faute d'intimité.

La semaine de quarantaine touche à sa fin, elle attend patiemment l'heure, elle se défoule dans sa salle de sport ou encore sur son puzzle. Elle regarde, impatiente le dernier puzzle qu'elle eut terminé, celui que son père doit accrocher dès sa sortie, la seule chose qu'elle ait dit sur elle à son père.


« Lou ! Lou !, crie-t-elle, en montant au QG.

- Qu'est-ce qui se passe ?

- C'est papa !

- Ce n'est pas l'heure.

- Il faut qu'on y aille ! C'est urgent ! Il se passe quelque chose !

- Tu n'as plus sa position, c'est ça, dit Jerry au courant qu'elle suit son père à la trace avec son téléphone. Stella a mis une application sur son téléphone avec son père et si le mobile n'émet plus elle...

- Je sais. Il l'a peut-être seulement éteint ou il n'a plus de batteries.

- Tu m'y accompagnes ou je prends mon vélo ?

- On va rester ici, Stella. Je ne suis pas Steve ! Je ne suis pas à tes ordres !

- Il est en danger ! Il n'est pas à mes ordres ! Lui, il me croirait.

- Il n'y a aucun danger ! On doit y aller pour quinze heures et on ira pour quinze heures, est-ce clair ?

- Papa et Danny sont vraiment les seuls à ne pas mettre mes paroles en doutes ! »


Elle se rend dans le bureau de son père où elle se console avec Didou. Lou ne voulait pas se fâcher, mais cette scène dans l'hélicoptère est encore pour lui, un traumatisme. Steve n'a pas encore pu en discuter avec sa fille à cause de sa cohabitation en quarantaine. Jerry se trouve donc depuis une semaine avec un homme bouleversé par des propos d'une ado qui n'a pas peur de mourir pour sauver son père, d'une ado rebelle en l'absence de celui-ci et qui se refugie avec son ours comme dans son enfance, quand elle souffre. Personne ne pense à lui, qui, lui aussi, grâce au micro, ce soir-là, a entendu Stella se proposer de mourir pour sauver son père.


****


« Salut toi, dit Jerry, en entrant dans le bureau de Steve.

- Laisse-moi tranquille.

- Lou a raison, tu sais.

- Non, il n'a pas raison.

- Et si tu me disais pourquoi.

- C'est un secret.

- On ne peut pas savoir où se trouve un mobile quand il est éteint et tu le sais.

- Tu ne peux pas comprendre ! Moi, je peux !

- Comment ?

- Il est en danger ! Pourquoi vous ne voulez pas me croire ?, hurle-t-elle.

- Viens avec moi, Stella ! Dépêche-toi, dit Lou essoufflé.

- Qu'est-ce qui se passe ?, demande Jerry.

- L'équipe a été attaquée ! », dit-il en regardant l'adolescente.


Jerry la regarde aussi. Il se demande comment elle a pu le savoir. Il imagine l'enfant devin.

Ils arrivent sur place. Des démineurs sont présents et l'hôpital est évacué. Une personne a pénétré dans la chambre de l'équipe, a déposé une bombe sur la porte, une fois à l'intérieur. Il a ensuite tiré sur Danny avant de se suicider.

Stella arrive avec Lou, à la chambre. Ils voient l'équipe essayer de maintenir en vie Danny. Steve passe le relais à Junior le temps de discuter avec sa fille :


« Tu n'aurais pas dû la prendre avec toi, Lou !

- On n'a pas le temps pour ça, Steve !

- Stella, tu vas quitter cet étage et tout de suite.

- Non ! Pas sans toi !

- Je n'ai pas le temps pour ça, Stella. Tu vas quitter ce lieu, c'est un ordre ! Lou, emmène-la !

- Non ! Toi, tu me lâches, je reste ici !

- Je t'ai dit de dégager de là ! Tout de suite ! », hurle-t-il à en sortir les veines de son visage.


Lou prend Stella qui est choquée par le ton de son père. Son père souffle une fois qu'elle ait le dos tourné. Il s'en veut énormément, mais la peur de perdre son ami dans cette pièce le terrifie, et surtout, il ne veut pas que sa fille voie Danny dans cet état. Tani et Junior sont quant à eux extrêmement choqués d'avoir entendu Steve crier contre sa fille.

Lou dépose Stella dans une salle d'attente. Une salle où Kamékona, Flippa, Jerry et Éric vont venir, eux aussi pour attendre des nouvelles quand le bâtiment sera de nouveau ouvert.


Le temps passe, l'hôpital rouvre ses portes. Lou arrive trente minutes après que l'équipe soit prise en charge, après leur libération de leur salle de quarantaine. La bombe a été désamorcée après en avoir fait exploser une petite pour pénétrer dans leur salle. Tout le monde est là. Il leur annonce que Steve, Tani et Junior passent des examens pour savoir s'ils sont encore positifs au virus tandis que Danny est sur la table d'opération.


Une heure plus tard, les résultats sont négatifs, ils rejoignent le groupe. Steve prend Éric dans ses bras en guise de soutien pour son oncle. Il regarde ensuite sa fille, au sol, dans un coin, silencieuse, tremblante, se cachant avec son ours. Il se pose face à elle, retire cet ours inondé de larmes, puis il soulève le visage de sa fille en passant sa main sous son menton. Ses yeux sont rouges, elle est fatiguée, inquiète, des émotions qu'elle supporte depuis bientôt, une semaine. Il lui propose ses bras dans lesquels elle se rend, immédiatement.


« Je suis si désolé, ma belle.

- Tu as coupé tes cheveux.

- Tu aimes ?

- Non.

- Ah ! Il faudra attendre que sa repousse, alors. », dit-il en l'étreignant dans ses bras.


Il n'a pas le temps de finir sa phrase qu'elle dort. Il la pose doucement à côté de Kamékona qui propose l'une de ses jambes pour y poser la tête de l'enfant. Steve s'éloigne ensuite avec Lou dans le couloir.


« Semaine difficile, Lou.

- Très difficile. Je lui ai crié dessus, tout à l'heure.

- Elle est fatiguée et elle a maigri.

- Je sais. Steve, elle savait qu'il se passait quelque chose, ici.

- Je sais qu'elle me suit avec un GPS, une application.

- Ouais, mais ça ne fonctionne pas si... ton téléphone est éteint.

- Je ne sais pas comment elle a donc pu faire. Il est cassé. Écoute, je ne t'en veux pas. Je sais que c'est extrêmement difficile de garder son calme avec elle en mon absence. Je veux savoir si tu as une identité sur l'homme qui a tiré sur Danny ?

- Non, rien, et personnellement, maintenant, on s'en fout, il est mort.

- Ouais, je ne suis pas d'accord avec ça. Je vais rejoindre le groupe.

- Steve ! Tu vas parler à ta fille, rassure-moi. »


****


Les heures passent, enfin le chirurgien se montre dans la salle pour donner une bonne nouvelle : Danny est hors de danger, malgré plusieurs complications. Ils attendent donc tous son réveil pour le voir.

Pendant ce temps, Steve et sa fille jouent à un jeu sur le téléphone. Ils rient et retrouvent peu à peu leur complicité mise de côté, cette dernière semaine. Malgré ça, elle sent que son père ne va pas bien.


Ils sont enfin autorisés à entrer dans la chambre de Danny. Steve et Danny trouvent déjà le moyen de se disputer pour des mains non lavées posées sur son corps alors qu'il saignait :


« Tu as mis tes mains sales sur moi, pour me soigner ! On se lave les mains avant, Steve !

- On est quitte, maintenant. Tu m'as donné de ton foie et j'ai mis un doigt entre tes côtes pour éviter une hémorragie, point ! »


Ils rentrent tous chez eux après la visite à Danny, sauf Steve, sauf Stella. Son père s'éloigne de toute distraction. Ils se rendent sur des collines :


« Allez, viens, on va finir à pied. Laisse Didou dans la voiture. »


Ils montent. Sa fille est faible, il le voit, elle traîne, elle boite. Il arrête la montée et ils se posent dans un coin :


« Tu es épuisée, ma puce.

- Je sais. J'ai fait des insomnies.

- Tu n'as pas beaucoup mangé, aussi. Il faut manger, même si je ne suis pas là.

- Je n'y arrive pas. J'ai envie de vomir quand tu n'es pas là.

- Il faut que tu apprennes à vivre sans moi, c'est important.

- Tu es là, maintenant.

- Il faut que l'on parle tous les deux, de tes comportements, Stella. Ici, c'est bien, tu ne trouves pas ?

- Ici, la maison, c'est pareil, non ?

- Non, car cette discussion restera ici. Les choses négatives resteront ici. Je ne veux plus jamais t'entendre dire que tu te tuerais pour me sauver la peau !

- Lou te l'a dit au téléphone.

- Oui, et heureusement. Tu pensais quoi, que tu allais me remettre à bord, me passer la valise et te laisser couler !

- Non, le plan ne se serait jamais passé comme ça. Je savais très bien que tu ne serais pas monté à bord tant que je n'y serais pas. J'aurais sauté à l'eau une fois toi à bord.

- Est-ce que tu t'entends parler ? Tu crois que j'aurais fait quoi une fois à bord en ne te voyant pas ? J'aurais de nouveau plongé ! Et ce sérum, c'est à toi que je l'aurais injecté.

- C'est pour ça que tu ne devais en aucun cas retourner à l'eau pour me secourir. De toute façon, avec Tani et Junior, tu n'aurais jamais pu plonger. Ils t'auraient maintenu.

- Tu ne peux pas savoir la force qu'un père a en soi pour sauver son enfant. Jamais, ils n'auraient réussi à me retenir.

- Sûrement assez de temps pour que tu comprennes qu'il était trop tard pour moi.

- Même si c'est le cas, jamais ton corps ne serait resté dans cette tempête.

- Alors, tu serais mort, avec moi. Tu étais trop faible... Cette discussion ne mène à rien, tu sais. Si c'était à refaire, j'aurais fait différemment. J'aurais agi plutôt que parler dans cet hélicoptère. Si un jour ce choix doit se faire de nouveau, ça sera la même chose.

- Tu ne dois pas te tuer pour moi, tu comprends ça ?

- C'est ce que tu fais chaque jour pour des inconnus, non ?

- Mais c'est mon devoir de policier.

- Je ne veux pas rester sur cette Terre si tu n'es plus là.

- Mais il le faut. C'est comme ça que se font les choses. Je dois mourir, avant toi. »


Steve a beau expliquer de façon différente son travail, ses obligations, le cycle de la vie, rien n'y fait. Elle reste sur ses principes. Il décide donc de passer à autre chose, son altercation avec Lou :


« Je m'excuserai demain, c'est bon.

- Je sais que tu le feras, mais maintenant, je veux savoir comment tu peux me localiser avec précision via ton mobile alors que le mien est éteint et cassé.

- Ça, c'est Jerry.

- Jerry qui l'a dit à Lou et qui me l'a dit. Le téléphone arabe, tu connais ?

- Oui.

- Alors, comment fais-tu ?

- Tu ne vas pas apprécier, tu sais.

- Je le sais bien, mais je veux savoir.

- J'avais inséré un GPS dans ton téléphone, là où on met la batterie du téléphone. Ça m'a beaucoup aidé quand je te suivais dans tes missions. Le gars l'a écrasé du coup, il n'était plus opérationnel.

- Je sais comment fonctionnent ces choses-là. Tu l'as mis à cette période ?

- Oui.

- Pourquoi tu ne l'as pas retiré une fois que tu as promis de ne plus me suivre ?

- J'avais déjà pris de gros risques à le mettre en place, je n'allais pas en prendre un pour le retirer. Et en plus, j'aime bien savoir où tu te trouves exactement.

- Oui, je sais. Stella, dans ton téléphone, même si je serais le faire, jamais je ne l'aurais fait...

- Mais tu le fais sans t'en rendre compte ! Avec cette montre autour de mon poignet, tu sais exactement où je me trouve. Tu as pris une montre plus intelligent, plus sophistiqué. Tu n'as plus besoin d'appeler le fournisseur pour obtenir ma position, tu as le logiciel intégré dans ton mobile. Tu t'es servi de ton statut de policier pour l'obtenir !

- C'est vrai, oui, mais contrairement à moi, toi, tu sais que je te suis. Et je ne te surveille pas H24, avec. Il me sert seulement si tu disparais.

- Je ne pourrais pas en mettre un autre dans ton nouveau téléphone, alors ?

- Non ! »


Ils rentrent chez eux, Junior est absent avec Eddie. Steve profite de ce moment pour aller au jardin passer un coup de fil. Stella ouvre sa fenêtre de chambre pour écouter. Son père parle avec Danny de leur discussion. Elle entend son père dire à Danny qu'il est un mauvais père pour elle, qu'elle méritait mieux que lui, il ne sait pas l'élever à sa juste valeur. Il pensait réussir, mais en fait le job d'un père n'est pas si simple que ça.


« Regrettes-tu de l'avoir gardé, Steve ?, demande Danny à l'autre bout du fil sans que Stella n'entende les paroles, de ce dernier.

- Non ! Je pense simplement que j'aurais dû demander de l'aide dès le début, ne pas attendre qu'elle vienne à dialoguer.

- Il faut que je te remette les idées en place, ou quoi ? Tu as demandé de l'aide ! Personne n'a jamais pu t'aider, car elle ne parlait pas et quand elle a enfin parlé, tout le monde t'a envoyé balader tellement il y avait à dire sur elle ! Tu es la seule personne qui aide, cette gosse ! Ils t'ont tous dit de revenir quand elle serait prête ! Un enfant n'est jamais prêt sans un coup de main !

- Il faut absolument qu'elle entre en contact avec un professionnel, mais elle refuse ! Elle se braque. Je ne sais plus quoi faire. »


Elle ferme sa fenêtre doucement... malgré que les deux hommes continuent de discuter.


En soirée, Steve discute de nouveau avec sa fille. Il reprend la discussion qu'il n'avait pas finie avec elle.


« Ma belle, il y a une autre chose dont j'ai oublié de te parler.

- Je n'ai plus vraiment envie de parler de tout ça, papa.

- Mais, moi, j'en ai besoin. La prochaine fois qu'il y aura une évacuation pour une bombe ou n'importe quoi d'autre dans un bâtiment, je veux que tu quittes les lieux.

- Désolé, mais non. Lou n'a même pas cherché à discuter de cette décision parce qu'il savait que je serai retourné à l'intérieur.

- Tu vas arrêter d'être bornée !

- Tu es dedans, je vais dedans ! Point !

- Des fois, je me demande si tu te rends compte du danger.

- Je m'en rends compte, sinon, j'aurai obéi à Lou. Je t'aurai attendu dehors. Je vais remettre Didou en place, il doit manquer à Loulou. »

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