Bye Bye Tonight
Hermione se redressa, les cheveux en bataille et la mine chiffonnée. Elle se redressa en ne voyant personne, mit un gilet en laine qui traînait, et sortit de la tente pour rejoindre Peter et Caspian qui discutaient assez violemment. Elle les interrompit, apparemment, car ils se turent lorsqu'elle fut à leurs côtés. Elle faillit leur dire qu'ils pouvaient continuer, mais se retint.
« Bonjour. »
Elle sentait comme une tension ; quant à savoir si c'était entre elle et eux, ou entre eux deux seulement, elle n'aurait pu le dire. Elle fit un sourire amical à Peter, et se retint d'en faire un plus doux à Caspian. Cela aurait été mal vu, non ? Enfin, il n'y avait rien entre eux deux, bien entendu ! Elle revint à elle quand elle entendit le soupir de Caspian.
« Je vous laisse, j'ai du travail. »
Et il partit sans dire un mot de plus. Qu'est-ce qu'il avait ? Hermione fit un pas pour le rejoindre, inquiète de ce tempérament qui ne ressemblait pas au Prince, mais Peter la retint en saisissant doucement son poignet.
« J'ai à te parler. »
Cette simple phrase, dite le plus gentiment du monde, la mit pourtant très mal à l'aise. C'était comme si une brique s'était interposé entre sa bouche et son estomac, au milieu de sa gorge, et ça l'alourdissait, lui pesait ... Elle se mordit la lèvre mais ne trouva aucune excuse valable pour se déroger à cette conversation. Elle devinait qu'il allait lui parler de sa nuit avec Caspian, et bla bla bla. Elle le suivit à petits pas, avec toute la mauvaise volonté du monde. Peter, une fois qu'ils furent un peu éloignés, se retourna vers elle.
« Ecoute, je voulais te parler de ton retour dans ton monde. Notre monde.»
« Ce n'était rien, tu sais ! On a rien fait ! »
Moment de flottement ; Hermione, tellement sûre de ce qu'il allait lui dire, avait déjà préparé une phrase toute faites, et elle était sortie toute seule. Elle écarquilla les yeux, en lisant la même expression d'hébétude sur le visage de Peter, puis, ils éclatèrent de rire en même temps. Il n'y avait pas matière à rire, de nouveau, mais c'était ce qu'il y avait de mieux à faire dans la situation.
« Ecoute moi, quand je te parle. » reprit Peter d'un ton amusé, en lui jetant un coup d'oeil furtif. Hermione le soupçonna d'avoir comprit ce qu'elle avait voulu dire, et s'étonna de la subtilité qu'il mettait à l'oeuvre : il ne lui parlait pas de cela. Elle qui l'avait toujours vu comme une sorte de Ron blond, il se révélait finalement un peu plus mature que le rouquin de ses souvenirs.« Je voudrais savoir comment tu comptes repartir d'ici ? A chaque fois, nous avons été aidés de Aslan. Nous sommes déjà venus quelques fois ici. Nous avons été nous aussi appelés par la trompe. Je suppose qu'Aslan ne te laissera repartir qu'une fois ce que tu devais faire achevé. »
C'était logique. Elle se demandait quand elle rentrerait, elle était tiraillée entre ses nouveaux amis ici, et Harry et Ron. Elle serait heureuse de rentrer, cela ne faisait aucun doute, mais elle commençait à s'acclimater à Narnia. Elle savait que, dans un cas comme dans l'autre, qu'elle reste ou qu'elle parte, elle se sentirait déchirée.
« Ta famille doit te manquer. »
Peter avait le regard dans le vide, et elle supposa que la sienne aussi. Elle se rendit compte que beaucoup de choses les liaient : ils étaient du même monde, ils étaient deux jeunes à l'abandon dans un monde perdu. Enfin, Peter était un peu moins perdu. Et puis il était le Roi Suprême, ou un truc du genre.
« Bien entendu. » déclara t-elle, d'une voix un peu plus brisée qu'elle n'aurait voulu. « Mes deux meilleurs amis me manquent, mes amis me manquent, mes parents me manquent. Quand je rentrerais, je pense que je vais avoir du mal à retourner à la civilisation et à la technologie. »
Regard curieux de Peter. Quoi, qu'est-ce qu'elle avait dit ? Ils restèrent silencieux un instant.
« J'aimerais que, quand on rentrera dans notre monde ... Tu sais ... Qu'on se revoit. On vit dans la même ville, ca ne devrait pas être difficile. »
Hermione sourit gentiment, ce n'était pas forcément une mauvaise idée. Elle savait qu'elle ne pourrait raconter ce qu'elle vivait à personne, on la prendrait pour une folle, même Ron ou Harry. Elle même avait eu tant de mal à se faire à l'idée ... Peter et les autres Pevensies seraient ceux avec qui elle pourrait en parler, ce qu'elle aurait sûrement besoin de faire.
« Oui, ce serait vraiment bien. »
« Une fois la guerre finie, tout sera plus calme ... »
La guerre ? Etait-il au courant pour Voldemort ?! Elle lui jeta un regard surpris, mais n'eut pas le temps de lui poser des questions ; Lucy se rua vers eux, le souffle court, en essayant de leur parler.
« Calme toi, Lucy, que se passe t-il ? »
« Aslan ! Aslan est là ! Il demande à nous voir ! »
Ils retournèrent rapidement au camp où le grand lion était en grande discussion avec Caspian, qui semblait ébahi et furieux.
« Aslan, vous ne pouvez pas lui demander cela ! »
Le regard de Lion le traversa, mais le prince ne baisa pas les yeux, et Hermione et Peter frémirent devant l'intensité du regard d'or. Le lion grogna, et se détourna pour baisser son regard vers le Roi et la sorcière.
« L'heure du haut fait approche, fille d'Eve. Je vais te révéler ce que tu vas devoir faire. »
Tous ceux présents - le camp entier - étaient suspendus aux lèvres du lion : qu'allait-elle devoir faire ? Tout le monde se doutait de la teneur de la mission mais cela n'avait aucune réalité tant que l'ordre n'avait pas été donné.
« Tu combattras aux côtés de Peter et Caspian. Et ce seras de ta main que la Sorcière mourra. »
Hermione resta interdite. Tout en se doutant profondément de ce qu'elle devait faire, maintenant qu'Aslan le lui avait ordonné, et que l'ordre était comme gravé dans son coeur, en elle. Comme une voix qui n'aurait de cesse de lui rappeler ce qu'elle devait faire ; maintenant qu'elle avait ça en elle, elle se sentait bizarrement apaisée. Elle allait devoir tuer la sorcière. Elle allait devoir s'entraîner à contrôler son pouvoir, voire récupérer sa baguette. Serait-ce un combat comme entre Harry et Tom Jedusor ? Elle ne savait pas. Mais une vague de peur la saisit à la gorge. Elle allait devoir tuer quelqu'un. Comme pour la rassurer, une main saisit la sienne. C'était celle de Peter. Il avait déjà tué, lui. Il savait ce que c'était. Et, dans ce simple geste, il la soutenait. Edmund lui jeta un regard confus, et Lucy la plaignait tout en l'encourageant. Elle vit Caspian essayer de s'approcher, mais en voyant les deux mains de Hermione et Peter, serrées l'une dans l'autre, elle le vit se tendre, hocher la tête d'un air solennel, et leur tourner le dos pour s'éloigner.
Elle n'avait vraiment pas besoin de ça ...