Secrets de Serpentard (III) : Les Mangemorts

Chapitre 30 : Chez les Potter

6672 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour il y a 19 jours

Chez les Potter



– Harry ! Cou-cou, Harry !

– Chhht, tu vas lui faire peur, rit Lily.

James se redressa, faussement offusqué.

– Mais non, regarde comme il rigole... Notre petit Harry n'a peur de rien, exactement comme nous ! N'est-ce pas, Harry ?

Lily dut admettre que James avait raison : les grimaces et les gesticulations de James n'effrayaient pas du tout Harry, loin de là. Allongé sur le dos, il regardait ses deux parents penchés sur lui avec émerveillement, en poussant de temps à autre de grands éclats de rire.

– Il est vraiment merveilleux, dit James pour la dixième fois de la journée. À mon avis, c'est le plus beau bébé que la terre ait jamais porté.

Il se pencha sur Harry et embrassa ses pieds minuscules, le faisant de nouveau rire aux éclats.

– C'est dingue, sourit Lily. Quand je le regarde, j'ai l'impression de voir les photos de toi au même âge, celles qu'il y avait chez tes parents... Regarde ses cheveux, on dirait qu'ils commencent déjà à faire des épis comme les tiens !

– C'est vrai, dit James en caressant délicatement les cheveux noirs que Harry avait sur le crâne.

En pensant aux photos de lui qui décoraient la maison de son enfance, une vague de nostalgie l'envahit. Cela faisait maintenant un peu plus d'un an que ses deux parents étaient morts. Depuis le début de la guerre, Fleamont et Euphemia avaient abrité dans leur petite maison de pierre des dizaines de familles, moldues ou sorcières, toutes poursuivies par les Mangemorts. James avait vécu avec la peur qu'ils soient débusqués et tués par les partisans de Voldemort, mais finalement, c'était la Dragoncelle qui les avait emportés à quelques jours d'intervalle, après avoir hébergé pendant plusieurs jours un jeune sorcier de dix ans qui souffrait de cette affection contagieuse et parfois fatale. Évidemment, Fleamont et Euphemia avaient choisi de prendre ce risque en connaissance de cause, mais James ne pouvait s'empêcher de regretter leur absence, alors même qu'il venait de devenir père. Et Lily le comprit aussitôt, car elle passa un bras autour de ses épaules.

– C'est vrai qu'il me ressemble beaucoup, mais ce sont ses yeux que je préfère, reprit James pour changer de sujet. Ce sont vraiment les plus beaux yeux du monde.

– Je les tiens de mon père, dit pensivement Lily.

À son tour, une ombre de tristesse passa sur le visage de la jeune femme, et James lui rendit son étreinte.

En apprenant que Harry était né, et trois semaines avant la date prévue, ses deux parents, alors en vacances dans le nord du pays, avaient décidé de revenir en urgence pour leur rendre visite, malgré les nombreuses mises en garde concernant les ouragans qui dévastaient la région. D'après les policiers moldus que Lily avait eu au téléphone, un arbre était tombé sur la route juste devant eux, et ils avaient été tués sur le coup. Et évidemment, Petunia s'était empressée d'en accuser sa sœur, qu'elle considérait comme entièrement responsable de l'accident.

Heureusement que Harry est là, songea Lily. James avait bien raison de le répéter avec autant d'insistance : il était magnifique. Bien sûr, son crâne n'était pas encore tout à fait rond, ses yeux étaient un peu bouffis... Mais ces doigts minuscules, ces cheveux noirs qui s'ébouriffaient déjà, et ce rire irrésistible.... Oui, décidément, Harry était un petit miracle, et Lily ne se lassait pas de le regarder sourire, ni de voir James trouver chaque jour de nouvelles raisons de le trouver merveilleux. Et heureusement, il était en pleine santé, malgré le fait qu'il soit né un peu plus tôt que prévu.

Ils jouèrent encore avec lui pendant un long moment, puis James le prit dans ses bras et alla s'étendre sur le canapé, où Lily les rejoignit aussitôt.

– On ne se débrouille pas si mal, pour l'instant, fit remarquer James en regardant Harry s'endormir progressivement contre sa poitrine.

– Si on ne fait pas attention à la propreté de nos vêtements, ni à l'état de tes lunettes... Oui, on peut dire ça, sourit Lily en examinant les constellations de taches de couleurs diverses qui se trouvaient sur son jean.

– Je ne vois pas de quoi tu parles, dit James en essayant de faire tenir sur son nez ses lunettes complètement tordues.

En effet, Harry prenait un malin plaisir à les empoigner, les mordiller ou les jeter par terre, ce qui mettait ces pauvres lunettes à rude épreuve.

Sans y accorder d'importance, Lily embrassa doucement le front de leur fils, puis ébouriffa tendrement les cheveux de James, et se blottit contre lui.

– Me voilà au paradis, soupira James en renversant sa tête en arrière.

Au milieu du salon en désordre, Lily souriait toujours. James avait raison de dire qu'ils ne se débrouillaient pas si mal : ils n'avaient que vingt ans, aucune famille pour les épauler, une guerre féroce faisait rage à l'extérieur, et malgré cela, ils réussissaient à s'occuper de Harry à peu près correctement. Et encore mieux, ils étaient tous les deux heureux de le faire, malgré l'épuisement et les innombrables peurs qui les assaillaient...

Ils étaient toujours enlacés sur le canapé lorsque Dumbledore apparut derrière eux. James et Lily ne le remarquèrent pas tout de suite, car dans un premier temps, leur ancien professeur se contenta de les observer depuis le coin de la pièce, immobile et silencieux, comme s'il hésitait à interrompre ce moment de félicité. Il était habillé comme à l'accoutumée, avec un long manteau brodé et un chapeau assorti ; et pourtant, derrière ses lunettes en demi-lune, Dumbledore semblait étrangement abattu.

– J'ai hâte que Sirius puisse nous rendre visite, disait joyeusement James. Il va être comme un fou.

– Ça, je n'en doute pas, approuva Lily en désignant un énorme tas de cartons dans un coin de la pièce. Il lui a déjà envoyé une quantité de cadeaux complètement déraisonnable. Marlene m'a aussi écrit pour nous féliciter, elle t'embrasse... Tu n'as toujours pas réussi à joindre Remus ?

– Non, sa mission s'éternise, soupira James. Et Dumbledore préfère ne pas nous donner de détails. Nous ne l'avons pas vu depuis si longtemps ! J'espère qu'il va bien, et qu'il rentrera bientôt...

– Et Peter ? Tu as des nouvelles ?

– Non, pas depuis qu'il s'est disputé avec Sirius, lors de leur dernière mission. Ils étaient tous les deux très remontés l'un contre l'autre... J'ai cru comprendre que Peter avait agi comme un lâche, et c'est quelque chose que Sirius ne supporte pas. Il s'est emporté, et j'ai bien peur que ses mots ne soient allés au-delà de sa pensée...

– Quand il est en colère, Sirius peut être vraiment blessant, concéda Lily. Il n'a jamais été tendre avec Peter, et depuis la mort d'Adam Claring, j'ai l'impression qu'il se défoule sur lui... Nous devrions peut-être les inviter tous les deux ? Si c'était toi qui le leur demandais, je suis sûre qu'ils pourraient faire l'effort de se réconcilier.

– Tu as raison, approuva James. Je ferai ça... Dis, tu crois que nous pourrons emmener Harry avec nous, à la prochaine réunion de l'Ordre du Phénix ? Je voudrais pouvoir le montrer au monde entier... Oh, regarde ! Il bouge... Il rêve ! Bon sang, comment peut-il être aussi adorable ?

Refusant de les espionner plus longtemps, Dumbledore se résolut à signaler sa présence en s'éclaircissant la gorge. James et Lily sursautèrent, puis lui adressèrent le même sourire étonné.

– Oh ! Dumbledore, dit James à voix basse. Vous tombez bien ! Regardez, venez dire bonjour à Harry !

Il se leva, rayonnant de fierté. Face à lui, en essayant de masquer sa tristesse, Dumbledore baissa les yeux sur le nouveau-né qui se trouvait dans ses bras.

– Bonjour à tous les deux... Ou plutôt, à tous les trois, se reprit-il en essayant de sourire. Et félicitations pour cette merveilleuse nouvelle.

Dans les bras de James, Harry dormait à poings fermés. De temps à autre, ses longs cils noirs tressaillaient, et on avait même l'impression qu'il souriait légèrement.

– Je vais le mettre dans sa chambre, décida James en s'éloignant. Comme ça, nous pourrons discuter tranquillement... Je reviens tout de suite !

Dumbledore le suivit du regard jusqu'à la porte, puis se résolut enfin à regarder Lily. Elle se tenait bien droite, face à lui ; ses longs cheveux roux étaient un peu emmêlés, ses vêtements étaient constellés de taches ; et contrairement à James, elle avait déjà deviné que cette visite impromptue était de mauvais augure.

– Je suis désolé de vous déranger en cette période si précieuse, dit sombrement Dumbledore.

Plus elle l'observait, plus Lily se sentait inquiète. Depuis le début de la guerre, Dumbledore n'avait jamais montré le moindre signe de découragement, même lorsque certains membres de l'Ordre du Phénix avait perdu la vie ; mais ce soir-là, pour la première fois, il semblait profondément attristé.

– Que se passe-t-il, professeur ? s'inquiéta Lily.

James revint dans la pièce à ce moment-là, et comprit à son tour qu'il se passait quelque chose d'anormal.

– C'est à propos de Sirius ? demanda-t-il en s'approchant. Il lui est arrivé quelque chose ?

Dumbledore secoua tristement la tête.

– Remus, alors ? Marlene ? Ou bien Peter ?

– Non, lâcha finalement Dumbledore. Hélas, c'est à propos de Harry.

L'inquiétude qui était lisible sur le visage de James et Lily s'accentua encore.

– Harry ? répéta James, incrédule. Comment ça, Harry ? Que voulez-vous dire ?

– Expliquez-nous, le pressa Lily.

– Bien sûr. Mais d'abord, permettez-moi de m'asseoir... Je suis fourbu.

Assis face à James et Lily, Dumbledore commença par leur raconter son entrevue avec Sybille Trelawney, au Serpent qui Fume, puis son effroi lorsqu'il avait compris qu'un client de l'auberge avait écouté à la porte, et son effroi plus grand encore lorsqu'un Mangemort l'avait secrètement contacté pour l'informer que le mage noir avait eu vent de cette prophétie, qu'il la prenait au sérieux et qu'il avait donc l'intention de tuer l'enfant dont il était question.

Dumbledore se garda bien de révéler l'identité de son informateur, mais il leur expliqua, avec autant de sollicitude que possible, que Voldemort avait estimé que Harry était celui qui était le plus susceptible d'être le sujet de la prophétie.

– Mais... Pourquoi lui ? gémit James. Pourquoi a-t-il choisi notre Harry, plutôt qu'un autre ?

Dumbledore poussa un long soupir. Il avait redouté que cette question soit posée, peut-être parce que la réponse le révoltait.

Mais il n'eut pas à donner la réponse, car Lily la donna avant lui.

– À ton avis, James ? dit-elle avec colère. Ça me semble évident.

James se tourna vers elle. Ses yeux verts étaient remplis de larmes.

– Tu ne comprends pas ? insista-t-elle. C'est à cause de moi. C'est parce qu'il a été mis au monde par une Sang-de-Bourbe que ce monstre l'a choisi, plutôt que Neville Longdubat. N'est-ce pas, professeur ?

Dumbledore baissa les yeux. Il ne pouvait pas se résoudre à acquiescer. Quant à James, il secoua la tête, horrifié. Il n'aurait jamais pu imaginer une telle chose. Pour la première fois de sa vie, il était sans voix.

– Non, ce n'est pas... Ce n'est pas possible, professeur... Enfin, ce n'est qu'une stupide prophétie ! Voldemort ne peut pas... Il ne peut pas...

Il prit sa tête entre ses mains, incapable d'achever sa phrase. L'idée que quelqu'un veuille s'en prendre à son fils lui était tout simplement inconcevable.

– Qui vous a raconté tout ça ? demanda James en se redressant, soudain tendu. Qui ? Il doit se tromper, c'est certain !

– Malheureusement, j'ai de très bonnes raisons de lui faire confiance, dit Dumbledore avec gravité.

James se leva, et fit quelques pas dans la pièce, de plus en plus agité.

– Nous n'allons pas le laisser faire, déclara Lily, résolue. Nous allons tout faire pour protéger Harry.

– Et je vais vous y aider, assura Dumbledore. Si je suis venu ici, c'est pour vous proposer d'emménager dans l'endroit le plus sûr qui soit.

– Vous parlez de Poudlard ?

James et Lily échangèrent un regard, puis Lily secoua la tête.

– Nous ne pouvons pas accepter cela, dit-elle. Professeur, si Voldemort l'apprenait... S'il est aussi déterminé que vous le dites, il pourrait trouver un moyen d'entrer dans l'école... Cela mettrait en péril l'ensemble des élèves.

– Lily a raison, approuva James. Nous devons protéger Harry, mais cela ne justifie pas de mettre en danger d'autres enfants. Il faut trouver autre chose.

Dumbledore regarda James, puis Lily.

– Votre noblesse d'âme et votre courage vous honorent tous les deux, commenta-t-il. Bien, dans ce cas... Je vais me mettre en quête d'un autre abri. Je vais contacter quelques membres de l'Ordre du Phénix pour monter la garde autour de votre maison, puis je vous emmènerai quelque part où vous serez en sécurité.

Il fit mine de se lever, mais Lily l'arrêta d'un geste.

– Attendez, dit-elle. Je dois vous demander quelque chose. James, tu veux bien nous laisser ?

James était trop choqué pour protester. Il quitta la pièce d'un pas incertain, et ferma la porte derrière lui, laissant Lily seule avec Dumbledore.

Dans un premier temps, la jeune femme resta silencieuse. Elle se contenta de fixer Dumbledore, comme si elle essayait de lire dans ses pensées. Ses grands yeux verts avaient quelque chose d'intimidant, même pour le directeur de Poudlard.

– Qui vous a prévenu ? demanda-t-elle.

– Je crois que vous avez déjà deviné, répondit calmement Dumbledore.

Lily baissa les yeux.

– Alors c'est vrai, dit-elle avec dépit. Je ne voulais pas y croire, mais il est bel et bien devenu un Mangemort.

– Un Mangemort qui trahit son camp, corrigea Dumbledore. Et qui pourrait bien m'aider à mettre en déroute Lord Voldemort.

Lily ne réagit pas. Elle semblait réfléchir intensément.

– Ne le dites à personne, ordonna Dumbledore. Pas même à James... Son statut d'espion doit à tout prix rester secret.

– Bien sûr, acquiesça Lily. Comptez sur moi.

– Il tient toujours à vous, vous savez. D'une manière assez surprenante, la haine qui lui dévore le cœur semble avoir épargné le lien puissant qui l'unissait à vous... Un lien qui pourrait bien changer l'issue de la guerre.

– Vous dites ça comme si je devais le remercier, remarqua Lily avec agacement. Mais s'il peut nous aider aujourd'hui, c'est parce qu'il a choisi de participer à toutes ces tueries... Il veut peut-être me sauver la vie, mais il est aussi responsable de la mort de beaucoup d'autres. Et si cette prophétie concernait un autre enfant, il aurait volontiers laissé Voldemort le tuer... N'est-ce pas ?

Dumbledore ne répondit rien. Il se contentait d'écouter.

– Vous savez, c'est lui qui m'a révélé que j'étais une sorcière, poursuivit Lily. C'est lui qui m'a tout expliqué à propos du monde magique : le Ministère, Poudlard, les quatre maisons... C'était il y a plus de dix ans, mais je n'ai pas oublié. Je me souviens encore de toutes ses explications...

Lily eut un léger sourire, les yeux dans le vague, mais il s'évanouit rapidement.

– Il y a quelques années de ça, il m'a traitée de Sang-de-Bourbe. À Poudlard, devant tout le monde. Ce jour-là, j'ai été blessée bien plus profondément que je ne l'ai laissé paraître... Je me suis sentie tellement idiote de lui avoir fait confiance, d'avoir fermé les yeux sur ses convictions, d'avoir cru que notre amitié pourrait le faire changer d'avis sur les Nés-Moldus et sur ces idioties de pureté du sang. Vous voyez, quand il a dit ça, quand j'ai pleinement réalisé que depuis le début, il ne me considérait pas comme une véritable sorcière... C'est bête, mais j'ai eu l'impression que c'était l'ensemble du monde magique qui me claquait la porte au nez. Tout ce qu'il m'avait expliqué, tous les moments que nous avions partagé... Tout a été sali. Et je ne sais pas si je pourrai un jour lui pardonner.

– Cette décision vous revient, ma chère Lily, dit doucement Dumbledore. Et Severus n'espère aucune récompense de ses agissements, à part le fait que vous ayez la vie sauve. Toutefois, si d'aventure vous souhaitiez lui transmettre un message...

Lily regarda en direction de la pièce voisine. À travers la porte, les sanglots étouffés de James parvenaient jusqu'à eux.

– Dites-lui que s'il veut me protéger, il faudra protéger James et Harry aussi, dit Lily avec fermeté. Je me fiche bien d'avoir la vie sauve si quelqu'un leur fait du mal... À eux ou à n'importe qui d'autre, d'ailleurs.

– Rassurez-vous, je saurai parler à Severus pour qu'il comprenne cela, promit Dumbledore.

Voyant qu'elle ne disait plus rien, Dumbledore fit mine de se lever, mais Lily le retint.

– Attendez, dit-elle.

Dumbledore obtempéra. Face à lui, Lily hésitait à parler.

– Ne le...

Elle s'interrompit, assaillie par l'émotion. Puis elle se reprit.

– Essayez de protéger Severus aussi, dit-elle enfin. S'il vous plaît.

Dumbledore soutint longuement son regard, puis hocha la tête.

– Je ferai ce qui est en mon pouvoir pour qu'il ne lui arrive rien, promit-il.

Sans plus de cérémonie, Lily se leva, et alla rejoindre James dans la pièce voisine.

Par la porte ouverte, Dumbledore aperçut Harry, toujours paisiblement endormi dans son petit berceau en bois. Tout en restant à distance pour ne pas le réveiller, James et Lily étaient étroitement enlacés, tous les deux anéantis. James avait cessé de retenir ses sanglots, tandis que Lily pleurait silencieusement sur son épaule.

Et Dumbledore songea que, de toute sa vie, il n'avait jamais rien vu d'aussi injuste.


***


Flash !

– Attendez, ne bougez pas, je vérifie que tout le monde est bien dans le cadre... Bon, on en refait une dernière, au cas où...

Flash !

– J'espère que cette fois-ci, c'est la bonne, marmonna Sirius à l'intention de James, qui se trouvait juste à côté de lui. J'ai besoin d'air.

– Tiens bon, l'encouragea James. Ça nous fera des souvenirs.

Sirius le regarda discrètement, et en voyant son meilleur ami sourire à côté de lui, Sirius trouva la force de sourire à son tour.

Flash !

Après une énième tentative, Maugrey s'avança vers l'appareil installé sur un trépieds, examina attentivement la photographie et dut estimer qu'elle était convenable, car il hocha légèrement la tête.

– Ça ira, grogna-t-il.

Malgré son habituelle expression renfrognée, on voyait qu'il était ému. C'était lui qui avait insisté pour prendre cette photo de groupe, désireux d'immortaliser cet instant de convivialité.

La guerre s'intensifie de jour en jour, avait-il insisté. Et lorsqu'elle sera terminée, certains seront heureux de pouvoir mettre un visage sur ceux qui se sont battus pour eux.

Soulagé de pouvoir arrêter de prendre la pose, Sirius se dirigea vers l'extérieur pour respirer un peu. Il se rendit dans la petite cour fermée, seul espace extérieur auquel ils avaient accès ; puis il s'adossa au mur en regardant le ciel, et poussa un long soupir.

Il était épuisé.

La guerre était éprouvante depuis son commencement, mais depuis l'assassinat d'Adam Claring, la situation se dégradait de plus en plus rapidement. En effet, avec les géants à leurs côtés, les Mangemorts avaient décuplé le nombre de leurs victimes et agissaient avec plus de sauvagerie que jamais. Malgré l'insistance de Sirius pour les affronter en combat direct, Dumbledore et Maugrey rechignaient à partir en quête des géants pour tenter de les arrêter, de peur de voir l'Ordre du Phénix décimé ; ils se contentaient donc de protéger les Moldus qui étaient menacés par leur avancée, ce qui était fastidieux, dangereux et insuffisamment efficace.

De plus, en dehors de la situation générale, Sirius sentait que ses proches étaient de plus en plus menacés. Au début, il avait eu l'impression qu'en étant les plus jeunes recrues, ils avaient été quelque peu protégés ; mais depuis un peu plus d'un an, tout allait de travers. Il y avait eu l'assassinat d'Adam Claring, évidemment... Mais par ailleurs, Andromeda avait déménagé sans laisser d'adresse, rendant impossible toute communication avec elle ; Remus côtoyait de féroces loups-garous et vivait toujours avec la peur de se retrouver un jour face à Fenrir Greyback... Et puis surtout, il y avait eu la terrible nouvelle dont James l'avait informé : Voldemort les pourchassait, lui, Lily et Harry, à cause d'une stupide prophétie. Sirius avait été aussi horrifié que James, et depuis, il était tenaillé en permanence par la peur que l'un d'entre eux soit tué, ce qui mettait ses nerfs à rude épreuve et rendait le sommeil difficile à trouver...

– Pas facile, ces temps-ci, dit une voix familière à côté de lui.

Sirius tourna la tête et esquissa un pâle sourire. Remus venait de sortir pour le rejoindre, et s'assit sur la margelle à côté de lui.

– Oui, c'est affreux, dit Sirius en jouant avec un petit caillou qu'il venait de trouver. Je me demande comment tu fais, toi, pour accomplir toutes ces missions tout seul... Tu n'as jamais envie de jeter l'éponge ? D'avoir la paix, une bonne fois pour toutes ?

– Ce n'est pas simple, convint Remus. Les loups-garous que j'essaie d'approcher en ce moment sont assez hostiles, j'ai mis plusieurs semaines rien que pour réussir à leur parler... Ils craignaient que je les dénonce, que le Ministère vienne les débusquer... Il s'agit d'un groupe particulièrement ostracisé, les sorciers leur ont fait subir des choses vraiment terribles, donc ils ont beaucoup de mal à se sentir concernés par la guerre. Et puis, au-delà de la mission... C'est dur pour le moral, de voir tout ce que des sorciers ont pu faire endurer à certains de mes semblables. En réalité, je crois qu'une part de moi comprend leur volonté de se couper définitivement du monde.

– J'aimerais tellement pouvoir venir avec toi, soupira Sirius. Pour que ce soit plus supportable.

Remus sourit timidement.

– Le simple fait de savoir que certaines personnes pensent à moi me donne du courage, dit-il pour rassurer son ami.

À quelques mètres d'eux, la porte s'ouvrit de nouveau, et deux personnes les rejoignirent dans la petite cour. James vint jusqu'à eux, mais Peter s'arrêta à distance, malgré les signes que James lui faisait pour qu'il s'approche. Il restait planté là, les bras croisés, en regardant Sirius d'un air boudeur.

Évidemment, Sirius savait parfaitement pourquoi il se comportait ainsi. Quelques semaines plus tôt, Dumbledore leur avait tous les deux ordonné d'aller aider Edgar Bones à évacuer un hameau de Moldus dans le nord du pays, de peur que les géants ne passent à proximité. Initialement, tout s'était bien passé, mais la situation avait dégénéré lorsqu'ils avaient été attaqués par un Mangemort ; Sirius l'avait alors affronté, aidé par Edgar Bones, mais Peter avait brutalement disparu en se transformant en rat ; et après avoir repoussé le Mangemort, Sirius l'avait retrouvé et avait explosé de colère, indigné par sa lâcheté. Peter en avait été profondément secoué, mais Sirius n'en avait éprouvé aucun remords.

– Je ne veux pas lui parler, dit Peter avec animosité.

– Oh, allez, s'énerva Sirius. Arrête de faire l'enfant !

Peter devint rouge écarlate, et le fusilla du regard. Avec ses petits yeux humides, Sirius ne l'avait jamais trouvé aussi agaçant.

– Sirius, soupira Remus. Fais un effort... Pour une fois que nous sommes réunis tous les quatre, j'aimerais que nous fassions autre chose que nous disputer inutilement.

Sirius jeta un œil à son ami, et se sentit assailli par la culpabilité. Remus était épuisé, lui aussi, et il repartirait loin d'eux dès le lever du jour pour que les loups-garous ne remarquent pas son absence. De même, James avait enfin l'occasion de les voir, alors que le reste du temps, il restait cloîtré dans l'abri que Dumbledore avait prévu pour lui, et où Harry se trouvait en ce moment, gardé par un proche de Dumbledore. Oui, décidément, James avait besoin de les voir soudés autour de lui... Même si la lâcheté de Peter était inexcusable, James et Remus méritaient qu'il essaie d'apaiser la situation.

– D'accord, lâcha-t-il. Peter, je suis désolé.

On aurait dit que les mots lui écorchaient la bouche. Il avait parlé avec une telle exaspération que James et Remus levèrent les yeux au ciel.

Fais un effort, semblait lui dire Remus.

– Je ne sais même plus ce que je t'ai dit, grogna Sirius avec réticence.

– Tu m'as dit que nous étions amis parce que vous aviez pitié de moi, par exemple.

James et Remus se tournèrent vers Sirius et lui adressèrent le même regard de reproche.

– Écoute, je suis désolé, marmonna Sirius. Ce n'est pas vrai, nous n'avons jamais eu pitié de toi...

– Menteur !

– Nous t'avons pris sous notre aile, nuança Sirius. Et nous étions ravis de le faire. Tu as toujours eu moins d'assurance que nous, et ça n'avait strictement aucune importance. Rien n'aurait été pareil sans toi, Peter. Je l'ai toujours dit.

Il ravala sa fierté, et mobilisa toute son énergie mentale pour s'exprimer avec humilité.

– Encore une fois, je suis désolé, répéta Sirius. J'ai bien conscience d'avoir été injuste avec toi. Cette guerre me rend dingue, et lorsque tu as disparu, j'ai eu peur pour tous ces Moldus... Mais j'ai eu peur pour toi aussi. Pendant quelques secondes, j'ai cru que l'un des sortilèges t'avait atteint, et que tu avais été tué. Alors, quand je t'ai retrouvé... Je t'en ai voulu de m'avoir fait aussi peur. Depuis le début de la guerre, je suis terrorisé à l'idée que l'un de nous quatre meure, et la dernière fois, c'est surtout cette inquiétude qui t'a explosé à la figure.

James le remercia du regard, mais Peter était toujours renfrogné.

– Pardonne-moi, insista Sirius. Je n'aurais pas dû dire ça, je ne le pensais pas, et je te promets que je ne recommencerai plus. Et tu hésites encore à me pardonner, je t'en prie, fais-le pour James. Il a besoin de nous, en ce moment. De nous trois.

Lentement, Peter se tourna vers James.

– Ça, j'ai du mal à y croire, grogna Peter. Vous avez des secrets, tous les deux ! Vous croyez que je ne vous vois pas, à murmurer derrière mon dos ? James, tu ne nous as même pas dit que tu avais déménagé ! Quand j'ai voulu te rendre visite, l'autre jour, j'ai trouvé ta maison vide ! J'ai cru que tu étais mort !

– Je voulais te raconter aujourd'hui, dit calmement James. Je suis désolé de t'avoir fait peur, mais c'est quelque chose que je ne pouvais pas raconter par écrit. Remus n'est pas au courant non plus.

Peter regarda Remus, suspicieux ; mais celui-ci était sincèrement surpris.

– Que se passe-t-il ? demanda-t-il avec inquiétude.

– Je vous raconterai quand Peter et Sirius seront réconciliés, décréta James. Je voulais même vous proposer de passer la soirée chez moi.

Peter parut apaisé par cette proposition. Il se détendit progressivement et finit par accepter l'invitation, pour le plus grand bonheur de James.


***


Quelques heures plus tard, Sirius et Peter arrivaient devant la maison de Peter. Ils étaient restés chez James jusqu'à l'aube, avec Remus et Marlene, et à l'horizon, le ciel pâlissait ; Sirius était nettement plus détendu, et souriait béatement en parlant de Harry.

– Je suis tellement content pour eux, disait-il en regardant le ciel. Malgré la situation, ils arrivent à être heureux, simplement parce qu'ils sont ensemble... Et Harry est tellement adorable, je n'arrive pas à croire que je suis son parrain... Vraiment, c'est formidable. Et l'abri que Dumbledore leur a trouvé m'a semblé suffisamment sécurisé, tu ne trouves pas ?

Peter resta silencieux, même s'il l'écoutait attentivement.

– Tu n'étais pas obligé de me raccompagner, dit Peter alors qu'il gravissait le perron de sa petite maison. Je peux me débrouiller tout seul.

– Je ne voulais pas qu'il t'arrive quelque chose, dit Sirius. Imagine que des Mangemorts t'attendent chez toi ? Je ne me le pardonnerais pas.

Peter haussa les épaules, et se retourna vers la porte.

– Hé, Peter...

Voyant qu'il lui tournait le dos, Sirius le retint par le bras.

– Aïe ! sursauta Peter.

– Oh, excuse-moi, dit Sirius en le lâchant aussitôt. Tu es blessé ?

Peter hésita un instant, puis acquiesça.

– Une autre mission que Dumbledore m'a donnée, dit-il évasivement. Je te raconterai une prochaine fois.

– Vraiment ?

Sirius eut l'air agréablement surpris.

– C'est vrai que tu semblais beaucoup plus attentif tout à l'heure, par rapport aux précédentes réunions, remarqua Sirius. J'ai l'impression que tu es plus actif au sein de l'Ordre, ces derniers temps... Non ?

Cette fois-ci, Peter grimaça un sourire embarrassé.

– Même si vous ne m'aviez rien dit à propos de James, j'avais déjà cru comprendre qu'il était en danger, marmonna-t-il. Disons que ça m’a fait réaliser certaines choses. À propos de la nécessite de se battre... Et de se protéger les uns les autres, malgré la peur.

Sirius hocha la tête, impressionné.

– C'est vraiment noble de ta part, Peter. Et je suis sûr que tu es capable de rendre de grands services à l'Ordre.

– Ce n'est pas ce que tu disais il y a quelques semaines...

Sirius repensa furtivement à ce qu'il lui avait dit lors de leur dernière dispute, et se sentit de nouveau envahi par la honte et la culpabilité.

– À propos de ça, justement... Tu me connais, Peter... Quand je suis en colère, je dis n'importe quoi. Je sais que ce n'est pas une excuse, mais je t'assure que notre amitié m'importe tout autant que celle de James, ou de Remus. Et j'espère vraiment que tu voudras bien me pardonner de t'avoir aussi mal jugé. Maintenant que tu me dis tout ça, je me rends compte à quel point j'ai été injuste avec toi.

Peter regardait le sol avec intensité, et Sirius crut qu'il allait se mettre à pleurer.

– Je vais aller dormir, dit sèchement Peter en ouvrant la porte. À bientôt, Sirius.

Il entra et ferma rapidement la porte derrière lui, laissant Sirius seul sur le perron. Dans un premier temps, il resta immobile dans l'entrée, et tendit l'oreille pour entendre les pas de son ami s'éloigner. Lorsque le silence retomba, il s'approcha d'une fenêtre, entrouvrit un rideau, et vit un chien noir disparaître au coin de la rue.

Et enfin, il se décida à allumer la lumière.

Autour de lui, sa maison était petite et très mal entretenue. Il ne prenait jamais la peine de ranger, ni de nettoyer, même s'il lui aurait suffi de donner un coup de baguette pour le faire : l'entrée et le petit salon étaient donc plongés dans le désordre. Des détritus jonchaient le sol, et de vieux exemplaires de la Gazette du Sorcier s'empilaient au pied du canapé. Dans la cuisine qu'on apercevait par la porte, de la vaisselle sale s'accumulait dans l'évier ; n'importe qui, en voyant l'état de la maison, aurait deviné que celui qui vivait là était seul et passablement négligé.

Sans y accorder la moindre importance, Peter marcha jusqu'au miroir de l'entrée et y observa son reflet. Il parcourut du regard ses cheveux ternes, ses petits yeux humides, son ventre repoussant ; et la rancœur qui l'accompagnait depuis plusieurs années se raviva furtivement. Puis il regarda son avant-bras gauche, où Sirius l'avait attrapé, remonta sa manche avec précaution et sourit pour la première fois depuis le début de la soirée.

En effet, ce qu'il avait raconté à Sirius à propos de son bras était très loin de la réalité – mais la réalité était tellement horrible, tellement absurde que Sirius aurait été incapable de l'envisager.

Peter pivota légèrement pour que la lumière du salon éclaire au mieux la Marque des Ténèbres qui se trouvait sur son avant-bras. Elle était si récente que sa peau était encore à vif, et saignait légèrement à l'endroit où Sirius l'avait agrippé.

Cela faisait un peu plus d'une semaine que Peter avait fait le choix de rejoindre les Mangemorts, même s'il hésitait à le faire depuis bien plus longtemps. En effet, dès le début de la guerre, il avait eu le sentiment de se trouver dans le camp des perdants. Les Mangemorts semblaient si puissants, galvanisés par leur chef charismatique et invincible... Ils semblaient chaque jour plus proches de la victoire, tandis que l'Ordre du Phénix était de plus en plus vulnérable...

Peter avait donc longuement hésité à retourner sa veste, effrayé par l'idée d'être découvert par Dumbledore et retenu par l'affection qu'il continuait d'avoir pour James, Sirius et Remus ; c'était l'altercation qui l'avait opposé à Sirius qui l'avait finalement décidé. Sirius lui avait dit des horreurs, et Peter avait décidé qu'il ne pouvait plus continuer à prendre autant de risques pour rester avec des gens qui avaient autant de mépris pour lui. Peter aurait souhaité que James et Remus prennent la même décision, qu'il jugeait bien plus sage, mais ses amis semblaient aveuglés par leur confiance en Dumbledore, prêts à tout pour le servir, même à perdre la vie.

Il s'était donc mis en quête de Voldemort pour lui proposer ses services, en l'échange de sa protection. Ravi d'avoir un espion au plus près du camp adverse, et après avoir fouillé ses souvenirs de fond en comble, afin de s'assurer qu'il n'était pas envoyé par Dumbledore pour l'espionner, Voldemort avait accepté sa proposition et avait fait de lui un Mangemort.

Depuis, Peter se félicitait chaque jour d'avoir pris cette décision. Il se trouvait désormais dans le camp des puissants, et lorsque Voldemort obtiendrait enfin la victoire – ce qui n'était plus qu'une question de temps – il serait récompensé à la hauteur du rôle décisif qu'il comptait jouer dans la suite de la guerre.

Évidemment, lorsqu'il se trouvait avec ses trois anciens amis, quelques remords le saisissaient, sans pour autant affaiblir sa volonté de servir le Seigneur des Ténèbres. Il aurait préféré qu'ils empruntent le même chemin que lui, mais malheureusement, il n'en avait jamais été question.

Au-dessus de sa tête, il y eut un léger craquement : quelqu'un marchait sur le parquet. Des pas retentirent dans l'escalier, et un homme de haute taille apparut dans l'encadrement de la porte. Il s'agissait d'Augustus Rookwood, un Mangemort qui était infiltré au Ministère comme Langue-de-Plomb : lui aussi servait Voldemort comme agent double, et avait été chargé de surveiller Peter pendant quelques semaines.

– Tu en as mis du temps, grogna le Mangemort. J'ai fait un petit somme en t'attendant. Alors, ils vont attaquer les géants ?

– Non, lâcha Peter. Pas encore, même si certains d'entre eux s'impatientent.

– Dommage. Yaxley et Dolohov sont impatients d'affronter les Prewett... Et sinon, tu as de nouvelles adresses à nous donner ?

– Oui, dit Peter en sortant un morceau de parchemin de sa poche.

Pendant une fraction de seconde, il hésita à le donner à Rookwood, mais le Mangemort le lui arracha des mains et le mit devant ses yeux.

– Edgar Bones, dit-il avec un sifflement admiratif. Les Lestrange le détestent, ils espéraient que tu le trouves en premier... Et Marlene McKinnon ! Cette petite peste a mis une raclée à Travers, la dernière fois, il va donc pouvoir se venger ! Fabuleux, fabuleux... Bien, je vais transmettre tout cela au Seigneur des Ténèbres, il sera ravi.

Peter ne réagit pas. Il repensa au soir où il avait suivi Edgar Bones jusqu'à chez lui, sous sa forme animale, après la mission que leur avait donnée Dumbledore... Il était accompagné par Sirius, également sous sa forme de chien, qui craignait que les Mangemorts n'attaquent Edgar Bones sur le trajet... Puis il repensa à la manière dont il avait obtenu l'adresse de Marlene, à peine quelques heures plus tôt, encore une fois grâce à Sirius : la jeune femme, qui avait toujours eu un faible pour lui, et qui avait de plus en plus de mal à supporter la solitude que la guerre lui imposait, avait décidé de lui donner discrètement son adresse, afin qu'il puisse lui rendre visite de temps en temps. Et au cours de la soirée qu'ils venaient de passer chez James, alors que la vigilance s'était relâchée, Peter avait profité d'un passage aux toilettes pour regarder dans le blouson de Sirius, où il avait trouvé le morceau de parchemin qui indiquait l'adresse de Marlene...

Avec des gestes un peu engourdis, le Mangemort commença à mettre ses chaussures, puis son manteau. Face à lui, Peter hésitait à rajouter quelque chose. C'était l'instant de vérité : après cela, il ne pourrait plus jamais revenir en arrière. L'espace d'un instant, il fut tenté de renoncer à son horrible projet – mais la soif de reconnaissance qui l'animait était bien trop forte.

– Ce n'est pas tout, dit finalement Peter d'une voix sourde.

– Ah oui ?

Peter tourna brièvement la tête. Sur la petite table qui se trouvait à côté du canapé, on pouvait voir une photo prise quelques années auparavant, le jour de son quinzième anniversaire. Il était attablé devant un gâteau un peu brûlé, dans la Grande Salle de Poudlard. Autour de lui, James, Sirius et Remus l'entouraient en riant, regardant alternativement l'objectif et leur ami Peter. Ils portaient tous le même uniforme, la même cravate rouge et or, comme s'ils étaient tous les quatre parfaitement égaux.

Mais ils ne l'étaient pas, Peter avait fini par le comprendre.

Avec Remus et James, on pensait que tu valais quelque chose, avait craché Sirius lors de leur dernière dispute. C'est pour ça qu'on t'a traîné avec nous pendant tout ce temps... Mais quand je vois à quel point tu es lâche, je me dis qu'on a peut-être eu tort.

Ils t'ont toujours mis de côté, lui avait dit le Seigneur des Ténèbres lors de leur rencontre, lorsqu'il avait visité ses souvenirs. Ils t'ont méprisé, t'ont utilisé comme faire-valoir, simplement pour mieux briller... À leurs yeux, tu n'es rien qu'un vermisseau...

– Allez, crache le morceau, dit Rookwood avec agacement.

Peter ne réagit pas tout de suite. Son regard s'attarda encore un peu sur la photographie, et plus précisément sur le visage souriant de James.

Puis il reporta son attention sur le Mangemort.

– Fais venir le Seigneur des Ténèbres, dit-il. Dis-lui que j'ai réussi à obtenir ce qu'il recherche.



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