Destinée | les Prince, tome 1

Chapitre 13 : Ce à quoi mène le ressentiment

1290 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 16/07/2024 01:43



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Séraphine était l'antipode même de Lily.


Là où son amie était radieuse et chaleureuse, Séraphine était sombre et froide. Si Lily préférait jouer dehors plutôt que faire ses devoirs, Séraphine choisissait toujours de réviser ses dernières leçons malgré le beau temps - pourtant rare à Carbone-les-Mines.


Les endroits où elles vivaient étaient, eux aussi, différents : Séraphine habitait dans la partie sombre et sordide de Carbone-les-Mines, dans une maison vieille et délabrée, tandis que Lily logeait dans une belle demeure aux murs blancs et au jardin entretenu. Elles avaient beau se trouver dans la même ville, elles semblaient appartenir à deux mondes opposés.


Leurs familles étaient également contraires. Lily avait la chance d'être née d'un père adorable et d'une mère aimante, et même si elle n'était plus exactement sa sœur chérie, elle avait aussi Pétunia. Séraphine oubliait parfois qu'elle avait une mère et son père était un ivrogne, violent, autant dans ses paroles que dans ses actes, qui ne rentrait que tard le soir.


À ce stade-là, la question sensée qui venait aux lèvres des gens qui s'interrogeaient sur leur amitié était : comment ces deux filles, si différentes, avaient-elles pu devenir amies ?


Si Lily et Séraphine leur répondraient que ce n'étaient pas leurs affaires — quoique Lily l'eut sans doute dit plus gentiment —, Pétunia aurait une réponse tout à fait différente, et pas si lointaine de la vérité : c'étaient toutes les deux des monstres, il était donc normal qu'elles s'assemblent.


« Séraphine, tu m'as dit que tu avais des choses à me raconter, et tu ne m'as toujours rien dit. », s'impatienta Lily.


La chambre de Lily était joliment meublée. Il y avait une moquette rouge au sol et des rideaux oranges suspendus aux grandes fenêtres, une large armoire remplie de belles tenues sur laquelle était accroché un miroir, un coffre plein de bottines et de chaussures et une lampe avec un abat-jour peint sur la table de nuit près du lit.


« Oui, excuse-moi, je voulais attendre que l'on soit seules, murmura-t-elle en vérifiant que personne n'écoutait à la porte.


— Oh, dit Lily, sa curiosité piquée. Dis-moi ! Je veux savoir.


— Eh bien, tu te souviens de ma mère, Eileen Prince ? »


Lily hocha la tête.


« Sa mère, ma grand-mère donc, me fait hériter de tous ses biens. Je l'ai appris grâce à Gringott, la banque sorcière, qui m'a envoyé une lettre avant-hier. Au début, ma mère n'était pas d'accord, mais quand le notaire a parlé d'enquêter sur elle, elle a accepté.


— Woaw, c'est incroyable ! s'écria Lily d'un ton enthousiaste. Mais qu'est-ce qu'elle t'a donné, exactement ?


— Le notaire m'a expliqué qu'il y avait un manoir et une fortune de — si je me souviens bien — 4800 gallions quelque chose. »


Lily, stupéfaite, écarquilla les yeux.


« Mais c'est énorme ! Enfin je crois. Je n'ai pas encore bien assimilé la conversion de livres aux gallions...Et... »


Elle se mordit la lèvre, détournant le regard. Séraphine pencha la tête, avec un air interrogateur.


« Tu vas partir dans ce manoir ? demanda-t-elle finalement.


— Bien sûr que non ! protesta aussitôt Séraphine. Jamais je ne te laisserai, même pour tout l'or du monde. »


Lily sourit.


« Mais, dans ce cas, qu'est-ce que tu vas en faire ?


— Je ne sais pas, avoua Séraphine en haussant les épaules.


— On pourrait aller au Chemin de Traverse avec mes parents ? suggéra Lily. Je suis sûre qu'ils accepteraient volontiers de nous emmener si tu leur demandes.


— Ce serait une bonne idée », approuva Séraphine.


Elles discutèrent de leurs futurs achats au Chemin de Traverse, Lily insistant pour qu'elles s'arrêtent au magasin d'accessoire de Quidditch — depuis qu'elle avait entendu parler de ce sport, elle ne rêvait plus que de le visiter.


Le ciel s'assombrissait quand la mère de Lily vint chercher Séraphine.


« Séraphine, tu devrais rentrer. Tes parents risquent de s'inquiéter », dit-elle en la gratifiant d'un sourire chaleureux.


Mme Evans ressemblait beaucoup à sa fille — notamment de par sa nature chaleureuse et ses sourires. Elle était plus affectueuse avec elle que sa propre mère et Séraphine l'aimait beaucoup.


« Oui madame », acquiesça Séraphine, obéissante, en se débarrassant avec soulagement des barrettes et des nœuds dont Lily avait affublé ses cheveux. 


Elle salua son amie et traversa le salon. Pétunia lui adressa une grimace dégoutée et quelques insultes auxquelles Séraphine ne réagit pas.


Elle quitta la maison, jetant un dernier coup d'œil teinté de regret à la belle demeure des Evans.


Ce n'était pas une soirée à sortir dehors. Le ciel était noir, la lune cachée derrière d'épais nuages. Séraphine avançait, laissant les maisons des beaux quartiers derrière elle. Elle accéléra, effrayée par la bruissante cohorte de rats qui la suivaient dans l'ombre des poubelles éventrées tout en décortiquant des pommes pourries. Enfin, Séraphine entra dans la rue de l'Impasse du Tisseur.


Elle atteignit sa maison avec un soulagement qui disparut dès qu'elle aperçut sa mère, qui sanglotait dans l'entrée. Eileen la pointa du doigt en s'écriant : « Tobias, elle est là ! C'est elle, ce sont ses lettres ! »


Tobias Rogue était un homme pourvu d'une large carrure et d'un visage particulièrement antipathique, qui ne s'adoucissait qu'en présence d'une chope de bière. À cet instant précis, son visage virait au rouge et Séraphine en déduisit qu'il n'y avait que deux options : soit il avait bu, soit il avait trouvé quelque chose de compromettant, c'est-à-dire sorcier, dans sa chambre ou celle de sa mère.


Il tenait dans sa main deux lettres, l'une marquée par le sceau de Gringott, et l'autre par celui de Poudlard, et Séraphine comprit qu'il s'agissait de la deuxième possibilité.


Et, au vu de l'attitude accusatrice de sa mère, elle conclut qu'elle était dans le pétrin.


« Comment as-tu pu hériter de ça ? » rugit-il en agitant le papier.


Séraphine sursauta et elle réfléchit au meilleur moyen d'échapper à la colère de son père. Nier l'énerverait davantage, et elle n'avait pas d'explication à la présence de la lettre. Fuir semblait impossible : Séraphine, du haut de ses onze ans, était petite et maigre. Tobias la rattraperait avant qu'elle n'ait franchi le pas de la porte. Comme dernière possibilité, il ne restait qu'avouer.


« Je... Je n'en sais rien, bégaya-t-elle, effrayée par la fureur de son père. Ce n'est pas ma faute, c'est... »


Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase qu'une violente gifle atteignait sa joue. Elle battit des paupières pour empêcher les larmes de couler et s'efforça de se calmer.


« Te fous pas de moi ! hurla son père. Les monstres comme vous, ça n'est bon qu'à détruire ce que les honnêtes gens essaient de construire ! Des années que j'attends ça, et pourquoi ? Pour que ce soit toi ? Toi, cette espèce de démon ! »


Eileen avait pâli et s'était davantage recroquevillée sur elle-même, si c'était possible. Séraphine, quant à elle, se recula jusqu'à se coller au mur.


Son père s'avança vers elle et leva le bras. Séraphine attendit le coup, fermant craintivement ses yeux, mais il ne vint pas.


Elle rouvrit les yeux et vit sa mère qui tenait fermement le poignet de son père.

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