Destinée | les Prince, tome 1

Chapitre 4 : Le plan de Druella Rosier — début

1247 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 19/06/2024 20:59


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Janvier, 1950.


Le salon de Druella Rosier était une sphère de verre ornée d'or, située au centre d'une roseraie, qui pouvait accueillir jusqu'à trois centaines de visiteurs si besoin était. Comme Eileen Prince et Druella Rosier étaient les seules assises dans le salon, il avait diminué de taille. Installées sur des coussins en soie, elles buvaient leur thé à petites gorgées dans un silence complet.


Eileen observa discrètement la femme devant elle. Le visage de Druella était joliment encadré de boucles blondes et soyeuses et elle était pourvue de paupières lourdes et d'un sourire élégant. Néanmoins, et c'est ce qui convainquît Eileen de garder une certaine réserve à son égard, une certaine hypocrisie bien dissimulée imprégnait chacune de ses paroles, rendant ses gestes trop vifs et ses expressions trop lentes.


« Sais-tu que je me marie à Cygnus Black dans trois semaines ? » demanda-t-elle soudainement, avec l'air de quelqu'un qui venait tout juste de s'en souvenir.


Eileen songea que sa mère avait dû lui en toucher un mot ou deux. Mais elle ne voyait pas sur quel point le mariage de Druella la concernait. Elles n'étaient pas amies et, à moins qu'elle ne veuille s'assurer qu'Eileen, en tant que future belle-sœur, ne cherche à s'attirer les faveurs de leurs grands beaux-parents, elle n'avait pas de raison de discuter avec elle avant le grand repas familial.


« Tu deviendras ma belle-sœur. C'est pour cela que, te connaissant, je souhaitais m'assurer de quelque chose, expliqua Druella, déposant sa tasse sur le plateau qui flottait dans les airs entre elles deux.


— Ah bon ? Et qu'est-ce ? s'enquit prudemment Eileen, examinant le visage neutre de Druella,


— Contrairement à toi, j'ai parfaitement conscience du devoir qui est le mien. Je vais devenir un membre à part entière de la plus ancienne et noble famille de sangs-purs et je vais tout faire pour être à la hauteur de mon devoir, afin que la famille Black prospère. »


Druella but une gorgée de thé et reprit, son regard froid planté dans celui d'Eileen : « Sauf que tu gâches mes plans, à jouer la curieuse des Moldus. Je ne veux pas qu'à cause de toi nous ayons des ennuis.


— Qui t'a raconté cela ? s'écria aussitôt Eileen, furieuse qu'on ait pu la trahir. C'était Orion Black, ce fumier, elle en était sûre.


— Je le sais, c'est tout, rétorqua Druella. Tu n'as pas à te préoccuper de ce sujet : tu devrais plutôt songer à corriger ton comportement. »


Eileen lui jeta un regard noir. Elle avait l'impression d'être une adolescente dont le parent reprochait sa mauvaise conduite et ses joues en brulaient de honte.


« Eileen, sais-tu ce qui t'attends si tu continues ainsi ? Ta déchéance débutera par une humiliation dans la presse. On te rabaissera dans tous les magazines. Ensuite, viendra la dépréciation sociale. Toutes tes amies te tourneront le dos, plus personne ne voudra être vu avec toi. Et, enfin, tes parents te renieront. Tu ne figureras plus sur le registre familial. Tu seras oubliée du monde des sorciers, comme Phineas, murmura Druella d'une voix menaçante. Elle s'était penchée sur Eileen, adoptant une mine sombre.


— Si tu oses poursuivre cette voie, sois certaine d'être capable d'en assumer les conséquences. » asséna-t-elle en se redressant.


Eileen lâcha brutalement sa boisson, qui se brisa sur le sol et le thé éclaboussa la robe de Druella. Tremblante, elle répliqua : « Tu n'en sais rien. Il y a des...des gens, qui ne sont pas comme vous, qui pourraient m'aider. Vous, vous n'êtes que des égoïstes sans la moindre émotion. »


Elle s'enfuit d'un pas rapide, les larmes lui montant aux yeux. Elle ne vit pas le sourire de Druella qui pensait, satisfaite, qu'elle n'avait plus à se soucier de sa belle-sœur concernant la succession du rôle de matriarche de la famille Black.


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Le Hazel Coffee était un petit café, dont les tables de terrasse étaient jonchées de cigarettes encore rougeoyantes. Une odeur âcre de vieille chaussette imprégnait les lieux.


Eileen aurait espéré rencontrer Tobias dans un endroit plus chaleureux, mais il était idéal en termes de discrétion : il était caché dans des rues sombres et peu fréquentées et son adresse n'était donnée qu'aux amateurs de tabac et d'opium — les drogues s'y vendaient en masse. Aucune chance qu'un sorcier y soit présent.


« Vous voulez manger quelque chose ?


— Non, merci, refusa Eileen en jetant un coup d'oeil discret au menu, qui affichait des plats qu'elle préférait ne jamais avoir à goûter.


— Alors un paquet de clopes pour moi », commanda Tobias à un homme mal rasé aux cernes marquées.


Eileen lissa nerveusement les manches de sa veste. Pour se rassurer, elle glissa sa main dans sa poche et caressa le bout de sa baguette magique.


« Où habitez-vous ? » demanda-t-elle.


Elle avait appris les sujets de conversation à aborder entre sangs-purs de la haute société, mais face à un ouvrier, qui plus est Moldu, elle était incertaine. Lui demander son art de prédilection paraitrait un peu étrange, et lui répondre qu'elle adorait les Potions et les parties de bavboules encore plus. Par quel moyen se divertissaient les Moldus ? Elle se promit que, si ce rendez-vous finissait bien — c'est-à-dire qu'elle n'était pas obligée de lui jeter un Oubliete —, elle se renseignerait sur ce sujet.


 « Dans Carbone-les-Mines, marmonna-t-il en sortant un briquet.


 — Dans l'Ouest des Midlands ? »


Il lui jeta un coup d'oeil, tandis que le bout de sa cigarette s'embrasait. Une épaisse fumée s'échappa de ses lèvres pour s'évaporer dans les airs.


 « Dans l'Ouest des Midlands, confirma-t-il. Et vous ?


 — Quelque part dans Londres », affirma-t-elle, préférant ne pas divulguer des informations qui pourraient mener à des coïncidences dérangeantes.


Le silence retomba entre eux.


 « Vous lisez ? le questionna Eileen.


 — Quand ça m'chante, souffla Tobias.


 — Quel genre de livre aimez-vous ? Pour ma part, ajouta-t-elle pour éviter un autre silence, j'aime beaucoup les contes.


 — Les journaux.


 — C'est vrai que c'est utile », sourit-elle.


Il haussa les épaules et Eileen se vexa que son regard fut plus attiré par ce café miteux que par elle.


 « Que font vos parents ? dit-il enfin, et elle se sentit bêtement heureuse qu'il ait initié la conversation.


 — Mon père est le vice-président d'une entreprise de chaussures, mentit-elle. Ma mère ne travaille pas.


 — Ah, je vois. Et combien il gagne ?


 — Oh, je dirais...dit Eileen, qui avait toujours du mal à convertir les gallions en livres. Environ 17 000 livres par mois. »


Tobias s'étouffa et Eileen se précipita sur lui, inquiète. Elle lui tapota le dos tandis qu'il suffoqua.


 « 17... 17 000 livres ? toussa-t-il.


 — S'il-vous-plaît, peut-on lui apporter de l'eau ? appella-t-elle. Il s'étouffe ! »


Elle se redressa en se tournant vers le comptoir, mais Tobias la retint en agrippant son bras.


 « Ce n'est rien, assura-t-il en souriant. Je vais bien. »


Il l'obligea à se rasseoir et elle obéit. 


 « Vous avez dit que vous aimez les contes. Quels contes ?


 — Oh, les classiques... » murmura-t-elle.


Le rendez-vous termina bien. Tobias s'était nettement plus impliqué dans la fin et Eileen en était particulièrement contente. Elle soupçonnait que le salaire de son père y fut pour quelque chose, mais elle préférait ne pas y réfléchir.

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