La mort est une fin heureuse

Chapitre 2 : Premiers cours

4159 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 19/02/2024 08:54

Teddy, Septembre 2019.

 

— Bonsoir, monsieur Lupin. Asseyez-vous, je vous prie.

Teddy était debout, en plein milieu de la grande pièce presque vide des Trois Balais. Derrière une table ronde dans un coin, se tenait le professeur McGonagall, qui lui présentait d’un geste de la main la chaise en face d’elle. Tremblotant, Teddy s’avança vers elle, la salua poliment, et s’assit, angoissé. C’était son tout premier entretien d’embauche.

— Bonsoir, Teddy. Comment allez-vous ?

Teddy sursauta. Devant la prestance du professeur McGonagall, il n’avait pas remarqué madame Padilvia, son ancienne professeure de métamorphose, assise devant la table. Il s’empressa de répondre.

— Bien, madame Padilvia. Et vous ?

— Très bien, très bien, répondit Padilvia avec un grand sourire. Je profite des mes derniers moments avant la retraite, comme vous le savez, puisque vous êtes ici pour me prendre mon travail.

Teddy adressa un sourire complice avec elle, puis se tourna vers McGonagall, qui devait diriger l’entretien. Celle-ci prit la parole.

— Bien, commençons. Ce sont des formalités, mais nous devons procéder à des présentations, en tant que potentiels employeurs. Je suis Minerva McGonagall, directrice du collège Poudlard, et voici Paula Padilvia, professeure sortante de métamorphose, présente en tant que conseillère. Edward Lupin, vous êtes ici pour un entretien d’embauche pour le poste de professeur de métamorphose à Poudlard. Comment vous sentez-vous vis-à-vis de cela ?

— Eh bien, répondit Teddy, je me sens… Comment ça ?

— Savez-vous ce qui impliquerait pour vous de devenir professeur de métamorphose, et pensez-vous être capable d’enseigner ? récita McGonagall en fronçant les sourcils.

— Oh, et bien, comme vous le savez peut-être, commença Teddy en réfléchissant à toute allure, j’ai quelques facilités en métamorphose depuis ma naissance. J’ai toujours maîtrisé le programme enseigné durant les sept années à Poudlard, madame Padilvia pourrait vous le confirmer…

— Effectivement, ma collègue m’a expliqué votre prédisposition à la métamorphose, due à votre condition de métamorphomage, coupa McGonagall. C’est un don très rare, monsieur Lupin, il n’en fait aucun doute. Cependant, madame Padilvia m’a aussi affirmé le manque de zèle de votre part durant l’entièreté de votre scolarité, et pas seulement en métamorphose. Vous n’avez eu que deux ASPIC, deux « Acceptable » en sortilèges et en métamorphose.

Teddy se renfrogna. Il décida de ne rien nier, et de tenter le tout pour le tout.

— Oui, c’est vrai. Je ne suis pas un grand travailleur quand je manque de motivation. J’ai beaucoup de mal à travailler quand je ne peux pas voir l’objectif derrière tout ça. Or, je n’ai jamais eu de gros objectif pour après mes études.

— Si vous n’êtes pas motivé, je ne vois pas comment vous parviendrez à motiver vos élèves, répliqua McGonagall.

— Justement, professeur. Quand j’ai entendu que vous cherchiez quelqu’un pour enseigner la métamorphose, j’ai eu une révélation. Un objectif, un travail qui me passionne. Voyez-vous, j’ai donné des cours de soutien de métamorphose à Dominique Weasley, l’an dernier, quand elle était en sixième année et qu’elle avait du mal avec les sortilèges informulés. J’ai adoré ces leçons, c’était tout aussi enrichissant pour elle que pour moi.

— Enseigner à une élève qui vous le demande n’est vraiment pas le même travail que d’enseigner à trente élèves qui ne demandent qu’à sortir de la classe.

— Oui, je me doute, répondit Teddy en regardant son interlocutrice droit dans les yeux. Mais je pense que je peux le faire. Ça sera sûrement difficile, au début, mais j’y arriverai.

McGonagall soutint le regard de Teddy. Puis, elle adressa un regard à sa collègue. Celle-ci lui hocha la tête. McGonagall reprit la parole.

— Très bien. Voyons maintenant votre niveau en métamorphose.

Elle lui fit alors balayer le programme des sept années d’études, le tout sans prononcer la moindre formule magique. Sans aucune difficulté, Teddy transforma une aiguille et allumette, un escargot en dé à coudre, un toucan en verre à pied, une table en cochon, et même le comptoir du pub en buffle. Il fit disparaître d’un coup de baguette la moitié des tables, et les fit réapparaître au plafond d’un autre coup de baguette. Il enchanta un balai qui fit le tour de Pré-au-Lard, sous la surveillance de Padilvia, et revint dans le pub par une fenêtre ouverte. McGonagall lui posa ensuite plein de questions théoriques auxquelles Teddy répondit correctement. McGonagall parut satisfaite.

— Excellent. Il est certain que, du point de vue académique, vous avez largement le niveau pour enseigner la métamorphose à Poudlard. Il y a cependant un dernier aspect que j’aimerais que nous étudiions. Je vous trouve beaucoup trop jeune.

Teddy ouvrit la bouche sans parler.

— Vous n’avez que vingt-et-un ans, continua McGonagall, et certains élèves de septième année ont l’air plus vieux que vous. Je crois qu’il vous sera extrêmement difficile d’obtenir une quelconque crédibilité auprès de vos élèves. 

— Je n’avais pas pensé à ça…

— Vous auriez dû, répondit sévèrement McGonagall. Tenir une classe n’est pas une chose aisée, et vous ne leur apprendrez rien du tout s’ils vous prennent pour leur grand frère.

Teddy décida qu’il était temps d’abuser des dons qui lui avaient été accordés à la naissance.

— Dans ce cas, aux grands maux les grands moyens, dit-il en souriant.

Il fit alors apparaître sur son visage un petite barbe bleu foncé, quelques marques de la peau et une cicatrice sous l’œil, le tout lui donnant une bonne quinzaine d’années de plus. Le résultat était plus que convainquant. Padilvia éclata de rire, mais McGonagall ne parût pas amusée le moins du monde, ni impressionnée. Elle s’apprêtait à l’incendier quand Padilvia lui coupa la parole.

— Minerva, allons, n’exagérons rien… Les élèves de Poudlard sont souvent tous motivés à apprendre la magie, c’est peu probable qu’il y ait de débordements majeurs dans sa classe. Et puis, de toute façon, Teddy est le seul candidat qui a l’air assez motivé pour le poste…

McGonagall soupira. Discrètement, Teddy reprit son apparence habituelle.

— Tu as raison. Bon, écoutez monsieur Lupin, reprit McGonagall, il n’y a absolument aucun doute sur le fait que, sans compter votre âge, vous avez les compétences parfaites pour occuper ce poste. En temps normal, j’aurais choisi quelqu’un avec plus d’expérience, mais les faits sont là, vous êtes notre seul candidat potable. Je reste sceptique, mais je vais vous offrir le poste. Félicitations.

Tandis que Padilvia afficha un large sourire à Teddy, ce dernier se força à rester impassible et professionnel. Face au regard toujours sévère de McGonagall, il répondit :

— Merci beaucoup, professeur. Je vous promets de faire de mon mieux pour mes élèves.

— J’espère bien, rétorqua-t-elle. Je vous surveillerai de près. Je vous enverrai un hibou dans la semaine pour voir les formalités administratives, ainsi que votre salaire. En attendant, je vous souhaite une bonne soirée.

— À vous aussi, professeur, répondit Teddy en se levant. Madame, je vous souhaite une retraite tranquille et heureuse, ajouta-t-il à l’adresse de Padilvia, qui lui sourit.

Teddy rendit son sourire à Padilvia, tourna les talons, et commença à se diriger vers la sortie. Il entendit Padilvia murmurer quelque chose à McGonagall dans son dos.

— Edward ! s’exclama McGonagall sous le regard approbateur de Padilvia. Heu… De son temps, votre père a été le meilleur professeur de Défense contre les Forces du Mal depuis des années. Je suis sûre qu’avec le temps, vous ferez un excellent enseignant.

Puis, McGonagall lui adressa un léger sourire.

— Merci beaucoup, professeur, répondit Teddy, un grand sourire aux lèvres, avant de sortir du pub et de transplaner.

 

*       *       *

 

Teddy se réveilla brusquement, les yeux rivés vers le plafond. Il était allongé, parfaitement droit dans son lit, dans sa petite chambre de fonction à Poudlard. Aujourd’hui était le grand jour. Il allait donner ses premiers cours en tant que professeur de métamorphose à Poudlard. Il était déjà angoissé la veille, durant le banquet, mais le fait d’avoir rêvé de son entretien d’embauche durant la nuit lui donna la nausée. Il songea au fait qu’il n’avait aucune expérience en termes de maintien de l’autorité dans une classe, et surtout au fait qu’il voulait par-dessus tout ne pas décevoir le professeur McGonagall.

        La directrice avait proposé ce logement de fonction à Teddy, un petit bureau avec une chambre et une salle de bains, situés au premier étage du château, près de sa salle de classes. Teddy avait d’abord refusé, car il venait d’emménager avec sa copine, Victoire Weasley. Cependant, il s’était rendu compte que, sous la pression, il était devenu paranoïaque, et avait tellement peur d’être en retard à ses premiers cours, qu’il avait demandé à McGonagall le logement.

        La veille, Teddy avait passé la journée entière dans la salle des professeurs, avec ses nouveaux collègues, afin de préparer la rentrée. Il y avait d’abord eu quelques présentations, bien que tous le connaissent bien, Teddy ayant quitté Poudlard seulement trois ans auparavant. Ensuite, McGonagall lui avait donné son emploi du temps, qui était par ailleurs très chargé. En tant qu’élève, il ne s’était jamais rendu compte à quel point le boulot d’enseignant était dense. En voyant son visage se décomposer à la vue de ce nouvel emploi du temps, Neville était venu à sa rescousse afin de le rassurer. « Tu verras, on s’y habitue », lui avait-il dit avec un sourire chaleureux.

        La présence de Neville dans le corps enseignant était très rassurante. En effet, Teddy et Neville se connaissaient bien, et s’appréciaient beaucoup. De plus, Neville n’était professeur de botanique que depuis six ans, et lui non plus n’avait pas été le choix préféré de McGonagall. Pourtant, il avait aujourd’hui gagné le respect de la directrice, est occupait même, depuis peu, le poste de directeur de la maison Gryffondor. Alors, en pensant à Neville, Teddy se sentait moins angoissé.

        Quand leur réunion s’était enfin terminée, vers seize heures, Teddy était allé se détendre et prendre une tasse de thé chez Hagrid. Ils avaient beaucoup discuté, et Hagrid lui avait lui-aussi dit de ne pas s’en faire, que lui-même avait été un professeur désastreux au début, mais qu’il s’était très vite amélioré. Puis, à vingt heures trente, Hagrid était parti à la gare de Pré-au-Lard, tandis que Teddy était retourné dans le château, pour s’installer directement à la table des professeurs, dans la Grande Salle, et y attendre l’arrivée des élèves.

        Finalement, le festin de début d’année lui avait donné un peu confiance en lui, surtout après avoir pu discuter un peu avec les cousins Weasley. Au moment du coucher, seul dans sa petite chambre, il s’était même surpris à attendre son premier cours avec impatience.

 

        Mais le matin venu, cette légère once de confiance avait fait place à une angoisse terrible, à lui donner la nausée.

 

        Teddy regarda son réveil. Il était sept heures. Il se leva lentement, et prit une longue douche chaude. À sept heures et demie, il était dans la Grande Salle à prendre son petit déjeuner.

        Tout en mangeant un toast à la marmelade, Teddy observa les élèves qui entraient en compte-goutte dans la Grande Salle. Parmi les professeurs, seuls Brendan Lecreuset, professeur de potions, et Margaret Bell, professeure d’étude des Moldus, étaient déjà là, et mangeaient silencieusement. Flitwick vagabondait entre les tables pour distribuer les emplois du temps des premiers levés.

        Teddy se remémora alors la journée qui l’attendait. À neuf heures, il avait son premier cours de l’année, avec les sixième années de toutes les maison confondues. À dix heures, il avait les troisième années de Poufsouffle et de Serpentard. À onze heures, les quatrième années de Gryffondor et de Serdaigle. L’après-midi, il n’avait que les première années de Gryffondor et de Serdaigle. Il le savait, le plus dur serait de convaincre les plus âgés de ses aptitudes en tant que professeur. Il commencerait donc son premier cours par un gros obstacle.

        Tandis que Teddy était dans la lune, Neville s’assit à sa droite. Il lui adressa la parole.

— Salut, Teddy. Alors, pas trop stressé ?

— Salut, Neville, répondit Teddy. Si, bien sûr. Je sais pas comment je vais faire pour convaincre les sixième années que je suis pas leur camarade. En plus, j’en connais certains de quand j’étais élève.

— T’inquiète pas, assure Neville. Moi aussi, le jour de mon premier cours, j’étais stressé. Enfin, j’avais déjà trente-trois piges, mais quand même. Le truc, c’est la première impression. Si tu arrives à affirmer ton autorité dès le premier instant, ils te respecteront jusqu’à la fin de leurs études.

— Oui, enfin c’est ça le problème. Comment on fait pour affirmer son autorité ? Je ne sais pas si je suis capable de jouer au méchant brigadier devant une classe de trente élèves.

— Mais autorité ne signifie pas méchanceté, affirma Neville en riant. L’autorité, c’est respecter ses élèves et avoir leur respect en retour. Les intéresser, les passionner, les distraire, les amuser, mais tout en faisant en sorte qu’ils sachent que tu n’es pas leur ami. Se mettre à leur niveau, tout en leur faisant savoir que tu n’es pas à leur niveau.

Teddy ouvrit grand la bouche d’horreur. Neville avait dit tout cela comme si c’était simple et élémentaire, sauf que Teddy n’avait pas la moindre idée de commet l’appliquer. Neville le comprit vite, et reprit la parole.

— Tu sais, je suis certainement l’un des plus mauvais élèves que Poudlard ait enregistrés. Je comprenais rarement ce que les profs disaient, à part en botanique. Pourtant, en troisième année, ton père a su captiver mon attention en un instant. Tu sais comment il a fait ?  

Teddy fit non de la tête. Neville le regarda un instant, puis sourit.

— Il m’a compris, dit-il simplement.

 

*       *       *

 

C’est la boule au ventre que Teddy installa ses affaires sur le bureau de sa salle de classe, en attendant ses élèves. Il stressait beaucoup, mais il se connaissait, et heureusement, il stressait toujours avant, mais jamais pendant. Il savait que, quand les élèves arriveraient, que ça se passe bien ou mal, il ne serait pas stressé, et serait maître de ses actions.

À neuf heures, il entendit la cloche sonner, et vit les élèves entrer et petit-à-petit remplir les chaises vides. Teddy les salua tour à tour. Quand tout le monde fût assis, Teddy tapota le tableau de ses doigts pour mettre fin aux derniers papotages, et attirer l’attention de tout le monde. Quand la salle fût silencieuse, il commença à se sentir parfaitement idiot à se tenir debout tout seul devant tous ces gens, et fût pris d’une envie soudaine d’aller d’assoir au fond de la classe pour attendre le vrai professeur. Mais il prit son courage à deux mains, et ouvrit la bouche pour parler.

— Bonjour à tous. Je m’appelle Edward Lupin, et comme vous l’avez entendu hier au banquet, je serai votre professeur de métamorphose cette année. Certains d’entre vous se souviennent peut-être de moi, vous étiez en deuxième année quand j’ai terminé ma septième année. Enfin bref, je vais commencer par faire rapidement l’appel.

Teddy prononça le nom de ses élèves chacun leur tour, et les élèves répondirent « Présent » ou « Présente ». Il reconnût certains d’entre eux. L’appel se termina sur Weasley, Freddie puis Weasley, Molly, qui étaient tous les deux assis au premier rang. Quand ils entendirent leur nom, ils adressèrent à Teddy un petit sourire encourageant du coin de la bouche. Ou était-ce de la moquerie ? Teddy reprit son discours.

— Si vous êtes ici, c’est que vous avez obtenu au moins la mention « Efforts Exceptionnels » à vos BUSEs de métamorphose. Félicitations. Désormais, mon but est de vous aider à obtenir la meilleure mention possible pour vos ASPICs.

Cela se passait bien, pour le moment, se dit Teddy. Les élèves semblaient boire ses paroles. Soudain, un grand élève de Poufsouffle leva la main. Teddy l’interrogea.

— C’est bien vous, quand on était en première année, qui avez fini à l’infirmerie après avoir bu six litres de Bièraubeurre ?

Teddy se figea. Le souvenir de ce pari perdu, qui lui avait semblé si drôle jusqu’à l’instant d’avant, lui parut d’un seul coup complètement stupide. Teddy se retint de toutes ses forces de ne pas baisser les yeux.

— Oui, c’était moi, répondit-il, rouge de honte.

La classe entière éclata de rire. Ne sachant pas quoi faire, Teddy jeta un regard désespéré vers Molly et Freddie. Ceux-ci ne riaient pas avec les autres, et Teddy pouvait voir dans leur regard « Allez vas-y, défonce-les ! ». Reprenant courage, Teddy ouvrit la bouche pour récupérer l’attention de ses élèves, quand une élève de Serpentard, au deuxième rang, demanda sans aucune malice :

— Monsieur, j’ai toujours voulu vous demander, pourquoi vous cheveux sont bleus ?

— Oh ça, c’est simplement parce que…

— Il a bu trop d’essence d’occamy ! coupa le grand élève de Poufsouffle, ce qui provoqua encore l’hilarité générale.

Cette fois-ci, Teddy ne perdit pas le contrôle. Il se souvint ce que Neville lui avait dit une heure plus tôt : il faut gagner leur respect dès le premier contact. D’un regard, Teddy lança un regard interrogateur à Molly et Freddie. Ceux-ci répondirent à l’affirmative d’un signe de tête. Très bien. Il allait le faire, il n’avait plus le choix.

Tu veux savoir pourquoi j’ai les cheveux bleus ?

Les rires se turent d’un seul coup. Sa voix n’était plus calme comme avant. Elle était devenue forte, grave, et raisonnait dans la salle comme une contrebasse. Une fille poussa un cri : les yeux de Teddy, habituellement bleus, étaient devenus orange vif. Teddy continua à parler de sa voix grave :

Je suis un métamorphomage – son corps doubla de volume et sa tête heurta le plafond – vous savez ce que ça veut dire ? – de longs crocs poussèrent de sa bouche, ses cheveux bleus se rétractèrent dans sa tête, et ses vêtements se changèrent en un pelage gris – ça veut dire que je peux me transformer en ce que je veux – ses oreilles poussèrent au-dessus de sa tête – quand je veux – une longue queue touffue se détacha de son postérieur.

Il avait pris la forme d’un loup géant. La classe était aussi silencieuse qu’à des funérailles. Certains étaient morts de peur, d’autres étaient fascinés. Teddy les regarda un instant d’un regard menaçant, puis reprit en moins d’une seconde sa forme habituelle, ainsi que sa voix normale.

— Et je pense donc que je suis tout à fait capable de vous aider en métamorphose, vous ne trouvez pas ?

Au bout de quelques secondes de silence, Molly et Freddie lancèrent des applaudissements, et le reste de la classe les suivit. Il avait réussi. Durant l’heure qui suivit, les élèves paraissaient beaucoup plus enclins à écouter ce qu’il avait à dire.

        Quand la cloche sonna à dix heures moins cinq, les élèves sortirent de la classe dans un brouhaha d’excitation. Molly et Freddie restèrent en retrait.

— Alors, commença Teddy, impressionnés ?

— Bravo ! répondit Molly. T’as failli perdre le contrôle, mais c’était joliment repris. Félicitations.

— Maintenant que je sais comment faire, les autres classes ne devraient pas trop me causer de problèmes, affirma Teddy avec fierté.

— Mais ne prend pas la grosse tête, répliqua Freddie. Tu as beau avoir impressionné les autres avec tes crocs, nous on sait que t’es un gentil nounours.

— Ne vous inquiétez pas ! Même en tant que prof, je resterai un gentil nounours… Jusqu’à la prochaine fois où j’aurai à sortit le coup du loup géant. 

C’est en souriant que Teddy accueillit les élèves suivants, puis les suivants, puis les suivants. Il fit à chaque fois le coup du loup géant, mais pas pour se faire respecter, plutôt pour faire une petite démonstration. Une élève de troisième année demanda même, très pertinemment, s’il était un animagus. Teddy put alors enchaîner sur le programme de troisième année.

 

*       *       *

 

        Le soir venu, il avait tenu à dormir chez lui, en compagnie de Victoire. Ils avaient une petite maison de campagne dans le Sussex depuis un peu plus de deux mois. Ils avaient peu d’espace, car Victoire était en apprentissage de médicomagie, et passait beaucoup de temps à Ste Mangouste. Ce soir-là, cependant, elle était là, et Teddy passa la soirée à lui raconter ses aventures palpitantes.

— J’étais sûre que tu y parviendrais, dit Victoire. C’était certain, avec tes dons !

— Je sais, mais j’étais pas tranquille, répondit Teddy en passant tendrement sa main dans la chevelure flamboyante de Victoire. J’ai failli tenter la transformation en acromentule, mais je pense que j’en aurais traumatisé certains.

— Tu as bien fait, les parents auraient porté plainte, plaisanta Victoire.

Tous les deux dînèrent ensemble en se racontant leurs journées. Ensuite, Teddy prit de la poudre de cheminette et se rendit chez sa grand-mère Andromeda. Celle-ci, surprise, l’accueillit à bras ouverts, avec un grand sourire. Teddy raconta à nouveau sa rentrée. Andromeda parut comblée.

— Alors ça y est, tu as trouvé quelque chose qui te plaît vraiment ? lui demanda Andromeda, remplie de fierté.

— Je crois bien, oui, répondit Teddy avec un grand sourire.

— Alors je suis sûre que tu seras un grand professeur, lui assura Andromeda. Ton… ton père serait fier de toi. Ta mère aussi, bien sûr, mais ton père a été professeur, l’un des meilleurs d’après Harry, et il connaissait la valeur de l’éducation.

Teddy regarda les yeux de sa grand-mère s’humidifier. Depuis les vingt-et-un ans qu’elle l’élevait, il ne l’avait jamais vu pleurer la mort de sa fille. Non, c’était bien pour lui qu’elle pleurait, de joie. Et le fait qu’elle lui parle ainsi de son père, alors qu’elle ne le connaissait presque pas, témoignait de la fierté qu’elle éprouvait. Les yeux humides lui aussi, Teddy étreignit sa grand-mère, et la remercia.

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