L'évadé du clair de Lune

Chapitre 21 : Le cœur du maelstrom

4118 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 07/10/2024 12:04

Devant lui, dans la salle à manger, ils étaient une quinzaine de Mangemorts autour du Seigneur des Ténèbres. Ils mangeaient, riaient et se croyaient en sécurité. Sirius n’avait une vue directe que sur peu d’entre eux mais parmi tous, Severus Rogue, son ancien camarade était celui qui retenait toute son attention. Malgré ce que Dumbledore lui avait assuré, Sirius ne lui faisait aucune confiance et le dégout qu’il lui inspirait n’avait pas été atténué par les années écoulées. Le trouver là le replongeait au collège. Rogue n’avait pas changé, toujours aussi écœurant, sale, méprisable petit adorateur de magie noire. Il s’installa à table après avoir menacé Harry, son visage reflétait de la haine pure pour le jeune enfant. Sirius bouillait : comment Dumbledore pouvait-il croire que cet épouvantail en robe noire était de leur côté ? Laisser cet homme protéger Harry ? Qu’est-ce que le vieux sorcier savait que Sirius ignorait pour placer sa confiance en Severus ?

 

L'échéance du combat rendait Sirius nerveux et il avait de plus en plus de mal à se contrôler. Voir un de ses anciens ennemis devant lui, si proche de son filleul sans que lui ne puisse faire quoi que ce fût, n’arrangeait pas les choses. Sirius se sentait impuissant. Sa fatigue et sa colère lui embrouillaient les idées et il n’arrivait plus à réfléchir. Il voulait en découdre et le plus vite serait le mieux.

 

Sa tension devait se ressentir et Dumbledore, toujours invisible juste derrière lui, lui posa la main sur l’épaule, le faisant sursauter :

— Maîtrise-toi, Sirius, ce moment est trop important, murmura-t-il.

— J’essaie, Professeur… Croyez-moi, j’essaie, répondit Sirius en grommelant.

 

Sirius serra les mâchoires et sa main se crispa encore plus sur la baguette de James, le cœur sur le point d'exploser. Le jeune homme jeta un coup d’œil à la tablée devant lui et aux convives qui allaient faire bombance. Par chance, le brouhaha des conversations des Mangemorts avait couvert son échange avec Dumbledore. Sirius ferma les yeux, souffla puis tenta de dénouer ses épaules crispées. Il aurait vraiment voulu sauter sur place pour évacuer le trop plein d’énergie qui l’habitait mais craignait que, malgré le bruit ambiant, cela n’attire trop l’attention. Il fallait que le combat commence. Faites que le combat commence !!

 

Et enfin, comme s’il avait lu dans ses pensées, encore une fois, le directeur prononça enfin le signal alors que le plat principal venait d’apparaitre sur la table :

— Maintenant, murmura-t-il.

 

Instantanément, Sirius avança, courbé en avant, baguette sortie. Il se concentra pour faire le moins de bruit possible et ne pas se trahir : il n’était que sous un sortilège de désillusion et si quelqu’un faisait un peu trop attention à ce qu’il se passait à l’entrée de la salle à manger, ils étaient cuits. Suivi de près par Emeline sous la cape d’invisibilité dont il pouvait entendre le bruissement léger du tissu sur le sol, il progressa, lentement, longeant les murs, sans quitter son but des yeux.

 

Harry.

 

Il ressemblait tellement à James, avec ses cheveux noirs en bataille que Sirius devinait impossibles à coiffer. Le cœur du jeune homme se serra, il était tellement heureux de revoir son filleul qu’il se sentit prêt à abandonner le combat pour se charger lui-même de le mettre en sûreté. Il en voulut un instant à Dumbledore qui l’avait privé de cette tâche en la confiant à Emeline. Il se reconcentra et s’approcha encore, sans bruit, quand un éclat argenté attira son regard sur la droite et le stoppa dans son avancée. Emeline lui rentra dedans mais il n’en eut même pas conscience, son attention complétement accaparée par celui qui poussait discrètement la porte à l'arrière de la grande salle à manger :

 

Peter.

 

Toujours aussi petit, toujours aussi répugnant. Sirius sentit son cœur accélérer la cadence alors que Peter, le petit Peter, allait s'installer tranquillement auprès de Rogue, un sourire satisfait aux lèvres en lui montrant le journal qu'il tenait en main. Les deux Mangemorts échangèrent à voix basse puis Rogue hocha la tête avant de prendre la parole :

— Mes amis, je viens d'apprendre une bonne nouvelle. D'après nos informations...

— Quelles informations ? le coupa Voldemort à l'autre bout de la table et le silence se fit.

 

Sirius, Emeline et Dumbledore retinrent leur souffle. Ce n'était pas le moment de se faire remarquer. Rogue jeta un œil derrière son épaule et Sirius aurait parié qu'il les avait vus. Le jeune homme sentit une goutte de sueur glacée descendre lentement le long de sa colonne vertébrale alors qu'il mourrait d'envie de respirer de tout son soul mais c'était impossible. Il devait rester silencieux. Pas un mouvement, pas un souffle. En même temps, il ne parvenait pas à détacher ses yeux de Peter.

 

Peter.

 

Ce traître. Cet infâme traître, ce rat sans honneur se trouvait à seulement quelques mètres de lui. Il suffirait de pas grand-chose pour le... Soudain, Rogue se retourna vers son maître et se racla la gorge, faisant sursauter Sirius.

— Et bien Monseigneur, Pettigrow étant officiellement mort et grâce à ses capacités de métamorphoses pour le moins étonnantes, il peut se promener à sa guise sans attirer l'attention des Aurors. Il nous ramène les nouvelles du jour, expliqua Rogue de sa voix doucereuse en brandissant le journal.

— Oh... Peter ? s'enquit le Seigneur des Ténèbres à l'autre bout de la table. Quelle initiative pertinente...

 

Pettigrow rougit comme une tomate. Il se redressa, fier et arrogant. Il sourit, transpirant l'autosatisfaction. Jamais Sirius ne l'avait vu ainsi. C'est que ce lâche se sentait important parmi tous ces mages noirs... Un rat parmi les rongeurs... Un traître parmi les fourbes.

 

Peter. Sale rat. Sale traître.

 

La voix doucereuse et sombre de Voldemort s'éleva à nouveau :

— Et bien ? Quelles sont ces réjouissantes nouvelles ?

 

Rogue répondit à la place de Peter qui était tellement rouge qu'il semblait incapable de s'exprimer.

— L'évasion de nos camarades sème la panique, le Ministère est sur les dents. Milicent Bagnold a même dû passer côté Moldu pour informer son homologue, c’est la preuve de votre retour à votre plus grande puissance. D’après les journalistes, c’est un chaos sans nom. Le moment idéal pour « recruter » de nouveaux partisans, si vous voulez mon avis et infiltrer les plus hautes sphères. Votre domination est imminente.

 

Des murmures satisfaits parcoururent l'assistance des Mangemorts. Chacun y allait de son petit commentaire réjoui. Leur plan fonctionnait à merveille. Mais Sirius lui, n'écoutait que d'une oreille et restait fixé sur Peter.

 

Peter. Sale rat. Sale traître.

 

C'était lui le responsable de tout ce désastre. Sirius perçut quelque chose dans son dos et comprit alors qu'Emeline le poussait en avant :

— Sirius ! Qu’est-ce que tu fais ? murmura-t-elle de sa voix douce mais suffisamment fort pour pouvoir être entendue par quelqu'un à l'ouïe fine.

 

A nouveau, Rogue se tourna vers eux. Cette fois, Sirius en était sûr : il avait croisé son regard. Sa main se crispa sur sa baguette, faisant blanchir les jointures de ses doigts. Il fallait attaquer ! Maintenant ! Mais Rogue reporta son attention vers l'assemblée et Sirius ne vit plus que ses cheveux longs et gras. Il soupira de soulagement.

— Sirius, reprit Emeline qui commençait à paniquer. Harry nous attend.

 

Harry...

 

En voulant avancer, Sirius vit une nouvelle fois Peter, si fier, si heureux, si… satisfait. Et son cœur se gonfla à nouveau de haine.

 

Peter. Sale rat. Sale traître.

 

Severus Rogue se leva brusquement, faisant crisser sa chaise au passage. Il annonça d'une voix forte :

— Mes amis ! Je vous propose de porter un toast à notre victoire prochaine ! Gloire au Seigneur des Ténèbres !

 

Galvanisés par l'allégresse générale, tous les Mangemorts se levèrent, leur verre à la main, faisant racler les chaises sur le parquet parfaitement ciré. Ils répétèrent ensuite à l'unisson les acclamations de Rogue. Profitant du vacarme, Emeline, Sirius et Dumbledore respirèrent un grand coup. Sirius sentit une nouvelle pression dans son dos mais il resta figé, ne pouvant détacher son regard de Peter.

 

C'était sa faute, à ce lâche. C'était lui qui avait déclenché la cascade d’évènements qui les avaient menés ici, ce soir : quand il avait trahi ses amis, quand il avait vendu James et Lily à Voldemort, quand il avait échappé à Sirius, à Londres d’abord, quatre ans auparavant, le faisant accuser du meurtre de douze moldus, puis en Albanie, il y a quelques jours. Mais Sirius ne le laisserait pas filer cette fois. Il voulait qu’il paie. Maintenant. Tout de suite. De manière définitive.

 

Son désir de vengeance, qu’il s’était efforcé d’étouffer depuis plusieurs jours, explosa soudain. Sa main se crispa sur sa baguette, alors que dans son esprit, apparaissait les souvenirs de leur passé, les rires qu’ils avaient partagés, si douloureux à la lumière de la trahison que Sirius, James, Lily et Sélène, avaient subi. Il grimaça.

 

Peter… Ce rat. Ce traître...

 

Les Mangemorts se rassirent et continuèrent à échanger bruyamment. Au moins, l'intervention de Rogue avait eu un avantage pour les quatre sorciers invisibles au centre de la salle à manger des Malfoy, mais Sirius n'en avait même pas conscience. Il n'entendait plus rien, ne voyait plus rien, ne pensait à plus rien d'autre qu'à sa haine.

 

Peter. Sale rat. Sale traître.

Sale lâche qui se pavanait encore, fier de sa gloriole parmi des grands mages qui le manipulaient. Quel idiot...

 

Il se tourna vers sa cible. Sa haine avait occulté tout le reste. Le plan élaboré par le directeur était oublié. Il voulait frapper, blesser… tuer. A mains nues, tant sa rage était folle. Il hurla, attirant l’attention de son ennemi :

— PETER !

 

Et alors que l’interpellé se tournait, cherchant à localiser qui avait parlé, Sirius lança un sort dans sa direction qui le toucha en pleine tête, figeant la surprise sur le visage de son ancien ami qui bascula en arrière. Dans la précipitation, le sortilège de désillusion disparut mais Sirius n’en avait que faire. Il sentit qu'on essayait de le retenir par son bras gauche mais il se dégagea brusquement. Il était aveugle et sourd à tout ce qu’il se passait autour de lui. Il se précipita alors sur sa cible, profitant des quelques secondes où la stupeur avait figé tout le monde. Il se jeta sur Peter, stupéfixé et tombé au sol, et le roua de coups au visage.

 

Puis ce fut le chaos. Par chance, l’Ordre du Phénix réagit en premier : l’équipe extérieure, menée par Maugrey et à l’affut du moindre signe, pulvérisa immédiatement la grande baie vitrée et attaqua les Mangemorts. Les sortilèges fusèrent et les ennemis, empêtrés dans les chaises, nappes, et dont les baguettes étaient rangées, perdirent un temps précieux. Voldemort, lui, cria de rage et se jeta vers Harry pour se débarrasser de celui qu’il considérait comme la clé de sa victoire. Dumbledore apparut alors, s’imposant comme son adversaire. Le mage noir grimaça et hurla alors qu’il engageait le combat. Mais, tout à sa fureur, Sirius ne se rendit compte de rien.

 

La haine sifflait dans ses oreilles. Ses poings frappaient sans discontinuer cet homme immobile et il avait déjà du mal à reconnaître la figure de son ancien ami sous les hématomes et le sang. Puis, à travers les acouphènes qui lui vrillaient les tympans, une voix se fraya un chemin.

 

Il faut le faire juger.

 

C’était ce que lui avait dit Sélène. Le faire juger, pour que lui, Sirius, puisse être innocenté. Le faire juger pour que Peter prenne sa place à Azkaban, où les Détraqueurs lui rappelleraient sans cesse ce qu’il avait fait. Le faire juger…

 

Sélène.

Petit à petit, les poings de Sirius ralentirent, sa haine reflua.

 

Sélène.

Elle avait tant risqué pour lui. Il était si fier d’elle. Il l’aimait davantage encore qu’avant son incarcération. Il n’avait pas le droit de la décevoir. Même si pour cela il devait mettre sa vengeance de côté. Il voulait vivre le restant de sa vie avec elle et cela valait bien tous les sacrifices. Jamais il ne laisserait Peter lui prendre ce rêve.

 

Mais pour ça, il fallait le capturer le rat. Vivant.

 

Sirius se redressa, soufflant sa haine sous l’effort qu’il venait de faire. Peter était méconnaissable mais il respirait encore, bien que faiblement. A califourchon sur lui, Sirius reprenait son souffle, légèrement honteux de la folie qui l’avait pris. Il avait failli tuer un homme, à mains nues, et son impulsivité avait gâché l’effet de surprise sur lequel toute l’opération reposait. Le professeur Dumbledore l’avait pourtant mis en garde… C’était pour cette raison que le vieux sage ne lui avait pas confié le sauvetage de Harry.

 

Harry.

 

Où était-il ? Emeline devait avoir réussi à le sortir d’ici, maintenant. Sirius balaya la scène du regard.

 

Tout n’était que chaos. Dumbledore et Voldemort se livraient à un duel féroce au milieu de la salle à manger, sur les débris de la table et les restes de repas que les Mangemorts n’avaient pu finir. Des morceaux de meubles jonchaient le sol, des éclats de verre avaient volé jusqu’aux genoux de Sirius, l’écorchant par endroit. Il ne s’en était même pas rendu compte.

 

Non loin de lui, Remus se livrait à ses propres combat et Sirius devinait que son ami loup-garou l’avait protégé pendant qu'il se défoulait sur Peter. Il entendait Maugrey lancer des sorts derrière la haute silhouette, pleine de puissance, du directeur de Poudlard. Le vieil auror, malgré ses infirmités, menait le combat face à deux Mangemorts qui ne lui laissaient que peu de répit.

 

Dans le salon, sous les débris, il y avait bon nombre de corps au sol, inertes. Stupéfixés, saucissonnés. Morts peut-être. Mulciber, Avery, Selwyn, Dolohov, et même Croupton Junior. Ils s’étaient laissés surprendre par l’assaut initial. Sirius en fut rassuré, son coup de sang n’avait peut-être pas gâché toutes leurs chances. Mais son cœur se serra quand ses yeux se posèrent sur les corps de Dedalus Diggle et de Sturgis Podmore. Les yeux vides, ne respirant plus.

 

Merde… 

 

Puis les sons et les cris parvinrent à nouveau à ses oreilles. Et parmi tout ce raffut,  Sirius entendit alors les pleurs d’un enfant.

 

Harry.

 

Le petit garçon n’avait pas bougé : il était toujours là, devant la cheminée, à pleurer en jetant des coups d’œil apeurés vers la scène de combat en face de lui, les mains sur les oreilles. Sirius se figea, terrorisé. Pourquoi était-il encore ici ? Où était Emeline ? Pourquoi ne l’avait-elle pas fait sortir comme c’était prévu ?

 

Il la chercha du regard et la trouva un peu plus loin, sa tête au sol, le corps encore à moitié couvert par la cape d’invisibilité. Ses yeux morts regardaient dans sa direction. Sirius se rappela alors qu’elle avait tenté de le retenir quand il s’était brusquement jeté sur Peter. Il avait donné un coup de coude en arrière quand il avait jeté le sort de stupéfixion, c’est là que son bras avait heurté Emeline. Il avait même entendu un grognement étouffé mais il était tellement aveuglé par sa haine qu’il n’y avait pas fait attention. Il s’était rué vers son ennemi et avait abandonné sa mission. Elle avait perdu sa protection et elle avait été fauchée avant d’atteindre Harry et de pouvoir s’enfuir avec lui. Sirius s’approcha d’Emeline à quatre pattes, sa baguette en mains pour dévier les sorts perdus qui le frôlaient avant d’aller s’écraser contre le mur.

— Non, souffla-t-il.

 

C’était de sa faute. De sa faute si Emeline était morte. De sa faute si elle n’avait pu terminer sa mission. De sa faute si elle n’avait pas pu mettre Harry en sécurité.

 

Il frissonna en réalisant : il avait mis Harry en danger. Il s’avança encore, évitant les sorts, parfois de justesse, et saisit la cape d’invisibilité.

— Harry, ne t’inquiète pas mon bonhomme. Je vais te sortir de là, assura Sirius, les yeux rivés sur son filleul. Regarde-moi, Harry. Je sais que ça fait longtemps que tu ne m’as pas vu. Mais je suis ton parrain. Ton papa et ta maman voulaient que je m’occupe de toi. Je vais te sortir de là !

 

Le petit garçon tourna son regard vers lui. Ses yeux émeraude, écarquillés de terreur, le fixaient, cherchant un trait familier sur son visage. Sirius s’avança encore, toujours à quatre pattes, la cape de James dans la main.

— Toi et moi, on va se cacher, mon p’tit bonhomme. Plus personne ne pourra nous trouver, je te le promets. Tu veux bien ?

 

Reniflant, Harry hocha la tête, alors qu’un énième sortilège fit éclater un vase posé sur le linteau de la cheminée. Un éclat de la poterie coupa profondément le visage de Sirius en retombant. Ce dernier saignait abondement, mais ne s’en préoccupa pas, son attention toujours accaparée par le petit garçon.

— Allez, viens, je t’emmène. On va sortir de là. Se cacher du bruit. Tu seras en sécurité, lui dit-il en tendant la main vers le petit garçon si cher à son cœur.

 

Harry hésitait à le rejoindre, apeuré par le sang qui lui recouvrait le visage, terrorisé par les combats et le bruit environnant, il avait plaqué les mains sur ses oreilles et secouait la tête en pleurant. Sirius garda son calme, il devait absolument rassurer le petit garçon et céder à l’urgence n’aiderait en rien à faire avancer la situation. Harry avait cinq ans, Sirius ne pouvait pas lui en vouloir d’avoir peur. Non, c’était son rôle en tant que parrain de le sortir de là, et même si Harry avait sans doute oublié son visage depuis tout ce temps, il y avait sûrement d’autres solutions.

 

Il lança alors un sort de silence autour de lui et du petit garçon, pour s’isoler du bruit assourdissant, des cris, des insultes. Il continua avec une bulle de protection qui les entoura à son tour. Il s’essuya rapidement le visage avec sa manche en espérant que cela suffise et se retourna vers Harry.

 

Son filleul regardait autour de lui, tentant de comprendre pourquoi le bruit avait soudain cessé mais il resté recroquevillé sur lui-même, tremblant comme une feuille. Sirius pensa un instant se précipiter sur lui, et l’emporter, mais il devait gagner sa confiance, surtout que le petit avait déjà été enlevé une première fois. Sirius réfléchit un instant, puis, dans le vacarme assourdit, il se rappela une berceuse que Lily avait l’habitude de fredonner pour endormir Harry. Il pouffa devant l’incongruité de cette information, se demandant comment il avait pu penser à ça à cet instant. Il pria ensuite que cela marche. Malgré la difficulté de maintenir la concentration sur les deux sortilèges qui les entouraient, Sirius commença à chanter :

 

Doucement, sois confiant, petit Harry,

Les étoiles veillent sur toi cette nuit.

 

Harry releva la tête, intrigué. Il fronça les sourcils, et cligna les paupières. Sirius espéra que c’était là le signe que le petit garçon se rappelait. Oh oui, Lily, où que tu sois, fais que ton fils se souvienne de ta berceuse !!

 

Lilly !

 

A cet instant, un sort s’écrasa bruyamment en une gerbe d’étincelles rouges sur le dôme de protection. Sirius jura et jeta un œil en arrière pour vérifier d’où cela venait. Personne ne semblait pourtant faire attention à eux et les combats n’avaient pas perdu en intensité. Remus se battait non loin d’eux et déviait les sorts qui leur étaient destinés. Il faudra vraiment que Sirius pense à le remercier pour tout ce qu’il faisait pour lui. Non loin également, proche du corps toujours immobile de Peter, Rogue était aux prises avec Maugrey. Sirius grimaça, songeant que non, en effet, on ne pouvait pas lui faire confiance. Il aurait aimé que Dumbledore voit ça... Et puis...

 

Soudain, Rogue dévia un sort lancé par Maugrey et la boule phosphorescente écarlate alla percuter Carrow, un Mangemort qui se précipitait vers Sirius et Harry, qui s’écroula au sol. Etait-ce un hasard ? Sirius regarda Severus. Il ne semblait pas attristé le moins du monde et répéta la même opération. Cette fois le sort manqua de peu l'adversaire de Remus. Curieux... Dumbledore aurait peut-être quand même raison ? 

 

Mais Sirius haussa les épaules. Il aurait le fin de mot de cette histoire plus tard. Pour le moment, quelqu'un de plus important avait besoin de lui.

 

Harry.

Le fils de James et Lily.

Harry, son filleul.

Harry, celui qu'il devait protéger coûte que coûte et sortir d'ici.

 

Sirius se sentait un peu en décalage, comme désintéressé par ce qu’il se passait autour de lui. Sans doute la bulle de silence qu’il avait jeté autour de lui et de Harry y était pour beaucoup et surtout, sa priorité était de respecter sa promesse : il devait revenir auprès de Sélène avec Harry, le plus vite possible. Il se retourna vers le petit garçon qui s’était à nouveau recroquevillé sur lui-même.

— Harry, ne t’inquiète pas ! Concentre-toi sur ma voix. Tu connais cette chanson, hein ? C’est ta maman qui la chantait pour t’endormir ! Viens, écoute ! fit-il en tendant à nouveau les bras vers lui.

 

Doucement, sois confiant, petit Harry,

Les étoiles veillent sur toi cette nuit.

N'aies pas peur, la lune éclaire le chemin,

De tes rêves jusqu'au matin.

 

Petit à petit, Sirius parvint à gagner la confiance de Harry, qui, concentré sur la voix de son parrain, ne faisait plus attention à ce qu’il se passait autour de lui. Il avança alors vers la figure amie. Sirius en fut incroyablement soulagé et lui tendit les bras pour que le petit garçon vienne s’y réfugier. Le jeune homme n’avait qu’une hâte, pouvoir enfin le serrer contre lui après toutes ces années, et enfin le tirer de là.

 

La bulle de silence les empêcha d’entendre le cri d’alarme de Remus. Elle éclata sous la puissance du sort de mort. L’éclair vert fusa vers Harry alors que celui-ci touchait les mains de son parrain, un petit sourire timide aux lèvres, persuadé d’être enfin en sécurité. La lueur funeste le percuta à la tête, en plein sur sa cicatrice dans un craquement horrible.

 

Le garçon s'effondra. Sirius ne put rien faire. Rien. Rien à part éviter, dans un réflexe parfaitement inutile, que la tête de Harry ne heurte le sol. Soudain, le corps du petit reposa, inerte, pesant de tout son poids sur les bras tendus de Sirius. Le jeune homme ne parvint même pas à crier. 


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