Secrets de Serpentard (II) : Le Pensionnat Wimbley

Chapitre 12 : Une nouvelle alliance

9278 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 24/05/2023 12:55

Une nouvelle alliance



Pendant que Sirius, James, Remus et Peter célébraient leurs succès à Poudlard, des hiboux grand-duc provenant du manoir des Malefoy s'éparpillaient à travers le pays pour distribuer des invitations à un bal masqué le soir d'Halloween ; et tous ceux qui avaient eu l'honneur d'en recevoir une s'empressèrent de l'accepter, sans se douter une seule seconde de ce qui les attendait.

Durant les quelques jours qui précédèrent le bal, Abraxas et Lucius mirent au point un discours des plus convaincants, destiné à rallier tous leurs invités au clan de Lord Voldemort. Ils répétèrent des heures durant dans la grande salle de bal qui allait accueillir les convives ; Narcissa n'assista pas aux répétitions, mais elle entendit à travers la porte la canne d'Abraxas Malefoy frapper le sol à plusieurs reprises, pendant qu'il hurlait à son fils qu'il ne serait jamais à la hauteur.

Pendant la journée du 31 octobre, Prunnas et Lidelys décorèrent le château avec de véritables toiles d'araignée, des lanternes-citrouilles au sourire maléfique, des chauve-souris domestiquées pour rester sagement suspendues au plafond. Et plus les préparatifs avançaient, moins Lucius semblait serein. Pendant que Narcissa passait une robe parme et de longs gants assortis, Lucius revêtit un costume couleur d'ambre et entreprit de s'observer nerveusement dans le miroir.

– Tout va bien se passer, lui assura Narcissa en nouant les attaches dorées de sa veste. Tu sauras parfaitement t'y prendre, j'en suis certaine.

– D'habitude, l'assemblée ne compte pas de meurtriers sanguinaires, répondit Lucius d'une voix étranglée en desserrant le col de sa chemise.

Et pourtant, au moment où le gong du portail annonçait les premiers invités, toute trace d'appréhension disparut du visage de Lucius, remplacée par une expression de maîtrise confiante admirablement feinte ; et lui et Narcissa descendirent les escaliers main dans la main pour accueillir leurs premiers invités.

Evan Rosier, Balderic Parkinson et Damian Nott avaient été conviés avec un peu d'avance, et étaient les seuls avertis de l'objectif de cette splendide réception. Lucius ne les avait pas choisis par hasard : ils habitaient sur la Colline d'Émeraude et y étaient respectés par la plupart de ceux que Lucius souhaitait convaincre.

– Regardez-moi ces petites canailles ! leur lança Evan Rosier avec un sourire éclatant, après avoir ouvert d'un geste théâtral les deux battants de l'imposante porte d'entrée.

Il portait un superbe pardessus bleu ciel, et tenait dans la main un masque assorti. Il marcha à grandes enjambées conquérantes, les bras ouverts, et donna l'accolade à Lucius.

– Alors, comme ça, on a rencontré le Seigneur des Ténèbres ! Petit cachottier !

Il éclata d'un rire sonore et fit mine de lui pincer la joue avec affection.

– Bonjour, Rosier, dit Lucius en se dégageant poliment. Tu sembles être dans une forme éblouissante.

– Vous voir me donne des ailes, mes amis ! Et voilà Narcissa, ma tendre cousine ! Comment vas-tu ?

Et sans prévenir, il attrapa Narcissa par la taille, la souleva du sol, la fit tournoyer un instant dans les airs et la reposa un mètre plus loin.

– Evan ! rit Narcissa en retombant sur le sol.

– Toujours aussi resplendissante ! dit-il en lui baisant la main avec des manières exagérées. Parkinson, Nott, venez par ici !

Damian Nott, avec ses longs cheveux noirs lissés et un pardessus doré, fit son entrée aux côtés de Magdalena Nott, son épouse ; et Balderic Parkinson entra à son tour. Et la personne qui se trouvait à côté de lui était d'encore moins agréable compagnie que cette peste de Magdalena Nott : il s'agissait de Juliet Selwyn, avec qui il était fiancé depuis peu.

– Bonjour, Lucius, roucoula cette dernière sans accorder un regard à Narcissa.

– Bonjour à tous les deux... Et félicitations pour vos fiançailles, répondit Lucius avec indifférence.

Juliet piqua du nez vers sa superbe robe verte, assortie au pardessus de son mari. Lucius, quant à lui, reporta son attention sur ses amis :

– J'ai appris que vous aviez semé le trouble au Ministère, il y a quelques jours... Pendant l'investiture d'Adam Claring.

Les trois hommes échangèrent des regards complices, manifestement très satisfaits d'eux-mêmes.

– Ce n'est pas prudent, dit sèchement Lucius. Le Ministère est sur les dents, en ce moment. Vous risquez d'attirer l'attention sur nous.

– Oh, allez, Lucius... Tu aurais vu sa tête, quand les flammes sont apparues derrière lui ! C'était à mourir de rire. Et son copain Auror était absolument furieux.

– Ce n'est pas n'importe quel copain Auror, corrigea Lucius. Il s'agit d'Alastor Maugrey, issu d'une interminable lignée d'Aurors de premier ordre, tous plus coriaces les uns que les autres... Ses parents sont morts en essayant de sauver les Claring. Et pour arranger le tout, il a été élevé au Pensionnat Wimbley ! Celui-là risque de nous donner du fil à retordre, à l'avenir.

– Oui, bon...

– Tu en sais des choses, Lucius, roucoula Juliet sous le regard courroucé de son futur mari.

– Ne me dis pas que tu te réjouis de cette nomination, Lucius...

– Bien sûr que je m'en réjouis. Voyons, réfléchissez... C'est du pain béni ! Claring n'est pas très populaire, il souffre encore de la réputation violente de ses parents...

– Tu sais qu'il veut taxer nos fortunes pour éviter au Ministère de faire appel à nos financements directs... Instaurer un quota de Sang-de-Bourbe au Magenmagot, vous imaginez un peu ? Sans parler de sa maudite Fondation...

– Justement, dit Lucius avec un sourire. Rien de mieux pour effrayer les Sang-Pur... Et pour les convaincre de prendre parti pour nous !

Evan Rosier, Balderic Parkinson et Damian Nott s'entreregardèrent avec perplexité, puis éclatèrent d'un rire ironique.

– Je vois, dit Evan Rosier. Mon cher Lucius, tu as toujours un coup d'avance !

– Cela se pourrait...

– En tout cas, pour ma part, je ne suis pas tranquille, affirma Damian Nott avec gravité. Dois-je vous rappeler que ce sont nos parents, nos oncles et nos tantes qui sont à l'origine de l'incendie qui a tué ses parents ? Certes, ils n'ont jamais été identifiés, mais Claring a peut-être des soupçons. Nous serions alors en grand danger...

– Mon père m'a assuré qu'ils avaient pris toutes les précautions nécessaires, à l'époque, affirma Lucius. Et si Claring avait eu des soupçons, je t'assure que j'en aurais été immédiatement averti...

– Je suis certain qu'il a des pouvoirs démoniaques, insista Nott. Comment aurait-il pu échapper à cet incendie, sinon ? J'ai récemment jeté un coup d'œil aux archives, et d'après les quelques témoins, le démon de feu qui a ravagé l'immeuble n'a pas été détruit, mais absorbé...

– Absorbé ?

– Mais... par qui ? Ou par quoi ?

– Les rares témoins étaient trop éloignés pour le voir. Ils sont simplement vu le feu converger vers une forme noire et s'évanouir brutalement, comme si quelqu'un l'avait avalé. Avaler un Feudeymon, vous vous rendez compte ? Seule une créature terriblement diabolique en serait capable.

– Cela expliquerait son tempérament aussi impétueux...

– Ne raconte pas de sottises, s'il te plaît, l'interrompit Lucius avec agacement. Ce genre de choses est strictement impossible.

– Enfin, regarde son slogan : si ça ne prouve pas qu'il y a une part diabolique en lui...

Tout en observant la réaction de Lucius, Balderic Parkinson brandit sous son nez un prospectus de couleur rouge sombre frappé d'une écriture flamboyante :

 

La Fondation pour l'Égalité des Sorciers

et la Protection des Moldus

renaît de ses cendres

 

Adam Claring

siègera au Magenmagot

à partir du mois de novembre

 

Rejoignez-nous !

 

– Eh bien ?

– Il renaît de ses cendres, lut Parkinson d'un air sinistre. C'est une référence à l'incendie ! Et cette couleur rouge... Ça n'est pas un prospectus, mes amis : c'est une authentique mise en garde !

– Je compte sur toi pour en parler à tous les invités avant mon discours, rit Lucius. Ce sera du plus bel effet.

Parkinson renonça à convaincre Lucius du bien-fondé de ses inquiétudes et la conversation dériva vers les quelques alliés d'Adam Claring. À côté de Narcissa, Magdalena et Juliet s'en désintéressèrent aussitôt.

– Alors, Narcissa, il paraît que tu t'es réconciliée avec cette cruche de Daisy, dit Magdalena.

Narcissa serra les poings.

– Oui, c'est exact, dit-elle avec froideur.

– Elle est toujours plongée dans ses recherches à propos de balais volants ?

– Absolument, répondit Narcissa avec aplomb. Je crois qu'elle progresse.

– Ça promet, pouffa Juliet Selwyn.

Dans un premier temps, Narcissa se retint de répliquer. Mais après tout, si elle avait fait le choix de rejoindre le Seigneur des Ténèbres, c'était bien pour qu'on la respecte, et à quoi bon être respectée si elle ne pouvait pas défendre ceux qu'elle aimait ?

– Et vous, sur quoi avez-vous travaillé, cette semaine ? demanda Narcissa. À assortir vos tenues à celles de vos maris ? À parfaire votre manière de tenir une tasse de thé ?

Juliet et Magdalena prirent la même expression choquée, ce qui leur donnait l'air encore plus idiot. Il y eut quelques secondes de malaise généralisé, pendant lequel aucun des quatre hommes ne sut quel parti prendre ; et ce fut finalement Evan qui les sortit de ce mauvais pas, avec sa frénésie habituelle.

– Ça n'était qu'une plaisanterie, Narcissa, évidemment ! Daisy est tout à fait charmante ! Allons, parlons plutôt de ce soir... Où aura lieu la fête ?

– Dans la salle de bal... La salle principale, précisa Lucius.

– Parfait ! Nous allons être nombreux... Et le discours ?

– Quel discours ? demanda Juliet.

Tout le monde l'ignora.

– Je le prononcerai là-bas, dit Lucius en désignant une petite estrade proche de la cheminée.

– Bien, bien, approuva Evan Rosier. La sonorité de la salle est bonne... Nous nous disperserons au sein des invités, tous les trois, dit-il à Nott et Parkinson. Et nous les entraînerons tous dans notre enthousiasme !

Tous les trois semblaient incroyablement excités de prendre part au grand basculement qui se préparait.

– Quand je pense que les Crabbe voulaient faire exactement la même chose que toi, et que tout le monde refusait de les écouter, rit Parkinson lorsqu'ils eurent discuté de quelques détails du déroulement de la soirée.

– Mais de quoi parlez-vous, à la fin ? demanda Magdalena Nott.

Narcissa comprit avec satisfaction que leurs compagnons n'avaient pas daigné informer Magdalena et Juliet de ce qui allait se passer.

– Vous verrez tout à l'heure, leur répondit-elle avec un sourire, tout en plaçant sur le haut de son visage un masque de satin et de perles assorti à sa robe.

 

Les invités ne tardèrent pas à arriver, et commencèrent à se rassembler dans l'immense salle de bal. Les bruissements des robes, le carillon des bijoux et les éclats de voix résonnaient sous le lustre qui scintillait de tous ses cristaux clairs et raffinés. Malgré leurs sourires éclatants, on devinait que nombre d'entre eux étaient profondément embarrassés.

Les rumeurs avaient commencé à se répandre : plusieurs familles de sorciers avaient revu leur jugement concernant Lord Voldemort. Une partie non négligeable d'entre eux s'apprêtaient à le rejoindre ; d'autres y étaient encore réticents, par peur ou par conviction. Mais qui se trouvait dans quel camp ? À qui pouvait-on se confier ? Quel discours fallait-il tenir ? Et surtout : que recommandait la famille Malefoy ?

Cette interrogation informulée pouvait se lire sur tous les visages. Les regards glissaient vers Lucius, ou vers son père ; les invités s'évertuaient à sonder leurs expressions, dans l'espoir de déceler leurs intentions. Dans cette atmosphère craintive, personne ne remarqua la silhouette encapuchonnée qui les observait depuis la mezzanine, sous les dorures, ni les invités entièrement masqués, habillés de manteaux sombres et râpés, qui déambulaient parmi eux.

Malgré l'embarras des invités, la première partie de la soirée se passa donc à peu près normalement. Les Goyle tardèrent à arriver, et Narcissa souhaita un instant qu'ils ne viennent pas. Elle ne voulait pas les inviter, car elle souhaitait qu'ils restent en-dehors de la guerre ; mais cela aurait été trop soupçonneux. Les Goyle entrèrent donc dans la salle de bal peu avant le discours de Lucius, portant le même masque couvert de plumes orange – sauf Edgar, qui en portait un rouge, assorti à la robe de Carla.

Narcissa n'avait rien dit à Daisy à propos de Voldemort. La dernière fois qu'elles s'étaient vues, Daisy avait fermement condamné sa démarche, et Narcissa avait mollement acquiescé. Quant à Vera, elle luttait depuis quelque temps pour empêcher son fils de rejoindre les Mangemorts : comment réagiraient-elles quand elles apprendraient que Lucius et Narcissa leur avait tendu un piège ?

Pour l'instant, Daisy ne soupçonnait absolument rien, et s'approcha de Narcissa, un grand sourire aux lèvres.

– Cissy ! Comment vas-tu ? Oh, et Bellatrix, tu es là aussi, remarqua Daisy, un peu gênée.

– Comme tu peux le voir, dit Bellatrix en posant sa main sur celle de Narcissa.

Narcissa sentit une brûlure familière naître au creux de son estomac – celle qu'elle ressentait chaque fois qu'elle se sentait tiraillée entre deux parts d'elle-même.

– Assieds-toi, proposa Narcissa à Daisy en tirant une chaise à côté d'elle.

Son amie s'y laissa tomber avec joie. Ses yeux verts pétillaient avec intensité, et Narcissa remarqua qu'elle portait autour du cou le sifflet couvert d'écailles violettes qui lui servait de signal pour appeler sa dragonne.

– Joli collier, commenta Narcissa en caressant les écailles violettes.

– N'est-ce pas ? Ça me donne du courage de l'avoir autour du cou.

– Bonne idée, je ferai sans doute la même chose, à l'avenir... Ainsi, Carla et Juliet y réfléchiront à deux fois avant de me prendre de haut !

Daisy rit gaiement, et approuva avec enthousiasme.

– Je crois que j'ai progressé, par rapport à mon prototype de balai, chuchota-t-elle à l'oreille de Narcissa.

– C'est vrai ? Tu as de nouvelles idées ?

– Oui... Il faudra que tu viennes à la maison prochainement, pour que je te montre tout ça, dit Daisy.

Narcissa acquiesça avec sincérité.

– Qui sont tous ces hommes habillés de noir ? demanda Daisy en regardant la foule.

– Oh, des amis de Lucius, répondit vaguement Narcissa. Tiens, justement, il va nous les présenter...

Lucius avait attendu que l'ensemble des invités soit légèrement grisé par le champagne, et avait demandé à Prunnas de resservir plusieurs fois ceux qui pourraient potentiellement s'opposer à lui. Et il jugeait maintenant que les invités étaient assez mûrs pour être réceptifs à ses arguments.

Il se leva donc, fit un petit signe à Evan Rosier, à Balderic Parkinson et à Damian Nott, qui se dispersèrent dans la salle, au milieu des groupes compacts de convives.

Il marcha vers la petite estrade dressée à côté de la splendide cheminée de marbre, retira son masque et le posa sur le pupitre qui lui faisait face. Il paraissait parfaitement calme, malgré son front légèrement imbibé de sueur. Il jeta un regard à son père, qui était assis à la table la plus proche et dardait sur son fils ses yeux pâles et froids.

Abraxas Malefoy était habillé de son habituel manteau noir, fermé par deux rangées de boutons d'argent, avec le blason des Malefoy brodé sur la poitrine ; et Narcissa le soupçonnait de porter une cuirasse sous son manteau pour paraître moins maigre. Lucius lui adressa un sourire qui n'obtint pas de réponse.

D'un geste discret, il essuya la sueur qui perlait au-dessus de sa lèvre supérieure, puis le long de ses tempes. Il s'éclaircit la gorge, et à l'aide d'un couteau en argent, frappa trois petits coups sur la coupe de cristal qu'il tenait à la main.

Le premier tintement s'évanouit dans la clameur de la salle. Evan Rosier, Balderic Parkinson et Damian Nott restreignirent leurs voisins au silence en désignant Lucius, et les voix furent remplacées par des chuchotements fiévreux, que les deux autres tintements métalliques couvrirent aisément.

– Que va-t-il annoncer, à votre avis ?

– Peut-être que Narcissa est enceinte, dit quelqu'un de naïf.

– Tu crois ?

– Il était temps...

En entendant murmurer cela, Narcissa se sentit envahie de tristesse. D'un geste hâtif, elle prit sa coupe de champagne et la but d'un trait, comme si cela pouvait faire redescendre les larmes qui lui montaient aux yeux. Elle s'efforça de se concentrer, et fixa malgré sa vue brouillée la silhouette dorée de Lucius qui se dressait au-dessus de la foule d'invités.

– Mes chers amis, je vous souhaite la bienvenue, déclara-t-il avec douceur.

À côté de lui, les instruments magiques cessèrent de jouer. Evan Rosier applaudit avec enthousiasme, imité par quelques-uns de ses voisins amusés.

– Si je me permets de vous demander le silence et d'interrompre cette charmante musique...

Deux invités lançaient des regards excités à Narcissa. Elle essuya tant bien que mal de les ignorer, assaillie par une tristesse grandissante.

– Mes amis, vous qui venez régulièrement festoyer ici, dans ce manoir... Vous qui savez si bien apprécier notre sens de l'hospitalité... Je tenais à vous dire à nouveau à quel point nous sommes heureux, mon père et moi, d'avoir pu vous réunir ici malgré cette époque tourmentée.

Il parcourut la foule du regard et fit un geste ample du bras.

– Quelle fierté, quel bonheur de voir les plus illustres familles du monde magique se presser sous notre toit... À vous voir ainsi, je ne peux m'empêcher de penser à tous les millénaires d'histoire que nous représentons. Je repense aussi à nos ancêtres, les premiers sorciers qui ont foulé cette terre... Et à ce qu'ils penseraient de nous, aujourd'hui. Ce qu'ils penseraient de ce monde magique, dont ils ont fait la fortune et la beauté pendant des siècles et des siècles.

Narcissa frissonna. Les chuchotements dans la salle cessaient progressivement. Le silence s’étendait comme une onde autour de Lucius, et la résonnance de sa voix se propageait au-dessus des têtes.

– Oui, décidément, il ne faut pas l'oublier : ce sont nos familles qui ont créé, organisé, financé le moindre atome de cette si belle société. Et pourtant...

Il laissa sa phrase en suspens. Plusieurs invités froncèrent les sourcils ; Lucius quitta son visage rayonnant pour devenir grave et soucieux.

– Et pourtant, mes amis, ce même monde magique est en train de se retourner contre nous.

À côté de Narcissa, Daisy remua sur sa chaise, mal à l'aise.

– Certains d'entre vous ne l'ont peut-être même pas remarqué, car ce changement s'est fait lentement, insidieusement... Mais en quelques dizaines d'années, combien de libertés nous ont été retirées ? Combien de décrets nous a-t-on imposés au nom de la sainte Protection des Moldus ? Combien d'entre nous ont été injustement condamnés parce qu'ils ne faisaient que se défendre contre l'oppresseur ? Et surtout... de quoi va-t-on encore nous déposséder, si nous ne réagissons pas ?

Dans l'assemblée, de nombreux sorciers avaient déjà été poursuivis pour avoir pratiqué de la magie devant et parfois même sur des moldus. Opportus Rosier, par exemple, avait déjà passé quelques mois à Azkaban pour avoir transformé un jeune garçon moldu en araignée pour amuser ses propres enfants ; Agapé Humphrey, elle, était connue par le Ministère pour jouer des mauvais tours à ses voisins moldus en faisant pourrir toutes les plantes qui poussaient dans leur jardin ou en infligeant régulièrement des Charmes d'Agrandissement aux quelques rats qui peuplaient leur grenier. En entendant Lucius défendre la possibilité d'agresser les Moldus sans être inquiété par le Ministère, tous s'empressèrent donc d'acquiescer avec enthousiasme.

– Mes amis, l'heure est grave : demain matin, Adam Claring entrera au Magenmagot, dit sombrement Lucius. Et sa maudite Fondation est de retour. Vous savez tous ce que cela signifie : seuls les plus jeunes d'entre nous ont la chance d'avoir oublié la terreur que les deux Claring ont répandu parmi les sorciers... Oh, leur fils prétend qu'il n'emploiera jamais la violence, mais ses objectifs sont semblables : réformer le monde magique. Il ne s'en cache pas. Réformer... Je dirais plutôt rétrécir, appauvrir, effacer petit à petit tout ce qui fait la beauté de notre culture sorcière... Intégrer les Sang-de-Bourbe et leurs ignobles mœurs moldues aux nôtres...

L'assemblée poussa des exclamations de dégoût.

– Si nous laissons faire le Ministère, c'est l'extinction qui nous menace, poursuivit Lucius avec hargne. La misère, la terreur, la traque, la dépravation...

– Hors de question ! s'exclama Damian Nott, électrisé.

– Il faut agir ! cria Evan Rosier.

Lucius leur adressa un signe de tête discret et reconnaissant.

– Il faut agir, oui, je crois que nous sommes tous d'accord sur ce point. La colère gronde parmi vous, mes amis, je la perçois depuis longtemps... Et pourtant...

Pour la deuxième fois, il laissa sa phrase en suspens. Autour d'eux, le silence était de plus en plus épais.

– Et pourtant, il y a quelques années, un mage noir dont je ne prononcerai pas le nom tuait pour la première fois quatre Moldus, dans un quartier mal famé de Londres... Et quelques mois plus tard, il appelait tous les sorciers à se battre à ses côtés, résuma Lucius.

Très sérieux, il descendit de l'estrade, et se mit à déambuler au milieu des invités, comme s'il cherchait quelqu'un ; et la foule s'écarta sur son passage, comme si chacun craignait d'être pris à parti.

– Aucun de nous n'a répondu à cet appel, poursuivit-il en pivotant sur lui-même. Non, pas une grande famille de sorciers n'a daigné rejoindre Vous-Savez-Qui. Et pourquoi l'aurions-nous fait ? Nous sommes si bien installés dans nos petites vies, tellement enfoncés dans notre quotidien... Alors, pourquoi prendre le risque de côtoyer un dangereux criminel ?

Dans l'assemblée, les convives échangeaient des regards inquiets.

– Mes chers amis, j'ai le regret de vous dire qu'en commettant cette terrible erreur, nous avons tous renié notre héritage, dit Lucius.

Il fit une courte pause pour donner de l'effet à cette lourde accusation.

– Depuis toujours, nous autres sorciers vivons reclus dans l'ombre, dans des pays occupés par les Moldus, gouvernés par eux et délimités par leurs stupides frontières ; depuis toujours, nous sommes pourchassés sans relâche, condamnés à une existence secrète, parfois même emprisonnés pour avoir montré notre vrai visage... À la merci de ces parasites, forcés de supporter leurs mœurs en tout point inférieures aux nôtres...

Autour de lui, les regards étaient fixes, quelques bouches entrouvertes ; ses paroles imprégnaient les esprits comme du mauvais alcool. Ses formules vides coagulaient l’ambition des plus jeunes et la nostalgie des plus âgés ; elles agrégeaient toutes leurs petites frustrations, leur peignaient une révolution glorieuse qui remplacerait avantageusement leur quotidien morose...

– Qui, parmi vous, n'a jamais rêvé de traverser le ciel en balai, en plein jour, sans avoir le Ministère à ses trousses ? Qui n'a jamais rêvé de sortir de chez soi sans être obligé de porter ces ridicules vêtements moldus ? Qui n'a jamais souhaité abolir toutes ces règles qui nous entravent ? Qui n'a jamais questionné l'absurdité de cette situation, où cette vermine moldue évolue librement sans que personne ne lui demande de rendre des comptes, pendant que nous, nobles et puissants sorciers, sommes contraints de leur céder le pouvoir ?

Evan Rosier, Balderic Parkinson et Damian Nott acquiesçaient bruyamment, tout en donnant des petits coups de coude à leurs voisins pour les impliquer davantage.

– Alors, mes amis, où est passée la fierté d'être sorcier ? N'en avez-vous pas assez d'être écrasés par le carcan des lois, toujours plus nombreuses, et toujours au service des Moldus ?

– Si ! hurla Evan Rosier, faisant sursauter ses voisins.

– Plus qu'assez ! renchérit Balderic Parkinson.

– N'en avez-vous pas assez ? répéta Lucius en ouvrant les bras.

– Si ! répondirent de nombreux sorciers.

Lucius hocha la tête, satisfait, et remonta sur l'estrade qui se trouvait à côté de la cheminée. Narcissa sentait le regard inquiet de Daisy l'interpeller, mais elle refusait d'y répondre. Elle aperçut Vera et Fergus se glisser vers la porte de sortie, pour constater que celle-ci était verrouillée.

– Et pourtant, quand Vous-Savez-Qui nous a proposé de se joindre à lui pour mettre fin à cette insupportable situation, nous avons tous fait la sourde oreille... Mais pourquoi, mes amis ? Pourquoi ? Par paresse ? Par mépris pour les truands qui se trouvaient déjà à ses côtés, et que certains d'entre nous surnomment les Embrumés ?

On entendit quelques grognements hostiles, provenant des silhouettes masquées aux manteaux râpés.

– Et nous voilà, deux partis qui gagneraient à coopérer, mais qui n’y parviennent pas…

Au fur et à mesure que Lucius développait son discours, les silences se faisaient plus denses dans l’assemblée, les murmures plus intenses quand une révélation frappait les esprits. Comme tout cela était surprenant ! Deux clans de Sang-Pur, tous cousins, qui poursuivaient le même but, mais qui, séparés par la grandeur de leur fortune et la qualité de leurs habits, n'avaient jamais été capables de s'allier...

– Aujourd'hui, Vous-Savez-Qui nous tend à nouveau la main, dit Lucius avec un geste rassurant. Il nous pardonne notre lenteur d'esprit et nous offre une seconde chance. Et je crois, mes amis, qu'il est temps de s'en saisir. Car la seule solution pour que les Moldus nous respectent enfin, c'est d'abolir cette frontière entre nous, les Collinards, et ceux que nous appelions les Embrumés ! La seule solution, c'est l'union de tous les Sang-Pur contre le fléau qui nous menace !

– Oui !

– Il a raison !

– Car ce que nous voulons tous, c'est que justice nous soit rendue ! Et puisque le Ministère ne s'en soucie pas, nous allons la rendre nous-même ! dit Lucius en brandissant son poing serré.

– C'est ça !

– Parfaitement !

– Ce que nous allons entreprendre, certains en avaient parlé, des centaines de fois ; mais jusqu’ici, personne ne l’avait jamais fait ! Et le temps est venu ! Car la magie est puissance, la magie est sagesse ! Laissons-la éclater au grand jour, et construisons une nouvelle ère ! Un nouveau monde, pour nous, les sorciers ! Un nouveau rêve, où nous serons enfin libres ! Où nous n’aurons plus jamais à nous cacher, où nous ne serons plus jamais punis à cause de ces satanés moldus !

Lucius éleva le bras, et tendit la main vers la mezzanine :

– Et voilà celui qui nous va nous aider à le réaliser !

Tous les regards suivirent son geste. Avant que les convives n'aient pu l'observer suffisamment, Voldemort disparut dans une énorme traînée de fumée noire qui décolla de la mezzanine, vola au-dessus des têtes, et atterrit aux côtés de Lucius. Narcissa sentit Daisy lui saisir le poignet, mais elle se dégagea fermement ; et Bellatrix se leva de son siège, les mains jointes, au comble de l'excitation.

La silhouette de Voldemort apparut au milieu des volutes ; il adressa un signe de tête approbateur à Lucius, puis se tourna vers les convives et s'approcha du pupitre.

– Bonsoir, mes chers amis, dit-il de sa voix doucereuse, aiguë et sifflante.

Dans la salle, les lumières vacillèrent un peu.

– Mes alliés et moi-même sommes ravis de vous compter parmi nous, poursuivit-il. Vous vous demandez peut-être où sont mes partisans ; eh bien, vous serez surpris d'apprendre qu'ils se promènent parmi vous depuis le début de la soirée...

Et d'un même geste, toutes les silhouettes aux manteaux sombres et râpés passèrent leur baguette devant leur visage, et leurs masques se volatilisèrent. Corban Yaxley, Antonin Dolohov, Thorfinn Rowle, Rodolphus et Rabastan Lestrange, Fenrir Greyback, Macnair, Travers, Gibbon, tous exposèrent leurs visages hostiles et striés de cicatrices aux regards des autres Sang-Pur qui s'écartèrent, tous horrifiés. La vision de tous ces hideux personnages fit aussitôt retomber l'enthousiasme général. Dans la foule, quelqu'un laissa échapper un petit cri ; et pendant plusieurs secondes, aucun mot ne fut prononcé.

La salle était alors scindée en deux : les familles fortunées d'un côté, qui regardaient avec crainte et dégoût le petit groupe d'hommes et de femmes vêtus de noir qui se trouvaient à l'autre bout de la pièce.

Le son qui perça le silence fut le claquement des talons d'Evan Rosier sur le sol de la salle de bal. Celui-ci s'avança d'un pas tranquille, dominant la foule de sa haute taille, roulant ses épaules bien sculptées sous son pardessus turquoise. Il s'avança vers le groupe d'Embrumés et tendit la main à celui qui lui semblait le moins intelligent.

– Bonjour, mon brave, dit-il avec amabilité.

Le petit homme replet parut intimidé par autant de grâce ; hypnotisé, il tendit la main et serra celle d'Evan Rosier, la bouche entrouverte, sous le regard désapprobateur de Corban Yaxley.

Balderic Parkinson s'avança à son tour :

– Vous êtes un modèle pour nous tous, dit-il d'une voix forte. Notre alliance nous sera profitable, j'en suis certain !

Et Damian Nott les imita, en rejetant ses longs cheveux noirs et lisses en arrière.

– C'est un honneur de faire votre connaissance, dit-il en s'avançant vers Travers. La famille Nott se réjouit de faire alliance avec vous.

Peu à peu, l'atmosphère se détendit, et l'espace qui se trouvait entre les deux clans s'amenuisa. Voldemort en profita pour reprendre la parole :

– Évidemment, si certains refusent de se joindre à nous, je le comprendrai tout à fait, dit-il d'une voix doucereuse. Vous pouvez partir dès maintenant, je ne vous en tiendrai pas rigueur...

Quelques familles s'entreregardèrent timidement.

– Et pour être certain qu'il ne vous arrive rien sur le chemin du retour, mon homme de main, Fenrir Greyback, se fera un plaisir de vous raccompagner chez vous...

Corban Yaxley tapa sur l'épaule de l'intéressé ; celui-ci eut un large sourire pour laisser l'assemblée apprécier la longueur de ses dents pointues, ses ongles jaunes et crochus, et ses petits yeux noirs enfoncés dans leurs orbites. En voyant cela, ceux qui semblaient hésitants se ravisèrent immédiatement.

– Parfait, conclut Voldemort en voyant que personne ne bougeait d'un millimètre. Le vieil elfe de maison que vous avez peut-être aperçu tout à l'heure va passer parmi vous avec une sacoche, et si vous le souhaitez, vous pourrez lui donner quelques pièces ou quelques-uns de vos bijoux, afin de participer au financement de cette guerre qui s'annonce victorieuse.

Sur ces mots, il recula et laissa Lucius s'approcher du pupitre.

– Mes amis, nous voilà en guerre contre les Moldus, annonça-t-il avec un grand sourire conquérant. Nous nous apprêtons à rentrer dans l'Histoire. Ainsi unis, aucun obstacle ne sera de taille à nous arrêter ! Ensemble, nous marcherons vers la victoire, et ensemble, nous gouvernerons le monde ! Alors...

Il leva bien haut sa coupe en cristal.

– Que la fête commence !

Tout le monde applaudit avec enthousiasme, et alors que l'orchestre d'instruments magiques se mettait à jouer, Narcissa osa enfin se tourner vers Daisy, qui n'avait pas cessé de la regarder pendant tout le discours, et qui était absolument atterrée.

– Cissy, dit-elle simplement, mais qu'est-ce que vous avez fait ?

Elle était plaquée sur son siège, le souffle court, et toute trace d'allégresse avait disparu de son visage.

– Je vais t'expliquer, lui dit Narcissa.

Daisy secoua la tête, les larmes aux yeux.

– Il n'y a rien à expliquer, Cissy ! Comment as-tu pu...?

– Non, écoute-moi ! Tu as bien entendu Piscus Crabbe, l'autre jour ! Tous ces gens auraient rejoint Voldemort, quoiqu'il arrive ! Piscus Crabbe avait déjà commencé à les convaincre ! Nous l'avons tout simplement devancé, mais ça n'aurait rien changé... Et puis, Abraxas rabaissait constamment Lucius, je ne pouvais plus le supporter ! Je voulais lui montrer de quoi nous étions capables, sans lui... Et Piscus Crabbe, et Orion, tu as vu comment ils parlaient de mon père ? Nous ne pouvions pas les laisser prendre le pouvoir à notre place ! Nous avions le choix : participer au combat, ou la subir de plein fouet, voilà tout !

Au lieu de se détendre, Daisy parut encore plus effrayée.

– Cissy, enfin, c'est la guerre ! Ce n'est pas un jeu ! On ne pactise pas avec des êtres aussi maléfiques simplement pour se venger, ou pour imposer le respect !

– J'avais aussi peur pour Bellatrix, plaida Narcissa.

– Eh bien, tu aurais dû parler de cette impossible situation à quelqu'un de compétent ! Je ne sais pas, au Ministère, par exemple, ou à l'Hôpital Sainte-Mangouste, que sais-je !

À ces mots, le visage de Narcissa se ferma, et Daisy comprit immédiatement quelle erreur elle avait commise.

– Le Ministère a voulu emprisonner mon père, alors qu'il était innocent, dit Narcissa d'une voix glaciale. Et l'Hôpital Sainte-Mangouste a fait semblant de soigner ma mère pendant des années, tout ça pour continuer de nous vendre ces fichues fioles à prix d'or ! Ils nous ont ruinés, ils nous ont contraint à la soumission, et tu voudrais que je leur livre ma sœur, la seule famille qui me reste ?

– Cissy...

– Lucius est la seule personne qui m’ait jamais aidée, décréta Narcissa, dans le simple but d'être blessante. Je n'ai confiance qu'en lui.

Derrière le loup orange de Daisy, son visage se ferma également.

– Très bien, dit-elle. Dans ce cas, je te laisse avec tes nouveaux amis.

Au moment où elle se levait, ses deux parents étaient en train de s'approcher. En voyant le manteau de fourrure de Vera Goyle, son ravluk Albert posé sur son épaule et son cerbère nain qui se frottait à ses jambes, Narcissa sentit sa gorge se serrer.

– Félicitations, lui dit sombrement Vera. Vous avez fait entrer le chat dans la cage aux lutins.

Dans sa voix, l'inquiétude prenait encore plus de place que la colère.

– Je commence à avoir chaud, murmura Fergus Goyle derrière elle.

Contrairement à Vera, il ne semblait pas en colère, simplement absent. Face à eux, Narcissa resta obstinément silencieuse. Elle avait l'impression d'être une enfant que l'on grondait.

– Partons immédiatement, soupira Vera. Fergus va se trouver mal. Bonne soirée, Narcissa. Nous reparlerons de tout cela plus tard... Si tu acceptes de nous revoir.

Et, Prunnas ayant rouvert la porte, elle entraîna son mari et sa fille vers l'extérieur. Narcissa les suivit des yeux pendant qu'ils s'éloignaient, et lorsqu'ils eurent disparu derrière la porte d'entrée, elle saisit sa coupe de champagne et la but d'un trait.

Dès que les Goyle eurent franchi la porte d'entrée, Daisy se réfugia dans les bras de sa mère.

– Je ne comprends pas ce qui lui a pris, soupira Daisy en secouant la tête.

– Le chagrin et la solitude nous poussent parfois à des extrémités difficilement imaginables, lui répondit Vera en passant un bras autour de ses épaules.

Fergus, qui était à quelques pas, sembla s'éveiller brutalement et approuva avec énergie.

– C'est de vous, Vera chérie ? Je n'ai jamais entendu quelque chose d'aussi vrai. C'est précisément la raison pour laquelle j'ai décidé de ne jamais être malheureux.

Vera et Daisy sourirent, et Vera caressa la joue de son mari, qui faisait vingt bons centimètres de moins qu'elle.

– Vous n'auriez pas dû venir, mon cher Fergus. Avec votre santé fragile, vous auriez pu faire un malaise.

– Ne vous en faites pas, assura Fergus. Je me sens déjà beaucoup mieux.

Un gros bruissement de feuilles au bas des marches du perron interrompit ce moment de tendresse. Leurs regards convergèrent vers le buisson que leur cerbère nain était en train de réduire en charpie.

– Ça alors, Attila ! s'exclama Fergus Goyle. Ne fais pas ça, tu pourrais te planter une épine dans le palais !

Et il se précipita pour arracher les trois mâchoires du cerbère du bosquet de roses qu'il était en train de ravager. Vera et Daisy, quant à elles, longèrent machinalement le mur du manoir jusqu'aux grandes fenêtres à croisillons qui donnaient sur la salle de bal, et se penchèrent discrètement pour y jeter un œil sans être vues. Au milieu des convives qui se donnaient l'accolade, elles aperçurent Narcissa assise à sa table, à côté de Bellatrix qui applaudissait avec enthousiasme. Narcissa fixait intensément ses mains croisées devant elle, et jetait parfois des regards furtifs à la chaise vide que Daisy venait de quitter, ou à la porte que les Goyle venaient de franchir.

– Le plus raisonnable serait de tous les dénoncer au Ministère, remarqua Daisy.

Vera hocha la tête, accablée.

– Oui... Oui, c'est ce qu'il conviendrait de faire, en effet.

Dans la salle de bal, elles virent Narcissa saisir une bouteille de champagne et se resservir un verre, les yeux brillants.

– Mais nous n'allons pas le faire, soupira Daisy. Pour ne pas mettre Cissy et Edgar en danger. N'est-ce pas ?

Vera acquiesça et déglutit avec difficulté. Elle se détourna et leva les yeux vers le ciel encombré de nuages noirs.

– Si Lulu voyait ça, murmura-t-elle.

Daisy lui prit la main.

– Ne t'en fais pas, Maman. Je suis sûre que Narcissa finira par réaliser qu'elle s'est trompée.

– Oui, sans doute... Il ne nous reste plus qu'à espérer que cela arrive avant qu'il ne soit trop tard.

Dans un silence pesant, les trois Goyle s'éloignèrent et disparurent dans l'obscurité.

 

Quelques minutes après le départ des Goyle, deux autres invités quittèrent la fête – et ils n'étaient pas de meilleure humeur que les premiers déserteurs. Piscus Crabbe était le plus furieux des deux, et ne cachait pas son mécontentement :

– Satanés Malefoy ! tonna-t-il. Si seulement mes fils avaient rencontré Tu-Sais-Qui avant Lucius... Nous serions actuellement dans ma maison, ce seraient mes fils qui auraient prononcé ce discours, ce seraient eux qui auraient récolté tous les honneurs, et qui seraient en train de serrer la main de Tu-Sais-Qui en ce moment ! Ah, cette crapule d'Abraxas... Quand je pense que je lui ai servi mon ingénieuse stratégie sur un plateau ! L'idée de leur offrir un repaire, d'allier nos deux clans... Tout est de moi ! Quand je pense qu'il prétendait ne pas être intéressé par Tu-Sais-Qui ! Quand je pense que Lucius a indiqué une fausse rumeur à mes fils pour les envoyer dans le nord du pays ! Ils nous ont bien roulé, ces enflures ! Mais ils le regretteront... Oui, ils le regretteront ! Mes fils auront la peau de ce Lucius, et moi, j'aurai la peau de son père !

Orion, à côté de lui, n'écoutait pas un mot des menaces de Piscus Crabbe. En descendant avec difficulté les marches du perron de marbre noir, il tourna son petit buste raide et bancal vers les tourelles du manoir des Malefoy, et laissa ses pensées dériver vers d'autres tourelles – celles de Poudlard. Si Voldemort appréciait les jeunes gens riches et ambitieux, Orion avait quelqu'un à lui présenter. Quelqu'un qui pourrait lui plaire, peut-être encore davantage que ce freluquet de Lucius Malefoy... Quel âge avait Regulus, déjà ? Treize ans, quatorze ans ? Quatorze ans, ça n'était pas si jeune après tout, il devait déjà être en train de devenir un homme...

 

Dans la salle de bal, le champagne coulait de nouveau à flot dans les coupes en cristal. Les invités s'étaient débarrassés de leurs masques incommodes et Abraxas Malefoy était parti se coucher, lassé de les voir saccager son superbe parquet. Narcissa était encore en train de penser à Daisy et à Vera quand Lucius vint se laisser tomber sur la chaise que Bellatrix venait d'abandonner pour aller prendre part aux duels qui s'organisaient dans le jardin.

– Tu n'as pas l'air dans ton assiette, lui dit Lucius en lui prenant la main.

– Ce n'est rien, répondit-elle. Je me suis un peu disputée avec Daisy... Et je crois que j'ai bu trop de champagne...

Lucius se pencha vers elle et lui embrassa la main. L'odeur de son souffle indiquait qu'il avait bu au moins autant de champagne qu'elle. Après le succès de son discours, ses yeux brillaient d'excitation et de fierté ; mais malgré tout, il fit un effort pour réconforter Narcissa avec sérieux.

– Tu sais, Narcissa... Je sais à quel point tu l'apprécies, mais... Je pense que malgré toute sa bonne volonté, Daisy ne te comprendra jamais totalement. Elle ne sait pas ce que c'est, elle, de devoir grandir avec l'absence de sa mère et le mépris de son père.

Narcissa acquiesça, la gorge serrée.

– Quand je t'ai rencontrée, j'ai senti tout de suite que nous avions quelque chose d'important en commun, mais j'ai mis longtemps à comprendre quoi, poursuivit Lucius. Et aujourd'hui, je sais que ce sont nos deux solitudes nous ont poussé l'un vers l'autre, et qu'elles continuent de nous lier... Et nous allons leur montrer, tous les deux, ce que nous valons vraiment, acheva Lucius en désignant d'un geste du bras l'ensemble des invités qui ouvraient leurs bourses pour les vider dans la sacoche que Prunnas leur présentait.

Narcissa sourit, et posa sa tête sur son épaule ; mais elle n'en était pas rassurée pour autant.

– C'est vrai, tu as raison... Mais tout de même, je ne peux pas m'empêcher de penser... Et si nous étions en train de faire fausse route ? Et si nous réalisions, un jour, que nous nous sommes trompés sur toute la ligne ?

Lucius se retourna à demi vers les invités, qui commençaient à être sérieusement ivres. Il ne semblait pas croire une seconde que cela puisse se produire.

– Dans ce cas, nous nous tromperons ensemble, dit-il avec un petit gloussement, comme s'il ne pouvait rien imaginer de plus excitant.

Narcissa passa une main dans la nuque de Lucius, où ses cheveux blonds étaient trempés de sueur. À ses côtés, elle ne se sentait pas toujours heureuse, mais elle se sentait enviée, puissante et en sécurité ; et après tout ce qu'elle avait traversé, elle décida de s'en contenter, même si cela impliquait de participer à cette guerre dont l'enjeu la dépassait complètement, et même si cela devait froisser Daisy et Vera.

– Ça me convient, conclut-elle en l'embrassant. Au fait, je ne t'ai pas félicité pour ton discours... Tu as été parfait.

Le sourire de Lucius s'élargit.

– Merci... Je t'ai regardée tout du long. Si tu n'avais pas été là, je me serais enfui en courant ! Grâce à toi, Tu-Sais-Qui est absolument ravi de nos services.

– Je ne le vois plus... Il est parti ?

– Oui, ça n'est pas un grand boute-en-train... Bon, on va faire la fête ?

Un peu revigorée, Narcissa se laissa entraîner par Lucius au milieu des convives. Dans la salle de bal, les invités dansaient avec énergie ; debout sur l'immense table ouvragée, Parkinson faisait couler du champagne sur une pyramide de coupes en cristal ; MacNair et Travers organisaient un duel de serpents, et des invités surexcités pariaient sur leur favori en jetant des poignées de gallions sur le sol ; Rodolphus et Rabastan Lestrange fouillaient les capes brodées accrochées sur le porte-manteau ambulant, et empochaient tout ce qu'ils y trouvaient ; près du buffet, Burton échangeait des flasques de Bigoliard et de Têtournis contre des bagues ou des boutons de manchette ; Thorfinn Rowle vendait des Fumobecs à tous ceux qui étaient ravis de se débaucher de la sorte ; Prunnas passait entre les jambes des invités avec une sacoche pourvue d'un puissant Sortilège d'Extension, et Evan Rosier marchait à côté de lui, houspillant les danseurs pour qu'ils fassent la plus généreuse donation possible.

– Allez, allez, mes amis ! Pour financer notre lutte, aucun sacrifice n'est trop grand ! Regardez, j'ai donné ma montre, et Nott sa chaîne en or ! Je vois de jolies pierres précieuses qui ne m'ont pas encore été confiées... Pensez à tous les Aurors que nous allons pouvoir corrompre, grâce à cette fortune ! Pensez à la victoire qui nous attend ! Merci, monsieur, merci... Et madame, là-bas, puis-je vous demander votre diadème ? Il ne vous est pas vraiment utile, et il jure avec la couleur de vos yeux... Ah, vous voilà enfin raisonnable !

L'état des invités faisait de plus en plus honte à voir. La musique semblait ne jamais s'interrompre, et Narcissa avait l'impression de voir les choses se dérouler au ralenti. Elle était à la fois fascinée et effrayée par la puissance de l'hystérie collective qui s'emparait de la foule, par le renoncement de la raison qui s'opérait. Elle se blottit contre Bellatrix plusieurs fois, dès qu'elle en avait l'occasion.

– Tu es ivre, Cissy, lui dit Bellatrix alors que celle-ci l'étreignait pour la dixième fois.

– Peut-être, marmonna-t-elle en resserrant encore davantage son étreinte.

Vers le milieu de la nuit, Evan Rosier fit monter Lucius sur la table, à la vue de tous.

– Mes amis ! Écoutez-moi ! cria-t-il d'une voix mal articulée.

La musique diminua en intensité, et les danseurs se tournèrent vers les deux jeunes hommes blonds qui étaient debout sur la longue table ouvragée.

Evan Rosier désigna Lucius :

– Voilà notre champion ! Celui que nous attendions tous ! L'étoile qui nous guidera jusqu'à la victoire, aux côtés du Seigneur des Ténèbres !

Evan Rosier brandit une couronne sertie de pierres précieuses qu'il avait trouvée dans une des innombrables pièces du manoir ; Lucius s'agenouilla devant lui, les bras écartés, et tout le monde éclata de rire. Au milieu de la frénésie des convives, Narcissa avait du mal à respirer.

– Voilà pour toi, dit Evan Rosier en posant la couronne sur les cheveux blonds de Lucius.

Et quelques invités se prosternèrent à leur tour, dans un concert d'applaudissements déchaînés.

 

Lorsque les derniers invités quittèrent le manoir, aux premières lueurs de l'aube, Lucius et Narcissa restèrent sur le perron à leur faire de grands signes, puis retournèrent dans la salle de bal, où le sol était jonché de gallions, de verres brisés, de morceaux de citrouilles éclatées, de confettis dorés et de cadavres de bouteilles qui flottaient dans des flaques de champagne. Dans un coin, le vainqueur du duel de serpents déchiquetait de ses crochets la dépouille du perdant ; et dans le fond de la pièce, l'orchestre magique continuait de jouer avec énergie.

Lucius et Narcissa étaient complètement ivres, d'autant plus qu'ils avaient pris soin de boire une dernière coupe avec chacun des invités, afin que chacun quitte le manoir avec un sentiment d'importance.

– Quelle soirée ! Et quelle bande d'idiots ! s'esclaffa Lucius en refermant derrière lui les portes de la salle de bal.

Il se laissa tomber sur une chaise, et imita un invité en train de l'acclamer :

– Oui ! Oui ! Il a raison !

Puis il secoua la tête, hilare.

– Si j'avais su qu'ils seraient si faciles à manipuler, j'aurais fait tout ça depuis longtemps...

Narcissa s'écroula sur ses genoux, car elle peinait à tenir debout. Lucius l'attira contre lui et l'étreignit avec force ; puis il attrapa sur la table la couronne sertie de pierres précieuses qu'Evan Rosier avait posé sur sa tête pendant la soirée, et la posa sur celle de Narcissa.

– Elle te va bien aussi, dit-il avec amusement.

Narcissa caressa le métal froid et les pierres précieuses qui cerclaient son front. Le succès faisait briller les yeux pâles de Lucius ; ils étaient tous les deux trempés de sueur, ils avaient les joues rouges et le cœur battant.

– Tout ça pour un discours, haleta-t-elle.

– Mais quel discours !

– C'est vrai... J'ai beaucoup aimé ta petite envolée lyrique, à la fin... Construisons une nouvelle ère ! Un nouveau monde, pour nous, les sorciers ! s'exclama-t-elle en imitant sa voix pompeuse et ses gestes grandiloquents.

Un nouveau rêve, où nous serons enfin libres ! rit Lucius en articulant approximativement.

Narcissa éclata de rire et se blottit contre lui.

– Quelle soirée, soupira-t-elle.

Lucius l'embrassa sur le sommet de la tête et lui caressa doucement le dos. Ils restèrent enlacés sur le siège pendant de longues minutes, tous les deux songeurs.

– Attends, dit soudain Lucius. J'ai une idée...

Il se mit à remuer, et voulut se lever. Alors que Narcissa, étourdie, se rasseyait sur la chaise la plus proche pour ne pas tomber, Lucius marcha à grands pas vers un coin de la pièce, suivant une trajectoire dont la rectitude laissait à désirer. Tout en essayant de maintenir sa tête droite, Narcissa vit Lucius s'emparer de la sacoche de cuir dans laquelle Prunnas avait récolté les donations des invités.

– Regardons un peu tout ce que ces crétins nous ont donné, ricana-t-il en soupesant le sac avec un air satisfait.

Avec agilité, il monta debout sur une des chaises, puis sauta à pieds joints sur la longue table ouvragée qui se trouvait au milieu de la pièce.

– Prête ? demanda-t-il en brandissant la sacoche de cuir tendue à exploser.

Affalée sur sa chaise, Narcissa répondit par un petit rire. Lucius retourna la sacoche, et immédiatement, un torrent de gallions et de bijoux se déversa sur la table, dans une quantité telle que le tas d'or commença à glisser vers le sol, et Lucius dut se déplacer sur la table pour répartir leur trésor.

Narcissa renversa sa tête en arrière, radieuse, et eut l'impression que le lustre de cristaux scintillants suspendu au-dessus de sa tête brillait encore plus qu'à l'accoutumée. Elle sourit encore plus largement et ferma les yeux, s'abandonnant un instant à la léthargie qui s'emparait d'elle.

– Narcissa ! Viens ! appela Lucius.

– J'arrive, répondit-elle à mi-voix, baignée dans la lumière étincelante du gigantesque lustre de cristal.

Elle entendit des raclements de chaises, puis des bruits de pas qui se rapprochaient d'elle. Au moment où elle ouvrit les yeux, Lucius était en train de se pencher sur elle, et il l'embrassa dans le cou.

– Lucius ! rit Narcissa.

– Viens ! répéta Lucius en la tirant par la main.

Narcissa se leva en tanguant un peu et se laissa entraîner vers la table couverte de pièces d'or.

– Les invités se sont battus pour donner le maximum, gloussa Lucius. Viens voir, il y a de vraies merveilles...

Un peu hébétée, Narcissa essuya son front et ses tempes ruisselants de sueur.

– Tu-Sais-Qui n'aura peut-être pas besoin de tout ce trésor, dit Lucius en lui passant au poignet un bracelet serti de pierres précieuses. Après tout, c'est grâce à nous qu'il l'a obtenu...

Et ils s'affublèrent en riant des plus beaux bijoux qu'ils trouvaient. Lucius n'avait jamais été aussi exalté, aussi rayonnant ; quant à Narcissa, elle ne savait plus très bien où elle en était. Autour d'elle, la lumière jaillissait de tout ce qu'elle regardait : du lustre de cristal, des flaques de champagne répandues sur le sol, de la chevelure blonde de son mari, de ses yeux pâles, de ses bijoux étincelants, du trésor étalé sur la table ; dans le fond de la pièce, l'orchestre magique semblait jouer de plus en plus vite, et son cœur, dans sa poitrine, battre de plus en plus fort. Une excitation obscure montait en elle, avec une intensité croissante.

Sans vraiment s'en rendre compte, ils s'allongèrent sur la table et s'enlacèrent étroitement, faisant tomber une cascade d'or qui carillonnait en ricochant sur le sol ; et au moment où Lucius descendait ses mains le long de ses hanches, Narcissa lui échappa et descendit de leur estrade improvisée.

– Reviens, souffla Lucius.

Narcissa répondit par un éclat de rire, et, portée par une envie inexplicable, elle se mit à courir vers la porte dérobée qui se trouvait dans un coin de la pièce.

– Hé ! Reviens !

Alors qu'elle franchissait la porte, elle entendit Lucius se lancer à sa poursuite.

– Ah, tu veux jouer à ça ? gloussa-t-il. Tu vas voir... Attends un peu, que je t'attrape !

Ils parcoururent le manoir en long, en large et en travers, se cachant dans des alcôves pour s'effrayer mutuellement, se cognant dans les murs en riant aux éclats et en s'embrassant fougueusement à chaque fois que l'un rattrapait l'autre. Ils n'avaient jamais autant ri, ils ne s'étaient jamais sentis aussi puissants, aussi intensément vivants.

– Nous allons être les rois du monde ! criait Lucius en lui courant après.

Au détour d'un couloir, Narcissa fit tomber sur le sol un vase en porcelaine finement travaillée, et il se brisa en morceaux ; elle s'arrêta aussitôt de rire et s'appuya sur le mur, catastrophée. Lucius regarda fixement les morceaux de vase pendant quelques instants ; puis, afin de signifier à Narcissa que le vase sublime n'était qu'une babiole insignifiante dans leur fortune extraordinaire, il donna un coup dans le vase jumeau, qui se trouvait juste en face, et qui subit le même sort que le premier. Il éclata de rire, rapidement imité par Narcissa, de nouveau grisée.

De retour dans le splendide hall d'entrée, Lucius la porta dans l'escalier, tombant à la renverse à plusieurs reprises – mais cela ne les fit rire que davantage. Ils rejoignirent l'aile Ouest en titubant, et, dans le couloir qui menait à leur chambre, ils se retirèrent mutuellement leurs vêtements en les arrachant à moitié, à la fois par désir et par maladresse ; puis ils se jetèrent sur le lit et firent longuement l'amour, pressant et caressant leurs peaux moites, s'embrassant et se mordillant, ivres de champagne et d'allégresse.

Dehors, le jour se levait lorsqu'ils ils s'endormirent, étroitement enlacés et le sourire aux lèvres, sans s'inquiéter un seul instant de leur propre malfaisance, ni de la cruauté de celui qui tenait désormais leur destin entre ses mains.


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