Promesse de sang

Harry grommela vaguement avant de secouer la tête, l’air têtu. 

— Je veux te retirer ce truc ! Bon sang, Drago ! À l’instant où il apprendra que tu as disparu avec moi, il tentera de te blesser à travers la marque ! Je refuse de le regarder te rendre fou de douleur !

Drago écarquilla les yeux en fixant Harry, comprenant que le jeune homme s’inquiétait à ce point pour lui. Il se tortilla inconfortablement, mal à l’aise, Harry toujours perché sur ses genoux. 

— Je devrais être satisfait que tu sois autant préoccupé par ma sécurité, mais… je ne peux pas te laisser faire n’importe quoi. Tu imagines les risques pour toi ? Je veux dire… ça pourrait changer les choses et…

Harry l’arrêta d’un rire désabusé. Le regard vert fixé sur Drago était plein de tendresse, comme une caresse. Il murmura, à mi-voix.

— Drago… je n’ai rien de spécial. Je suis juste né au mauvais moment et c’est le sacrifice de ma mère qui m’a permis de survivre. J’aurais pu… devenir un sorcier puissant en étant entraîné depuis tout petit, mais j’ai grandi dans le monde moldu et même encore maintenant, je me rends compte à quel point je suis ignorant au sujet du monde magique. Je n’ai aucune connaissance supplémentaire, rien qui fasse de moi quelqu’un de meilleur qu’un autre, alors je refuse de… te laisser en danger. Tu es plus important pour moi que ce rôle de… symbole.

Les sourcils froncés, Drago protesta.

— Mais… la rumeur parmi les Mangemorts dit que tu as un pouvoir caché. Et tu es un sorcier puissant, quoi que tu puisses dire. Il suffit de voir comment tu t’es débrouillé face à ce foutu dragon en quatrième année ! Rien que ça prouve que tu n’es pas juste un adolescent comme les autres…

Harry haussa les épaules.

— La prophétie dont Dumbledore n’arrête pas de parler mentionne effectivement un pouvoir que Voldemort ignore à mon sujet, mais je ne sais pas ce que c’est. Je sais que nos baguettes sont jumelles, elles possèdent toutes les deux une plume du même phénix. Pour le reste… ce ne sont que des suppositions.

Drago se crispa, ses doigts se serrant sur la taille de Harry, le faisant grimacer d’inconfort. En s’en rendant compte, le Serpentard s’obligea à se détendre, mais il grogna, sans cacher sa colère.

— Tu veux dire que ce vieux fou t’envoie en première ligne sur la base de suppositions, sans même te donner les armes pour te défendre ? Tu ne peux pas savoir à quel point j’ai envie de réellement le tuer à cet instant !

Harry baissa la tête.

— Comme tu vois, je n’ai rien d’exceptionnel. Je fais juste ce que je peux, le plus souvent sans savoir exactement ce que je fais. J’ai conscience d’avoir peu de chances de m’en tirer, mais…

Drago grogna de nouveau, lâchant la taille de Harry pour attraper ses poignets, plongeant dans un regard vert tourmenté.

— Tu as plus que tu le penses. Cette promesse de sang, elle est une chose entre nous qu’il ignore. Tu te souviens ? C’était pour survivre aux dangers lorsque ça a été créé. Des compagnons d’armes. Ensuite, nous sommes ici pour une raison, non ? Nous n’avons même pas étudié le quart de cette bibliothèque et même si je dois y passer mon temps jour et nuit, je continuerai de chercher ! 

Harry leva un sourcil moqueur, le sourire revenant sur ses lèvres.

— Est-ce que tu cherches à me rassurer, là ?

Drago roula des yeux, puis il le força à se lever pour se lever lui aussi et s’étirer.

— Non. Je cite les évidences. Si je voulais te rassurer, je te dirais que tu as de la chance d’être lié à moi, parce que je suis doué dans ce que j’entreprends. 

Harry éclata de rire en croisant le regard satisfait de Drago. D’un pas plus léger, il se rendit jusqu’au rayonnage le plus proche et il en rapporta une nouvelle pile de livres, qu’il posa entre eux d’un geste théâtral.

- Ok. En attendant, j’espère ne jamais avoir à faire des recherches comme ça dans le futur. Je sais que je ne veux pas faire un travail où je devrais approcher des livres pleins de poussières et d’illustrations gerbantes. Même les potions ne sont pas aussi… dégoutantes et pourtant il y a tellement d’ingrédients ignobles…

Drago gloussa en lui adressant un petit clin d’œil.

— Petite nature. C’est particulièrement instructif de découvrir comment ôter l’œil de quelqu’un sans l’abîmer, non ?

Harry s’immobilisa, bouche ouverte. Puis il grimaça et secoua la tête.

— Malefoy. J’espère réellement que c’est une plaisanterie de mauvais goût et pas un côté psychopathe que tu m’aurais caché. Parce que je crois que c’est le truc le plus dégueu que tu aies jamais dit !

Drago ne put rester plus longtemps sérieux et il se mit à rire, les larmes lui montant aux yeux, tant il était amusé par l’expression de Harry. Son rire fut cependant coupé brusquement et il s’effondra, la main crispée sur son bras à hauteur de la marque des ténèbres, la bouche ouverte sur un hurlement muet, l’air horrifié. Il fut incapable de prononcer le moindre mot, l’air de ses poumons étant brusquement expulsé sous l’effet de l’ignoble douleur qui le frappait.

Le jeune homme se souvenait parfaitement de la douleur atroce qu’il avait dû endurer lors du marquage et il avait cru qu’il ne pouvait pas exister quelque chose de plus douloureux. Cependant, il avait eu tort. Il découvrait en cet instant que Voldemort pouvait infliger bien plus de douleur à travers ce tatouage ignoble.

Chaque nerf de son corps semblait être à l’agonie et il n’avait même plus la force de hurler tellement il souffrait. 

Il était tombé au sol, recroquevillé en position fœtale, essayant de ne pas devenir fou. Il avait l’impression que son bras était déchiqueté par des flammes invisibles, que chacun de ses muscles était malmené jusqu’à l’insupportable. Il n’était même pas certain de savoir comment respirer, parce que la douleur lui coupait le souffle et il suffoquait, haletant misérablement.

Au loin, il entendait des hurlements, mais il était bien trop préoccupé à tenter de survivre pour s’en inquiéter. Ses yeux roulèrent dans ses orbites et il songea brièvement que finalement, Voldemort avait été informé de sa défection et qu’il semblait décidé à le punir de sa trahison. 

Juste avant de plonger dans l’inconscience, Drago espéra de toutes ses forces que Harry allait bien et il regretta de ne pas avoir pu faire plus pour lui. L’image de ses yeux verts le fixant avec tendresse fut la dernière image avant que tout ne devienne noir.