Guérir ensemble

Chapitre 6

1349 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/09/2022 20:50

L’homme face à lui recula d’un pas après avoir laissé la petite dans les bras de son père et inclina à son tour la tête, un peu hésitant, mais sans la moindre agressivité. Il afficha un sourire en coin avant de le saluer.

   – Potter.



Harry cligna des yeux et son regard glissa sur le petit garçon aux côtés de Drago Malefoy. Il semblait de l’âge d’Albus et se tenait un peu en retrait, l’air timide, observant la scène avec curiosité. Lily se serrait dans les bras de son père et ne semblait pas le moins du monde perturbée par sa mésaventure. Visiblement, l’ancien Serpentard avait su la rassurer… et la charmer s’il en croyait les regards admiratifs que Lily lui lançait.


Ce fut probablement le sourire radieux de Lily qui le décida. Il vivait plutôt en ermite et ses enfants n’étaient pas vraiment à l’aise avec les inconnus. Le fait que sa princesse semble en confiance avec son ancien camarade de classe, celui qui avait été son rival pendant leur scolarité, le rendait curieux d’en savoir plus sur ce nouveau Drago Malefoy, sur ce qu’il était devenu durant toutes ces années.



Il sourit et il fit basculer Lily pour la tenir sur sa hanche, refusant de la lâcher — son cœur battait encore fort de la frayeur qu’il avait eue — puis il tendit la main avec un sourire un peu hésitant, mais cordial, sans cesser de le fixer, espérant que l’homme face à lui comprendrait et accepterait de laisser le passé derrière eux pour de bon.

Drago sembla surpris, une brève lueur indéfinissable passa dans ses yeux gris, puis il sourit aimablement et il saisit la main tendue.


Harry murmura, retenant sa main quelques instants de plus.   

   — Merci Malefoy. Merci d’avoir pris soin de ma fille et de me l’avoir ramenée. Si tu… as un peu de temps, on pourrait… prendre un verre ? Discuter un peu ?

Il put lire l’hésitation de Drago, mais ce dernier semblait assez intrigué pour céder à la curiosité. Après avoir dévisagé Harry, il hocha la tête lentement.

   — Pourquoi pas ? Ça fait longtemps qu’on ne s’est pas croisés… Une éternité.


Harry ferma un instant les yeux et vacilla légèrement avant de se reprendre. Durant une fraction de seconde, le souvenir de la bataille de Poudlard lui était revenu, comme s’il datait de la veille. Le feudeymon, Drago agrippé à lui, désespéré et sanglotant, avant de lui murmurer « bonne chance » d’une voix brisée. Puis, la dernière image de Drago, alors qu’il était enlacé par ses parents et qu’ils attendaient leur châtiment pour avoir appartenu au mauvais camp.


Ils n’eurent pas besoin de se concerter pour se diriger vers le Chaudron Baveur, marchant côte à côte en silence, Lily dans les bras de Harry entre les deux hommes et les deux jeunes garçons tenant la main de leurs pères respectifs.


Ils entrèrent et comme à son habitude, Harry prit garde de rester au maximum dans l’ombre, rabattant la capuche de sa robe sorcière sur sa tête. Drago nota son comportement, mais il ne fit pas le moindre commentaire. À la place, il murmura à son fils de rester avec son « ami » et il alla commander sans se préoccuper des regards méfiants qui suivaient sa progression dans l’établissement.


Harry sourit au petit garçon.

   — Je m’appelle Harry. Tu connais déjà Lily Luna et voici mon fils Albus Severus. Et toi ? Tu t’appelles comment ?

Le garçonnet lança un regard en direction de son père, puis il sourit doucement et murmura timidement.

   — Je m’appelle Scorpius.

   — Viens, on va s’installer à la table, juste dans le coin. On y sera tranquille.


Scorpius le suivit sans un mot, obéissant, et Harry installa les trois enfants avant de s’asseoir, face à la porte, prenant garde d’avoir le dos au mur.

Drago revint vers eux et se laissa tomber face à Harry, avec un sourire en coin.

   — Glace au chocolat pour les enfants et bièraubeurre pour les papas. Ça convient à tout le monde ?

Lily tapa dans ses mains avec un large sourire. Albus et Scorpius se contentèrent de glousser doucement, sans se quitter des yeux, curieux. Harry hocha la tête, approbateur, et il y eut un long silence alors qu’ils attendaient la commande.



Lorsque la serveuse déposa leurs consommations, les deux hommes attendirent quelques instants que les enfants soient occupés à dévorer leurs glaces. Puis, Harry soupira en passant nerveusement la main dans ses cheveux.

   — Alors, Malefoy. Qu’est-ce que tu deviens ?

Le blond haussa les épaules avec un sourire en coin.

   — J’ai validé ma maîtrise de potions il y a quelques années déjà. Je travaille à domicile, comme ça je peux m’occuper de mon fils. Et toi ?

Harry se mordilla la lèvre et gratta du bout de l’ongle une gravure usée sur la table de bois. Finalement, il souffla, essayant de cacher son amertume.

   — Auror. J’ai un poste de bureau pour avoir des horaires réguliers avec les enfants.


Leurs yeux se croisèrent et Drago se pencha soudain, pour chuchoter d’un ton pressant.

   — Bon sang, Potter… qu’est-ce qui se passe pour que tu sois aussi… démoli ?

Harry écarquilla les yeux, surpris, mais il ne chercha pas à nier. Il avait parfaitement conscience qu’il n’était pas au mieux de sa forme et il haussa les épaules.

   — Longue histoire.


Ils burent quelques gorgées en silence, se dévisageant mutuellement. Le regard de Harry glissa brièvement sur Scorpius qui ressemblait tant à son père et il posa la question qui lui brûlait les lèvres.

   — Tu es marié ?

Drago répondit, laconique.

   — Veuf.

Harry s’empourpra, un peu gêné, et balbutia une excuse, mais Drago le rassura immédiatement avec un haussement d’épaules nonchalant.

   — Ça fait quelques années maintenant. Ce n’était pas… enfin. C’était un mariage arrangé et nous étions… plus ou moins amis. Et toi, une madame Potter quelque part ?

   — Divorcé. Je suppose que ce n’était pas vraiment son truc la vie de famille. Ou je n’étais pas vraiment ce qu’elle espérait.


À leur côté, pendant que Lily dévorait sa glace, Albus et Scorpius faisaient connaissance sans se préoccuper des adultes, semblant se découvrir de nombreux points communs. Leurs pères buvaient leurs bièraubeurres, parlant de temps à autre de leurs souvenirs et de leurs vies actuelles, restant silencieux la plupart du temps, s’observant sans cesse comme si leurs yeux ne pouvaient pas se détacher l’un de l’autre. Ce n’était pas gênant, bien au contraire. Il y avait bien longtemps que Harry ne s’était pas senti aussi détendu avec quelqu’un, sans avoir à se méfier de chacune de ses paroles. Tout ça lui semblait naturel et c’était terriblement reposant de ne pas se tenir sur ses gardes…



Ils n’avaient jamais été amis autrefois, mais ils avaient assez de souvenirs en commun pour pouvoir relancer la conversation de temps à autre sans tomber dans des banalités malaisantes. Il y avait une certaine complicité innée entre eux, qu’ils n’avaient pas su découvrir lorsqu’ils étaient adolescents, et Harry se surprit à rire à plusieurs reprises de bon cœur, et à se sentir vivant, plus que jamais.




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