Secrets de Serpentard : La noble famille Black

Chapitre 26 : La victoire des Crabbe

3512 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2022 18:45

Narcissa, elle, ne se préoccupait absolument pas de Voldemort, ni des déboires du Hibou Jacasseur. En réalité, elle ne pensait qu'à ce qu'Andromeda lui avait dit, et à ce qu'elle allait pouvoir faire pour empêcher la catastrophe imminente de se produire. Car depuis l'affaire du Collier d'Opale, il était évident qu'elle ne pouvait plus compter sur leur père pour rétablir le prestige de leur famille : il était banni du Ministère, soumis aux ordres d'Orion qui ne cessait de le tourmenter. Bellatrix, elle, passait son temps en dehors de la maison, et se désintéressait totalement de leur famille ; et leur mère, évidemment, avait déjà du mal à tenir debout. Narcissa ne pouvait donc compter que sur elle-même et sur Andromeda pour tirer leur famille de ce mauvais pas.

Après leur échange expéditif à propos de Ted sur le quai du Poudlard Express, Andromeda avait envoyé des dizaines de lettres à Narcissa pour lui expliquer à quel point elle était attachée à ce jeune homme, et lui à elle ; elle suppliait sa petite sœur de lui répondre, de la comprendre, de la soutenir... Mais Narcissa était incapable de tout cela. Le moindre fait de lire le nom de Ted sur les lettres de sa sœur lui donnait la nausée.

En réalité, Narcissa avait une idée pour empêcher ce mariage, mais qu'elle se détestait d'avoir eue, car elle la jugeait absolument monstrueuse. C'était une idée qu'elle avait eue très vite, dès les premiers jours, en repensant à l'amoncellement des lettres d'Hector Crabbe sous le lit d'Andromeda. Dans un premier temps, Narcissa la chassa fermement de ses réflexions : Hector Crabbe était une brute sans esprit, il ne pouvait pas épouser Andromeda, c'était impensable ! Narcissa l'avait elle-même empêché d'importuner sa sœur, ça n'était certainement pas pour la jeter entre ses griffes quelques années plus tard !

Lucius, qui, pendant cette période, profitait de ce fameux complément d'apprentissage à l'école de Durmstrang, n'avait aucune idée de ce qui se tramait, et Narcissa se garda bien de l'en avertir. Il abreuvait Narcissa de lettres complaisantes et enthousiastes, louait la qualité des professeurs de Durmstrang, la beauté des glaciers environnants, les matières particulièrement intéressantes qu'il suivait – entre autres, les Sorts Impardonnables ou les exploits des grands mages noirs à travers les siècles – et surtout, il insistait bien sur ce point, la sélectivité de l'école, qui n'acceptait que des sorciers de Sang-Pur, ce qui, à son avis, était grandement profitable à l'apprentissage...

Environ une semaine avant les vacances de Noël, alors qu'elle n'avait trouvé aucune solution alternative, tout en relisant les lettres de Lucius qui vantait l'écrémage des élèves par Durmstrang, Narcissa fut saisie par une crainte subite et terrible : si Andromeda épousait Ted comme elle avait l'intention de le faire, Lucius resterait-il épris d'elle ? Après tout, la noblesse de leur famille jouait un rôle certain dans l'attirance que Lucius éprouvait pour elle. Si la famille Black se voyait déshonorée par un tel mariage, Lucius ne serait-il pas tenté de la mépriser, lui aussi, pour se tourner vers d'autres jeunes filles respectables qui ne demandaient que ça ?

Narcissa prit sa décision au beau milieu de la nuit, seule, acculée contre ses propres angoisses, poussée par la peur de l'abandon et du déshonneur. Elle écrivit à Lucius : vite, c'est urgent, il faut qu'Hector Crabbe demande Andromeda en mariage, convainc-le, mon père n'aura pas le choix, et ne dis à personne que c'est moi qui t'ai demandé de le faire.

La réponse ne se fit pas attendre :

Ma chère Narcissa,

Je suis bien curieux de savoir ce qui te tracasse. Ne t'en fais pas, je me charge de conseiller Hector. Je m'étonne d'ailleurs que l'idée ne lui soit pas venue avant, il doit donc être encore plus idiot que dans mes souvenirs. Et comme promis, je me garderai bien de dire que l'idée vient de toi.

À propos, je serai de retour en Angleterre pour les vacances de Noël, et organiserai un grand bal à cette occasion. Tu y es conviée, évidemment, ainsi que tes deux sœurs. J'espère que tu seras présente : j'aimerais beaucoup te montrer notre grand manoir, je suis certain qu'il te plaira.

Il me tarde de te retrouver.

 

Je t'embrasse

Lucius

Narcissa n'en fut pas soulagée pour autant, et s'évertua à chasser sa culpabilité en se répétant tout le jour durant que c'était la seule manière de garder Andromeda auprès d'elle. Les nuits qui la séparèrent de son retour à Londres pour les vacances de Noël furent peuplées de cauchemars en tout genre, où se mêlaient Hector Crabbe en habit de marié, Orion en train de mâchouiller bruyamment un os de poulet et une créature verte, luisante et griffue, aux yeux semblables à des fentes – c'était ainsi que Narcissa se représentait Lord Voldemort.

Daisy s'inquiéta de son état à plusieurs reprises, mais Narcissa refusa de se livrer à elle : connaissant la bonté et la tolérance de son amie d'enfance, Narcissa supposa qu'elle serait indignée par le choix qu'elle avait fait et que cela n'arrangerait rien à la situation.

Quand Narcissa rentra au 12, square Grimmaurd pour les vacances de Noël, elle n'avait quasiment rien avalé depuis plusieurs jours. Andromeda s'inquiéta aussitôt de sa mine blafarde, et se mit en quatre pour prendre soin d'elle, ce qui décupla encore la culpabilité de Narcissa. Sa grande sœur ne raconta rien à propos de Ted, mais son air rêveur et enjoué était la preuve qu'elle n'avait absolument pas abandonné son projet de mariage.

Le soir venu, Narcissa osa enfin la questionner, pendant qu'elle l'aidait à se redresser dans son lit pour boire une tisane préparée par ses soins.  

– Andromeda... Dis-moi que tu as changé d'avis, murmura-t-elle d'une voix faible, redoutant la réponse.

Andromeda lui sourit gentiment, un peu contrite, et plaça la tasse brûlante entre ses mains.

– Je vais le faire, Cissy, dit-elle posément. Je dois le faire.

– Tu ne peux pas... Andy, Papa...

– Tant pis pour lui, décréta-t-elle.

– Ils pourraient te punir, gémit Narcissa. Ils pourraient t'enfermer...

Malgré elle, elle sentit deux grosses larmes brûlantes rouler sur ses joues.

– N'aie pas peur, dit Andromeda. Tout ira bien, j'en suis sûre. Ted a un ami Auror qui saura le protéger si ça tourne mal, et moi... Je peux compter sur toi, n'est-ce pas ?

Narcissa déglutit avec difficulté, et hocha la tête, la gorge serrée. Elle passa les deux nuits suivantes dans le lit d'Andromeda, lovée contre sa grande sœur ; incapable de s'endormir, elle se contentait de l'écouter respirer paisiblement, effrayée par une telle sérénité.

Jusqu'au premier dimanche des vacances de Noël, où, vers midi, quelqu'un sonna à la porte du 12, square Grimmaurd.

Les Black étaient alors tous réunis dans la cuisine pour le déjeuner dominical, et Sirius et Andromeda préparaient un énorme plat en sauce dans la marmite. Narcissa était horrifiée par ce qui allait se passer. Andromeda ne t'a pas laissé le choix, se répétait-elle pour se convaincre qu'elle avait bien agi.

Lorsque la cloche de la porte d'entrée retentit, tout le monde se regarda, perplexe.

– Je n'attends personne, pourtant, dit Orion comme s'il était la seule personne de la maison qui mérite la visite de personnes extérieures.

La cloche retentit à nouveau, avec plus d'insistance.

– Eh bien Walburga, va ouvrir ! Ne fais pas attendre nos visiteurs !

Walburga lui lança un regard noir, mais obtempéra néanmoins, tout en pestant contre les visites improvisées :

– Vraiment, les gens sont si mal élevés ! Ils croient pouvoir débarquer chez nous comme ça, à n'importe quelle heure ! Ce ne sont pas des manières...

Elle ouvrit la porte, et poussa une exclamation étonnée, faussement aimable :

– Oh ! Crabbe ! Quelle charmante surprise...

– Bonjour, Walburga, répondit la voix brutale de Piscus Crabbe.

– Et tu es venu avec ton fils ! Que nous vaut l'honneur de votre visite, à cette heure, disons... inhabituelle ?

– Je dois parler à Cygnus, répondit Piscus Crabbe en la bousculant pour rentrer dans la maison.

– Oh, je ne sais pas s'il est là... Il serait peut-être mieux que vous repassiez un autre jour...

– CYGNUS ! aboya-t-il. J'ai à te parler !

Depuis la cuisine, les Black échangèrent des regards intrigués – sauf Andromeda et Sirius, qui continuaient de touiller le ragoût en riant, et Cygnus qui gardait le nez ostensiblement plongé dans son journal. Narcissa, quant à elle, examinait le manche de sa fourchette avec attention, la tête baissée pour ne pas montrer que ses joues avaient viré au cramoisi.

Piscus Crabbe entra dans la cuisine en faisant vibrer le sol à chacun de ses pas. Orion l'accueillit avec chaleur :

– Crabbe, mon ami ! Viens, viens, assieds-toi donc, dit-il en chassant Regulus du siège voisin. Et dis-nous un peu ce qui t'amène.

Crabbe s'écrasa sur le siège, manquant de réduire en bouillie la jambe du pauvre Regulus, qui alla se réfugier dans les bras de Bellatrix. À son arrivée, Andromeda s'était brusquement redressée, pâle comme un linge.

– C'est à Cygnus que je veux parler, répondit abruptement le nouveau venu.

Cygnus leva enfin la tête de son journal, et parut seulement remarquer sa présence.

– Tiens, ce cher Piscus, dit-il, placide, en le regardant par-dessus ses lunettes à la monture argentée. Que puis-je faire pour toi ?

– Je n'irai pas par quatre chemins, enchaîna Crabbe.

C'était la première fois que Narcissa voyait Piscus Crabbe d'aussi près. Ses mains faisaient la taille d'une assiette, et chacun de ses mouvements brusques étirait dangereusement les coutures de sa longue cape de cuir et de fourrure, aux épaules cloutées. Ses cheveux en brosse, son large cou et son rictus malveillant lui faisaient penser à un taureau enragé ; son œil noir et luisant semblait fixer Narcissa, peu importe où elle se trouvait ; et ses quatre rangées de dents pointaient vers l'extérieur de sa bouche, comme une horrible menace. Piscus Crabbe était absolument terrifiant, autant par son physique que par son attitude.

Pitié, pensa Narcissa avec affliction, par pitié, qu'Hector ne devienne pas comme ça... Pauvre Andromeda !

De son index épais, Piscus Crabbe désigna son fils, qui se tenait dans l'encadrement de la porte, profondément mal à l'aise devant leur nombreuse tablée.

– Mon fils... commença Piscus Crabbe.

– Enchanté, sourit ironiquement Cygnus avec un petit geste de la main.

– Silence ! tonna Crabbe, faisant sursauter tout le monde. Mon fils...

De son énorme index, il désigna Andromeda.

– ...va épouser ta fille... Celle-là, dit-il.

Elle était restée debout pendant tout le début de l'échange, pétrifiée. Elle pâlit encore davantage, mais resta muette. Tout le monde retint son souffle. Sirius laissa échapper un glapissement horrifié, et Cygnus écarquilla les yeux. Tous les regards étaient posés sur lui, dans l'attente de sa réaction.

– Je ne comprends pas bien, lâcha finalement Cygnus, méfiant.

– Quoi, qu'est-ce que tu ne comprends pas ? s'agaça Piscus Crabbe.

– Eh bien, tu décides de me compromettre aux yeux du Ministère, pour ensuite me proposer d’unir nos deux familles, du jour au lendemain ? J’avoue que je ne saisis pas très bien la logique de ta démarche.

– Oh, si ça a traîné, c’est parce que ta fille faisait la difficile. Sinon, ce serait déjà fait depuis longtemps, et j’aurais choisi quelqu’un d’autre que toi pour porter la culpabilité du Collier d'Opale...

– Attends, attends... le coupa Cygnus. Comment ça, depuis longtemps ?

– Tu n’en savais rien ? Hector lui fait des avances depuis... Je dirais trois, quatre ans ? Au bas mot...

Cygnus se tourna vers Andromeda.

– Et toi, tu ne m’as rien dit !

– C’est bien dommage, abonda Crabbe. Ce mariage, s’il avait eu lieu un peu plus tôt, t’aurait sans doute protégé des quelques ennuis que nous t’avons causé...

– À qui le dis-tu ! s’exclama Cygnus, rouge de colère.

– Et tu serais encore à ton poste, au Ministère...

Cygnus fixait toujours Andromeda, attendant qu’elle s'explique, mais elle restait stoïque, cramponnée à l'épaule de Sirius, qui lui avait pris la main et fusillait hargneusement les deux Crabbe du regard.

Piscus Crabbe reporta son attention sur Andromeda :

– Dis-moi, ma petite, il paraît que tu travailles dans la librairie de Mrs Painswick ?

Andromeda fit un petit signe de tête en signe d'assentiment.

– Après quelques recherches, j'ai découvert que cet endroit était bien mal fréquenté, continua Piscus Crabbe. Il serait malvenu d'apprendre que tu fricotes avec un Sang-de-Bourbe, n'est-ce pas ?

– Un quoi ? s'étrangla Cygnus, qui semblait à nouveau débarquer d'une autre planète.

– Tu m'as très bien entendu, Cygnus. Quant à toi, Andromeda, tu n'iras plus travailler là-bas, c'est terminé. Je t'ai trouvé un poste à Gringott's, à la comptabilité. Tu commences demain matin.

À l'idée de ces couloirs souterrains et des employés antipathiques, Narcissa sentit son sang se glacer. Andromeda, travailler dans cet endroit stérile ? C'était inconcevable.

– Me suis-je bien fait comprendre ? insista Piscus Crabbe.

Andromeda alla se réfugier dans les bras de sa mère qui affichait, elle aussi, une tête d'enterrement.

– Andromeda, ma pauvre chérie, lui chuchota-t-elle à voix basse.

– Je ne veux pas, murmura Andromeda. Je ne veux pas...

– Ça suffit ! hurla Cygnus en frappant du poing sur la table, furieux de sentir la situation lui échapper. Vous m'avez causé assez d'ennuis comme ça, toutes les quatre ! Druella, cesse donc de les consoler, ce ne sont plus des enfants !

Druella Black sembla alors hésiter à prendre la parole. Sa respiration s'était accélérée, et ses joues avaient pris une teinte plus soutenue.

– Et si j'étais toi, je me garderais bien de m'exprimer au sujet de ce mariage, siffla Cygnus entre ses dents.

– En effet, approuva Walburga sur un ton tranchant.

Tous les trois échangèrent des regards cuisants. Tournée vers sa mère, Andromeda plaçait visiblement tous ses espoirs en elle pour prendre sa défense.

– Je...

Dans un silence de plomb, tout en regardant sa femme, Cygnus fit un petit signe de tête appuyé et menaçant vers le côté de la table où se trouvaient Orion, Narcissa, Bellatrix et Regulus.

Druella referma la bouche, se détourna pour cacher les larmes qui brillaient dans ses yeux, et serra Andromeda contre elle un peu plus étroitement.

– Maman !

Mais Druella resta muette.

Narcissa regarda autour d'elle, perplexe, mais en dehors de ses parents et de Walburga, personne ne semblait avoir compris la portée de ces sous-entendus. Elle jeta alors un coup d'œil furtif à Hector, qui se tenait encore dans l'encadrement la porte. Il s'était apprêté avec soin, mais malheureusement pour lui, ses cheveux gominés le rendaient encore plus laid. Il ne semblait tirer aucune satisfaction de cet arrangement : en fait, il avait plutôt l'air furieux d'assister à toutes ces démonstrations de désespoir. Alors qu'il s'apprêtait à dire quelque chose, Piscus Crabbe fit un geste exaspéré :

– Allons-y, mon fils, nous avons mieux à faire que d'écouter ces pleurnicheries ! Nous reviendrons une fois que ta fiancée sera raisonnée...

Ils s'en allèrent avec autant de vacarme qu'ils étaient apparus, et ils emportèrent dans leur sillage tous les bruits de la maison, laissant un silence écrasant s'abattre sur la tablée des Black.

Après plusieurs interminables secondes, ce fut la tante Walburga qui parla la première :

– C'est vrai, c'est toujours difficile, au début, déclara-t-elle. Mais c'est ainsi depuis toujours, notre statut privilégié nous impose ce devoir. Il faut que tu l'acceptes, Andromeda.

– N'importe quoi, lâcha Sirius, dégoûté.

Walburga ne releva même pas, la mine sombre.

– Reprends-toi, ma chère, lui dit Orion. Tu as l'air aussi désespérée qu'elle ! Ça te rappelle de mauvais souvenirs ?

– Oh, tais-toi, espèce d'imbécile, siffla Walburga.

Orion écarquilla les yeux, peu habitué à ce genre de réponse. Il chercha immédiatement à se donner une contenance :

– Bon, eh bien... Ce n'est pas une raison pour se laisser mourir de faim ! Tiens, Walburga, ressers-moi un peu, dit-il en tendant son assiette.

Mais Walburga, exaspérée, repoussa l'assiette qu'il lui tendait, et celle-ci se renversa sur la nappe. Avant qu'Orion n'ouvre la bouche, elle se leva brusquement, en bousculant la table :

– Débrouille-toi tout seul : je sors. On étouffe, ici.

Et elle partit dans le froid glacial, sans cape et sans étole, en claquant la porte encore plus bruyamment que Piscus Crabbe.

– Je ne vois pas pourquoi vous en faites tout un foin, râla Bellatrix lorsque leur tante eut disparu. Épouse-le, Andy, son sang est pur ; rien ne t'oblige à l'aimer ! Pas vrai, Reggie ?

Alors que Regulus approuvait vigoureusement, Sirius lui donna un violent coup de pied dans le tibia. Bellatrix brandit sa baguette pour le défendre, et Cygnus dut faire à nouveau usage de sa voix de tonnerre pour consigner tous les enfants dans leurs chambres respectives – sauf Bellatrix, qui s'en alla en claquant la porte une troisième fois, dans un concert de protestations de la part des portraits qui peuplaient le hall d'entrée.

Narcissa passa le reste de l'après-midi à consoler Andromeda, mortifiée. Vera Goyle vint également leur rendre visite, et resta dans la chambre de Druella pendant plusieurs heures, durant lesquelles Narcissa entendit sa mère sangloter, et supplier son amie d'enfance de faire quelque chose ; hélas, Vera ne trouva aucune solution à cet épineux problème, et se contenta de venir embrasser Andromeda en partant, la mine sombre.

Le soir venu, lorsqu'Andromeda eut pleuré toutes les larmes de son corps et accepté que son père ne changerait jamais d'avis, elle se résolut à écrire à Ted, pour rompre définitivement avec lui.

– Je n'y arriverai jamais, se lamentait Andromeda. Je ne veux pas... Je ne peux pas lui faire ça.

Narcissa lui apporta une plume, de l'encre et du parchemin ; mais la main d'Andromeda restait paralysée, incapable d'écrire le moindre mot. Après quelques secondes d'hésitation, Andromeda tendit la plume à Narcissa.

– Vas-y, toi, dit-elle.

– Moi ? s'étrangla Narcissa.

– Oui. Je te fais confiance. Tu sais être ferme, quand il le faut.

Narcissa prit la plume, la gorge nouée. C'était une punition cruelle, mais juste, qu'Andromeda lui infligeait là, sans même le savoir. En écrivant à Ted, Narcissa fut forcée de faire face à la cruauté de ce qu'elle venait de faire, et au fur et à mesure qu'elle écrivait, elle avait l'impression d'inscrire, non pas des lettres, mais du dégoût brut et indélébile, et non pas sur une simple feuille de papier, mais au plus profond d'elle-même.

– Tu l'appelles comment, d'habitude ? demanda-t-elle d'une toute petite voix.

Andromeda se rallongea sur son lit, face au mur.

– Ted, murmura-t-elle. Je l'appelle Ted.

D'une main tremblante, Narcissa écrivit un billet expéditif.

Ted,

Nous ne nous reverrons plus. Je dois épouser un autre homme, pour le bien de ma famille. Je ne l'aime pas, et je ne l'aimerai jamais, mais je pense que j'arriverai à être heureuse avec lui. Nous avons vécu de belles choses ensemble, mais notre histoire s'arrête ici. Oublie-moi, c'est la seule chose que je te demande.

Adieu,

Andromeda

Andromeda lut les premiers mots de la lettre, puis se détourna.

– Merci de m'avoir aidée, soupira-t-elle. C'est parfait, comme toujours.

Et Narcissa évita soigneusement son regard jusqu'à ce qu'elles éteignent la lumière.

Cher journal,

Je me suis couchée il y a déjà plusieurs heures, mais je n'arrive pas à trouver le sommeil. Andromeda aussi se tourne et se retourne dans son lit. Mon cher journal, que dois-je faire ?

C'est vrai qu'à première vue, ce que ce que j'ai provoqué n'a fait qu'empirer la situation : mon père est fâché contre nous de lui avoir caché ces choses, et Andromeda est dans une très mauvaise posture.

Mais il faut que je me reprenne. Andromeda ne pouvait tout de même pas épouser ce... ce Ted ! Non, je ferais mieux de penser à la fierté de nos parents, quand Andromeda et moi auront fait deux beaux mariages. Oui, c'est certain, même si c'était un choix difficile, j'ai fait ce qu'il y avait de mieux à faire. Un point c'est tout.

Et puis dans quelques jours, Lucius sera de retour de Durmstrang, et il organise chez lui un grand bal pour Noël : cette fête splendide saura certainement nous remettre tous d'aplomb.


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