Le choix de la vengeance

Chapitre 3 : III. Nouveau venu au Terrier

Catégorie: G

Dernière mise à jour 08/11/2016 14:00

 

III. Nouveau venu au Terrier
 
« Au nom de Merlin ! »
Le rugissement de Ron résonna dans tout le Terrier. Harry s’immobilisa et lâcha le chiffon qu’il tenait à la main. Ce matin, Hermione devait arriver de chez ces parents, et Mr et Mme Weasley était partis la chercher à la gare tandis que Ron, Harry, Ginny et George étaient chargés de nettoyer la maison de fond en comble. Harry hésita encore un instant, puis se précipita dans l’escalier et dévala les marches quatre à quatre. Il croisa George qui descendait également en courant, l’air inquiet.
« Ron ? Ron ! Qu’est-ce qu’il se passe ? Où es-tu ?
-Devant l’entrée ! Nom d’une gargouille, venez voir ! »
Ron se tenait face à la porte, et fixait avec un visage ébahi mais dégoûté quelque chose que Harry ne pouvait pas voir.
« Non mais regardez qui dort sur notre paillasson ! Regardez ! dit-il à George et Harry en s’écartant.
Harry baissa les yeux et ce qu’il vit le stupéfia à tel point qu’il se demanda s’il ne s’agissait pas d’une illusion due à un maléfice quelconque. Draco Malfoy était allongé devant la porte, la tête dans la poussière, inanimé. 
« C’est une blague ? lança Harry en jetant un œil à l’extérieur.
-C’est ce que j’ai cru d’abord, mais apparemment pas. C’est bien notre fouine préférée. Ah, c’est vraiment dégoûtant, qu’est-ce qu’il fait là ? dit Ron en le remuant sans ménagement de son pied. Il semblait écœuré de ce qu’il voyait. Même George fixait la scène avec une animosité féroce dans le regard, et Harry ne pouvait s’empêcher de constater que Malfoy avait l’air vraiment pitoyable. Ses cheveux d’ordinaires blonds, presque blancs, étaient recouverts de terre, ses vêtements déchirés par endroit comme s’il était tombé et sa tête reposait face contre terre.
« On devrait peut-être lui enlever le nez du sol, suggéra Harry.
-Attend, je veux me délecter du moment présent, répondit Ron avec un sourire jusqu’aux oreilles. Il donna un coup de pied un peu plus fort dans les côtes de Malfoy. «Il bouge vraiment pas. Tu crois qu’il est mort ? »
Harry haussait les épaules quand soudain une tornade rousse les bouscula tous les trois.
« Qu’est-ce qu’il se passe ? Pourquoi Ron a crié ? Qu’est-ce que- oh ! »
Ginny s’arrêta net en apercevant le corps allongé.
« Ne lui mets pas de coups de pied, imbécile ! dit-elle en repoussant son frère.
-Mais c’est Malfoy ! » s’exclama-t-il tandis que Ginny s’agenouillait et secouait doucement Draco. Elle ne répondit pas. « Il est peut-être mort ? poursuivit Ron avec espoir.
-Il est inconscient, dit Ginny.
-Je vois pas pourquoi tu t’acharnes à vouloir le – hé ! Ne lui mets pas de claque ! Pourquoi elle a le droit de frapper et à moi elle me l’interdit ? Hein, pourquoi ? dit Ron à Harry. Celui-ci haussa les épaules.
Soudain, Malfoy ouvrit les yeux. Il avait l’air un peu hagard, et regardait Ginny, sans vraiment la voir. Elle le prit par les épaules, le secoua avec véhémence. Il toussa, puis ses yeux firent le point. Quand il vit que Ginny Weasley le tenait par les épaules, il recula violemment. Du mépris passa dans le regard l’un de l’autre.
« Qu’est-ce que tu fous là ? » lancèrent-ils simultanément.
Ginny éclata d’un rire froid.
« C’est toi qui est sur mon palier, Malfoy.
-Moi qui suis sur – quoi ? »
Malfoy regarda autour de lui, et parut soudain prendre conscience d’où il était. Puis ses yeux s’écarquillèrent, sa bouche s’entrouvrit et sa lèvre inférieure se mit alors à trembler comme celle d’un enfant.
« Le manoir… il a pris feu, le feu… La milice est entrée et… alors j’ai couru, je me suis enfui…»
Tous le regardaient et comprirent. C’était la deuxième fois que Harry voyait Malfoy bouleversé à ce point. La première, c’était un an auparavant, dans les toilettes de Mimi Geignarde.
« Malfoy, quand cela s’est-il passé ? demanda lentement Ginny.
- Je sais pas. Je sais pas, répondit Malfoy en secouant la tête, les yeux toujours écarquillés d’horreur.
-Hier ?
-Je sais pas… »
Il baissa la tête.
«Je les ai laissé… je les ai laissé ! cria-t-il avec colère en se relevant. Tous sursautèrent et Ginny fit un pas en arrière. Malfoy se laissa retomber lourdement sur le sol. Il se prit le visage entre les mains, se recroquevilla.
Ginny se tourna vers Ron, qui se tourna vers Harry, qui se tourna vers George. Chacun, même Ron, avait l’air attristé. George, plus que cela, semblait retourné, sur le point de vomir. Ginny fut la première à se ressaisir.
«Bon. Tu peux te lever ? »
Malfoy hocha la tête et se mit sur jambes. Ginny le poussa délicatement à l’intérieur du Terrier, Ron, George et Harry s’écartant sur son passage. Elle l’emmena jusqu’à la cuisine, l’assit sur une chaise. Harry sentit le besoin de faire quelque chose, et agita sa baguette pour lui couler un verre d’eau. Ron le considéra, surpris, et Harry écarta les bras, façon « oui, je sais mais bon… ». Tous observèrent Malfoy comme s’ils s’attendaient à le voir jeter son verre et lancer d’un ton méprisant : « Qu’est-ce que vous regardez ? » mais il n’en fit rien et but docilement.
Des bruits de voix parvinrent de l’extérieur.
« Ron, Harry, je suis là ! Vous avez vu le journal ? Vous avez vu ce qui est arrivé aux – » 
Hermione entra dans la pièce et s’immobilisa net.
« Qu’est-ce que vous faites ? demanda-elle en parcourant la pièce. Son regard tomba sur Malfoy, l’air hébété et le verre vide à la main.
 « Mon dieu. Je suis désolée. »
Harry songea qu’il devait s’agir d’un bien drôle spectacle que celui des trois Weasley et de lui-même, veillant avec sollicitude leur pire ennemi. Derrière Hermione arriva Mr Weasley, suivi de sa femme. Ils restèrent un instant interdit, hésitant entre plusieurs attitudes. L’instinct maternel de Mrs Weasley l’emporta.
« Mon pauvre chéri », murmura-t-elle en se précipitant vers Draco. Le fait qu’il n’eut aucune réaction à ce moment fut probablement le signe le plus criant de sa détresse.

Draco avait été assommé avec un puissant somnifère et expédié dans le lit de Charlie, non sans une réflexion outrée de Ron sur l’éventuelle contamination de la chambre de son frère par « cette gangrène malfoyenne ». Les Weasley et Harry étaient maintenant réunis dans la cuisine pour se ressaisir et discuter de la suite des évènements. Pour l’instant, seuls Mr et Mrs Weasley parlaient. A voix basse, ils paraissaient délibérer entre eux. Hermione semblait touchée par la situation, Ginny et George conservaient un silence buté. Harry ne savait trop que penser. Il lut l’article de la Gazette qu’Hermione avait rapporté, intitulé « Incendie au Manoir Malfoy ». A la phrase « Les corps des époux Malfoy ont été retrouvés parmi les éléments carbonisés », il vint à l’esprit d’Harry que Draco et lui se trouvaient maintenant dans une situation semblable : ils étaient tous deux orphelins. Sauf qu’Harry avait appris à grandir avec, et n’avait jamais connu ses parents. Draco devrait faire avec ses souvenirs. La suite de l’article précisait que « le corps de Draco Malfoy, fils du couple Malfoy et âgé de dix-huit ans, n’a pas encore été retrouvé. L’hypothèse selon laquelle le jeune homme aurait pu échapper à ses agresseurs n’est pas à écarter. » Mr Weasley toussota alors pour prendre la parole, et Harry posa le journal.
« Molly et moi avons discuté de ce qui vient de se produire, ainsi que des évènements qui s’y réfèrent et troublent le monde sorcier depuis la mort de Vous-Savez-Qui. Nous avons pris une décision. Draco va rester ici. Compte-tenu de- 
-QUOI ? rugirent Ron et George simultanément.
-Compte-tenu de la menace que représente la Milice, nous n’avons pas le choix. Draco doit rester ici.
-Bien sûr que nous avons le choix, s’exclama Ron. Il a sûrement de la famille, il peut aller chez ses oncles ou tantes, ou même les amis de ses parents, ou n’importe qui d’autre !
-Idiot, il t’arrive de réfléchir avant de parler ? répondit Ginny. La Milice poursuit tous les mages noirs ! Tu sais très bien qui sont les amis des Malfoys, ils vont forcément se faire avoir un jour ou l’autre. Et je ne connais pas toute sa famille, mais je crois que je peux facilement l’imaginer !
-En fait, le seul endroit où la Milice n’ira pas chercher Malfoy, c’est ici, dit Hermione. Ils n’iraient pas chercher un Mangemort sous le toit de l’Ordre du Phénix, sous le toit d’Harry Potter.
-Il semblerait effectivement que le jeune Malfoy savait parfaitement où il serait en sécurité, acquiesça Mr Weasley.
-Alors il doit rester ici », dit Harry. George et Ron se tournèrent vers lui, choqués. « Du moins… Du moins jusqu’à ce qu’on trouve le moyen de le protéger, des Aurors ou je ne sais pas… »
Harry se dit qu’il était peut-être allé un peu trop loin. Après tout, même si Hermione avait parlé du Terrier en tant que « toit d’Harry Potter » et qu’il passait chaque vacance scolaire entre ces murs, il ne s’agissait pas à proprement parler de sa maison, il n’avait légitimement aucun droit à prendre des décisions la concernant. Il jeta un regard timide à Mr et Mme Weasley. Mais heureusement, ils ne relevèrent pas, et Mr Weasley lui sourit même.
« Je crois aussi qu’il s’agit de la plus sage décision à prendre. Dès demain, je vais essayer d’en savoir un peu plus au Ministère. Discrètement, bien sûr, on ne sait plus trop quelle mauvaise oreille peut traîner au Ministère ces temps-ci. »
Ces temps-ci comme depuis que je connais l’existence du Ministère, songea Harry. Mme Weasley, qui n’avait jusqu’alors pas encore prononcé un mot, ouvrit la bouche.
« Est-ce que… est-ce que le pauvre chéri sait que ses parents sont décédés ? demanda-t-elle en évitant le regard de Harry. Il était toujours un peu agacé et reconnaissant de la sollicitude qu’elle montrait à son égard.
Ron, George et Ginny grimacèrent au son du « pauvre chéri ».
« Je suppose que oui, commença Ron. Il était là-bas, non ?
-Il a l’air tellement choqué… murmura Hermione.
-Je pense qu’il le sait, dit Harry en se rappelant la colère de Malfoy lorsqu’il criait « je les ai laissé ! ». Mais je crois que… je crois qu’il faudra… lui dire. Je crois que c’est vraiment nécessaire que quelqu’un lui dise. »
Tous se tournèrent alors vers lui.
« Quoi ? Non, non ! Non pas moi, je ne peux pas, je ne suis pas capable de…
-Ce n’est certainement pas à Harry d’annoncer ce genre de nouvelle, coupa Mrs Weasley. Arthur et moi nous en chargeront. Et maintenant, il est temps de manger un morceau avant d’aller au lit. Pas de discussion ! ajouta-t-elle lorsque Ron ouvrit la bouche pour protester. Et pas un mot, vous m’entendez, pas un mot sur la présence de ce garçon ici, c’est bien compris ? »
A la fin du bref dîner, Ron, Harry et Hermione montèrent les valises de celle-ci à l’étage.
« Non mais vraiment ! A qui veut-elle que j’annonce que j’héberge Malfoy sous mon toit ? Personne ne me croirait ! lança Ron à Harry qui éclata de rire.
-Ron ! Ce n’est que provisoire, il faudra qu’on fasse avec. Et puis, il vient de perdre ses parents ! dit Hermione sur un ton réprobateur.
-Heureusement que c’est provisoire… Et le fait d’être une immondice n’a rien à voir avec la perte de parents – excuse-moi Harry tu n’étais pas visé, répondit Ron et Harry rit une nouvelle fois. La mort de Voldemort lui avait permis de faire véritablement le deuil de ses parents, et le fait de pouvoir en parler avec ironie et rires lui faisait un bien fou.
« Et puis, qui sait si Malfoy ne va se montrer encore plus abominable maintenant qu’il a une bonne raison de l’être ? poursuivit Ron.
-Je crois que nous devrions essayer d’être ami Malfoy, non, peut-être pas, d’accord Ron, mais de nous montrer, disons, courtois et compréhensif avec lui, dit Hermione alors qu’ils arrivaient à sa chambre. Bonne nuit les garçons. »
« Très bien, très bien ! lança Ron une fois qu’elle eut fermé sa porte. Je lui dirai merci s’il me passe le sel. »

 

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