Le Parfum du Air Salonpas

Chapitre 6 : Koganegawa, Towada, Ogano

1333 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 21/10/2020 18:48

Koganegawa les attrapa, Hinata et lui, avec un air de conspirateur au visage qui ne disait rien de bon à Tsukkishima. Jusque-là, ce camp d'entraînement ne lui avait amené que des problèmes et il se doutait que ça ne se calmerait pas avant qu'il rentre chez lui et qu'il s'efforce d'oublier ce douloureux épisode de son existence. Au moins, il pouvait se consoler en se rappelant qu'il avait la possibilité de s'entraîner avec l'un des meilleurs bloqueurs qu'il connaisse — un type certes parfaitement énervant, mais excellent.


— Dites, si je vous demande vos numéros tout à l'heure, vous pouvez juste me les donner ? Mais pas maintenant, juste tout à l'heure, demanda-t-il, les mains jointes.


Hinata pencha la tête sur le côté comme un chaton perplexe.


— Mais tu l'as déjà mon numéro…

— En fait…


Koganegawa hésita un instant avant de poursuivre, le visage de plus en plus écarlate à mesure que passaient les secondes. Tsukkishima soupira. Qu'il en vienne au fait, un peu, ils allaient être en retard pour le déjeuner.


— En fait, je voudrais demander le sien à Goshiki mais je me dis que si je lui demande de but en blanc, il va refuser ou se sentir mal à l'aise, alors que si je fais comme si je demandais celui de tout le monde, il a plus de chances d'accepter.


Tsukkishima devait admettre que le plan se tenait. Mine de rien, il n'avait pas que de l'air dans la caboche, celui-là. Toujours était-il qu'il faudrait lui passer sur le corps avant qu'il donne son numéro de téléphone à cet enquiquineur. Enfin, rien ne l'empêchait de lui donner un faux numéro, pour la forme. Tout le monde serait content et on ne pourrait rien lui reprocher.


— Alors comme ça, taquina Hinata, il te plaît, Goshiki ?

— Pas… pas si fort ! bafouilla Koganegawa. Mais oui, je le trouve mignon. Tu… tu crois que je pourrais lui plaire ?

— Carrément ! s'exclama Hinata.

— Carrément pas, répliqua Tsukkishima.


Il les laissa là et se dirigea vers le réfectoire. Il en avait assez entendu. Derrière lui, Hinata lui criait de ne pas être aussi négatif, mais il n'y prêta aucun attention. Koganegawa se faisait des illusions. Tsukkishima avait bien vu comment Goshiki regardait Ushijima ; c'était lui, son genre. Et Koganegawa était bien loin de rivaliser.


Pourtant, quand Koganegawa mit son plan à exécution, Goshiki lui donna son numéro sans hésiter. Il se tourna et, certain que l'autre ne le verrait pas, le joueur de Shiratorizawa se fendit d'un large sourire, le rouge aux joues. Tsukkishima, qui avait tout vu, se fit la réflexion qu'il avait fort mauvais goût, puis que ce n'était pas si étonnant, vu sa coupe de cheveux.



Towada se tenait devant l'ancien capitaine d'Ohgiminami. Ils avaient beau avoir perdu leur match contre Karasuno, il s'efforçait de maintenir un visage digne. Akimiya l'observait sans un mot, l'air un peu inquiet. Il fallait dire que son interlocuteur était plutôt du genre intimidant, et le toisait d'une bonne dizaine de centimètres.


— Merci, souffla finalement Towada. C'est ta détermination qui nous a permis d'arriver jusque-là.


Akimiya lui répondit d'un doux sourire plein de fierté. Il avait beau être le plus petit des deux, il dégageait une aura de confiance qui ne mentait pas sur son statut d'ancien capitaine. Towada prit une longue inspiration avant de poursuivre. Sous ses airs de gros dur, on voyait sans peine une hésitation timide.


— Demain, on va manger des ramens avec les gars. Je sais que tu as déjà accepté de venir avec nous, mais je me demandais si… Est-ce que ça te dirait qu'après, on fasse quelque chose ? Genre… juste tous les deux ?


Il leva les yeux au plafond, pour éviter d'affronter le regard de son aîné. Akimiya, entre temps, prit dans ses mains celles de Towada et lui offrit un sourire encore plus radieux que le précédent.


— Ce serait avec plaisir.


Tout ce bonheur était bien touchant, mais ça n'empêcha pas Tsukkishima d'avancer sa tête entre eux.


— Vous bloquez la porte des chiottes.



Voilà déjà dix minutes que Kuroo cherchait Kenma. Il avait encore disparu il ne savait où alors que l'heure du déjeuner approchait à grand pas. Il ne grandirait jamais s'il refusait de se nourrir correctement et préférait se planquer dans un coin pour jouer à un quelconque jeu vidéo plutôt que de profiter d'un repas offert. Kuroo chercha dans tous les recoins et en particulier les endroits sombres, où la lumière ne risquait pas de faire de faux jour sur l'écran.


Dans sa quête pour retrouver son chaton perdu, l'attention de Kuroo fut attirée par un concerto de soupirs qui s'échappait du renfoncement entre le gymnase et le local du concierge. Allons bon, lesquels étaient-ce encore ? Depuis qu'il avait remonté les bretelles à Yamamoto et Fukunaga, ces deux-là avaient l'air de se tenir tranquille avec leurs démonstrations d'affection en public. Mais cela pouvait tout aussi bien être Yaku et Lev. Kuroo soupira. C'était bien beau l'amour, mais il ne tenait pas à ce que Nekoma commence à se traîner une réputation de queutards incapable de la garder dans leur pantalon plus de cinq minutes. Il s'approcha à pas discrets, prêt à hurler au scandale s'il voyait le moindre cheveu d'un de ses coéquipiers.


Il se figea sur place en les voyant. La bonne nouvelle, c'est que ce n'étaient pas des joueurs de Nekoma. La mauvaise nouvelle, c'est qu'il se serait bien passé de voir ça.


Masaki Gora, de l'équipe d'Ubugawa, maintenait contre le mur, les mains plaquées au-dessus de sa tête, un Daiki Ogano qui n'avait pas l'air de se plaindre de la situation. Ils étaient plongés dans un baiser passionné, aveugles au monde qui les entourait. De sa main libre, Gora agrippait le maillot d'Ogano au bas de son dos et le collait contre lui. Kuroo ne préféra pas laisser son regard s'aventurer en dessous de la ceinture, de peur de ne jamais oublier ce qu'il y verrait.


Il s'éclaircit la gorge bruyamment. L'effet fut immédiat. Gora et Ogano se séparèrent en moins de temps qu'il fallait pour le dire et commencèrent à balbutier des excuses aussi anarchiques qu'inintelligibles. Si Kuroo avait cru ça d'eux… Ils jouaient très bien la comédie ces deux-là, à faire semblant de ne pas se supporter. L'illusion était parfaite, même lui s'y était laissé prendre.


— C'est… c'est pas du tout ce que tu crois… réussit finalement à articuler Ogano.

— Ouais, ouais, je me doute bien que vous vérifiez juste vos caries respectives. L'hygiène bucco-dentaire, c'est important, tout ça…


Sa remarque fut accueillie par un silence gêné. Ils se savaient débusqués et n'avaient de toute évidence pas réfléchi à cette éventualité. Si vous voulez pas qu'on sache que vous êtes ensemble, évitez de vous lécher la glotte en public, songea Kuroo. Enfin, tout ça ne le regardait pas, ils pouvaient bien faire ce qui leur chantait.


— Trève de bavardages inutiles, dit-il après un trop long silence. Barbecue ?

— Barbecue, répondirent de concert les deux autres après s'être échangé un bref regard.


Ils sortirent de leur cachette, essayant de se recoiffer un peu et d'arranger leurs vêtements pour avoir l'air moins débraillés. Kuroo s'en sentit un peu rassuré. Au moins, ce n'était pas juste son équipe qui avait des problèmes avec les excès d'effusions malvenus.


— Tu en parleras à personne, hein ? demanda Gora en passant à côté de Kuroo.

— Parler de quoi ? J'ai rien vu.


Gora soupira, soulagé.


— Vous auriez pas vu Kenma, vous, par contre ?


Ils répondirent tous deux par la négative et Kuroo laissa échapper un long soupir. Ce n'était pas tout de suite qu'il allait pouvoir manger.

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