Le Parfum du Air Salonpas
Chapitre 4 : Takeda, Sugawara, Kyotani
1093 mots, Catégorie: K+
Dernière mise à jour 21/10/2020 18:42
Le distributeur de boissons près du gymnase était un point stratégique pour qui voulait épier une conversation. On pouvait tout y entendre sans être vu. Evidemment, Tsukkishima n'avait pas prévu d'espionner ses aînés quand il s'y rendit ce jour-là. Tout ce qu'il voulait, c'était une canette de café. Mais au moment d'insérer sa pièce, il entendit une conversation non loin. Ils devaient ne se trouver qu'à quelques pas, car il eut à peine à tendre l'oreille pour comprendre ce qu'ils se disaient.
Il reconnut sans mal les voix du coach et de Takeda.
— Vas-y, je t'écoute, dit Takeda, d'un ton abrupt que Tsukkishima ne lui connaissait pas.
Tsukkishima vérifia le sol avant de s'approcher d'un pas. Le soleil était déjà bas sur l'horizon, son ombre ne le trahirait pas. Il se remémora l'autre fois, au restaurant, et se dit qu'il ferait peut-être mieux d'arrêter d'écouter aux portes. Mais s'il y avait de l'eau dans le gaz entre ces deux-là, cela pouvait présager de lourds changements pour l'équipe et il préférait autant ne pas être pris de court.
— Pour ce qui c'est passé l'autre soir, c'est…
— Ni fait ni à faire, j'avais très bien compris la première fois.
Tsukkishima mit plusieurs longues secondes à comprendre ce qu'il entendait. Puis, il se souvint de ce qu'il avait entendu au restaurant. Super. Il ne manquait plus que ça. N'empêche, jamais il n'aurait pensé que Takeda puisse avoir une voix aussi glaciale. Même lui en avait des frissons.
— Attends ! J'ai été idiot, d'accord ? J'avais peur de ce que les gens diraient, si ça venait à se savoir. J'avais peur pour ton travail, que ça fasse jaser que… enfin, que tu enseignes… On est à la campagne, c'est pas dans les moeurs…
Il marqua une pause et Tsukkishima en profita pour reculer. Il allait les laisser à leur conversation, ce n'était pas ses affaires. Mais tout ce qu'il pouvait dire là-dessus, c'était qu'Ukai se trompait lourdement. Il suffisait de regarder l'équipe de Karasuno pour comprendre que si, ce genre de choses étaient complètement dans les moeurs.
—
Un soir, le coach Ukai arriva à l'entraînement avec une invitée surprise. Dès qu'il passa la porte avec l'enfant dans les bras, une toute petite gamine d'à peine plus de trois ans, plus personne n'avait l'esprit au volley. D'où venait-elle ? Qui était-elle ? Pas sa fille, quand même ? C'était quoi, son petit nom ? Ukai coupa court à toute discussion en expliquant qu'il s'agissait de sa nièce, qu'il devait garder exceptionnellement pour dépanner sa soeur. La petite fut confiée aux deux managers et l'entraînement commença dans un calme tout relatif. Bientôt, on oublia la présence de l'enfant, qui faisait sa vie en bordure de terrain, surveillée de près par Kiyoko et Hitoka.
Elle ne leur revint à l'esprit qu'à l'heure de la pause, quand il s'accordèrent quelques minutes de répit pour reprendre leur souffle et boire un coup. Yuki en profita pour foncer comme un bolide vers Sugawara, lui tendant les bras pour être portée. Sans hésiter, il se pencha et la ramassa dans l'attendrissement général. Un attroupement se forma autour d'eux, attroupement dont Tsukkishima se tenait farouchement éloigné. Qu'est-ce qu'ils pouvaient bien tous lui trouver, à cette morveuse ? Lui détestait les enfants, ces êtres de l'enfer qui crient, bavent et cassent tout. En plus, il subissait déjà Hinata et Nishinoya tous les jours et préférait ne pas en rajouter.
— Makoko ! Makoko ! s'exclamait la gamine, serrée contre Sugawara.
— Tu ressembles un peu à mon cousin Makoto, expliqua Ukai en tentant de le débarrasser de cet encombrant colis. Il vit chez ma soeur en attendant de commencer la fac, elle doit te prendre pour lui.
L'affaire ne fut pas aisée mais à force de pleurs et de cris, on réussit à décoller Yuki de Sugawara, qui partit s'installer de son côté du terrain pour un match en trois contre trois. Dans la même équipe que lui, Tsukkishima entendit Daichi lui dire :
— Ça te va bien, de t'occuper d'un enfant…
Et Sugawara de lui répondre :
— Tu trouves ?
— Oui. Ça me donne envie d'avoir les nôtres, un jour.
Sugawara prit une magnifique teinte rouge brique et, un sourire béat aux lèvres, bafouilla quelques mots incompréhensibles. Tsukkishima, de son côté, se prit à rêver que le service de Kageyama l'atteigne en pleine tête et le tue sur le coup, pour lui épargner tout ça.
—
✉ Tu savais que Kyotani et Yahaba de Aoba Johsai étaient ensemble ? :o
✉ Est-ce que je suis censé en avoir quelque chose à foutre ?
Tsukkishima avait répondu du tac au tac, avant même de se demander qui étaient ces deux-là. Yamaguchi était bien mignon, mais il avait une furieuse tendance aux commérages que Tsukkishima ne comprenait pas. Mais finalement, surtout parce qu'il n'avait rien d'autre à faire, il essaya de se rappeler d'eux. D'abord, il pensa au navet et à La Frange™. Non, c'était Kindaichi et Kunimi, rien à voir. Ensuite, il visualisa les deux figurants de troisième année, mais ce n'était pas ça non plus. Eux, ils s'appellaient Hanatrucmuche et Matsumachin… quelque chose dans le genre. En tout cas, ce dont Tsukkishima était certain, c'était que ça ne ressemblait pas ni à Kyotani, ni à Yahaba. Puis, soudain, l'illumination se fit dans son esprit.
Mad Dog-chan et Monsieur Propre-sur-Lui.
Ça ne l'étonnait qu'à moitié. Il se souvenait de leur dispute durant le match de sélection pour le tournoi de printemps. Comme tout le monde, il avait vu celui qui avait une tête de premier de la classe pousser contre le mur le petit rebelle et s'était demandé quelle tournure prendraient les événements. Une oreille traînant dans le bus au retour lui avait appris qu'il n'était pas le seul et que tous ceux sur le banc de touche avaient pris les paris pour savoir si l'altercation allait se terminer ou non en gros bisou bien baveux. Finalement, il ne s'étaient pas embrassés. Tsukkishima en remerciait le ciel et Kinoshita devait une canette à Narita. Enfin, ils n'avaient quand même pas traîné, ces deux-là, il ne s'était écoulé que deux semaines depuis leur match. Tsukkishima se demanda si bisouillage il y avait eu dans les vestiaires juste après, mais se rappela qu'il s'en fichait et retourna à ses moutons.