Le Conflit D'Orr, Guild Wars 2

CHAPITRE 3 : L’enlèvement

            Trois détonations assourdissantes retentirent et trois cratères se formèrent instantanément sur la membrane de l’Œil. Trois impacts qui, quelques secondes plus tard, avaient tout simplement disparu, comme si l’Orrien s’était régénéré. La flèche de la rôdeuse, elle, gisait sur le sol. Totalement inefficace... Sans perdre son sang-froid, Dynfaw fonça et contourna le monstre. Il esquiva un premier coup de tentacule, para le second mais reçu le troisième en plein dans l’abdomen. Une douleur fulgurante traversa son corps et il sentit une de ses cotes se fêler. La puissance du coup l’envoya valdinguer, et il atterrit lourdement sur le sol de pierre… Seconde cote… Le sang coula plus abondement du coin de sa lèvre. Il se releva, plus entamé dans son amour propre que dans sa forme physique et revint à la charge, esquivant les sorts qui fusaient de la pupille et explosaient derrière lui. Il analysa rapidement la situation : Shadoine se battait au corps à corps, mais n’encaissait pas le moindre coup, insaisissable, tel une ombre, délivrant un orage de coups sur son adversaire, le tailladant sans lui laisser le moindre répit. Mais l’Œil ne semblait pas affecté, et encaissait les coups sans broncher, se contentant de bombarder le nécromancien de sortilèges. Iryenna, de son côté, abattait méthodiquement les cadavres qui tentaient de se relever ou de rejoindre le combat : une flèche par cible, mortelle, précise. SombreLame, lui,  un œil ensanglanté, fonçait tête baissée sur le monstre, une épée dans chaque main. Esapdoum n’était nulle part en vue. Il se ressaisit. Cette fois, il ne se ferait pas avoir. Il sprinta, sauta par-dessus la première attaque, prit appui sur le second tentacule, qui fendait sur lui, fit un saut périlleux au-dessus de l’Œil en lançant sa dague qui vint se planter sur le haut du globe oculaire. Par dédain, il cracha un mélange de salive et de sang sur son adversaire et en retombant, asséna un coup de hache sur l’un des tentacules,  y mettant toute sa force. Il le coupa en deux, et le membre tomba sur le sol poussiéreux, secoué de spasmes nerveux. Il atterrit lestement et dit :

« Alors? T’en dis quoi ?

-Comment oses-tu ??? » SombreLame le coupa :

« T’as pas entendu c’que t’as dit la p’tite dame ?? Boucle-la !

-JE VAIS VOUS BRISER !! » Hurla le monstre en se tournant vers Dynfaw.

« Oui !! Viens me voir !!! »

Il grimpa sur l’Œil qui tentait vainement de le fouetter, ignorant le flux magique qui lui brulait la peau, récupéra sa dague, cracha une seconde fois sur le globe oculaire, redescendit, et se mit en garde. Il para un coup, en asséna trois, et exécuta une roulade arrière au moment où une gerbe de flammes de jais s’abattaient à l’endroit où il se trouvait une seconde avant. Ses côtes commençaient à le faire souffrir sérieusement et il ne fallait pas que cela dure encore trop longtemps… Il lança sa hache comme un disque, tendit la main, faisant tournoyer l’arme, qui lança une série de coups de griffes spectrales sur son ennemi. Mais l’Œil avança, et frappa des dizaines de fois, obligeant le nécromancien à reculer sous une pluie de fouets tentaculaires. C’est à ce moment-là qu’Esapdoum réapparut…  

            De son coté, tranquillement perchée sur le même rocher (qu’elle avait nommé « Pupuce ») depuis le début des hostilités, Iryenna mâchouillait un morceau d’élémentaire de bonbon. Elle tirait calmement quelques flèches, tentant d’atteindre la base des tentacules, seul endroit où ses flèches étaient utiles. Elle remarqua qu’Esapdoum avait disparu, et aurait parié qu’une bombe n’allait pas tarder à exploser. Elle ne prendrait pas le risque de se rapprocher de la mêlée. Elle passa ses cheveux derrière l’oreille. Ce n’était pas la peur qui la poussait à rester à l’écart, elle n’était pas lâche, et encore moins trouillarde. Non. Elle savait juste que si elle partait au corps à corps, elle passerait les trois prochaines semaines à l’infirmerie, au mieux. Décoiffée en plus. Elle avait bien évidement été entraînée au combat rapproché, mais elle ne s’y sentait pas bien, elle y était comme étouffée : trop peu d’espace et de moments de répit.  Elle encocha une autre flèche. Visa. La flèche siffla, et traversa en une seconde les quinze mètres qui la séparait de l’Œil. Un tentacule s’arrêta de bouger. Le sang coula. Elle remarqua la mine posée juste sous le revenant. Elle ne s’était pas trompée… Elle descendit rangeant son arc, et se mit à couvert.

            Esapdoum attrapa le nécromancien par la taille, tira sur le sol avec son fusil. Le recul généré par le tir de tromblon fut tel que grâce à une simple poussée de la part de l’ingénieur, ils parcoururent une vingtaine de mètres, et atterrirent en roulant au sol. Dynfaw, surprit, commença :

« Qu’est-ce que ??... »

- Boum… «  Obtint-il pour toute réponse.

Il se retourna. L’Œil explosa, disparaissant dans un déluge de feu et de flammes. La terre trembla sous la puissance de la détonation, et l’onde de choc les souffla, les déséquilibrant. Quatre autres explosions retentirent, alimentant le feu d’artifice de napalm et de poudre. Il y eut un court instant de répit. Puis une sixième explosion, semblant venir d’en haut.

            Tout se passa très vite. Un bruit assourdissant déchira le silence d’Orr. La conflagration détacha le gigantesque pic rocheux au-dessus d’eux. Un craquement sourd se fit entendre, et une pluie de décombres s’abattit sur eux. Jetés à terre par la puissance de la déflagration, ils regardèrent, impuissants, le roc fondre sur eux. Dynfaw ferma les yeux. Une  dernière mine se déclencha. Un champ de force bleuté se forma autour d’eux.

            Une voix douce et familière le réveilla :

« Ça va ? »

La voix d’Iryenna. Il émit un grognement, sortant de son inconscience comme l’on sort d’un long tunnel plongé dans le noir. Dynfaw ouvrit lentement ses yeux, ébloui par le pâle soleil d’Orr. Les évènements, tels des pièces de puzzle, s’emboitèrent petit à petit dans son esprit : la bataille… la victoire… l’Œil… les explosions… puis le rocher. Mais il ne parvenait toujours pas à se relever… Iryenna déposa un doux baiser sur ses lèvres… et le gifla. Surpris, il se redressa d’un seul coup, aspirant une grande goulée d’air. Il se redressa péniblement, titubant. Il demanda, scandalisé :

« Pourquoi t’as fait ça ?? 

-Ça t’apprendra à me faire des frayeurs ! J’étais morte d’inquiétude !!! »

Elle ne changera jamais… Se dit-il.

Elle lui tendit une main gantée d’un épais maillage végétal vert en rouge orné d’une petite fleur et dit :

« On va voir les autres ?

-Oui, allons-y. »

 Tout en marchant il regarda autour de lui : du corps de l’Œil il ne restait qu’un tentacule, s’agitant frénétiquement. Il l’écrasa de tout son poids sous sa botte et se dirigea vers  SombreLame :

« Commandant ? Réveillez-vous, on a vaincu… »

Ce  ouvrit les yeux, et se releva en chancelant. A part un œil à demi fermé couvert de sang, la lèvre éclatée et une épaule déboitée, il semblait bien se porter. Il fallait néanmoins remettre cette épaule… Il attrapa l’articulation. Le commandant, habitué, se laissa faire. Il la remit en place d’un coup sec. Un craquement étouffé et sec se fit entendre. Le Charr grimaça un instant, puis fit jouer son épaule, faisant de grands moulinets, comme si de rien n’était et le félicita:

« Bravo petit ! Beau boulot. Allons chercher les autres. »

Ils y allèrent sans un mot. SombreLame réveilla Esapdoum :

« Allez tronche de platane, on se lève… »

Pendant ce temps, Dynfaw chercha son frère. Il n’était nul par… Ils cherchèrent partout durant plusieurs dizaines de minutes, mais rien n’y faisait, Shadoine avait tout bonnement disparu…

            Ils ne retrouvèrent qu’une de ses dagues, plantée dans le sol…