Un monde d'Arcs-en -ciel

Chapitre 22 : Une nuit magique

Catégorie: M

Dernière mise à jour 08/11/2016 23:00

Chapitre 22 : Une nuit magique

 
         La cérémonie de remise des diplômes était passée. Depuis que Rei s’était installée chez Ayumi, Maya se sentait bien seule. Elle regardait avec nostalgie l’album de sa promotion. Ses camarades de classes, qui étaient devenus ses fans, y avaient tous écrit un petit mot. Mais celui qui l’avait le plus touchée venait de la présidente du club de théâtre :
« Te voir interpréter Jane m’a appris beaucoup de choses. Merci, Maya-san. »
Elle aurait bientôt dix huit ans et entrerait enfin dans le monde des adultes. Elle pensa au chemin parcouru ces cinq dernières années.
Sans vous, Sen’seï, qui n’avez découverte et donné ma raison de vivre, sans toi, Masumi, qui m’as fidèlement aidée et soutenue dans l’ombre, que serais-je aujourd’hui ?
En pensant à Masumi, des images osées lui traversèrent l’esprit. Elle sentit une curieuse impression et rougit jusqu’aux oreilles.
Qu’est-ce qui me prend d’imaginer ça ? Oh mais… Ça n’est pas désagréable du tout !
Dans peu de temps, elle se rendrait avec Ayumi dans la Vallée des Pruniers. Les choses sérieuses commenceraient alors.
         De son côté, Masumi était pensif. S’étaient-elles donné le mot ? Saeko, Ayumi et maintenant Shiori ! Un véritable complot de femmes !
Ce n’est pas que je ne voudrais pas le lui dire. Mais pourra-t-elle croire que je suis son fan anonyme ? Pourra-t-elle jamais me pardonner la mort de sa mère ? Non, elle me hait trop pour ça.
Saeko entra dans le bureau et le tira de sa rêverie.
-Masumi, Maya-chan part demain pour la Vallée des Pruniers. Que comptes-tu faire ? Vas-tu l’y rejoindre pour enfin te déclarer ?
-Tu as vraiment de la suite dans les idées, Saeko. Tu sais pourtant pourquoi je ne peux pas !
-Balivernes ! Tu préfères souffrir en silence ? Être rejeté te ferait-il plus souffrir qu’en ce moment ? Qu’as-tu à perdre en lui disant la vérité ? Et peut-être y as-tu tout à gagner, qui sait ?
-Je sens bien que tu as raison, mais… je…
-Ah, tu m’énerves ! Es-tu un homme ou un mollusque ? Du nerf, bon sang !
Saeko avait touché le point sensible. Mettre en doute sa virilité, non mais ! Il réagit aussitôt comme elle l’avait prévu.
-C’est bon, tu as gagné. J’irai la rejoindre et je lui dirai tout !
Enfin ! Ça a été vraiment pénible, mais j’y suis arrivée. Merci, Ayumi-san, merci, Shiori-san ! Vous m’avez bien aidée à enfoncer le clou…
Le lendemain, tout un groupe de personnes prit le train pour la Vallée des Pruniers. Outre le président de l’ANT et quatre jurés, il y avait Maya et Ayumi, accompagnée bien sûr de Rei, Kuronuma et Onodera, qui devaient aider les jeunes actrices à préparer leurs prestations. Le plus grand secret avait été gardé sur ce départ, aussi aucun journaliste ne viendrait les déranger. Les trois filles s’étaient mises ensemble et semblaient bien s’amuser. Ayumi et Rei furent écroulées de rire lorsque Maya, en rougissant, leur raconta ce qu’elle avait ressenti en pensant à Masumi.
-Mais ma chérie, c’est tout à fait normal d’avoir des fantasmes. Si je te racontais ceux que j’ai eus à propos de Rei avant qu’on soit ensemble, tu te cacherais sous la banquette !
-Et je ne te parle même pas des miens sur Ayumi ! Ce qui serait inquiétant, c’est que tu n’en aies pas.
Dans leur coin, Kuronuma et Onodera se regardaient en chiens de Fayence. Kuronuma méprisait Onodera, qu’il considérait comme un imposteur et Onodera craignait et jalousait le talent de Kuronuma, qu’il pressentait bien supérieur au sien. Après sept heures de train et trois heures de car, ils arrivèrent enfin au petit village près de la vallée. Genzo les attendait et les conduisit à l’auberge du village où, excepté Maya et Ayumi, qui logeraient dans l’ancien temple, ils prirent tous une chambre. Puis Maya, Ayumi et Genzo se rendirent à l’ancien temple, à peu de distance de la sortie du village.
Le lendemain, Maya et Ayumi allèrent se recueillir sur la tombe de Chigusa, après quoi  les épreuves commencèrent. Elles devaient jouer le vent, le feu, l’eau et la terre. Onodera, qui avait une confiance aveugle en Ayumi et une touffe de poils dans la main, ne lui fut d’aucune utilité. Pour le vent et le feu, elle dut faire appel à sa technique et son don de la danse.  Ses prestations raffinées et élégantes ravirent les jurés. Par contre, les conseils de Kuronuma furent très utiles à Maya, et ses prestations, moins élégantes que celles d’Ayumi, mais plus puissantes, impressionnèrent les jurés. Pour jouer l’eau, Maya et Ayumi s’étaient isolée, Ayumi au bord de la rivière et Maya perchée sur une branche du prunier réputé millénaire. Elle réfléchissait sur la façon de jouer l’eau lorsqu’elle vit avancer Masumi.
-Hayami-san ! Que faites-vous ici ?
Levant la tête, il vit Maya et prit peur pour elle.
-Chibi-chan, descends vite de là, c’est dangereux !
-Aucun risque, Hayami-san, vous êtes vraiment frouss… Aaaaaah !
Masumi eut juste le temps de la recevoir dans ses bras.
-Euh… Hayami-san, c’est bon. Vous pouvez me reposer, maintenant.
Ils marchèrent côte à côte quelques instants, le cœur battant et n’osant se regarder lorsqu’une averse leur tomba dessus. Heureusement, un petit temple se trouvait non loin et ils coururent s’y réfugier. C’était le temple consacré à La Nymphe Écarlate et sur tous les murs, des tableaux de bois peints en ocre racontaient la légende de la nymphe.
-C’est donc cela, la Nymphe Écarlate, l’histoire de l’amour impossible d’une déesse et d’un humain. Je suis sûr que tu seras fabuleuse dans ce rôle, comme tu l’as été dans tous ceux que tu as tenus jusqu’à présent. J’ai toujours aimé te voir jouer, tu sais. Que ce soit Beth, Midori, Gina, Tazu, Catherine, Puck, Aldis ou Jane, tu m’as toujours impressionné par l’étendue de ton talent.
Masumi sentait que le moment crucial était arrivé. S’il ne disait rien maintenant, il n’aurait sans doute plus l’occasion ni le courage de le faire. Il se mit derrière Maya et posa les mains sur ses épaules.
-Chibi-chan, tu veux bien écouter ce que j’ai à te dire sans m’interrompre ? C’est… très important…
Le cœur de Maya battit encore plus vite. Allait-il enfin…
-Oui, Hayami-san, je vous le promets.
-Te souviens-tu de ceci : « Kitajima Maya-sama
Devenez vite une Beth en bonne santé. J’ai hâte de vous voir dans votre prochain rôle.
Votre dévoué admirateur
»
Cette fois, le cœur de Maya faillit s’arrêter.
Il va le dire ! Mon Dieu, faites qu’il avoue enfin qu’il est mon fan !
-Et bien d’autres message de ce genre, accompagnés de roses pourpres t’ont été envoyés. C’était moi, Maya. C’est moi qui t’ai aidée et soutenue dans l’ombre toutes ces années. C’est moi qui, sans le savoir, suis tombé amoureux de toi lorsque je t’ai vue jouer Beth.
Masumi poussa un profond soupir, puis reprit :
-Mais c’est moi aussi qui ai fait couler la pièce que tu avais si bien jouée, c’est moi qui me suis souvent moqué de toi, qui t’ai dit tant de méchancetés et surtout, qui suis responsable de la mort de ta mère… Mais je…
Maya ne pouvait plus tenir. Elle se retourne et se jette dans les bras de Masumi.
-Arrête, Masumi. Ne dis plus rien. Je savais que c’était toi mon admirateur anonyme, et je n’attendais qu’une chose : que tu me le dises. Moi aussi je t’aime. Je crois que je t’ai aimé le jour où on s’est rencontrés au théâtre. Je crois qu’à ce moment là, nos âmes sœurs se sont reconnues.
Les larmes commençaient à couler sur ses joues.
-Pour ma mère, je sais que tu le regrettes sincèrement, je l’ai vu dans tes yeux. Mais tu avais de bonnes intentions, c’est pour moi que tu l’as fait, pour augmenter ma popularité. Mais moi, quelle excuse ai-je pour l’avoir abandonnée comme ça ?
-Vivre sa passion peut tout excuser, même ça. Tu avais la chance d’avoir une raison de vivre. Moi, je n’en ai découvert une que lorsque je t’ai rencontrée. Tu vis dans un monde merveilleux, un monde d’Arcs-en-ciel que seuls les plus grands acteurs et actrices, comme Tsukikage-sen’seï, Ayumi-kun, toi et quelques rares autres peuvent atteindre.
-Je t’y conduirai, mon amour. Je te prendrai par la main et t’y emmènerai.
Elle se serra encore plus contre lui et lui dit :
-Tu sais, depuis le jour où je t’ai serré dans mes bras dans ton pavillon d’été, ce jour où tu m’as donné mon premier baiser, je me suis juré de n’appartenir qu’à toi. Alors… si tu en as envie…
Question superflue ! Serrée contre lui, il était évident pour elle qu’il en avait envie !
-Tu en es sûre ? Ô, Maya…
-Oui, chéri, je suis prête. Je le suis depuis longtemps. Mais, comme c’est la première fois, sois très doux, je t’en prie.
Il se pencha vers elle et lui donna ce second baiser qu’elle attendait depuis si longtemps. Il était aussi intense et fougueux que le premier avait été doux et léger. Puis, avec beaucoup de douceur, il lui enleva ses vêtements. Maya frissonnait, mais ce n’était pas de froid. Elle ne sentait plus la morsure du froid qui était tombé, ni la rudesse de la natte sur laquelle il l’allongea.  Elle ne sentait que le feu qui brûlait en elle et la chaleur du corps de Masumi qui était allongé près d’elle. Elle eut encore des frissons de plaisir lorsque les lèvres et les mains de Masumi explorèrent tout son corps. Puis leurs corps ne firent plus qu’un, et tout autour d’eux disparut. Seuls existaient les battements de leurs cœurs et les mouvements synchronisés de leurs corps. Maya éprouva des sensations jusqu’alors inconnues et des plaisirs que même ses fantasmes les plus fous ne lui auraient jamais fait soupçonner. Lorsqu’à regret leurs corps se séparèrent, elle se blottit entre ses bras.
-Mon amour, c’était magique. Je n’aurais jamais cru qu’un tel bonheur puisse exister. Je t’aime… je t’aime tant que mon cœur va exploser. Jure-moi que nous resterons toujours ensemble. Je ne pourrais plus vivre sans toi.
-Je te le jure, Maya chérie. Moi non plus, je ne pourrais plus vivre sans toi. Tu es la seule, l’unique. Plus rien ne pourra nous séparer.
Enveloppés dans une vieille couverture qui traînait près d’eux, ils s’endormirent, étroitement serrés l’un contre l’autre. Tôt le lendemain matin, il la raccompagna à l’ancien temple. Ils marchaient serrés l’un contre l’autre, lui la main sur son épaule et elle la main sur sa taille. Genzo, Ayumi, Rei, le président de l’ANT et les deux metteurs en scène étaient déjà là. Masumi fut étonné. Mis à part les metteurs en scène, personne n’avait l’air surpris de les voir ensemble. Puis il comprit. Genzo et le président avaient dû être mis au courant par Tsukikage-sen’seï, qui avait deviné leur amour. Quant à Ayumi et Rei, les deux meilleures amie de Maya, quoi de plus naturel ! Ayumi se jeta sur Maya et la prit dans ses bras.
-Je suis si heureuse pour toi. Enfin, c’est arrivé ! Il était temps de vous décider, Hayami-san !
Puis se penchant, elle murmura à l’oreille de Maya :
-Maya chérie, alors, comment c’était ? Tu me raconteras tout, n’est-ce pas ? Et avec les détails !
-Ayumi, enfin !
Kuronuma, quant à lui, était ravi. Maya amoureuse et aimée en retour, voila qui était excellent pour le rôle d’Akoya, l’incarnation de la Nymphe Écarlate. Ils allaient pouvoir faire du bon travail ensemble. Par contre, Onodera faisait grise mine. Il commençait à comprendre bien des choses qui l’avaient un peu étonné dans l’attitude de Masumi.
Comment a-t-il pu tomber amoureux de cette gamine ? Certes, elle a bien un petit talent d’actrice, mais rien de comparable à celui d’Ayumi-kun ! Cette petite passade ne durera sûrement pas. Hayami-kaichô va rapidement y mettre bon ordre.
Ce qu’Onodera ignorait, c’est que si Eisuke faisait partie du problème, il faisait également partie de la solution !
Masumi prit à nouveau Maya dans ses bras.
-Ma chérie, je dois rentrer à Tokyo pour mes affaires. Mais je t’appellerai dès ton retour. Tu restes dans mon cœur, je t’aime.
-Mon amour, tu restes aussi dans mon cœur et la distance qui nous sépare ne peut rien contre notre amour. Je t’aime…
Et devant un Onodera scandalisé, ils s’embrassèrent avec passion. Ayumi et Rei étaient ravies. Si elles n’avaient craint de les gêner, elles auraient même applaudi ! Maya, leur petite Maya qu’elles chérissaient toutes deux allait enfin être heureuse.
Une fois Masumi parti, le président de l’ANT demanda aux filles :
-Ojô-san, êtes-vous prêtes pour la représentation de l’eau ?
-Pas tout à fait, Kaichô. Mais je pense maintenant savoir comment faire. Pourrions-nous le faire demain à la chute d’eau ?
-Et vous, Ayumi-san ?
-L’endroit de la chute me convient parfaitement. Je serai également prête demain.
-Bien. Dans ce cas, je vais en aviser le jury.

 

À suivre...
 

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