Double boucle temporelle

Chapitre 2 : La boucle de Carl Neely

1121 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour il y a 7 jours




7 novembre 2008, département de police de Grandview, bureau B 123, 19 h 20.


Carl Neely, un trentenaire très sérieux, détective policier depuis plusieurs années, est assis sur la chaise de son bureau. Il doit faire son quart de nuit. Pour passer le temps, il lit à la lumière d’une ampoule le rapport qu’il a rédigé la veille, sur une enquête de la semaine passée sur un homicide à Grandview. Carl joue avec son stylo qu’il tient entre les doigts de sa main droite, penché sur son rapport, corrigeant de-ci de-là quelques fautes d’accord. Il veut s’assurer d’écrire un texte impeccable. Le silence de la pièce est brisé par la sonnerie du téléphone. Le détective lâche son stylo pour saisir le combiné : – Bonsoir, le détective Carl Neely. Que puis-je faire pour vous ?

Une voix larmoyante au bout du téléphone répond : – C’est Melinda Gordon…

Pourquoi m’appelle-t-elle ? Sans doute quelqu’un est en danger…

Front plissé, le détective l’interroge d’un air sérieux : – Que se passe-t-il ? 

Melinda poursuit : – Jim… Mon mari… est… en danger…

– Pouvez-vous préciser ?

– Un homme… armé… le menace…

Oh là ! L’affaire est sérieuse !

– La location de l’endroit, s’il vous plaît ?

– 120, près du lac Morton…

– À l’est de Grandview ?

– Oui ! Il est… dans la cabine… dans la cabane… annexée… à ce domaine…, dans la forêt…

– J’arrive au plus vite !


Les deux raccrochent leur téléphone puis le détective se dépêche de prendre son manteau de complet qu’il jette sur ses épaules puis se dirige rapidement vers un véhicule de fonction dans le stationnement du département de police, s’y engouffre à la place du conducteur, puis regarde rapidement sur une carte le trajet le plus court pour se rendre jusqu’à sa destination. Comme il a déjà fait le trajet la veille, pour y apporter les résultats de son enquête sur Hunter Clayton à la demande de son ami ambulancier Jim Clancy, Carl Neely s’y rend alors rapidement. Il stationne le véhicule de fonction près d’une cabane perdue dans un bois, celle où une lumière se voit. Le détective, avec son arme de fonction sous son uniforme, se rapproche à pas de loup de la cabane pour se tenir près d’un arbre, de manière à regarder les ombres que projettent l’ampoule. Il observe attentivement le mouvement : deux ombres qui tantôt avancent tantôt reculent vers une direction puis vers la direction contraire, en renversant peut-être quelques objets au passage. 

Il me semble que Melinda a mentionné qu’un homme est armé… Zut ! J’aurai dû venir avec du renfort… À moins que je rentre pour évaluer la situation… Ensuite, je peux essayer d’immobiliser l’homme armé… Au moins de l’effrayer…

Fatigué, Carl sort son arme de sous son uniforme, vise vers la vitre, alors qu’il n’a aucune des ombres qui est proche, puis tire. Sauf qu’il n’a pas prévu que l’une des ombres sera dans la ligne de tir, de sorte qu’elle est atteinte.

Attristé, le détective baisse son arme de fonction. Zut ! Tu es vraiment un idiot ! Viser ainsi de loin !

Malgré la culpabilité qui le ronge, il court près de la cabane et ouvre violemment la porte, pour remarquer Hunter Clayton sursauter maladroitement, visiblement ivre, comme il le devine à ses yeux rouges plissés qu’il semble avoir de la difficulté à les garder ouvert, à son exclamation empâtée lors de son irruption surprise et le manque de coordination lorsqu’il recule, surpris.

Le policier pense qu’il devrait lui faire passer un test pour savoir son taux d'alcoolémie.

Carl Neely, arme pointée vers lui, ordonne : – Monsieur, lâchez immédiatement cette arme !

Hunter proteste d’une voix avinée : – Qui… êtes-vous ? Je…

Le détective remarque du coin de l’œil que son ami ambulancier gît sur le sol, inconscient, étant donné l’absence de réaction. Il soupire. En espérant qu’il se rétablira rapidement… Je suis vraiment désolé, Jim

Carl ramène son attention sur l’ex-fiancé de Tricia, s’éclaircit la voix puis répond d’un ton sévère : 

– Je suis le détective Carl Neely… Je dois vous arrêter pour attaque armée.


Ignorant le bruit de protestation de son interlocuteur, qui trébuche en reculant, Carl le désarme aisément, lui passe des menottes aux mains et le pousse devant lui jusqu’à son véhicule. Une fois à l’extérieur de la cabine, il communique avec des collègues au moyen d’un émetteur-récepteur portatif. Il ajoute la nécessité de faire venir une ambulance. Deux autres voitures de police et une ambulance arrivent aussitôt. Carl laisse ses collègues ramasser le fusil de chasse. Il remarque du coin de l’œil que Jim est allongé sur une civière. Deux collègues s’occupent de lui, en s’assurant que le blessé soit allongé de manière sécuritaire. Carl embarque dans son véhicule de fonction, les yeux humides, le regard dans le vague, les épaules affaissées. Il conduit comme un automate, sans prêter attention aux signalisations sur la route. Il active les sirènes pour passer en priorité. Je viens de blesser un innocent… Comment ça a pu arriver ? Pourquoi moi ? Pourquoi à ce moment ? Le détective est dévasté. Il ne croit pas à ce qu’il vient de voir. Il est dépassé par ce qu’il vient de faire. Carl se rend dans son bureau, en se jetant sur la chaise derrière le bureau. La tête entre ses mains, il rumine ce qui vient de se passer. J’ai blessé un innocent… En plus, un ami… Quelle imprudence ! Pour avoir commis une telle faute grave, je devrais quitter mon poste… Je ne devrais plus jamais porter d’armes…




À ce moment, l’Archange Michel, le patron des policiers, sous les traits d’un jeune homme blond aux yeux bleus, vêtu d’un complet blanc, arrive devant la porte du bureau de notre détective et murmure : « Monsieur Carl Neely, que le Seigneur vous éclaire ! Vous répéterez votre intervention dans la cabine, mais aucune erreur ne sera tolérée ! » Puis l’Archange disparaît aussitôt avant que quelqu’un ne le remarque.


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