Survivre à Gantz

Chapitre 12 : Dernière soirée avant la fin de l'année.

5184 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 07/11/2020 01:41

Un mois était passé depuis la dernière nuit, un mois calme et sans encombres durant lequel je restais souvent en contact avec John et Lucie. Tous les trois, quand nous avions le temps, nous réunissions afin de nous entraîner. Nous voulions tous les trois être le plus apte possible à survivre, et cela passait par des exercices à l’extérieur. Si John était sportif et avait fait de la boxe pendant un temps, on ne pouvait en dire autant de Lucie et moi. Elle était en bon forme physique et avait à son actif quelques années de gymnastique durant son enfance. Moi, je n'avais rien, hormis des quelques exercices que je m'étais mis à faire depuis la première nuit. Être coaché par un habitué comme John fut très difficile au début mais nous n'avions pas le droit de nous plaindre, car pour chaque exercice que nous faisions avec Lucie, John en faisait le double. Nous réussîmes à nous retrouver deux fois par semaine, et au bout d'un mois nous pouvions déjà sentir que nous étions en meilleure forme. La combinaison de Gantz, selon nos observations n'était là que pour nous protéger et améliorer nos capacités de bases. J'avais moi même remarqué des différences entre mes propres capacités en utilisant la combinaison à celles d'autres, particulièrement les businessmen. Plus on était naturellement forts, plus on pouvait le devenir avec la combinaison, et il devait en aller de même avec la vitesse, les réflexes et l'endurance. Autant dire que nous avions du pain sur la planche, car pour la suite et pour ramener deux êtres chers, nous devions devenir meilleurs. Gantz voulait des soldats, alors nous allions devenir des soldats.


Mais au bout d'un mois, le stress commença à nous gagner tous les trois. C'était la première fois que nous restions inactifs sur une si longue période. Lucie nous expliqua qu'elle avait déjà connu ça une fois avant mon arrivée et que ça avait été une bénédiction autant qu'un long calvaire. Chaque jour qui passait nous ne pouvions nous empêcher de redouter l'arrivée de cette sensation sur notre nuque nous annonçant le début de la prochaine mission. Aussi fort que fût notre engagement, la peur d'avoir à nouveau se battre venait s'insinuer chez nous comme un liquide froid traversant nos corps. Mais il y avait aussi, et c'était le plus surprenant, une forme d'impatience. Car chaque jour qui passait c'était une journée de plus sans Roman et Déborah, une journée de plus où ils n'étaient présents que dans la base de données de Gantz. Une journée de plus à attendre avant leur retour et une journée de plus qu'ils allaient devoir rattraper une fois de retour. Les plus affectés étaient bien entendu mes deux acolytes qui oscillaient dangereusement entre ces divers sentiments. Pour ma part je tentais ce que je pouvais pour les soutenir. Je les enviais parfois d'avoir une aussi bonne raison d'avancer et de se battre. Ma résolution de leur venir en aide était au moins aussi forte, mais au delà de ça je ne me battais que pour ma survie. Lorsque je me comparais à eux, je me trouvais bien pitoyable.


C'est ainsi que nous arrivâmes bientôt au premier jour d'avril. Avec lui venait le début du printemps, l'approche de la fin de mon année d'étude, la multiplication des fêtes étudiantes et beaucoup de questions. Certains parlaient déjà de leurs poursuites d'études, d'autres n'avaient la tête qu'aux multiples fêtes et autres festivals de l'été. Et moi au milieu de tout ça, je me sentais perdu, et un peu paniqué. Je savais que je terminerais l'année sans problème et que j'obtiendrai mon diplôme de licence sans trop de soucis...mais je ne m'étais pas demandé quoi faire après. Avec tout ce qui s'était passé depuis janvier, ce n'est pas comme si j'avais eut beaucoup de temps devant moi pour penser à ce genre de choses. Dans mes connaissances, la plupart disaient vouloir partir en Master, et pour la plupart, dans des villes différentes. Sans se le dire, comme un sujet tabou, tout le monde savait que les groupes d'amis formés durant ces trois années ne dureraient pas. On a beau créer de belles choses, la vie faisait que les gens prenaient tous des chemins différents et venaient à ne plus se voir où se parler, malgré de belles promesses, ne laissant alors que des souvenirs. Je ne me souciais pas vraiment de tout ça, je comptais simplement profiter au maximum des jours devant moi, des ces amis et de ces instants. Et si possible, j'allais essayer de survivre aux prochains mois et les missions allant avec. Cependant les inscriptions pour la poursuite d'étude n'allaient plus tarder et je me promettais d'y réfléchir correctement dès que j'aurais un peu de temps.


- Apparemment il y aura une énorme fête ce soir chez Mousk !


Bastien, toujours très au courant des soirées et de bons coups nous lança cette information alors que nous mangions tranquillement avec Stan. Ce dernier et moi même on se regarda sans trop rien dire, on voyait où il voulait en venir mais lui et moi partagions les mêmes pensées.


- Quoi, me dîtes pas que ça ne vous tente pas ?

- Mousk va encore ouvrir son appart à n'importe qui, commenta Stan, il y aura beaucoup trop de monde, ce n'est pas mon genre de soirées.

- Allez quoi, ce sera peut-être la plus grosse soirée avant la fin de l'année, on peut pas louper ça.

- Et on connaît à peine Mousk, peut-être que l'on entre chez lui comme dans un moulin mais moi...je sais pas, ça ne me plaît pas, continua Stan.


Tout deux se lancèrent dans un débat enflammé sur « Pour ou contre aller à cette soirée » et de mon côté, comme à mon habitude, je gardais le silence, pesant bien mes pensées, réfléchissant à tout ceci avant de prendre une décision. Mousk était...un gars, dans une autre fac, à dire vrai je ne sut jamais quelle études il faisait. Il vivait dans un appartement assez grand mais un peu miteux. Il était assez connu, par beaucoup de gens, pour organiser des grosses soirées chez lui. Les gens y venaient, parfois en nombre, pour faire la fête. Pour quelles raisons ? Pourquoi ce gars et son appart plutôt qu'un autre ? Son appart était simple, l'entrée donnait sur un très grand salon avec des toilettes sur le côté. Plusieurs canapés, et des poufs et une déco assez baba cool. Sur un côté un escalier grimpait sur une mezzanine elle aussi garnie de plusieurs poufs et d'un immense matelas ainsi qu'une table avec un narguilé. Il y avait une toute petite porte dans un coin donnant sur une cuisine à la taille ridicule comparée au salon. Dans cette cuisine il y avait trois autres portes, l'une donnait sur une chambre assez simple et une salle de bain, l'autre donnait sur une petite cour intérieure avec une large table de pique nique et d'autres sièges construits en bois de palette. Mais il y avait surtout la dernière porte dans la cuisine. Elle avait un aspect vieillot, en vieux bois, garnies d'armatures en fer épais. On aurait dit une porte telle qu'on aurait put les voir dans une vieille église ou en visitant un château. Et c'est à cause d'elle que des gens venaient chez Mousk.


Derrière cette porte, il y avait un escalier donnant sur un long couloir éclaire par des lanternes rouges et sur chaque côté de ce couloir, des sortes d’alcôves donnant sur plusieurs petites caves. La soirée typique chez Mousk commençait généralement ainsi. Mousk invitait des amis à lui, des connaissances à lui et ils entamaient la soirée. Puis ces amis et ces connaissances appelaient des amis et des connaissances à eux pour venir. Ils leur donnait le feu vert en quelque sorte. Les gens arrivaient alors en petits groupes au cours de la soirée, prévenus par l'un ou par l'autre des gens déjà présents. On remplissait le salon, puis la mezzanine, puis enfin les caves. On buvait beaucoup, on fumait encore plus et on se droguait à foison. Je disais parfois pour plaisanter que plus on avançait dans les caves plus on passait d'une drogue douce à une drogue dure. Et généralement, sans que personne n'y fasse vraiment attention, plus d'une centaine de personnes se retrouvaient à inonder les lieux. Je n'en avais pas encore été témoins, mais il se racontait que les soirées les plus extrêmes finissaient presque en orgie et que si l'on arrivait très tard il n'était pas étrange de voir des gens faire l'amour dans des coins ou dans les caves, que ce soit à deux ou à plusieurs. Bref, l'appart de Mousk était un squat pour tout ceux qui voulaient s'amuser, délirer, tenter des choses extrêmes et au final, tout oublier le temps d'une soirée. Qu'en pensait Mousk de tout ceci ? Pas grand chose, pour le peu de conversations que j'eus avec le bonhomme, il donnait même l'impression de s'en moquer éperdument.


- Allons y, dis-je soudainement.


Stan se tourna vers moi, assez surpris.


- Ah, enfin un de mon côté, dit Bastien en frappant triomphalement son poing sur la table.

- Tu veux y aller, toi, la dernière fois c'est même toi qui a insisté pour rentrer, fit Stan en me questionnant du regard.

- La dernière fois c'était il y a un an, aujourd'hui c'est différent !

- Exactement ! On arrive à la fin de nos études, continua Bastien, bordel je sais même pas si on se reverra une fois l'été passé et que l'on sera tous parti continuer nos vies dans des villes différentes, alors profitons en bordel de merde !

- Je comprends l'idée de s'amuser, et c'est vrai que si on veut finir en beauté y'aura certainement pas de meilleures occasions, ajouta Stan, mais putain, il va encore y avoir tellement de monde...

- Et alors, lançais-je à mon tour, on s'en branle, de toutes façons au bout de quelques heures on sera tellement bourrés que l'on discutera avec n'importe qui !


On ne tarda pas à convaincre Stan qui, il fallait bien l'avouer, ne fut pas difficile à convaincre. Et c'est ainsi que l'on se retrouva devant la porte de Mousk et ce fut lui même qui nous ouvrit la porte. Il salua Bastien en premier, car c'était lui qui le connaissait le mieux, mais il nous reconnut assez vite et nous salua en nous invitant à nous mettre à l'aise. Nous entrâmes, déposant les packs de bières et les bouteilles que nous avions amené pour l'occasion et je remarquais aussitôt que nous n'étions pas très nombreux. C'était une première pour moi, d'arriver parmi les premiers chez Mousk. Et la soirée commença comme toutes les autres soirées. Nous étions une petite dizaine pour commencer, tous installés sur les canapés au milieu de la soirée. On commença à boire assez vite et la pièce commençait d'ores et déjà à s’envelopper de fumée de cigarette et de pétards. Pour ma part, je m'étais juré de ne pas fumer ce soir là...de toute façon avec la fumée ambiante je savais très bien que j'aurais ma dose. Ce soir j'avais décidé de me lâcher, la dernière grosse soirée avant la fin de cette année scolaire, avant la fin de ma Licence. La dernière soirée peut-être en compagnie de mes deux vieux compagnons qu'étaient Bastien et Stan. La dernière soirée où je me lâchais complètement avant de me concentrer sur d'autres objectifs plus pressants...comme ma survie durant les missions de Gantz. Pas d'esprit sain dans un corps sain ce soir là ! J'allais certainement le regretter le lendemain matin mais bon, on ne vivait qu'une fois...enfin deux fois en ce qui me concernait.


Si nous échangeâmes quelques discussions avec Stan et Bastien, ceux ci se trouvèrent rapidement occupés par d'autres sujets. Bastien s'était rapidement lancé dans une conversation assez amusante où il faisait presque un sketch, reprenant des lignes d'une comédie qu'il connaissait presque par cœur. Apparemment le duo avec qui il parlait connaissait le film aussi bien que lui et ce trio étrange s'amusait à se réciter le film. Stan lui discutait vivement de politique, l'un de ses sujets favoris, échangeant des idées quasi anarchistes et enflammées avec un autre gars qui lui n'était apparemment pas du même avis. Le ton montait entre eux mais gardait une certaine cordialité, comme si ils étaient plus intéressés par le débat que par l'affront. Et moi, le hasard agissant parfois étrangement, je me mis à causer simplement avec un type apparemment plus vieux que moi. Il fut d'une part surpris d'apprendre que je n'avais que 20 ans, il m'en aurait apparemment donné plus. Ceci ne me surprit pas, depuis quelques années déjà on me faisait plus vieux que mon âge...peut-être à cause de la barbe, mon attitude, ou peut-être ma façon de parler. Quoiqu'il en soit il se trouva que cet étranger connaissait bien un autre type que j'avais connu du temps du collège. Ce gars là n'avait jamais été mon pote à l'époque mais il fut utile à cette soirée, me permettant d'engager la conversation avec cet inconnu. En bref, la soirée commença simplement, faîte de simples conversations et éclats de rires, d'échanges d'anecdotes et d'avis, le tout accompagné d'une petite musique en fond.


Mais au bout d'une heure, un premier groupe arriva, composé de cinq personnes que je ne connaissais pas. Aussi surprenant que cela puisse paraître, le groupe ne salua que Mousk, passa à côté de nous sans même nous adresser un regard, et s'en alla directement dans la cuisine en direction des caves. Puis une heure s'écoula alors durant laquelle beaucoup de gens arrivèrent, certains en connaissant d'autres déjà présents, se répartissant sur les canapés, les poufs, grimpant à la mezzanine ou directement dans la cour intérieure ou vers les caves. Une fois fois cette heure passée, le petit groupe de quinze était devenu à vue de nez une petit groupe de quarante personnes, et encore, je n'avais pas encore été dans les caves. Ce fut à peu près à ce point là que je perdais de vue Stan et Bastien sans vraiment le vouloir. Je faisais mon chemin au travers de cette soirée au gré des conversations et des gens sans avoir de but précis. Les heures s'enchaînèrent et j'atteignis sans m'en rendre compte un état d'ébriété assez avancé.


Le salon était très enfumée, la musique restait basse et on l'entendait à peine, couverte pas toutes les conversations. Je craquais à un moment, fumant une cigarette avec un groupe d'inconnus dans la petite cour extérieure, puis l'un d'eux proposa d'aller se faire un narguilé. Beaucoup ne furent pas intéressés mais l'idée me tenta bien et je grimpais avec lui sur la mezzanine. Il y avait du monde ici, et sans surprise, plusieurs personnes se trouvaient déjà autour du narguilé. Il était très grand, massif, et possédait quatre branches mais nous étions bien dix assis autour. Derrière nous, sur un groupe de poufs, d'autres personnes buvaient un alcool que j'imaginais être une sorte d'absinthe, tout en y trempant des sucres. Sur l'immense matelas, trois personnes étaient allongées, se faisant tourner un pétard, le regard perdu dans le vide du plafond. La soirée continua simplement, je fumais sur la narguilé lorsque l'on me passait l'une des branches tout en humectant ma bouche avec quelques gorgées de pastis. Les gens allaient et venaient mais je restais installé autour du narguilé un bon moment, perdant la notion du temps, jusqu'à ce qu'une jeune femme s'installa à côté de moi.


On se mit à discuter elle et moi tout en se passant le narguilé, elle buvait de son côté de la vodka caramel. Sans que je comprenne trop comment on en arriva là, elle m'embrassa au bout d'un moment avant de me passer la branche de narguilé. J'étais bien trop saoul pour capter comment j'en étais arrivé là, et à voir ses yeux vitreux, elle était elle aussi bien atteinte par l'alcool et certainement d'autres drogues. On s'embrassa encore un peu plus tard et quelques temps plus tard je me retrouvais allongé avec elle sur le matelas juste à côté. Je n'avais même pas remarqué que les personnes installées dessus à mon arrivée étaient parties. Sans vraiment parler, sans vraiment faire attention à ce qui se passait autour, l'inconnu et moi échangeâmes quelques autres baisers et caresses avant de s'abandonner complètement. Je n'avais pas la moindre idée de l'heure, je ne savais pas où était Bastien et Stan, et je ne savais pas si les gens autour de nous faisait vraiment attention à ce qu'il se passait. De manière maladroite, lente et malhabile, elle et moi on fit l'amour sur le matelas, se fichant de tout ce qui pouvait se passer autour. Je me souvenais par contre m'être protégé...dernier éclair de lucidité de la soirée avant de me laisser aller aux joies sexuelles avec l'inconnue. L'ensemble dura un certain temps que je ne saurais quantifier, mais on se retrouva allongés tous les deux sur le matelas, nu comme des vers, elle blotti contre mon torse, enveloppés dans une mince couverture à peine plus épaisse qu'un drap.


L'acte sexuel m'avait pas mal fait tourner la tête mais il eut le mérite de me faire dessaouler quelque peu. La salle autour de nous résonnait encore de quelques conversations mais était globalement silencieuse. Trois personnes se trouvaient autour du narguilé, aucun ne parlait, ni ne nous accordait la moindre attention. Leurs yeux étaient plongés dans le vide, comme si ils n'étaient plus présents parmi nous. Je pouvais entendre des gémissements de plaisir venir d'un coin du salon, à croire que nous n'étions pas les seuls à nous laisser aller. Mon esprit encore très embrumé, je fit l'effort de me concentrer sur elle, celle avec qui je venais de m'unir par le plus grand des hasards. Elle avait un visage ovale, une peau très claire, parsemée de quelques tâches de rousseurs sur les pommettes. Elle avait de longs cheveux roux lui tombant au milieu du dos, des yeux bleus gris. Elle n'était pas très grande, avait un corps menu mais des fesses assez rebondies et une jolie petite poitrine. Je ne connaissais pas son prénom mais ça n'avait pas d'importance. Elle était assez jolie, bien que ce n'était pas le genre de fille vers qui je me tournais d'ordinaire. Je regrettais presque d'avoir été autant bourré avant d'avoir fait l'amour...je n'en avais presque aucun souvenir. Puis, sans m'en rendre compte, je m'endormis. Je ne sais pas combien de temps, mais je fut réveillé par une sensation de tremblement alors que je rêvais d'un combat de Gantz où je me faisais bastonner par un alien à tête de chien.


- Alessio...


J'ouvrais les yeux, accablés aussitôt par une vive douleur au crâne. Dans la pénombre je vit Bastien, torse nu, ses vêtements dans les mains et une mine horriblement fatiguée. Il me murmura avec un sourire.


- Il est cinq heures du matin...je rentre dormir. Je ne sais pas où est passé Stan.

- Je ne sais pas non plus...je vais rester un peu.


Bastien me fit juste un signe de tête, avec un sourire il me fit un clin d’œil en voyant la fille toujours endormie dans mes bras.


- Je vois que je n'ai pas été le seul à profiter de la soirée.

- Casses toi !


Ma réplique ne se voulait pas méchante et il comprit, rigolant à ma réflexion, et s'en alla. J'entendis ses pas dans l'escalier de la mezzanine et chacun résonna dans mon crâne comme un coup de canon. Je fermais les yeux, à moitié endormi, cherchant à simplement finir ma nuit, espérant que je me sentirais mieux au réveil. Mais la douleur fut plus forte que la fatigue, j'eus beau tourner, rien n'y faisait, la douleur était insupportable. Je n'avais bien entendu pas emporté de cachets avec moi, pourquoi être prévoyant quand on pouvait être con ? Ce n'est pas comme si avoir des cachets avec soit était utile pas vrai ? Bordel, n'avais-je donc tiré aucune leçon des circonstances de ma première mort ? Je pensais alors à la fille dans mes bras, m'accrochant au cliché ridicule que les filles étaient généralement plus prévoyantes, plus organisées, et qu'elle devait peut-être avoir des médocs avec elle, ne serait-ce que pour ses règles. Mais elle dormait si bien, et je ne connaissais même pas son prénom. Mais la douleur fut plus forte que ma politesse et je la secouais doucement pour la réveiller. Elle bougea, marmonnant dans son sommeil sans pour autant ouvrir les yeux. J'hésitais à nouveau, enfilant mon caleçon, mes chaussettes, mon pantalon et mes chaussures dans l'idée de partir d'ici et trouver une pharmacie de nuit. Mais je me sentis soudainement très mal, secoué d'un vague frisson, mes tripes semblant se retourner sur elle même. Je savais que si je faisait plus de dix pas j'allais vomir partout.


Je la secouais à nouveau, plus vivement, résolu à ne pas bouger de ce matelas tant que mon malaise ne serait pas passé. Elle sursauta presque avant de s'immobiliser, ouvrant grand les yeux, me regardant un instant. Puis, soudainement, sans que je comprenne ce qu'il se passait, ses yeux se révulsèrent et elle fut prise d'une série de tremblements. Les premières secondes je ne comprenais pas ce qui lui arrivait, avant de réaliser que c'était peut-être grave. Ses tremblements s'intensifièrent et son corps semblait en même temps se crisper horriblement, mais le pire était sa respiration, de plus en plus saccadée, à la fois rauque et sifflante. Je réalisais ce qui lui arrivait, une sorte d'attaque, de l'épilepsie ou un autre truc. Je la secouais alors, cherchant à la ramener à elle, puis j'appelais à l'aide, plusieurs fois. Mais nous étions seuls sur la mezzanine et tout le monde devait être endormi autour de nous. Je criais, hurlais, ignorant totalement ma douleur afin que quelqu'un vienne, que quelqu'un nous aide. Je n'étais pas dans Gantz, ce n'était pas une mission, c'était le monde réel, et cette inconnue était entrain de mourir. Un gars dans le salon me répondit enfin, pour me dire de fermer ma gueule.


- Va te faire enculer espèce de connard, elle est en train de mourir, appeler les urgences, que quelqu'un vienne m'aider !


J'entendis alors du mouvement en bas, comme des gens se levant doucement, se dégageant de couettes. Mais la fille fasse à moi, dans un dernier soubresaut, s'immobilisa. Ses yeux revinrent à la normal, mais ils étaient fixes. Je lui touchais le cou du bout des doigts et n'y sentit rien. Je posais mon oreille sur sa bouche, elle ne respirait plus. Je criais que l'on vienne à mon secours et alors, l'impossible se produisit.


Les deux mains que j'avançais vers elle afin de lui faire un massage cardiaque se mirent à disparaître. Non, tout sauf ça, ce n'était pas le moment, je devais l'aider.


Lorsque finalement quelques instants plus tard, Mousk lui même grimpa à la mezzanine, il put remarquer mon t-shirt et mon pull traînant dans un coin de la pièce. Je n'étais pourtant plus là, mais je n'étais pas le seul.


Car j'ouvris les yeux, toujours aussi paniqué, dans la pièce de Gantz. Torse nu et le crâne toujours vibrant d'une intense douleur. John était déjà là ainsi que Lucie, ils avaient l'air fatigué mais eux contrairement à moi avait été tiré d'une nuit de sommeil bienfaisante. Je me sentais tellement mal que j'étais sur le point de vomir, et à sentir ma tête tournée, j'en jugeais que je devais être encore à moitié imbibé par l'alcool. Mais je ne réalisais pas tout ceci, ne faisait même pas attention aux trois autres personnes dans le fond de la salle. Je regardais mes mains, comme impuissant. J'avais déjà vu des gens mourir, beaucoup trop de personnes, durant ce jeu horrible. Mais une jeune femme, à l'extérieur de tout ceci, avec qui je venais de passer la nuit. C'était injuste et affreux. John s'approcha de moi, la mine inquiète, les yeux exorbités.


- Alessio, tout va bien...qu'est-ce que tu faisais ?

- J'étais à une soirée, j'ai trop bu...et...


Je remarquais alors qu'il portait sa combinaison, Lucie aussi bien entendu...et moi je n'avais que le bas de mes habits ordinaires. Je tâtais mon torse nu, nu comme un ver, me sentant soudainement particulièrement en danger. Mes yeux, plongés dans ceux de John s'écarquillèrent alors que je réalisais pleinement la situation dans laquelle je me trouvais. John me regarda et je pus voir toute l'intensité de la peur passant dans son regard, il avait peur pour moi. Je me tournais vers Lucie, sur le point de lui poser une question. Mais, elle aussi effarée, me répondit sur un ton bien trop sombre à mon goût.


- Non, il n'y a qu'une seule et unique combinaison par personne...Alessio...je suis désolé.


Je restais sans voix. Je ne lui en voulais pas elle n'avait pas à s'excuser, j'avais simplement été stupide. Un mois était passé et je m'étais comme senti en sécurité, je n'y avais plus pensé. Un sac, un simple sac avec ma combinaison aurait suffit. J'aurais alors pu agripper au sac au moment du transfert, venir ici avec mon armure. Mais je n'avais pensé à rien, j'avais oublié la situation dans laquelle je me trouvais. Roman ne m'avait-il pas dit de toujours l'avoir à portée de main ? A quoi est-ce que j'avais pensé ? A rien, si ce n'est finir mon année sur une note glorieuse, une fête mémorable ! Tu parles que j'allais m'en souvenir, une fête où je ne connaissais pas un dixième des gens, où j'avais déjà zappé les trois quarts à cause de l'alcool et de la drogue ! Tout ça pour finir ici, au beau milieu de la nuit. Je ne savais plus quoi dire, ni quoi faire...j'étais perdu.


Le rayon envoya alors une autre personne et je me tournais vaguement pour voir à quoi ressemblait l'heureux élu. Ma seule chance dans toute cette histoire, c'est que contrairement aux nouvelles âmes égarées de cette nuit, je savais dans quoi je mettais les pieds. Puis la silhouette se dessina, d'un corps nu, d'une jeune femme...rousse...avec de profonds yeux gris. Elle apparut enfin, poussant soudainement un hoquet comme quelqu'un qui s'étranglait avant de me regarder droit dans les yeux, réalisant qu'elle était encore en vie. La fille avec qui je venais de coucher venait d'apparaître dans la pièce. Elle était donc bel et bien morte d'une sorte d'attaque, peut-être à cause d'une drogue prise dans la soirée, ou un brutal coma éthylique.


- Où...où suis-je ?


Je ne savais plus où donner de la tête, j'étais perdu, tellement que lorsque je la vis arriver, après tout ceci, je craquais. Elle était presque morte dans mes bras, j'étais téléporté ici, sans aucune protection pour la mission à venir, j'allais mourir ce soir, elle avait droit à une seconde chance, mais allait-elle survivre à cette nuit ? Toutes ces pensées se bousculèrent dans ma tête, encore dangereusement secouée par l'alcool et je fut pris d'un fou rire horrible, démentiel. John tenta bien de m'appeler, me demander de me calmer. Il me disait que j'effrayais les nouveaux. Je vis Lucie du coin de l'oeil jeter un large manteau sur les épaules de l'inconnue et l'entraîner un peu à l'écart. Elle allait certainement lui expliquer la situation...et je supposais que John allait s'occuper de tout expliquer aux trois autres. Mais moi j'étais là à genoux sur le sol, riant à plein poumons. Un mois au calme, à attendre dans le stress et l'angoisse. Un mois où je m'étais finalement relâché, pensant à tort que je pouvais être un peu moins prévoyant. Et voilà où j'en étais, quelle belle ironie.


Puis je fut soudain secoué d'un violent soubresaut et ce que je redoutais depuis un petit moment arriva. Je vomissais l'entièreté de ma soirée sur le sol de la pièce, ce qui provoqua des cris de dégoûts de la part des quelques spectateurs autour de nous. Je restais là encore un instant, à genoux, appuyé sur mes mains, contemplant ma gerbe...image de ma bêtise. J'allais mourir ce soir.


Non.


- Alessio...


Je sentis la présence de John juste derrière moi mais je me relevais tout seul. Ma tête me faisait encore mal mais je ne me sentais plus malade. Devant le regards des personnes assemblées là, j'enlevais mes chaussures puis mes chaussettes et utilisaient ces dernières pour éponger la flaque de vomi au sol. Tandis que Lucie expliquait à l'inconnu ce qu'il se passait, j'entendis John se mettre à en faire autant avec les autres. Je suppose qu'il voulait me laisser seul, où ne savait pas trop comment réagir avec moi. Tant mieux, il avait mieux à faire, car sans informations, tous les nouveaux ne seraient pas parmi nous après la mission...et je comptais bien faire parti des survivants.Mon petit ménage effectué, je jetais mes chaussettes dans un coin, ré enfilait mes chaussures, m'essuyait le coin de la bouche et proclamait haut et fort, fatigué par tout ceci.


- Bon...avant qu'on commence ! Est-ce que quelqu'un a une putain d'aspirine ?

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