Kyme - Partie 1 - Tests

Entraînements et Recherches

 

 

Seifer para sans peine le coup de Lionheart et repoussa son assaillant à quelques mètres de lui sans grande difficulté.

" M'avoir comme ça, il me prend pour qui ? " songea-t-il un peu amer. Mais malgré la fureur causée par la violence du combat, il était heureux. Heureux que Squall ait accepté de s'entraîner avec lui pour augmenter leur force respective.

Après le départ de Fujin, Raijin et Linoa, il lui avait présenté cette requête. Il ne savait pas si l'autre engin allait accepter. Mais il l'accepta et Seifer en eut une petite bouffée de joie. D'où venait-elle, il aurait été incapable de le dire. Mais au moins, il pouvait enfin se sentir respecté pour ce qu'il était : un combattant.

Squall vit Seifer se rapprocher de lui, l'air menaçant. Il se prépara à encaisser le coup. Il avait dosé sa première attaque pour évaluer le niveau de son rival. Il n'avait pas été surpris par son contre mais Seifer avait réussi à le repousser plus violemment et rapidement qu'il ne l'en pensait capable. Squall se sentait lui aussi exalté par l'entraînement avec son vieil ennemi. Si ce dernier ne le lui avait demandé, lui l'aurait fait. Ils s'étaient toujours mesurés l'un à l'autre et cela devait continuer, quoiqu'il en coûte. Il ressentait au plus profond de lui ce besoin. Il stoppa Hyperion. Des étincelles giclèrent des deux Gunblades. Seifer n'avait pas ménagé sa force. Il avait dû voir qu'il avait voulu le tester et ne l'avait pas apprécié.

" Intéressant.. Enfin quelqu'un de mon niveau avec qui je peux me battre sans limite. " pensa-t-il.

Les deux adversaires se défièrent une nouvelle fois du regard avant de se jeter brusquement l'un vers l'autre. La violence de leurs coups fit s'enfuir les rares oiseaux qui traînaient autour de l'entrée de la Mine de Soufre.

Irvine posa des canettes vides sur un tronc d'arbre mort. Il s'éloigna d'une centaine de mètres et arma son W.W.West. Il mit en joue la première canette et tira. Une canette vola en l'air. Il recula de quelques pas et retira. Seule la détonation troubla l'air. Il ravança de quelques mètres et tira une troisième fois. Une seconde canette bondit en l'air. Il se gratta nonchalamment la tête avec son fusil. Quoiqu'il fasse, malgré son excellence au tir, il avait une limite. Tous ses fusils avaient une portée maximum au-delà de laquelle ses balles ne touchaient plus leur cible, victimes des déviations minimes qu'elles subissaient lors de leur propulsion dans le canon. C'étaient les millimétriques défauts du canon qui étaient en cause mais contre cela, il n'existait nul remède. Il ne le savait que trop bien en tant qu'expert des armes à feu. Il s'allongea dans l'herbe de la prairie contiguë à la B.G.U. Il savait presque tirer les yeux fermés sur n'importe quelle cible, alors il se sentait un peu désœuvré. Il n'avait aucun moyen de s'améliorer. Au rythme où allaient les choses, il risquait plus de devenir un poids pour le groupe que quelqu'un sur qui on puisse compter. Un pétale de fleur qui voletait au-dessus de lui, vint le tirer de sa rêverie. Il leva son index et visa.

"Pan ! "

A sa surprise, le pétale sembla contourner sa balle mentale. Vexé, il réessaya, mais le pétale se joua de lui une nouvelle fois. Il retenta encore et encore l'expérience sans plus de succès, le pétale continuant à éviter ses balles factices. Finalement, sans doute lassé par ce petit jeu, le pétale de fleur s'éloigna narquoisement de lui. Irvine resta allongé à contempler son index, une expression songeuse sur le visage.

"On dirait qu'elle a..."

- Mais oui ! Quel abruti ! Et dire que je m'entraîne avec des boîtes de conserve ! s'exclama-t-il en se relevant brusquement.

Pour fêter sa découverte, il se décida à faire sauter les deux dernières boîtes. Il commença à viser soigneusement celle de gauche, arma son chien, posa son doigt sur la détente, commença à appuyer et...

- BOOYAKA !!!

Il sursauta, le coup partit, une canette s'envola.

- Waow !! T'as eu celle de droite !!

- Eh oui, que veux-tu Selphie, je suis un expert, crâna-t-il un peu mal à l'aise. Mais toi, qu'est-ce que tu fais là ? Enfin la prochaine fois, évite de me surprendre comme, ça pourrait être dangereux.

- Oh, avec toi, j'ai rien à craindre les balles atteignent toujours leur objectif !

- Ouais... Si on veut...

- En fait, je ne savais pas trop quoi faire pour m'entraîner, alors je fais le tour de tous ceux qui sont ici. Quistis est à la serre de combat, Zell a décidé de battre ses records de traction, d'abdos et de pompes dans la même journée, Seifer et Squall sont partis tôt ce matin et personne ne sait où ils sont, et maintenant, je suis arrivé à toi . Voilà ! Alors qu'est-ce que tu fais pour t'entraîner ?

- Je tirais sur ces canettes, mais je viens de me rendre compte que c'est un entraînement inutile pour un as comme moi. J'ai bien mieux à faire si je veux m'améliorer. D'ailleurs, il faudrait que j'aille à Horizon pour mettre au point mes deux ou trois petites idées. Ça te dérangerait de m'y amener avec l'Hydre ? Sans leurs techniciens, je ne pourrais rien faire.

- Pas de problèmes ! Mais d'abord, je veux que tu dégommes la dernière boîte !!!

- Hein ? Bon, si t‘en as envie...

Selphie était bien la seule personne qui arrivait à le prendre de court. Peut-être était-ce pour ça qu'il l'aimait. Il sourit et plaça le viseur au niveau de son œil.

 

Selphie aimait le voir tirer. Elle ne l'aimait jamais autant que dans ces moments-là. Il montrait alors le visage qu'il cachait tout le temps. Un homme confiant au visage et au regard doux mais pénétrant. Un homme qui saurait la protéger, prendre soin d'elle.. Quel dommage qu'il ne soit sérieux que dans ces moments-là. Mais cette paix qu'il arborait maintenant, compensait tous ces autres défauts et c'est pour ça qu'elle l'aimait. Elle pourrait même se donner entièrement à lui. Le coup partit. La dernière canette tomba sur le sol. Il lui sourit et elle fondit complètement. Quelle malchance qu'il fût un tel dragueur invétéré. Ce fut pour cela qu'elle ne lui rendit pas son sourire.

- Tu n'utilise pas ton Steel Gun aujourd'hui ?

- Non, si je l'avais pris, j'aurais détruit toute la souche et les canettes en une fois, et ce n'était pas mon but. On y va, maintenant ? A moins que tu ne désires autre chose...

Il s'approcha et se pencha vers elle délicatement. Ses lèvres s'approchèrent dangereusement des siennes. Selphie sentit son petit cœur battre la chamade, mais au dernier instant, elle détourna la tête et courut vers la B.G.U..

- Je vais faire préchauffer les moteurs ! lui cria -t-elle d'un peu plus loin. Ne traîne pas trop !

Après qu'elle eut disparu au coin de la B.G.U., il ne put s'empêcher de jeter son chapeau à terre et de lui donner un coup de pied de dépit.

- Et zut !

Un quart d’heure plus tard, l'Hydre s'envola. Le voyage fut silencieux, perturbé seulement par le ronronnement régulier des moteurs. Arrivé à Horizon, Irvine sortit suivi de Selphie.

- Je peux t'aider ? lui demanda-t-elle.

- Non, c'est bon.

Il commença à descendre l'échelle et, une fois arrivé au bas, se retourna, la regravit à toute allure et se jeta sur Selphie. Il lui déposa un rapide baiser sur les lèvres. Il repartit aussitôt à toute vitesse vers Horizon. Surprise, elle ne réagit pas. lrvine, lui, de soir côté, gardait encore dans sa tête le délicieux goût de ses lèvres. Il avait peut-être manqué, de style mais avait obtenu ce qu’il voulait. Il se retourna.

- Je t'appellerai pour te dire quand venir me chercher !

Et il repartit en courant. Elle acquiesça à peine à ses paroles, encore sous le choc. Elle posa son doigt sur ses lèvres et se mit à sourire. Elle rentra inconsciemment dans l'Hydre et décolla. Ce ne fut qu'en l'air qu'elle reprit conscience et laissa éclater sa joie. Elle fit mille cabrioles avec son vaisseau préféré et retourna à la B.G.U. encore plus guillerette que d'habitude. Irvine, en apercevant les figures de l'Hydre, ne put empêcher un sourire de bonheur fleurir sur ses lèvres.

 

 

Quistis marchait tranquillement dans la serre de combat. Elle ne savait pas trop quoi faire. A chaque combat qu'elle faisait, elle réfléchissait sur les actions à mener ou la façon à agir, mais elle ne trouvait pas de réponses. Cette situation commençait à l'irriter quand un T- Rex surgit des fourrés. Elle l'endormit avec l‘aide d'un sort Morphée et alla s'asseoir au bord de l'étang où se trouvait généralement le joker du groupe C.C.. Elle vit son image dans l'étang qui semblait aussi désespérée qu'elle. Le seul bruit qu'elle entendait, était le ronflement régulier du T-Rex. Elle ne savait vraiment pas quoi faire. Cid avait conseillé à Squall de la faire relever de ses cours pour qu'elle puisse se concentrer sur son entraînement, mais rien n'y faisait. S'entraîner ? Comment ? Cela ne servait à rien. Elle avait déjà atteint ses limites physiques. Bien avant la chute d'Ultimecia, elle avait déjà remarqué qu'elle ne progressait plus en combat. Que faire alors ? Réussir à dépasser ses limites ? Stupide, elle sentait qu'elle ne pouvait plus s'améliorer. Cela avait déjà été un exploit de devenir aussi forte, alors aller plus loin... Elle soupira. Elle aurait aimé pouvoir avoir une vie tranquille, mais non, il fallait qu’il se passe toujours quelque chose qui vienne la perturber. Si ce n'était Linoa qui lui avait volé Squall sous le nez, c'était Ultimecia qui voulait détruire le monde et maintenant c'étaient des jeunes qui leur prédisaient de grandes catastrophes s'ils ne se préparaient pas. Elle se demanda d'où ils avaient bien pu sortir. Cela semblait incompréhensible. Avec leur puissance, ils auraient facilement pu débarrasser le monde d'Ultimecia. Elle se redressa. De toute façon, elle n'avait plus le choix. Si elle ne pouvait pas devenir plus forte et qu'elle voulait en savoir plus sur ces jeunes gens, il y avait plus qu'une seule chose à faire : remplir sa tête de toutes les connaissances possibles et imaginables. Ainsi, elle serait au moins prête à leur faire face s'ils les attaquaient à nouveau avec de "vieux" trucs. Et qui sait ? Peut-être qu'elle découvrira quelque chose à leur sujet au détour d'une page d'un vieux livre ? Elle se releva et quitta la serre de combat, abandonnant le T-Rex à son doux et profond sommeil.

 

Selphie cherchait quelqu’un avec qui prendre le dîner. Elle finit par trouver Quistis attablée devant une montagne de livres à la bibliothèque. Cette dernière accepta avec plaisir l’invitation de son amie, qui fut heureuse de ne pas avoir à manger seule, chose qu’elle détestait. Après avoir réussi à obtenir un repas à la cafétéria, ce qui relevait du miracle à cette heure-ci, elles s’assirent tranquillement dans un coin de la salle bondée et commencèrent à discuter de choses et d’autres. Selphie lui signala le départ d’lrvine, chose qui surprit Quistis qui ne s’attendait pas à ce départ subit. Elle allait elle-même lui expliquer ce qu’elle faisait à la bibliothèque quand Selphie aperçut Taranne et l’appela aussitôt, curieuse d’avoir des nouvelles de Zell. Cette dernière s’approcha. Selphie s’empressa donc de savoir si Zell avait réussi à battre tous ses records.

- Malheureusement, oui... Et depuis, il s’est écroulé sur son lit et ne bouge plus. Je ne m’inquiète pas trop, car je sais qu’il s’en remettra vite, mais quand même, je me demande si ça en vaut vraiment la peine.

- Il faut le croire, murmura Quistis.

- Enfin... J ’étais juste venu lui chercher quelque chose à manger. Sinon, vous ça va ? Vous arrivez à bien vous entraîner ?

- J ’ai un peu mal au crâne sinon ça va.

- C’est normal, elle était cachée sous une montagne de livres quand je l’ai trouvée! s’exclama Selphie.

~ Oh ! Tu n’as pas quitté la bibliothèque de la journée ?

Elle confirma d’un mouvement de tête.

-Comme physiquement je ne progresse plus , j’ai décidé de me remplir la tête avec tout ce que nous connaissons des monstres et des magies. Et qui sait peut-être que je vais trouver des renseignements sur nos deux assaillants ? J’espère seulement que je ne perds pas mon temps, soupira-t-elle.

- Je vais devoir vous laisser, Zell attend que je lui apporte son repas. Passez une bonne soirée !

Les deux filles saluèrent leur amie qui sortait de la cafétéria.

- Elle a l’air inquiète, tout de même.

- Et quelle fille amoureuse ne le serait pas ? Tu ne t’inquiètes pas pour ton amoureux, toi ?

- Oh, pas vraiment... De toute façon, tout ça se verra après la bataille que nous allons livrer dans un mois.

Quistis sourit en voyant que les joues de Selphie s’empourpraient malgré son ton sérieux.

- Et pourquoi pas avant ? Il s’est passé quelque chose ? demanda-t-elle insidieusement.

Elle ne pensait pas que sa question aurait pu faire autant rougir Selphie. On aurait dit un gros ballon de baudruche qui allait exploser.

-Euh... C’est à dire que... Et toi Quistis ? Toujours personne en vue ? En plus avec tout ce que tu dois lire, tu ne vas avoir le temps de voir quelqu’un.

- Ce n’est pas très grave, il y a plus urgent. Et donc ? Que s’est-il passé ?

- Heu... Rien, rien..., bredouilla Selphie. Juste que. .. Juste que mon assiette est vide et que je dois l’amener à la plonge ! D’ailleurs, toi aussi Quistis ! Il est temps pour nous de passer à l’action ! On ne peut pas rester ici sans rien faire.

Dans la seconde qui suivit, elle se leva et partit entreposer sa vaisselle. Décidée à connaître le fin mot de l'histoire et nullement impressionnée par le retour de veste de Selphie, Quistis lui emboîta le pas. Elle allait la rejoindre quand cette dernière se mit à éclater de rire à l’entrée de la cafétéria. Elle n’eut le temps de l’interroger qu’elle lui montrait déjà la raison de son hilarité. Elle désignait du doigt deux bosses qui marchaient péniblement dans le hall de la B.G.U. et qui allaient vers les dortoirs. Elle se mordit la lèvre en reconnaissant les deux "bosses" : Squall et Seifer. Ces deux derniers revenaient de l'infirmerie et étaient couverts de pansements. Ils avançaient lentement en claudiquant, pitoyables, se soutenant l’un et l’autre tant bien que mal. Les étudiants les évitaient du mieux qu’ils le pouvaient, effrayés par cette déplorable vision de leur chef et les nombreuses traces de sang qu’arboraient les deux Gunblades. Les deux filles se décidèrent à les rejoindre pour les aider, car ils leur inspiraient vraiment une très grande pitié. Ils acceptèrent avec reconnaissance leur aide bienvenue.

Quistis demanda des explications à Squall sur leur état. Ce dernier lui fit un bref récit.

-Après avoir été nous entraîner à la Mine de Soufre...

- Pourquoi là-bas ? demanda Selphie.

- On se le demande..., soupira Quistis.

Squall et Seifer, eux, s’échangèrent un grand sourire complice, tandis que Selphie restait perplexe.

- Je continue. Nous avions fini notre entraînement et comme nous étions crevés, nous avons décidé de couper par les bois. C’est là que nous sommes tombés sur un T-Rex pas commode. Comme on était vraiment fatigué, on a eu du mal à le battre.

- C’est bien fait pour vous, vous n’aviez pas à faire n’importe quoi, lâcha Quistis glaciale.

- On n’a pas fait exprès de tomber sur ce T-Rex, protesta son chef. Enfin quand nous sommes arrivés ici, le docteur Kadowaki n’a pas cru un mot de cette histoire et nous a un peu soignés avant de nous renvoyer dans nos dortoirs car elle ne veut pas de vauriens dans son infirmerie. Ce sont ses propres mots. Voilà pourquoi vous nous avez trouvé dans cet état.

- Et elle a eu parfaitement raison, renchérit Quistis. A sa place, j’aurais fait pareil. La prochaine fois, faites attention.

- Personnellement, je pense avoir compris, agréa Seifer. Et toi, Squall ?

- Ça ira...

- Donc que ferez-vous la prochaine fois, à votre prochain entraînement pour éviter que ça se reproduise ? interrogea-t-elle avec un peu de compassion.

- Comme on va se rebattre à fond à chaque entraînement, autant que la B.G.U. soit à côté de la Mine de Soufre. ·

- Tu ne serais pas en train de faire de l’abus de pouvoir, là, s’enquit Selphie. La fac est censée parcourir le monde ou rester près de Balamb pour résoudre les problèmes.

- Bah, non, je pense pas...

- Au pire, on y va avec l’Hydre ? suggéra Seifer.

- Et tu crois que vous allez vous amuser avec l’Hydre tout seul ! Et pendant toute la journée ! Et tous les jours ! Et puis quoi encore ! s’énerva Selphie.

- Eh, calme-toi ! C’était juste une idée comme ça, ne le prends pas mal, se retira Seifer, apeuré, surtout que c’était Selphie qui le tenait et l’aidait à marcher.

Pendant ce temps, Quistis se prenait la tête dans une main de la même manière que Squall le faisait auparavant, l’air désespéré. Ceci tout en soutenant ce dernier de son deuxième main.

- Vous pouvez pas vous entraîner juste à côté de la B.G.U., tout simplement, soupira-t-elle. De plus, les élèves pourront tirer des leçons de vos combats en vous regardant.

Les deux épéistes s’entreregardèrent d’un œil interrogateur.

- Pourquoi pas ? admit Squall.

Les deux filles les déposèrent finalement dans leur dortoir respectif et les laissèrent seuls avec leurs blessures. Elles se retrouvèrent dans le couloir.

- Pas un pour rattraper l’autre, ironisa Selphie en se tapant dans les mains.

- C’est vrai, resoupira Quistis.

 

*

* *

 

 

Linoa était fatiguée. Cela faisait maintenant cinq heures que l’Hydre était repartie. Il s étaient sur l’île de Poccahari, à la base du doigt au nord de l’île et depuis leur arrivée, ils avaient passé leur temps à longer la muraille rocheuse. Fujin inspectait chaque parcelle de cette impressionnante muraille. Leur avancée était donc lente. Linoa sentait sa gorge s’assécher au fur et à mesure que le temps s'écoulait. En dehors de leurs armes, ils n’avaient pris avec eux que quelques gourdes et un peu de nourriture qui risquaient vite de disparaître si leur recherche durait trop longtemps. Par chance, les monstres ne les assaillaient que rarement, sinon ils seraient encore à leur point de départ. Elle se souvint du départ de l’Hydre. Squall lui avait demandé pour la énième fois si elle était toujours sûre qu’elle ne voulait pas qu’il vienne. Et elle avait une fois encore refusé son offre arguant du fait qu’il devait s’entraîner pour pouvoir la protéger au mieux à son retour, vu qu’elle n’aurait sans doute le temps de s’entraîner elle-même. Elle le lui avait même ordonné et son chevalier lui avait souri.

- Puisque c’est un ordre de ma princesse, je n’ai d’autres choix que lui obéir. Mais de toutes façons, je te protégerai même si tu ne me le demandais pas, quoiqu’il puisse arriver.

Ces paroles lui avait fait chaud au cœur et elle n’avait pu résister à la tentation de lui donner un dernier long baiser, interrompu par la toux de Fujin qui ne souhaitait pas perdre de temps. Ils étaient donc maintenant séparés pour une période d’au moins vingt-cinq jours, une durée choisie par Fujin. Depuis l’envol du vaisseau, Fujin n’avait soufflée mot, se contentant d’avancer lentement en examinant les alentours. Raijin avait bien tenté de poser quelques questions, mais la seule réponse qu’il eut, fut des coups de pied. Il finit par bougonner qu’on ne l’y reprendrait plus. Depuis un silence mortuaire s’était installé, car Linoa ne connaissait pas suffisamment la froide jeune femme pour lui poser des questions, auxquelles, de toutes manières, elle ne semblait pas encline à répondre. Elle ne l’avait croisé que quelques fois quand elle était avec Seifer et lui avait toujours paru distante. Même Seifer n’avait réussi à lui arracher une quelconque réponse. Elle restait de marbre sur ces questions, tout comme Edéa, ce qui était en soi assez surprenant car la gouvernante leur avait toujours prêté une oreille attentive quand ils en avaient eu besoin, devançant même quelques fois leurs questions. Le voyage se présentait donc sous les meilleurs auspices. Mais Linoa commençait en avoir assez de cette situation. Elle se campa sur ses deux jambes et attendit que Fujin fasse attention à elle. Raijin la regarda d’un air interrogateur. En voyant que les deux autres n’avançaient plus, Fujin cessa de regarder la muraille et se tourna vers eux. Linoa saisit cette opportunité.

- Fujin, je sais que tu ne veux rien dire, mais j’en ai assez ! J’ai l’impression de tourner en rond. Dis nous au moins ce que tu cherches pour qu’on puisse t’aider!

- Je cherche l’entrée de mon village natal.

- Dans la muraille ? s’étonna-t-elle.

- Mon village est placé dans une cavité naturelle. Il est un peu comme le village Shumi, lui répondit Fujin, d’un ton monocorde.

- Mais pourquoi ne sais-tu pas où il est ?

Fujin hésita un instant et choisit finalement de lui répondre, elle leur devait au moins ça.

- J ’ai quitté mon village, il y a dix ans. C’est normal que je ne me souvienne plus de l’endroit exact de l’entrée, surtout que l’on en sortait rarement à cause des monstres qui circulaient. Ils étaient plus forts et plus nombreux que maintenant à cause de la guerre occulte et de la chute de la larme sélénite provoquée par Adel.

Raijin ouvrit la bouche mais il s’arrêta, ne voulant recevoir un autre coup de pied.

- Angel pourrait peut-être nous aider ?

- Non, les gens de ce village sont discrets et font tout pour cacher leur présence. Aux humains comme aux monstres. Ils savent dissimuler leurs odeurs, par exemple.

- Ils se prennent pour des ninjas ou quoi ? ne put s’empêcher de répliquer Raijin.

L’instant d’après, son front reçut une pierre dans laquelle avait shooté son amie. Une petite goutte de sang perla. Il l’essuya et jura à nouveau qu’on ne l’y reprendrait plus.

- Ils ressemblent plus au maire Dobe qu’à des ninjas, lâcha Fujin d’un ton amer.

- Des pacifistes ? Ce doit être une ville tranquille, trop tranquille pour toi peut-être. C’est pour ça que tu es partie ? s’intéressa Linoa.

- Ça n’a rien à voir. De toute façon, ma vie ne vous regarde pas, trancha Fujin glaciale.

- Je vois, cela a peut-être un rapport avec la perte de ton œil, lâcha calmement Raijin.

Fujin le dévisagea d'un regard haineux comme si elle le voyait pour la première fois, mais à sa surprise, elle ne le frappa pas.

- Qu’est-ce qui te fait dire ça ! attaqua-t-elle.

- Je commence à te connaître et la seule autre fois où je t’ai vu dans cet état, c’était quand Seifer t‘avait demandé ce qui était arrivé à ton œil. Je n’ai jamais oublié la fureur dans laquelle tu es entrée ce jour-là. Depuis on n’en a jamais reparlé, mais c’est peut-être le moment, la provoqua-t-il.

Il soutint son regard en faisant attention à ne pas faire transparaître ses sentiments. Mais il ne put s’empêcher de songer que si l’œil de Fujin avait pu lancer des éclairs, il aurait été transpercé de toutes part. Linoa, voyant que les évènements prenaient une tournure orageuse, essaya de diminuer la pression.

-Quel est le nom de ton village ?

Fujin mit un temps avant de déclarer :

- Le village de Hari...

Mais elle et Raijin continuaient à se regarder avec tension. Linoa s’interposa donc à nouveau.

- Et si on continuait à chercher cette entrée ? Je n’ai pas envie de mourir de soif, de faim, ou de quoi que ce soit d’autre ! s’exclama-t-elle.

Surpris par son ton enjoué, les deux acolytes cessèrent de rester en chien de faïence. Fujin retourna examiner la muraille d’un pas ferme tandis que Raijin se taisait. Linoa soupira. S’ils devaient passer vingt-cinq jours de ce style, cela allait être une vraie partie de plaisir. Elle en regrettait presque l’absence de son tendre chevalier. Profitant que Fujin était absorbée par ses recherches, Linoa se rapprocha de Raijin après avoir envoyé Angel à la recherche de quelconques informations qui pourraient les aider.

- Tu connais Fujin depuis longtemps ? lui demanda-t-elle.

Raijin, plonge dans la contemplation d’une colonne de fourmis, releva la tête, interrogateur, mais il finit par lui répondre. M

- Seifer ne te l’a jamais raconté ?

- Non.

- Depuis mon entrée à la B.G.U., il y a sept ans environ. On s’est retrouvé l’un à côté de l’autre en cours. Elle était assez froide. Comme je ne savais pas comment les cours fonctionnaient, je lui ai demandé de m’aider. La seule réponse que je reçus fut une baffe.

- Quoi ! C’est sûr que c’est agréable comme premier contact.

- Oui, après je ne lui ai plus parlé pendant un mois. Et puis, avec le temps, j’ai réussi à lui parler sans me faire frapper. Mais j’ai encore reçu beaucoup d’autres coups avant ça. Je ne me suis jamais découragé. Je ne comprenais pas pourquoi elle agissait ainsi avec moi, et je voulais le découvrir.

- Et tu as réussi ?

- Oui, elle ne faisait absolument pas confiance aux autres et ne croyait pas en la nature humaine. Je n'ai jamais su pourquoi, mais je pense que cela a un rapport avec la perte de son œil. C’est pour ça que je l’ai provoquée tout à l’heure. La réponse doit se trouver ici, et je ne vais pas laisser passer cette occasion de comprendre la raison de cette haine et de ce rejet de l’humanité.

- C’est pour ça qu’elle est autant sur les nerfs en ce moment..., acquiesça Linoa.

- Je pense, admit-il.

- Tu es un garçon très généreux, tu t’es battu pour qu’elle t’accepte. Je ne sais pas comment tu as fait, mais tu es sûr de ne pas avoir été un peu amoureux ? le taquina-t-elle.

Raijin eut un grand sourire.

- Non, je pense que j’étais seul comme elle et que je cherchais de la compagnie et des amis. Elle était la seule à ne pas se moquer de ma taille et de ma gaucherie. C’est sans doute ça qui m’a poussé à m’intéresser à elle, malgré toutes les blessures que j’avais à chaque tentative. Pourtant...

- Oui ?

- Elle ne m’a vraiment accepté et accordé son amitié que le jour où je lui ai sauvé la vie. Elle a dû se dire que je devais être différent des autres.

- Tu as fait ça ! Mais comment !?

- Ça a été un malencontreux concours de circonstance. Je la suivais souvent, curieux de voir ce qu’elle allait faire. Un jour, excédée que je la suive sans cesse comme un petit chien, elle s’est mise à courir vers la sortie de la B.G.U., mais elle est tombée dans les escaliers extérieurs. Je l’ai rapidement rejointe. Elle était encore consciente, mais sa tête saignait beaucoup. Quand je me suis approché, elle a tenté de me frapper mais elle n’en avait plus la force. Avec mon gabarit hors-norme, j'ai pu la porter et je l'ai amenée à l'infirmerie. Le Docteur Kadowaki qui était déjà en poste, lui a dit que je lui avait sauvée la vie. Quand je l’ai revue plus tard, elle m’a demandé simplement : pourquoi ? Je lui ai dit que c’était normal. C’était la première fois où je pouvais aligner une phrase sans recevoir une baffe comme point. Même si c’était un peu ma faute si elle était tombée, elle ne m’en a jamais tenu rigueur. Elle a toujours eu un sens des responsabilités aiguës et très tranchées, c’est ce qui a fait qu’elle était la véritable terreur du conseil du discipline en cas d’affaires graves. Enfin, toujours est-il que depuis ce jour, on a passé tout notre temps ensemble, même si j’ai encore droit régulièrement à de nombreux coups, je dois reconnaître qu’ils me font beaucoup moins mal qu’auparavant. C’est plus tard que nous avons rencontré Seifer. On s’est approché de lui car il était comme nous à nos débuts, seul. Avec le temps, nous avons appris à tous nous apprécier et nous sommes devenu le trio inséparable qui siégeait au conseil de discipline. Nous n’avions aucune raison d’y aller, mais je pense que quelque part, nous voulions nous venger des gens qui n’ont jamais essayé de nous comprendre. Mais nous n’avons pas fait le premier pas non plus.

Raijin se tut un court instant, encore plongé dans ses souvenirs.

- Je me demande pourquoi je te raconte tout ça. Mais je dois reconnaître que ça m’a fait du bien. D'ailleurs, pourquoi m’as-tu demandé comment j’avais connu Fujin ?

- Je voulais juste comprendre votre relation. Savoir pourquoi vous avez autant suivi Seifer lorsqu'il a rejoint Ultimecia, comment vous aviez pu arriver à un tel degré d’unicité... Les choses de la vie, quoi !

- Et moi, c’est la première fois que je parle autant sans me faire frapper.

Tous deux eurent un petit rire.

- On peut dire qu’une indéfectible amitié vous lie, conclut-elle.

- C’est vrai, répondit Raijin songeur. Mais j’espère que j’aurais toutes les réponses à mes questions un jour.

- Ne t’inquiète pas. Continuez à vous faire confiance ainsi, et un jour, elle s’ouvrira complètement et tu sauras tout. Laisse le temps faire et les choses s’emboîteront d’elles-mêmes.

- J ’espère bien que ça arrivera, soupira-t-il.

- Mais oui. Regarde Squall. J’ai eu du mal, mais maintenant il est presque devenu un homme normal !

Et ils rirent à nouveau, mais plus fort cette fois. Ils furent interrompus par Fujin qui braillait au loin.

- Bon, on va la rejoindre ?

- Je sais pas, j’ai pas envie de me faire encore frapper.

Ils rirent une dernière fois et se dépêchèrent de rattraper Fujin en essayant de cacher leur hilarité, car ils étaient tous deux sûrs qu’elle n’aimerait pas les voir arriver avec un sourire aux lèvres compte-tenu des circonstances. Elle les réprimanda d’ailleurs vertement.

- On n’a pas de temps à perdre ! Qu’est-ce que vous faisiez encore ? Vous vous croyez en vacances ?

Raijin se demanda si son tibia allait souffrir.

- On a fait que discuter, se défendit Linoa.

- Discuter s’écria Fujin. Comme si c’était le moment ! En plus avec ce gros balourd incapable d’aligner une phrase ! On doit continuer à avancer, ce que je cherche n’est pas ici . Ce coup-ci ne me retardez pas !

Raijin s’inquiétait de plus en plus. Fujin avait vraiment les nerfs à fleur de peau, et cela risquait de mal tourner. Il ne l’avait quasiment jamais vu comme ça, au point qu’elle en oublie de le frapper. Il se demanda si c’était la présence de Linoa qui la retenait, peut-être voulait- elle paraître moins violente qu’elle ne semblait être. Il s'autodénéga de la tête. C’était stupide. Fujin ne s’était jamais privée de se défouler sur lui, même quand il y avait du monde. La présence de Linoa ici, ne changeait donc rien à son attitude. Il n’y avait plus de doutes à avoir. Quelque chose ici la perturbait au plus profond d’elle-même et gravement. C’était presque à se demander pourquoi elle avait accepté la mission vu la haine que lui procurait ces lieux. Qu’est-ce qui avait pu lui arriver ? La perte de son œil ne pouvait à lui seul expliquer une telle rage. Raijin se jura, tout en continuant à suivre Fujin qui descendait vers le Sud en longeant la paroi rocheuse, qu’il découvrirait le fin mot de cette histoire, même si pour cela, il devrait affronter la terrible colère de son amie. Contrairement à Linoa, il n’avait pas envie d’attendre éternellement. Il voulait agir aussi.

 

 

Le crépuscule commençait à assombrir le ciel et Linoa à s'inquiéter. Elle ne se sentait pas d’humeur à passer la nuit à la belle étoile dans une région aussi hostile. La douceur de la nuit était certainement préférable à la chaleur suffocante du jour, mais les monstres étaient plus agressifs la nuit. Pendant ce temps, Fujin s’acharnait à chercher la pierre qui lui permettrait d’ouvrir la porte de son village natal. La nuit tombante rendait ses recherches de plus en plus difficiles, ce qui la rendait d’autant plus maussade. Raijin, lui, se contentait de regarder ce qui se passait autour de lui, d’un air tranquille. Rien ne semblait pouvoir troubler sa sérénité. Il se mit à siffloter doucement.

- Arrête-ça tout de suite ! grinça Fujin entre ses dents.

Raijin se tut. C’était la première fois qu’elle ne supportait pas de l’entendre siffler. Fujin n’était vraiment plus qu’une boule de nerf, ce qui l'alarma.

- Fujin ? appela doucement Linoa, soucieuse de ne pas la brusquer.

Elle ne répondit pas à son appel.

- Fujin ! la rappela-t-elle plus fort en lui posant la main sur l’épaule.

Sa réaction ne se fit pas attendre. Elle se retourna brusquement.

- Quoi !

- Ça ne sert à rien de continuer. On ne trouvera rien aujourd’hui avec cette obscurité qui arrive. On ferait mieux de trouver un endroit où dormir.

- On m’a donné une mission, et j’ai bien l’intention de l’exécuter, répondit Fujin, acerbe.

Raijin suivait la scène avec intérêt.

- Mais c’est inutile, il. ..

- Tais-toi ! Si la princesse veut que je lui prépare sa chambre, elle peut aller se faire foutre !

Linoa, vexée, se mordit la lèvre inférieure pour contenir sa colère. Ce qui ne fut pas le cas de Raijin. Son amie avait dépassé les bornes et il était grand temps de remettre les pendules à l’heure avant que tout ne devienne incontrôlable. Et c’était à lui que revenait cette triste tâche. Les étoiles commencèrent à briller dans le ciel tandis que Raijin fondait sur Fujin.

- Excuse-toi, déclara-t-il d’un ton abrupt. On a tous eu une journée épouvantable, alors ça suffit.

- Mêle-toi de ce qui te regarde, imbécile !

Raijin s’attendait à cette réaction, mais il voulut donner une dernière chance à son amie.

- Excuse-toi.

- Laisse tomber, Raijin, je ne lui en veux pas, abandonna Linoa.

- Tu vois ce que la princesse te dit ! Alors, lâche-moi la grappe, gros simplet !

Elle ne vit pas arriver la main de Raijin, mais en sentit le douloureux contact sur sa joue.

- Que. .. ?

Elle leva l’œil et aperçut les yeux de son ami qui s’excusaient dans la semi-pénombre. Elle resta un temps sans réaction. C’était la première fois qu’il levait la main sur elle. Elle réalisa enfin comment elle s’était comportée toute la journée.

- Excuse-moi, finit par lâcher Raijin. Je ne voulais pas en arriver là, mais tu ne m’en as guère laisser le choix.

- Non.

- Hein ?

- C’est moi la fautive. J ’ai dépassé les bornes. Avec cette journée difficile, j’ai perdu mon contrôle. C’est pourtant la règle de base pour être un Seed : savoir garder son sang-froid en toutes circonstances. Je ne suis pas encore prête pour le devenir. Tu as raison Linoa, on va chercher un endroit où dormir. Il faudrait être stupide pour chercher quelque chose par une telle pénombre. Excuse-moi, je n’aurais jamais dû te dire ce que je t’ai dit. Mais j’ai tellement cet endroit en horreur, que ça m’affecte plus que ça ne devrait. Je hais vraiment être ici.

- Pourquoi ? demanda Raijin.

Elle lui fit face et lui envoya un coup de pied dans le tibia, même si elle ne voyait pas grand- chose avec la nuit qui était quasiment tombée. Le grognement de Raijin lui apporta satisfaction et un sourire narquois naquit sur ses lèvres.

- Et tu crois que je vais te le dire ? nargua-t-elle.

Pendant ce temps, Raijin grimaçait de douleur, mais il réussit à articuler :

- Je préfère te voir comme ça . Mon tibia allait être en manque de sa douleur journalière.

- Fujin, tu te trompes sur un point.?

- Lequel ?

- Tu es digne d’être une Seed. Même si on ne peut pas dire que tu nous as fait passer une journée agréable, tu n’as pas quitté l’objectif de ta mission. Peu aurait pu tenir sous une telle pression, surtout dans un lieu qu’ils détestent autant.

Fujin la remercia d’un signe de tête. Ils se mirent à chercher un endroit où dormir. Linoa siffla pour appeler Angel. Cette dernière arriva en jappant doucement, toute contente qu’on ne l’oublie pas. Après s’être installés dans un repli rocheux et avoir mangé un peu, les deux filles s’endormirent rapidement, fatiguées par la rude marche de la journée tandis que le garçon prenait le premier tour de garde surveillant les environs et le petit feu qu’ils avaient réussi à faire malgré le manque de combustible. Angel se mit à veiller à côté du garde,qui fut étonné mais heureux d’avoir un peu de compagnie.

 

Fujin se réveilla aux premières lueurs du jour. Raijin dormait non loin d’elle. Elle se sentait barbouillée de partout. Elle aperçut Linoa non loin d’eux qui jouait avec sa chienne, un bon moyen pour rester éveillée. Cette dernière l’aperçut aussi et lui fit un petit signe tout en lui demandant si elle avait bien dormi. Elle fit une grimace montrant que son sommeil avait été mitigé. Linoa poussa un rire clair.

- J ’espère qu’on va enfin trouver ton village, histoire qu’on prenne une bonne douche et qu’on ait le droit à une bonne nuit de sommeil !

Le visage de Fujin se rembrunit et Linoa eut l'impression d’avoir gaffé. Mais il s’éclaircit à nouveau.

- De toute façon, tu seras obligé d’en prendre une, vu qu’on va chez les ninjas ! s’exclama-t- elle.

Et les deux filles se mirent à rire gaiement. Raijin, qui s’éveillait péniblement à son tour, fut surpris de voir Fujin rire. Il était en effet assez rare que cela se produise, surtout sans se forcer. Il s’approcha et lui posa la main sur l’épaule. Elle sentit la lourde poigne qu’elle connaissait.

- Comment te sens-tu ?

- Ça va, merci. Et merci hier pour hier soir, je me sens bien mieux à présent. Mais tu vas devoir payer pour ta baffe.

Et une douleur sourde vint du genou de Raijin, le talon de Fujin s’y étant encastrée. Mais il cilla à peine car la douleur n’était pas très élevée.

- Voilà ta punition, déclara-t-elle simplement.

Raijin lui sourit.

- Tu m’as habitué à mieux ! s’esclaffa-t-il.

Il sut qu’il aurait dû encore se taire quand une deuxième douleur beaucoup plus forte que la première lui vrilla le crâne.

- N’abuse pas de ma gentillesse.

Raijin sauta sur place en se tenant le genou. Il réussit tout de même à songer que Fujin était en train de changer. A quelques mètres de là, Linoa avait observé la scène avec ravissement et, maintenant, elle relançait le petit groupe à l’assaut de la paroi rocheuse. Mais finalement, ils ne purent bouger tout de suite, car deux Héras, attirées par le bruit vinrent les attaquer. Quelques instants plus tard, le combat était expédié. Ils reprirent donc leur lente avancée et Linoa envoya à nouveau Angel à la recherche d’indices.

Le soleil commençait à être haut dans le ciel et la faim et la soif commençait à les tenailler. Ils avaient fini leur dernières provisions dans la matinée, et maintenant ils regrettaient de n’avoir pensé à prendre plus de provisions. Linoa était perdue dans ces pensées, quand Angel se mit à tourner autour d’elle avec quelque chose dans la bouche. Elle le lui ôta.

- Une poupée ? s’étonna-t-elle.

Cette dernière était très sale et ses couleurs étaient toutes passées. Elle avait perdu un œil. Ses vêtements étaient à demi-arrachés et seuls ses cheveux semblaient encore en état. Elle devait avoir été abandonnée depuis longtemps. Mais c’était peut-être toujours mieux que rien car elle pouvait peut-être appartenir à quelqu’un du village de Fujin. Ou n’avoir aucun lien avec ce village et être juste perdue par des voyageurs. Elle se décida tout de même à la montrer aux autres après avoir donné une petite récompense à Angel qui en grogna de contentement. Comme Fujin et Raijin la dévisageait déjà après avoir entendu son petit cri, elle tendit la poupée dans les airs.

- Regardez ce qu’Angel à trouver ! cria-t-elle.

Le visage de Fujin blêmit. Elle se précipita vers elle et la lui arracha des mains. Linoa se retint de protester voyant la tête qu’arborait Fujin. Raijin était resté à sa place et les observait.

- Cette poupée... Non... C’est impossible..., s’étrangla-t-elle.

Elle se baissa vers Angel et, tout en lui caressant la tête, lui ordonna 2:

- Montre-moi où tu l’as trouvée ! Vite !

Angel la regarda, l’air étonnée. Elle regarda ensuite sa maîtresse qui lui fit un signe d’assentissement. Elle partit alors au galop vers le Sud-Est.

- Suivons-là ! cria Fujin.

- C’est quoi cette poupée ? voulut savoir Linoa.

- Plus tard ! l’arrêta Fujin, d’un ton sans réplique.

Ils coururent de toutes leurs forces, oubliant leur faim et leur soi, n’ayant qu’en tête l’espoir de toucher au but. Ils retrouvèrent Angel cinq minutes plus tard. Elle était assise et les attendaient tranquillement. Fujin semblait perplexe. La possibilité que ce soit une erreur, s’insinua en eux. Mais Fujin s ‘approcha des rochers et les poussa. Il y en eu un qui s’enfonça et un bloc de pierre découpé de façon invisible dans la paroi rocheuse pivota sur lui-même, libérant l’entrée d’une grotte sombre.

- Un système de contrepoids et une sacrée technique pour dissimuler la porte, reconnut Raijin.

- Nous sommes arrivés, lâcha Fujin d’un ton indéfinissable.

 

 

NdA :

- Les Héras sont des monstres dont les défenses montent au cours du combat. Ils ne ressemblent strictement à rien. Un truc volant mince mais large avec trois yeux verticaux et de couleur rouge et blanche. Un monstre qui meurt vite et qu'on oublie vite.