Aisling.
Aisling rentra chez elle avec les quatre chocobos attachés l'un à l'autre. Assise sur celui qui était en tête, elle caressait d'un air distrait la tête jaune plumée de celui-ci qui laissait échapper des petits cris, content que sa maîtresse s'occupe de lui.
Elle contempla les couleurs rosées et orangées que le soleil déposait dans le ciel pour laisser place à la nuit. Elle aurait bien aimé être devant la mer pour regarder les âmes s'échapper pour être enfin sereines. La jeune fille avait toujours été fasciné par le spectacle qu'offrait les Invokeurs lorsqu'ils séparaient le corps et l'esprit selon les préceptes de Yevon.
Elle soupira. Elle ne pouvait malheureusement pas s'y rendre ce soir étant donné que son père la punirait sûrement pour être arrivée en retard. Elle avait mit plus d'une heure à soigner méticuleusement chaque bête simplement parce que ce joueur de blitzball avait voulu s'amuser. Quand elle y pensait, elle sentait la colère l'envahir.
Il avait cru qu'elle était ce genre de fille facile qui se laissait amadouer par les beaux discours. Ça ne l'aurait pas vexée si ce n'était pas la première fois. Or, à chaque fois qu'un garçon venait la voir, c'était pour ce genre de choses. Elle n'était pourtant pas vulgaire dans sa manière de s'habiller ni dans sa manière de faire. Elle lisait et écrivait car pour elle, c'était une chance de s'instruire autant.
Surtout dans ces temps de terreur qui plainait sur tout le monde à cause de Sin. Les gens ne pensaient plus qu'à leur survie et ils privilégiaient les arts de défense pour leurs enfants. Très peu d'enfants allaient encore à l'école pour apprendre l'Histoire de Spira. Il y avait seulement deux catégories de personnes qui s'y rendaient: les futurs Invokeurs et les riches qui avaient des gens à leur service qui seraient capables de les défendre.
Aisling ne faisait partie d'aucune de ces catégories. Mais sa mère, guérisseuse, avait lourdement insisté pour que sa fille reçoive un enseignement autre que le combat. Bien évidemment, elle lui apprenait les arts de la magie ainsi que les arts de combat mais selon elle, Aisling ne pourrait pas se défendre sans connaître l'histoire de ses ancêtres.
Aisling arriva à la hutte qui n'était autre que sa maison. Elle vit son père et sa mère sur le seuil de la maison. Elle baissa la tête lorsqu'elle vit le regard lourd de reproches de son père ainsi que les yeux inquiets de sa mère. Sa mère, brune aux yeux bleu, se précipita en direction de sa fille en criant:
- Mais où étais-tu?! Tout le village est à ta recherche!
- Je suis désolé, répondit la jeune fille. J'ai eu un petit problème.
- Quel genre de problème? questionna son père en posant sur elle un regard noisette.
Aisling soupira et avoua:
- J'étais en train d'étendre les draps tout en surveillant les chocobos quand tout à coup, ils se sont enfuis. Je les ai donc poursuivis mais ils se sont dirigés en direction de la forêt. J'ai suivi leurs traces mais quand je les ai trouvés, ils étaient tous empoisonnés au Cyanure à cause d'un abruti qui a jeté une balle de blitzball au Cyanure sur eux. J'ai donc mis plus d'une heure pour leur retiré tout le poison et je suis rentrée.
Cette fois-ci, son père la foudroya du regard.
- Tu sais combien vaut un chocobo? Hein?!
- 1500 gils, déclara-t-elle machinalement.
- C'est ça! 1500 gils! Et encore, ils valent encore plus chers en temps normal! Mais plus personne en veut! Qui voudrait bousiller son argent pour des bestioles inutiles pour le combat?!
- Chéri, tenta de tempérer la mère. Les chocobos sont...
- Et tu laisses s'échapper 6000 gils comme ça! Comme si les gils, ça tombait du ciel!
- En bonne santé, termina sèchement sa femme, agacée par le comportement de son mari.
- En bonne santé?! S'énerva le père d'Aisling en se tournant vers la brune. Qui nous dit qu'ils n'auront pas de séquelles, hein? Et qu'est-ce que l'on aurait fait si ils avaient été attaqués?! Tu peux me le dire?! Arrête un peu de défendre ta fille!
- Je ne la défends pas. C'est toi qui t'énerve pour rien.
- Je m'énerve pour rien?!
L'homme passa une main nerveuse dans ses cheveux blonds cuivrés et il inspira profondément.
- Maureen, mets-toi bien ça dans la tête: on ne peut pas vendre des chocobos blessés ou en bonne santé. N'importe quel guérisseur s'apercevra que les chocobos ont, à un moment donné, étés exposés au Cyanure.
- Je le sais très bien Aymeric. Pourtant, on va devoir faire avec. Et puis, nous avons une femelle qui attend un petit. Il faut voir les choses positivement: les chocobos, bien qu'ils aient été empoisonnés, vont bien. La femelle va bientôt mettre bas et Aisling est revenue saine et sauve. Ce n'est pas ce qui compte?
Aymeric jeta un coup d'œil sur sa fille qui n'osait pas se mêler de la dispute de ses parents. Elle savait, par expérience, qu'ils se réconciliaient presque toujours après. Et puis, elle ne voyait pas l'intérêt de se faire encore plus punir simplement parce qu'elle aurait voulu prendre le parti d'un de ses parents.
- Pour ta punition, tu viendras avec moi au match de blitzball demain.
Aisling leva brusquement la tête. Elle détestait littéralement les matchs de blitzball. Elle trouvait stupide de regarder des gens se battre une balle dans l'eau et de marquer dans des camps adverses. Elle n'avait jamais compris où est-ce que les gens trouvaient leur fascination pour ce genre de spectacle. Et sa rencontre avec Tiago avait confirmé ce qu'elle pensait depuis tout petite: les joueurs de blitzball étaient des idiots. Et si il joue demain? Pensa-t-elle alors. Elle écarquilla les yeux à cette simple pensée. Il serait capable de croire qu'elle regrettait de l'avoir giflé. Elle ouvrit la bouche pour protester mais son père la devança et alourdit la punition:
- Tu devras être debout au lever du soleil. On préparera ensemble notre sac et on passera prendre Tao et Evan.
- Non! Pas Evan!
Alors c'était pour cela qu'il était revenu après six mois d'absence! Aisling repensa à leurs « retrouvailles » de tout à l'heure. Il s'était littéralement moqué d'elle et voilà qu'elle allait se retrouver obligée de passer la journée avec lui. Elle le haïssait et elle allait devoir rester assise pendant des heures à côté de lui si on comptait le trajet, le match, le repas que leurs pères s'offraient traditionnellement après chaque match pour fêter la victoire de l'équipe gagnante et le trajet du retour.
- Papa, s'il te plaît! C'est déjà assez le match de blitzball comme punition!
- La discussion est close. Va te coucher maintenant. Tu te lèves tôt demain.
- Mais je vais pas pouvoir aller à la mer voir l'Invokeur demain soir.
- Je ne veux pas savoir, trancha Aymeric. Maintenant, dans ta chambre.
Aisling chercha alors sa mère du regard, espérant que celle-ci lui vienne en aide. Mais Maureen lança un regard navré à sa fille. Elle ne pouvait rien faire quand son mari se mettait en colère. Déçue par la réaction de sa mère, Aisling serra les poings, descendit du chocobo et passa devant ses parents en leur sifflant un « bonne nuit ». Elle entra dans la hutte et se rendit directement dans sa chambre. Elle n'avait pas faim, elle était seulement fatiguée. Elle se déshabilla, se laissa retomber sur son lit en bois et ouvrit ses draps orangés en toile. Elle remonta ensuite la couverture jusqu'à son cou.
Aisling sentait que la journée qui allait arriver n'allait pas être de tout repos. Mais le pire, c'était ce pressentiment qui était en train de l'envahir petit à petit. Elle savait très bien ce que signifiait ce pressentiment. A chaque fois que cette boule lui enserrait l'estomac, Sin frappait le lendemain. Passa ses bras devant elle et pria pour que cette fois, il y ait le moins de victimes possible. Puis, la jeune fille s'endormit sachant qu'elle allait rêver de Sin cette nuit-là.