Chroniques désespérées d’un casque-micro
Chapitre 25 : Moi-même – Le calme au cœur du cyclone
373 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour il y a 26 jours
Je n’étais pas le plus bruyant, ni le plus visible.
Mais j’étais là. Toujours à l’heure. Toujours opérationnel.
Un peu comme un métronome au milieu d’un orchestre en crise de nerfs.
On me connaissait pour mes punchlines. Pour mon sang-froid. Pour cette manière de répondre à des objections tordues avec une précision chirurgicale, comme si je recousais un cœur en pleine opération, à mains nues et sous tension.
On me félicitait en coulisses.
Un jour, même le Client Donneur d’Ordre en personne a appelé.
Pas pour râler.
Pas pour exiger.
Mais pour demander qu’on me félicite.
C’est rare. Presque mythique.
Mais derrière ce calme olympien, j’étais usé.
Usé par les scripts débiles.
Par les chefs de projets aussi charismatiques qu’un PowerPoint mal animé.
Par les "objectifs" qui changeaient tous les deux jours, comme si on jouait à un Monopoly en pleine guerre civile.
Et puis il y a eu la crise.
Pas celle du plateau. La mienne.
Un jour, une douleur comme un éclair m’a traversé le flanc.
Un calcul rénal.
Le médecin m’a regardé comme on regarde un prisonnier politique :
« Vous devez arrêter. Là, c’est votre corps qui vous supplie. »Ce n’était pas un simple caillou.
C’était un appel d’alarme.
Un SOS envoyé par mon propre organisme, saturé de stress, de bruit, de pression.
Un mois plus tard, j’ai donné ma démission.
Pas une fuite.
Un acte de guerre.
Car dans un centre d’appel, démissionner, c’est un doigt d’honneur silencieux.
Un doigt ganté, élégant, mais redoutablement précis.
Et je n’étais pas seul.
Voix de Velours partait aussi. Elle, vers Dubaï. Moi, vers un autre monde. Une école. Une salle de classe. Des élèves. Une forme d’humanité retrouvée.
Ils ont essayé de cacher la surprise.
Mais je l’ai vu dans leurs yeux.
Ils savaient.
Ils venaient de perdre un pilier.
Un de ceux qui tenaient encore le plateau debout.
Ils m’ont dit :
« Nul n’est indispensable. » Mais au fond, ils ont compris que ça s’appliquait à eux.Anthony était parti... pour toujours.