L'ombre qui nous lie

Chapitre 5 : J'ai accepter ma solitude comme une évidence...

1155 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour il y a 3 mois

Plus les semaines passaient, plus Airi cherchait à se rapprocher de moi. Au début, j’avais cru que ce n’était qu’une simple curiosité de sa part, un intérêt passager qui finirait par s’éteindre. Mais elle persistait. Chaque matin, chaque pause, chaque trajet en bus, elle était là, à me sourire timidement, à tenter de m’adresser la parole. Je ne comprenais pas. Pourquoi elle ? Pourquoi maintenant ?


Aujourd'hui encore elle était là.

La journée se terminais mais je devais rester plus longtemps au lycée pour finir un exposé avec quelques filles de ma classe. Je le fis savoir à Airi vu qu'on rentrait ensemble en bus. J’espérais qu’elle comprendrait l'allusion et qu’elle partirait sans insister. Mais à ma grande surprise, elle m’avait répondu avec une douceur déconcertante :


— Ce n’est pas grave, je t’attendrai.


J’étais restée figée un instant. Pourquoi faisait-elle ça ? Pourquoi ne pas juste partir comme tout le monde ?


Je n’avais rien dit puis entra entra dans la salle de classe avec les autres filles. On s’était installées en groupe, ouvrant nos cahiers et échangeant quelques mots sur le projet.Pourtant, bien vite, la conversation dévia.


— Vous avez entendu parler de la rumeur sur Miyuki ? avait chuchoté l’une d’elles en se penchant vers les autres.


— Ah oui… La sorcière, c’est ça ?


— Miyuki c'est vrai ? Il paraît que tu peux voir les morts.


Je senti mon cœur se serrer. Encore ces absurdités…


— Moi j'me doutais bien que tu avais quelque chose de bizarre surtout tes yeux ? Ils me mettent...mal à l'aise...


Je baissa la tête, feignant de me concentrer sur ma feuille. J’avais l’habitude de ces murmures, de ces messes basses. Mais aujourd’hui, quelque chose était différent.


Airi était là.


Assise dans un coin de la classe, elle écoutait la conversation. Je pouvais voir son regard surpris, presque choqué. Je n’avais pas envie qu’elle entende ça. Je ne voulais pas voir cette expression sur son visage, comme si elle découvrait une vérité effrayante à mon sujet.


C'en était trop.


Je me leva brusquement, faisant crisser ma chaise contre le sol. Sans un mot, je quitta la salle en courant.


Je ne savais pas où aller, je voulais juste fuir, ne plus avoir à écouter tout ça.


Mes pas me menèrent jusqu’à la salle de musique. Je referma la porte derrière moi puis me laissa tomber sur la chaise près du piano.


Pourquoi… Pourquoi fallait-il toujours que ça se passe ainsi ?


Mes doigts tremblaient, mon cœur battait trop fort. Une douleur sourde s’était installée dans ma poitrine. Sans que je ne puisse me contrôler, des larmes avaient commencé à couler.


Je détestais ça. J’avais promis de ne plus pleurer.


Mais à cet instant, j’étais incapable de retenir cette vague d’émotions qui me submergeait.


J'entendis des bruits de pas.


Je me leva d’un coup, essuyant mes larmes du revers de la main. La porte s’était ouverte, et Airi était là.


— Miyuki…


Sa voix était douce, hésitante.


Je sentis une colère soudaine monter en moi. Pourquoi est-elle venue ? Pourquoi ne peut-elle pas juste me laisser tranquille ?


— Laisse-moi tranquille ! avais-je crié.


Airi ne bougea pas.


— Je veux juste…


— Je t’ai dit de partir !


Elle s’avança malgré tout.


— Miyuki j'aimerai... J'aimerai être ton amie.


Je me figea.


Amie… ?

Ce mot résonna en moi avec une étrange violence.

Non.


Je ne peux pas avoir d’amis.


-------------------------------Flash-back-----------------------------------



La chaleur de ses bras. La douceur de sa voix...


Ma mère était mon rayon de soleil du haut de mes 9 ans je l'adorais.


Quand elle était là, tout semblait plus léger, plus beau. Son rire illuminait la maison, et même les jours de pluie semblaient moins sombres.


Puis elle est partie.


Je me souviens du froid qui s’est installé après sa mort. Pas seulement celui de l’hiver, mais un froid bien plus profond, celui qui s’est infiltré dans notre maison, dans notre famille.


Mon père n’était plus le même. Avant, il souriait parfois. Après, il n’y avait plus que du silence et des ordres. Il était devenu strict, distant, comme si la douleur avait creusé un fossé entre lui et nous.


Je voulais croire que ça s’arrangerait. Mais au fond, je savais que rien ne redeviendrait comme avant...



C’est arrivé une nuit.


Tout le monde dormait, mais moi, je n’y arrivais pas. Le silence était trop lourd, oppressant. Alors j’ai ouvert les yeux… et je l’ai vue.


Une ombre.


Non… pas une ombre. C’était elle.


Ma mère.


Elle se tenait là, dans ma chambre, baignée d’une lumière pâle, irréelle. J’ai voulu lui parler, lui tendre la main, mais à peine ai-je cligné des yeux qu’elle avait disparu.


Le lendemain, j’ai cru que j’avais rêvé.


Mais ça s’est reproduit.


Seulement, cette fois, ce n’était pas elle.


D’autres esprits ont commencé à apparaître. Des inconnus. Certains me fixaient en silence, d’autres semblaient murmurer des mots que je ne comprenais pas. La peur s’est installée, grandissant chaque nuit un peu plus.


J’ai fini par en parler à mon père. J’espérais qu’il me croirait, qu’il m’aiderait.


Mais sa réaction m'avait glacée.


— N’en parle jamais. À personne. Pas même à Yusuke et Minami. Si les autres enfants apprennent ça… ils auront peur de toi.


Je compris ce jour-là que j’étais seule avec ce fardeau...



Malgré tout, j'avais réussi à me faire une amie.


Elle ne savait rien. Et c’était mieux ainsi.


Mais un jour, je n'arrivais plus à supporté de garder ce secret pour moi. Le poids était trop lourd, j’ai cru qu’elle comprendrait. Alors, je lui avais tout raconté.


Son sourire s'était immédiatement effacé.


Le lendemain, elle ne m'avait plus adressé la parole.


Peu après, tout le monde savait.


Les regards avaient changés. D’abord curieux, puis méfiants, et enfin remplis de crainte. Les murmures me suivaient dans les couloirs, les chuchotements empoisonnaient l’air.


« C’est la fille qui voit les morts… »


Je suis devenue une étrangère parmi eux.


Mon père a fini par me changer d’école, pensant que tout s’arrangerait. Mais les rumeurs me suivaient comme une ombre. Peu importait où j’allais, les gens finissaient toujours par me regarder avec cette même expression : entre peur et rejet.


Alors j’ai arrêté d’essayer.


J’ai accepté ma solitude comme une évidence..


Mieux vaut être seule que de se bercer d’illusions.


Car au fond, il n’y avait qu’une seule vérité : les monstres n’ont pas d’amis....

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