World Wars Two : Écho du Destin.
Chapitre 2. Le Dernier Survivant.
11 Mai 1940. Route de convoie. Quelque part dans les Ardennes.
Le champ de bataille, dévasté et silencieux, était enveloppé d’une brume épaisse qui masquait les horreurs de la nuit précédente. Alexandre Chauss, encore sous le choc des événements, avançait péniblement parmi les corps de ses camarades tombés au combat. Chaque pas était accompagné du craquement sinistre des branches et des feuilles mortes sous ses bottes usées. Il parcourait les décombres, les yeux écarquillés, cherchant désespérément un signe de vie.
Alexandre Chauss : Hé !... Est-ce que quelqu’un est encore en vie ?! Répondez, s’il vous plaît ! « Lança-t-il, sa voix tremblante et brisée résonnant dans le silence oppressant. »
Mais aucune réponse ne lui parvint, si ce n’était l’écho funeste de sa propre voix. Le silence lui renvoyait l’image d’un cimetière à ciel ouvert. Alexandre tituba, presque comme s’il espérait que l’un de ses compagnons se redresserait soudainement, les yeux vifs et prêts à reprendre le combat. Mais rien. Partout autour de lui, ses frères d’armes gisaient, figés dans des postures de souffrance éternelle, les visages tordus par la douleur, les mains crispées autour de leurs armes.
Alexandre Chauss : Non… non, ce… ce n’est pas possible… « Murmura Alexandre, la gorge nouée par l’émotion. Il respirait avec difficulté, comme si l’air lui-même lui refusait de remplir ses poumons. » Il… il n’y a aucun survivant…
L’insupportable vérité s’abattait sur lui, écrasante. La mort était omniprésente, enveloppant tout de son voile.
Alexandre se laissa tomber à genoux, le poids du chagrin se faisant sentir dans chaque fibre de son être. Il serra contre lui un médaillon pendu à son cou, le symbole de sa famille, un dernier lien avec la vie qu’il avait connue avant cette guerre sans pitié.
Ses doigts tremblaient tandis qu’il caressait son visage, se frottant la moustache, cherchant à effacer l’image de ses camarades déchiquetés de son esprit. Les larmes brûlantes dévalaient ses joues, brouillant sa vision, mais il ne pouvait plus les retenir. Il pleurait pour eux, pour lui, pour tous ceux qu’ils avaient laissés derrière eux.
Seul. Il était seul, dernier survivant d’une tragédie inimaginable.
Les yeux encore rouges, Alexandre tenta de ravaler ses sanglots, se forçant à se ressaisir. Il refusait de se laisser submerger par la douleur. Il y avait peut-être encore une chance, aussi mince soit-elle.
En trébuchant parmi les corps, il cherchait frénétiquement quelque chose, n’importe quoi, qui pourrait l’aider à contacter l’état-major, à demander des renforts, à prévenir d’autres vies perdues inutilement. Après de longues minutes à fouiller les décombres, il aperçut enfin une radio, coincée sous le bras rigide d’un de ses compagnons d’infortune. Il la tira de là, le cœur plein d’espoir, mais celui-ci fut rapidement anéanti lorsqu’il constata l’état de l’appareil.
Alexandre Chauss : Merde… la radio est HS… « Grogna-t-il, sa voix rauque à cause du désespoir et de la fatigue. »
Ses yeux tombèrent sur le corps de son frère d’armes, et il sentit un mélange de honte et de nécessité l’envahir.
Alexandre Chauss : Désolé mon vieux, je vais devoir fouiller tes poches…
Avec un respect mêlé de culpabilité, il fouilla les poches du soldat défunt, espérant y trouver une note, un numéro, quelque chose qui lui permettrait de se connecter avec le reste de l’armée. Mais les poches étaient vides. Rien. Il se tourna alors vers la musette du soldat, y plongeant les mains, cherchant toujours. Puis, soudainement, son regard s’éclaira lorsqu’il trouva un morceau de papier soigneusement plié. La détermination reprit forme dans ses yeux, illuminant son visage marqué par le chagrin et la peur.
Sur ce bout de papier était inscrit un code de communication, un contact avec l’état-major français. C’était peut-être sa seule chance. Mais une autre décision s’imposait : la radio étant inutilisable, il devait trouver un moyen d’atteindre un village à proximité, espérant y trouver un appareil encore fonctionnel, ou bien il devrait se rendre directement à l’état-major.
Alexandre Chauss : Calme-toi… calme-toi… « se murmura-t-il, tentant de maîtriser les tremblements qui secouaient ses mains. »
Il déplia une carte trouvée dans la musette et la consulta fébrilement, son doigt tremblant parcourant les tracés jusqu’à trouver l’emplacement du village le plus proche.
Alexandre Chauss : Un village… un village… avec de quoi communiquer… mais les lignes sont sûrement coupées…
Il n'avait pas le choix. Alexandre prit une grande inspiration, essuya les dernières larmes de ses joues d’un geste brusque, rangea la carte et la boussole, puis se redressa. Son uniforme déchiré collait à sa peau, alourdi par la sueur et la poussière. Il resserra sa musette, ajusta son fusil sur son épaule et prit la direction de Sedan, laissant derrière lui le champ de bataille macabre.
Le chemin qui s’étendait devant lui serpentait à travers une forêt dense, ses arbres imposants projetant des ombres menaçantes sur le sol jonché de débris de véhicules militaires. Chaque pas semblait peser une tonne, et pourtant, Alexandre avançait, son visage tordu par la souffrance et la peur. Chaque bruit, chaque craquement de branche, le faisait sursauter, ses sens aiguisés par l’adrénaline.
Soudain, le silence pesant fut brisé par un son inattendu. Un vrombissement lointain, croissant en intensité, se faisait entendre. Alexandre s’arrêta net, ses sens en alerte maximale. Le bruit distinct d’une moto se rapprochait rapidement. Son cœur battit plus vite, martelant sa poitrine avec une force brutale.
Instinctivement, il se glissa dans l’ombre des arbres, s’abritant derrière un tronc massif tombé au sol, espérant que l’obscurité le protégerait.
Le souffle court, il retint sa respiration, essayant de se faire aussi petit que possible. Les secondes s’étirèrent interminablement alors que le vrombissement approchait encore et encore, jusqu’à ce que finalement, deux motos surgirent, leurs phares perçant la pénombre. Les machines, de robustes BMW R12, s’arrêtèrent brusquement à l’endroit même où Alexandre s'était trouvé quelques instants plus tôt.
Alexandre Chauss : Eh merde… Ils m’ont vu… « Murmura-t-il pour lui-même, sentant l’angoisse monter en lui comme une vague menaçant de l’engloutir. » Ils m’ont vu… je suis fichu…
Les silhouettes des motards se dessinèrent clairement dans l’obscurité. Les uniformes allemands, les casques, les insignes… tout indiquait leur appartenance à l’ennemi. Ils échangèrent quelques mots en allemand, une langue que Chauss ne comprenait pas, mais dont le ton ne laissait rien présager de bon.
Soldat Allemand 1 : Je suis sûr que quelqu’un était là ! « Lança l’un des soldats allemands d’une voix dure. »
Soldat Allemand 2 : Je n’ai vu personne. C’est probablement un animal que tu as vu. « répondit l’autre, visiblement moins inquiet. »
Alexandre, caché dans l’ombre, se tendit un peu plus. Il comprenait l’urgence de la situation. Si l’un des soldats décidait de vérifier les environs, il serait découvert. Et alors, il n’y aurait plus d’échappatoire.
Soldat Allemand 1 : Je vais tout de même vérifier la zone, d’accord ? « Insista le premier soldat, descendant de sa moto. »
Soldat Allemand 2 : Très bien, dépêche-toi alors ! « Grogna l’autre, visiblement peu enclin à passer plus de temps que nécessaire. »
Le soldat commença à s’aventurer dans les sous-bois, ses bottes écrasant les feuilles mortes et les branches cassées.
La tension devenait insupportable pour Alexandre, qui observait chaque mouvement, chaque geste de l’ennemi qui se rapprochait dangereusement de sa cachette.
Alexandre Chauss : Merde… non, non, non… « pensa Alexandre, sentant l’urgence de la situation le submerger. » Il va me trouver…
Puis, un bruit sourd fit sursauter le soldat allemand.
Soldat Allemand 1 : Il y a des empreintes de pas ici ! « S’exclama-t-il, tirant son arme de poing avec une rapidité effrayante. »
Soldat Allemand 2 : Sois prudent ! « Répondit son compagnon depuis la route. »
Le motard avançait, l’arme prête, scrutant les environs. Chaque pas le rapprochait un peu plus du tronc d’arbre derrière lequel Alexandre se terrait. Ses muscles se tendaient, son cœur battant à tout rompre. Il savait qu’il n’avait plus beaucoup de temps. C’était une question de survie.
Le soldat allemand approchait encore… encore…
Alexandre Chauss : C’est lui ou moi… « Pensa Alexandre, sa gorge nouée, alors qu’il déposait silencieusement son fusil à terre, pour ne pas attirer l'attention. »
Son esprit travaillait à une vitesse vertigineuse, pesant les options. Il savait que le moindre bruit, la moindre hésitation, lui serait fatale. Il glissa lentement la main vers le pommeau de son couteau, sentant la froideur du métal contre sa paume moite. L'angoisse rendait ses gestes maladroits, mais il savait qu'il n'avait pas le droit à l'erreur.
Le soldat ennemi continuait de s'approcher, ses yeux scrutant les alentours avec méfiance. À quelques pas seulement du tronc d'arbre, il s'arrêta, son regard passant juste au-dessus d'Alexandre, qui se figea comme une statue.
La sueur perlait sur son front, ruisselant le long de ses tempes, mais il ne pouvait pas bouger pour l'essuyer. L'ennemi tourna la tête, scrutant les ombres autour de lui. Le temps sembla se suspendre, chaque seconde s'étirant dans une tension insupportable.
Puis, le soldat fit un pas de plus, son pied s'enfonçant dans la terre meuble juste à côté de l'endroit où Alexandre était caché.
Le moment était venu. Le soldat Français n'avait plus le choix. Il bondit hors de sa cachette, frappant avec une précision désespérée. La lame de son couteau trancha net, pénétrant la gorge de l'allemand avec une force nourrie par la peur et la rage de survivre.
L’allemand émit un gargouillis étouffé, ses yeux écarquillés par la surprise et la douleur.
Ils tombèrent au sol ensemble, Alexandre maintenant la pression sur le couteau pour achever son adversaire. Le pauvre homme se débattit faiblement, ses forces le quittant rapidement. En quelques secondes, il s'immobilisa, son corps inerte écrasé sous celui d'Alexandre.
Il resta ainsi un moment, son cœur battant frénétiquement, ses mains encore crispées sur le manche de son arme. La réalité de ce qu'il venait de faire s'imposait à lui, comme une vague de dégoût et de choc.
Mais il n'avait pas le temps de s'attarder sur son acte. Il devait agir vite. Le deuxième soldat, entendant le bruit de la lutte, commença à appeler son camarade.
Soldat Allemand 2 : Hé, tout va bien ?! « Cria-t-il, la voix inquiète. »
Alexandre se redressa rapidement, retirant son couteau du corps sans vie. Il ne savait pas combien de temps il lui restait avant que l'autre soldat ne vienne vérifier. Il savait seulement qu'il devait éviter un autre affrontement direct, surtout dans son état.
Profitant de l'ombre et de la confusion, il se glissa furtivement entre les arbres, se rapprochant de la route où les motos étaient garées. Il devait agir vite et intelligemment.
Une idée folle germa dans son esprit. S'il pouvait atteindre l'une des motos, il pourrait s'enfuir rapidement, avant que l'ennemi ne comprenne ce qui s'était passé. Mais il devait d'abord neutraliser l'autre moto pour empêcher une poursuite.
Le second soldat, sentant que quelque chose n’allait pas, descendit de sa moto et s'avança prudemment dans la forêt, suivant le même chemin que son camarade. Il scrutait les ombres, son arme au poing, prêt à réagir à la moindre menace.
Alexandre, caché derrière un arbre, regarda son ennemi passer à quelques mètres de lui. Il n’avait qu’une seule chance.
Alors que le soldat allemand s'éloignait un peu plus, Alexandre jaillit de sa cachette et se précipita vers l'une des motos. Il s'accroupit rapidement, tirant son couteau et le plongeant dans le pneu arrière. Le caoutchouc se déchira sous la lame, émettant un sifflement strident alors que l'air s'échappait. Il savait qu’il n’avait pas le temps de saboter l’autre moto de la même manière. Il devait partir, maintenant.
Chauss se redressa d'un bond, monta sur la deuxième moto et tourna la clé de contact. Le moteur rugit, brisant le silence de la forêt. Le bruit attira immédiatement l’attention du second soldat allemand, qui tourna la tête, écarquillant les yeux en voyant sa moto sabotée et Alexandre prêt à s’enfuir sur l’autre.
Soldat Allemand 2 : Hein, ma moto ? Merde ! « S'exclama-t-il en se précipitant vers Alexandre, son arme levée. »
Mais il était trop tard. Alexandre accéléra, laissant une traînée de poussière derrière lui. La moto bondit en avant, dévorant la route avec une rapidité qui fit monter l'adrénaline en lui. Le vent fouettait son visage, mais il ne regarda pas en arrière. Chaque seconde comptait, et il devait mettre autant de distance que possible entre lui et l'ennemi.
Le soldat allemand, impuissant, tira plusieurs coups de feu, les balles sifflant dans l'air autour d'Alexandre. Mais aucune ne l'atteignit. Il était déjà loin, se fondant dans le paysage, emporté par la moto qui grondait sous lui.
Le paysage défilait devant moi à une vitesse vertigineuse, une succession de forêts sombres, de champs ravagés et de villages désertés. Je savais que je devais atteindre Sedan le plus vite possible. Chaque minute arrachée à cette course effrénée était une chance supplémentaire de rester en vie. Je me forçais à ne penser qu'à la route, bien que mes pensées s'entrechoquaient, tiraillées entre le soulagement d'avoir échappé à une mort certaine et la lourdeur de la culpabilité qui pesait sur moi pour avoir pris une vie pour sauver la mienne.
Mais en temps de guerre, il n'y avait pas de place pour l'hésitation ou le remords. Je devais continuer, coûte que coûte. Je priais pour que cette fuite désespérée ne soit pas vaine.
Fin du Chapitre 2. Le dernier Survivant.