Wolf Skin: Omega

Chapitre 13 : ÉTRANGES INFORMATIONS

8340 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 09/06/2022 09:10

XIII.

ÉTRANGES INFORMATIONS


Étrangement, être à tête reposée n'avait pas arrangé la situation. Bien au contraire même. En fait, c'était sans doute pire. Je n'avais même pas réussi à dormir tant j'étais obnubilée à l'idée de le retrouver. Je m'en voulais d'être comme cela, ce n'était pas dans mes habitudes. Je ne m'amusais pas à faire ramer les mecs mais jamais je ne me transformais en midinette parce qu'un garçon me plaisait. Et pourtant là, j'étais dans cet état. J'étais pressée de le revoir et stressée surtout. J'en avais eu la plus belle des preuves et celle-ci était simplement le temps que j'avais mis à me préparer. Une véritable éternité. Déjà la salle de bain, la plus longue durée de ma vie sans doute, bien plus même que pour mon premier bal. Un très long bain d'abord durant lequel j'ai frotté encore et encore chaque coin et recoin de mon corps. Après tout ça, je me suis lancée dans une séance de rasage de jambes plus parfait que chez des professionnels. Je voulais que ce soit absolument parfait. Un peu honteuse, j'avais envisagé l'épilation intégrale du Mont de Vénus, comme si j'imaginais que Matthew désire bêtement s'adonner à l'alpinisme... Au final, je m'étais résignée à conserver mon léger duvet pubien. J'avais en plus fixé longuement le plafond en me disant que c'était évident que je me teignais les cheveux donc, c'était inutile... Ces pensées m'avaient consternée même si la suite n'était guère mieux en fait. Passer plus de dix minutes à chercher quelle teinte utiliser pour mon rouge à lèvres ou mon mascara... C'était pire que tout, j'avais l'impression d'aller à un rencard. Bon il faut bien reconnaître que le temps passé dans le dressing à me chercher une tenue n'aidait pas à changer d'impression. J'avais d'abord pensé à une robe mais il faisait un peu froid, j'avais alors pensé à une mini-jupe et des collants mais je serai sur une moto donc c'était encore plus con. J'avais donc opté pour un jean que j'avais voulu moulant pour mettre ma silhouette en valeur. Le haut... Ce fut encore plus compliqué. J'hésitais, enlevant tel haut parce qu'il était trop sérieux, mettant un haut à bretelles avant de l'enlever parce qu'il montrait tellement mes seins que cela ressemblerait à une invitation, et ainsi de suite. Au final c'était un t-shirt avec pas mal de boutons, orange pale, dans la seule optique que si le besoin se faisait sentir, je pourrais jouer la carte séduction. J'avais alors pensé à des petites bottes qui me grandiraient un peu ainsi je serai plus grande, au cas où... C'était en remontant la fermeture éclair de ces fameuses bottes, qui au moins me donnerait un air réfléchi et pas sortie tout droit de Simple Life, une vieille émission de téléréalité, que je m'étais figée. Des bottes pour être plus grandes... J'étais consternée à cette idée : plus grande pour qu'il ait moins de chemin à parcourir. Le mode midinette nunuche commençait à me les briser menu... Mais qu'est-ce que je pouvais avoir pour agir comme ça ? Je n'en savais rien mais j'étais sûre que c'était un peu la faute de Josh. Je pris alors mon sac à main après y avoir placé mon livre et je suis descendue dans la cuisine pour me servir un soda. Il me faudrait bien quelque chose de plus fort mais j'étais encore mineure et il y avait ma famille donc... Enfin, mes grands-parents étaient dans leur chambre car ma grand-mère se sentait fatiguée ce jour là ; il n'y avait donc que le croisement improbable entre la Gestapo et une chauve-souris : ma mère.

- Et ben..., marmonna ma mère.

- Quoi? dis-je en me retournant inquiète.

- Cette tenue..., hésita ma mère.

- Quoi? C'est moche? Je dois me changer ? me suis-je immédiatement mise à paniquer.

- Non... C'est joli... Tu as un rencard ? demanda ma mère.

- Non, un devoir..., répondis-je en me rendant compte que techniquement, ce n'était pas un mensonge.

- Hum hum..., fit ma mère suspicieuse. Ce garçon de l'équipe ?

- Hein? Non... Je vais chez les Wilder, précisai-je alors en buvant un autre verre.

- Réviser... Tu es sûre ? demanda ma mère.

- Ben ouais pourquoi ? ai-je insisté.

- Je trouve très... en beauté pour une fille qui désire réviser, argumenta ma mère.

- Parce que je dois avoir l'air d'une SDF pour réviser peut-être ? ai-je dit en contre argument.

- Non mais... Là cela ressemble à une tenue faite pour plaire, dit-elle en insistant encore.

- Mais non, c'est juste comme ça, dis-je en passant ma main dans mes cheveux en vérifiant que j'étais bien coiffée.

- Tiens c'est nouveau ça, fit ma mère en montrant mon bracelet. Journée shopping ?

- Non, cadeau, répondis-je laconiquement.

Ma mère me fixa attentivement et j'ai plus ou moins fuit son regard. J'espérais franchement qu'elle n'allait pas poser plus de questions que nécessaire. Vu sa tête, elle en avait envie et c'était plutôt évident. Étrangement, une sonnerie fantôme de mon téléphone attira mon attention et je fis genre de rien. J'osais à peine la regarder malgré le regard insistant que je sentais sur moi.

- Vous serez seuls? demanda soudainement ma mère.

- Non, il y a toute sa famille Maman, je pourrais même jouer avec sa sœur, comme d'habitude quoi, avouai-je alors.

- Ho d'accord..., fit simplement ma mère.

J'ai soudainement regardé par au dessus mon téléphone pour observer ma mère et je la vis pensive. Ce n'était peut-être qu'une impression mais j'étais soudainement prise d'un doute.

- Tu comptais peut-être me faire un petit laïus ? demandai-je méfiante.

- Non..., hésita ma mère avant de répondre bien plus franchement. En fait si... J'espère que...

- Si tu comptes me faire un speech sur les protections, c'est inutile, j'en ai toujours sur moi, avouai-je avant de me rendre compte de la bêtise.

- Pardon? s'étonna ma mère.

- Juste au cas où cela arriverait et pas forcément avec Matthew, on n'est pas ensemble pour la centième fois, dis-je alors.

- Mais...

- J'en ai sur moi au cas où... On ne sait jamais. Pas là bien sûr mais vaut mieux être toujours prête, ai-je quand même précisé.

- Oui... Effectivement..., hésita ma mère.

- C'est toi qui m'a toujours dit que on ne sait jamais comment les choses se passent je te rappelle, lui ai-je effectivement rappelé.

- Mais... Si tu ne veux pas tu dois le dire..., précisa ma mère.

- Maman... J'y vais pour travailler... Je n'y vais pas pour m'envoyer en l'air... Parce qu'il n'y a rien entre lui et moi avant tout mais surtout parce qu'il y aura toute sa famille, ai-je dit complètement lassée.

- Mais tu aimerais... Qu'il y ait quelque chose ? demanda ma mère.

J'ai regardé ma mère attentivement avant de simplement hausser les épaules. En fait, oui, j'aimerais mais je préfèrerais rester évasive.

- C'est pas une réponse, me précisa ma mère.

- J'en sais rien ok? me suis-je peut-être un peu trop énervée. Il est gentil, serviable et je mentirai si je disais qu'il n'était pas mignon... Mais je ne sais même pas ce qu'il pense de moi.

- Ok d'accord..., marmonna ma mère. Mais vous vous êtes rapprochés comment ?

- On ne s'est techniquement pas rapprochés, ai-je tenu à préciser. J'y suis allée pour recruter sa sœur et on a discuté, point. Rien de plus.

- Mais... Il te plaît réellement ? demanda ma mère.

- Bon oui! T'es contente? Oui j'ai cherché de jolies fringues, je me suis maquillée et je me suis même rasée bêtement les jambes alors que je suis en jean..., marmonnai-je alors.

- D'accord... Ne t'énerve pas, je m'intéresse c'est tout, ronchonna ma mère.

Je fus alors sauvée par le gong ou plus particulièrement par un bruit caractéristique d'une grosse moto. Mon chauffeur était là. J'ai attrapé mon sac et j'ai traversé tout le couloir en fonçant vers la porte.

- À tout à l'heure ! Je sors! dis-je en ouvrant la porte pour la refermer derrière moi.

Et là je le vis sur sa moto. Matthew avait enlevé son casque en patientant tranquillement le téléphone en main. Il le rangea rapidement, sans doute avait-il dû penser à me prévenir de son arrivée. Je lui fis un petit signe de la main avant d'approcher à grande vitesse, mais en marchant, de lui.

- Salut, dis-je bêtement. Ça s'est bien passé pour venir?

J'avais honte... Quelle nullité dans les propos... Consternante.

- Oui, ce n'était pas loin... Ça te va bien, me fit il mal à l'aise sans doute à l'idée d'oser un compliment.

- Merci... Ça te plaît ? demandai-je avant de me gifler mentalement tant j'étais cruche.

- Euh... Oui, c'est... Classe? tenta Matthew.

Je l'ai regardé fixement avant de réaliser que faire des compliments n'était peut-être pas sa spécialité. Il avait essayé et c'était l'essentiel. Je souris quand il me tendit une veste plus épaisse que la mienne.

- La sécurité avant tout, dis-je en la prenant pour la mettre.

- Même si ce n'est pas très loin... Et je t'ai pris un casque, fit-il en l'attrapant dans une des sacoches sur le côté.

- Merci, dis-je alors. Le mien est un peu moins couvrant, dis-je en le plaçant sur ma tête. Tu me l'attaches?

J'avais compris que c'était une veste de Lacey car même si je ne flottais pas dedans, elle était un peu grande. Je sentis ses doigts sous mon cou et j'eus un petit frisson que j'essayais de réprimer. Je le vis se figer et regarder derrière moi. Je me suis retournée, ne doutant nullement de ce que j'allais trouver et j'ai effectivement trouvé ma mère complètement en stress.

- Matthew ? l'appela ma mère.

- Madame Perkins, la salua Matthew. Pardon... Austen...

- C'est pas grave, fit ma mère qui était fraîchement divorcée et pas encore très habituée à ce statut non plus. Je... C'est ma fille que tu as sur ta moto.

- Oui, je sais..., marmonna Matthew attendant la suite.

- J'espère que tu seras prudent... Ce n'est pas parce que tu as une grosse moto qu'il faut faire des pointes de vitesse, précisa ma mère.

- Maman..., ai-je grommelé tout bas.

- Deb n'est pas habituée à ce genre de moto alors je conduis doucement, la rassura Matthew.

- J'espère... C'est ma fille unique et j'y tiens tu t'en doutes, lui rétorqua ma mère.

- Je comprends, n'ayez aucune crainte, lui assura Matthew qui ne lui tenait pas rigueur de ses peurs.

- Bon faites attention et travaillez bien, ajouta ma mère en reculant.

Je suis montée derrière Matthew en regardant ma mère assez méchamment. Elle me faisait honte là. Je devais perdre des points devant Matthew. J'étais alors surprise d'imaginer cela. Je perdais totalement le contrôle de mes pensées. Heureusement, Matthew ne pouvait le voir vu que j'étais derrière. J'ai tout de même salué Maman quand il a démarré et puis je me suis accrochée comme une moule à son rocher non sans en profiter un tout petit peu. Je ne pouvais cependant autant en profiter car cette fois Matthew avait également une veste. Et puis surtout ce ne fut pas bien long pour rejoindre la ferme, je m'en rendis compte dès que le ralentissement fut suivi d'un arrêt total et de la mise à l'arrêt du moteur. Je descendis doucement avant de détacher le casque. Je dois préciser que j'ai voulu replacer mes cheveux d'un mouvement ridicule digne des pires comédies musicales. Je me sentais bête, je n'étais pas comme ça d'habitude.

- Ça va? Tu n'as pas trop stressé? demanda Matthew par acquis de conscience.

- Non, j'ai confiance, ai-je précisé.

Je le vis me sourire et j'ai un petit peu fondu, comme une idiote, avant qu'un cri ne me surprenne.

- Deb!!!! hurla une voix qui se rapprochait.

Je me suis retournée pour découvrir la minuscule tornade qui fonça dans mes bras. Je l'ai soulevée et je fus saisie par le coup.

- Bonjour ma grande, dis-je toute contente. Elle est restée humaine... Y a du progrès.

- Elle savait que tu venais, me précisa Matthew. Tu veux que je la prenne?

- Non, elle est légère comme tout, ai-je précisé.

Tammy se fit un devoir de me raconter ses longues journées à observer les animaux. J'étais amusée de son comportement et ce ne fut que sur le perron que j'ai réalisé la présence d'Eva Wilder.

- Bonjour, dis-je poliment. Vous allez bien?

- Très bien... Dis-donc tu es déjà assaillie.

- Ce n'est pas gênant, elle si mignonne, dis-je alors en assurant ma prise.

- Tu es jolie aussi... Surtout aujourd'hui, me précisa Tammy avec un sourire.

Je regardai la petite et d'un léger mouvement de tête j'ai regardé discrètement vers Matthew pour voir si il réagissait. Il semblait gêné.

- Mais entre donc, me fit Eva. Vous pouvez vous installer sur le canapé, Lass est avec son père pour s'occuper des animaux. Je voulais envoyer Tammy mais...

- Voulais voir Deb, ronchonna la petite.

- Moi aussi je voulais te voir, dis-je alors en l'embrassant sur la joue.

J'étais enfin entrée et je me suis dirigée vers le canapé. Sur la table basse, le livre de science-fiction était là ainsi qu'un cahier de note, celui de Matthew forcément. Je remarquai rapidement la présence de crayons de couleur et de feuilles pour Tammy. À peine l'avais-je posée pour enlever ma veste que déjà un grand dessin était devant moi alors qu'un bras était toujours dans ma veste. Je me suis empressée de l'enlever pour attraper le dessin. Il était évident qu'il s'agissait d'un dessin d'une petite fille et pourtant je l'aimais déjà vu qu'il était fait avec plaisir. Il s'agissait d'une forêt avec un loup noir et une lune. Sujet évident bien évidemment.

- C'est moi, me fit Tammy.

- Je t'avais reconnue, tu avais les poils noirs, ai-je précisé. Ton frère est tout gris... Comme ses yeux, ai-je bêtement précisé.

- C'est vrai, me fit Tammy.

- Je ne sais pas pour ta sœur et ton père, ai-je alors précisé à Matthew.

- Tu ne risques pas de les voir sauf en cas de problème, m'a-t-il spécifié.

- Et je ne peux pas savoir la couleur de leurs robes? demandai-je un peu étonnée.

- Matie... Qu'est-ce que ça change ? lui demanda sa mère.

J'ai regardé Eva étonnée et elle me sourit.

- Ils n'aiment pas se comparer, c'est une habitude. En général dans une meute classique, la plupart des membres sont liés et ont donc des robes assez semblables, m'expliqua Eva.

- Ho je comprends... La couleur donne un peu une appartenance en fait ? demandai-je pour être sûre.

- C'est bien cela, me fit Eva. Et pour te répondre ma fille est rousse et mon mari est tout blanc, dit-elle. C'est magnifique quand il neige.

Je l'ai regardée en souriant, une pensée romantique l'avait traversée sans aucun doute.

- J'aime bien la robe de Matie, dis-je alors attirant une petite surprise d'Eva.

- C'est moi la plus jolie en loup, marmonna Tammy.

- Évidemment, dis-je en lui touchant la joue.

- Vais te dessiner! me fit rapidement Tammy en attrapant des crayons.

- Ce sera beau, j'en suis certaine, dis-je en souriant.

- Tu n'as rien contre Picasso j'espère, me fit Matthew en souriant.

- C'est qui? demanda Tammy. Un élève de ta classe ?

- C'est pas important, dit alors Matthew.

J'ai rapidement jeté un petit coup d'œil au dessin et en effet, je risquais d'être difforme. C'était étonnant que la petite ait plus de difficultés pour dessiner un être humain qu'un loup.

- Tu veux quelque chose à boire ? me demanda Eva.

- Si vous avez du jus d'orange, ai-je demandé.

- J'en ai, fraîchement pressé, me fit la mère de famille avant de me servir.

Désormais concentrée sur son dessin, la petite était extrêmement sage. Cela me permit de me concentrer sur le livre et Matthew.

- Bon alors... Ce bouquin ? dis-je à Matthew avec un sourire.

- Tu l'as lu entièrement ? demanda Matthew.

- Oui... C'est intéressant mais j'ai du mal, avouai-je alors.

- Tu le vois comme quoi alors ? demanda Matthew.

- Je ne sais même pas si c'est une critique de la guerre..., avouai-je rapidement.

- En fait, c'est surtout une critique de la banalisation des conflits. Et de ce côté extrêmement jeux vidéo qu'elle a pris. La guerre moderne qui se pratique en appuyant sur un bouton, précisa Matthew.

- Mais ce côté... Journée qui redémarre... C'est chiant, marmonnai-je discrètement.

- Attention jeune fille, précisa Eva au loin.

Je l'ai regardée et elle m'a montré Tammy avant de toucher son oreille. C'était idiot de marmonner elle pouvait en effet entendre. Je me suis sentie idiote et j'ai regardé Matthew gêné.

- En plus d'un ressort purement scénaristique, il s'agit de critiquer le syndrome du Game Over et l'horreur de banaliser la guerre au fur et à mesure. Kiriya y prend peu à peu goût, m'expliqua alors Matthew.

- Ouais mais au début il essaye de sauver ses potes non? demandai-je quand même.

- Oui... Mais peu à peu il en perd son humanité pour ne se soucier que de sa survie... Même si sa rencontre avec elle le change, précisa Matthew.

- Ouais encore un couple maudit et de la pire manière, dis-je en prenant des notes.

- C'est cela... Un grand classique, dit Matthew.

On en discutait encore longuement mais j'avais envie de savoir ce qu'il pensait de moi. Discrètement, après avoir vérifié que personne ne me regardait, j'ai détaché deux boutons du décolleté. J'espérais qu'il réagisse un peu mais comme il avait dû entendre les boutons, je l'avais juste vu déglutir en changeant de sujet.

- Mais la descente dans la folie est intense. Il note son nombre d'essais, ses théories sans jamais réaliser qu'il doit penser en terme de boucles. Ce qui est ancré est ancré, précisa Matthew.

- C'est vrai que ça se voit, dis-je alors en fixant Matthew qui semblait ne pas oser me regarder de peur de voir mon décolleté.

- Le manga et ses dessins nerveux nous le montre bien, précisa Matthew.

- Tu voulais me le montrer non? demandai-je soudain. On pourrait aller dans ta chambre...

J'avais dit cela sur un ton que moi-même je qualifierai d'aguicheur. Cela avait totalement été inconscient et c'était sorti tel quel. Je n'arrivais même pas à croire que j'avais dit cela. Je vis alors Matthew se figer, sous le choc je m'en doutais bien, et ne plus savoir où se mettre. J'entendis un bruit provenant de la cuisine. Je n'ai pas tourné la tête car son origine, je la connaissais déjà.

- Matie, fit Eva Wilder calmement. Tu pourrais emmener Tammy à ton père et rester là-bas... Je voudrais discuter avec Debrah...

- Euh... Ok, dit alors Matthew en attrapant sa sœur.

- À tout à l'heure Deb! me fit la petite.

Quant à moi, j'étais en train de me décomposer sur le canapé en réalisant ce que j'avais fait. C'était une évidence pour moi mais Madame Wilder devait me juger. Je pouvais comprendre, même moi si une fille faisait ce que je venais de faire, je l'aurais qualifiée de chaudasse et d'allumeuse voir de fille extrêmement facile pour ne pas dire salope du lycée. Naturellement, je pouvais comprendre qu'une fille ait des envies, c'était normal mais faire ce genre de proposition alors que la mère du garçon se trouvait à quelques mètres seulement et la petite sœur encore plus près, c'était franchement déplacé. J'avais honte et seul le bruit des pas d'Eva Wilder rompait le silence. Elle se campa devant moi et j'aurais aimé pouvoir devenir invisible.

- Debrah, mets ta veste et suis moi s'il-te-plaît, nous allons marcher, me fit la mère de Matthew.

Je me suis redressée doucement et j'ai attrapé ma veste avant de l'enfiler. Je me suis dirigée vers la porte quand j'ai senti la main d'Eva sur mon épaule. Elle me guida doucement et en silence à l'extérieur. Je commençais à me demander si elle n'allait pas m'assassiner dans la forêt pour agir en folle du cul.

- Lass... Pas de panique, on ne sera pas loin, fit soudainement Eva.

J'ai tourné ma tête pour voir l'adolescente à l'extérieur de l'étable et elle nous surveillait. Je commençais à me demander si je devais songer à prier. N'étant pas croyante, la réponse fut évidente. J'aurais aimé que Matthew soit là pour me rassurer, me protéger, être là tout simplement.

- Tout va bien Debrah? demanda Eva calmement.

- Je ne sais pas trop... Matthew va s'inquiéter non? demandai-je alors en me retournant.

- Non ça ira, me fit Eva en attrapant mon bras.

- Eva... Je veux retourner là-bas..., ai-je alors affirmé.

- Je sais mais non, me fit alors Eva.

Elle me tirait presque et je commençais à me débattre. Je devais rejoindre Matthew, il allait s'inquiéter pour moi.

- Je dois...

- Ça suffit Debrah..., s'est un peu énervée Madame Wilder. Suis moi sans discuter...

- Mais je...

- Encore quelques mètres et cela devrait être bon, me confirma Madame Wilder.

- Je veux rentrer chez vous, s'il-vous-plaît, l'ai-je alors suppliée me surprenant moi-même.

- Je sais..., a grommelé Eva.

- Je veux être... Avec Matthew, ai-je assuré.

- Juste un peu plus près..., marmonna Eva.

Elle me tirait toujours et je devais résister. Je ne voulais pas lui faire du mal, Matthew pourrait m'en vouloir. Mais je me demandais si il m'avait suivie pour veiller sur moi, cela me ferait plaisir. Je suivais toujours Eva quand elle me lâcha pour me regarder fixement. Je l'ai observée également et je me suis sentie honteuse de la situation. Mais j'agissais vraiment comme une folle furieuse et même moi je m'en rendais compte. Mais le pire c'était que je me souvins surtout de mon insinuation.

- Ho putain ! ai-je presque hurlé. Mais qu'est que...

- Calme toi, me fit Eva en agrippant mes épaules. Respire calmement...

- Mais... Je suis désolée... C'était pas moi... Je ne suis pas comme ça..., me suis-je justifiée.

- Ça je n'en sais rien mais ce n'est pas le sujet, me fit Eva. Tu te sens toi-même ?

- Euh... Oui. Honteuse, consternante mais moi-même... Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demandai-je.

- Je t'ai amenée près de cet arbre, fit Eva en se tournant.

Je me suis alors empressée de regarder le dit arbre et il était bizarre. Ses branches semblaient partir dans tous les sens sans aucune logique de croissance. Mais le plus étrange était son feuillage intégralement noir avec quelques reflets argentés. C'était assez étrange mais encore plus que je ne l'ai pas remarqué, trop obnubilée par Matthew que j'étais.

- Wahou... Ça c'est aussi bizarre que les loups, dis-je alors.

- Ceci est un Sephiroth, me fit alors Eva.

- Oui... Peut-être... Sans doute, ai-je dit bêtement.

Eva eut alors un petit rire, pas franchement moqueur mais légèrement nerveux.

- Excuse moi, j'oubliais, fit Eva en s'approchant de moi.

- Il ne m'en a pas parlé, ai-je précisé.

- Je me doute... Cet arbre est un vestige des Dryades, précisa Eva. Leur monde...

- Ha bon? dis-je alors étonnée.

- Vas-y touche le tronc tu vas comprendre, me fit Eva doucement.

- D'accord, dis-je en joignant le geste à la parole. Ho... On dirait... Des battements ?

C'était bien ce que je sentais, des battements cœur ou quelque chose qui y ressemblait tout du moins.

- Je ressens juste une vibration, tu dois être très sensible comme l'atteste le fait de voir des ombres, précisa Eva.

- Les Dryades... Elles vivent encore dedans? demandai-je au cas où.

- Malheureusement non, me fit Eva tristement.

- Alors à quoi sert l'arbre ? demandai-je.

- Cet arbre est d'une importance capitale pour nous, et quand je dis nous cela signifie l'humanité, me précisa Eva. C'est de ça dont les ombres veulent s'emparer.

- Un arbre ? demandai-je surpris.

- Il ne s'agit pas d'un simple arbre. Il n'en existerait que dix dans le monde, chacun relié au monde des Dryades. Ils seraient des refuges pour les loups.

- Seulement dix? Mais à quoi servent ils? demandai-je encore.

- Chacun d'eux apporte une vertu à l'humanité et aux loups, si les ombres avilissent ces arbres... Ce sera un drame car nous perdrions un des attributs qui fait de nous des humains, précisa Eva.

- Des attributs ? demandai-je étonnée.

- Oui, les dons offerts par les Dryades au monde des hommes quand elles existaient encore. Leur connaissance était le plus haut degré de la vie contemplative ; c’étaient la couronne, la sagesse, l’intelligence, la force, la miséricorde, la beauté, la victoire, la gloire, le fondement et la royauté, m'expliqua alors Eva.

- Et celui-là... C'est lequel ? demandai-je.

- Selon Garrett, il s'agirait de celui de la miséricorde, me fit Eva. La bonté humaine, l'empathie. L'un des plus importants à mes yeux.

- Et pourquoi j'agis normalement maintenant ? demandai-je alors.

- Car son pouvoir, sa présence entre les deux mondes altère le pouvoir des loups, me précisa Eva.

- Euh..., dis-je hésitante et ne comprenant pas vraiment.

- Tu étais bien en train de proposer certaines choses à mon fils non? demanda simplement Eva.

- Madame... Je... J'ai honte... Je...

- Je sais que tu as honte mais je sais également pourquoi tu as agi comme ça, me précisant Eva devant ma panique.

- Pou... Pourquoi ? demandai-je alors.

- Te souviens tu de ce que tu as ressenti quand Matthew s'est transformé devant toi? demanda Eva.

- Oui.. C'est dangereux ? me suis-je inquiétée immédiatement.

- Compliqué... Sache que je suis ethnologue de formation, et que dans certaines cultures, les femmes savent au premier coup d'œil quel homme serait un bon partenaire, héritage du cerveau reptilien, expliqua Eva.

- Euh... Quoi? demandai-je un peu perdue.

- Les effets bizarres qui ont lieu sur les humains lorsqu'un loup change devant eux est basé sur le même principe. Nous n'utilisons que dix pourcents de notre cerveau et les loups activent des récepteurs dans ces parties inusitées, précisa Eva.

- Une seconde... C'est à cause de Matthew ? demandai-je.

- Cela devait être inconscient mais quand il s'est transformé devant toi il a... Comme relâché des phéromones qui ont agi sur toi comme un déclencheur du désir, fit Eva légèrement gênée.

- QUOI??? hurlai-je choquée

- Cela a éveillé en toi un instinct de reproduction inscrit en toi, dans ton cerveau reptilien. On parle souvent d'horloge biologique qui sonne et ben c'est le même principe, précisa Eva.

- Mais c'est n'importe quoi! dis-je alors.

- J'étais du même avis que toi mais moi aussi, j'ai ressenti cela quand Garrett a changé devant moi... C'était plus compliqué encore, plutôt... Chaud, me fit Eva. Et presque instantané.

- Ça ne peut pas être pareil... Je commence à déconner d'accord mais je ne suis pas tarée ! Je ne lui ai pas sauté dessus! me suis-je alors justifiée.

- C'est vrai que ce fut assez long... J'avais peut-être une idée de la raison mais je n'ose pas te poser la question, me fit Eva.

- Au point de gêne où on est... Allez-y, marmonnai-je.

- Es-tu vierge ? me demanda Eva sans chercher à tourner autour du pot.

- Hein ? C'était cela la question ? demandai-je choquée.

- Oui... Je pensais que peut-être cela avait pû être plus long parce que... Tu ne peux désirer ce que tu ne connais pas encore..., expliqua vaguement Eva.

- Mouais... Freud se retourne dans sa tombe, grommelai-je alors.

- Je suis humaine aussi, je n'ai que des spéculations, précisa Eva.

- Maintenant c'est bon, j'ai plus rien, ai-je précisé en m'éloignant.

- Dès l'instant où tu vas t'éloigner, cela va recommencer et même si mon fils n'essayera pas de profiter de la situation, il reste un adolescent... Il ne résistera pas éternellement, qu'importe le respect qu'il puisse avoir pour toi, me fit Eva.

- Je dois vivre collée à ce putain d'arbre? me suis-je énervée, chose compréhensible il faut bien dire.

- Non, bien sûr..., fit-elle en sortant une fiole de sa poche. Ceci est une infusion faite avec les feuilles de cet arbre, ses effets sont donc permanents sur ce genre de désagrément... Bois la et plus aucun problème de contrôle. Mais cela peut changer beaucoup de choses...

- Lesquelles ? ai-je demandé.

- Si par hasard le contrecoup et ce désir activé, encore inconsciemment sans doute, sont les seuls détails à t'avoir permis de nous accepter...

- Je ne changerai pas d'avis... J'avais compris, ai-je rappelé.

- Et... Ce genre d'effet n'apparaît pas vraiment au hasard... Il faut qu'il y ait... Une base, précisa Eva mal à l'aise .

- Comment ça une base? C'est quoi encore ce truc? demandai-je lassée.

- Cela n'apparaît que si une attirance réciproque existe même si elle est infime... Entre les deux, précisa Eva.

- Mais on ne se connaissait qu'à peine... Comment je pouvais..., dis-je avant de relever le mot "réciproque". Vous...

- Hmmm, marmonna Eva gênée.

- Il... Je... Je plais à Matthew ? Mais quand? On se rembarrait...

- Chez les loups, un regard, une odeur... Cela peut suffire à créer une attirant quand tout concorde... C'est difficile à expliquer en tant qu'humain... Un coup de foudre quoi, s'avoua vaincue Eva.

Et là, je me suis souvenue de son regard qui ne se détachait pas de moi le jour de la rentrée... Était-ce à cet instant là ? Et si il m'éloignait c'était uniquement pour me protéger quitte à en souffrir ? J'étais dubitative en regardant Eva et sa fiole.

- On me l'a proposée aussi, me fit Eva. Garrett, précisément.

- Et vous avez hésité longtemps ? demandai-je.

- Euh... Pas le moins du monde, fit Eva rouge pivoine. J'ai bu dès qu'il a réussi à m'en donner.

- Dès qu'il a réussi ? demandai-je surprise.

- Ne pose pas de questions, disons que Garrett n'était pas le premier, et donc..., fit-elle plus honteuse encore.

- Je crois que je comprends... Vu ce que je m'apprêtais à lui proposer... Il sait? demandai-je.

- Je pense qu'il doit en parler discrètement à son père... Tu sais... C'est...

Elle n'avait pas fini sa phrase que je buvais le contenu sans sourciller ni même hésiter, cul sec! Et là... Et bien rien du tout.

- Il ne se passe rien, dis-je alors en la fixant.

- C'est normal, tu es loin de Matie et près du Sephiroth..., avoua Eva.

- Ce moment vient d'entrer dans les pires moments de ma vie..., marmonnai-je.

- Je suis navrée... Heureusement que cela a dérapé chez moi, fit Eva.

- Il... Il ne s'en est pas rendu compte ? demandai-je.

- Il se voilait peut-être la face ou il avait peur du rejet, précisa Eva.

- Hmmm, dis-je pensive en fixant l'arbre. Ils doivent le protéger ? demandai-je préférant changer de sujet.

- Normalement ce sont ceux de Fort Collins qui devraient mais nous nous en chargeons également au vu de la proximité de ce dernier de notre chez nous, précisa Eva.

- Et c'est la raison de votre venue ? demandai-je ensuite.

- Il est le deuxième que nous approchons... Nous voulions... Nous étions partis la première fois avec Matie et... Bref, cela n'a servi à rien au final, me fit Eva.

- Matthew va bien? me suis-je inquiétée immédiatement.

- Je remarque que tu as laissé tomber le Matie, me fit Eva. Mais il va bien...

Je la vis regarder autour d'elle comme si elle espérait quelque chose. Je me demandais ce qu'elle avait à chercher comme ça.

- Eva... Y aurait-il quelque chose que je devrais savoir d'important ? l'ai-je interrogée.

- Rien qui ne te concerne, juste nous... Notre famille, dit-elle avec tristesse.

- Eva... Si vous avez besoin de parler... Même si je n'y connais pas grand chose réellement... Je suis là, dis-je alors en passant ma main dans son dos.

- C'est très gentil à toi mais je ne vais pas t'embêter avec nos problèmes, alors que tu ne peux rien nous apporter à ce sujet, fit Eva.

- Comme vous voulez, ai-je répondu.

J'ai alors enfin remarqué, sans doute parce qu'elle remplaçait ses cheveux tout en fixant l'arbre, qu'elle arborait un tatouage sur son avant-bras droit. Il était sublime et représentait un arbre stylisé dont les branches se transfirmaient en dates.

- Il est très beau, dis-je en le montrant.

- Ho, merci... Il porte les dates importantes, ma rencontre avec Garrett, notre mariage évidemment, parfaitement légal, ajouta-t-elle avec un sourire. Et puis les dates d'arrivée de nos enfants. Pour information, à cause fe leur capacité à régénérer leurs tissus, je suis la seule à pouvoir me tatouer.

C'était amusant comme information et cela n'enlevait rien à ce tatouage sublime avec ses six dates. En me rendant alors compte du nombre de dates, je fis plus attention au tatouage mais déjà Eva le cachait. J'avais clairement vu six dates. Elle parlait de rencontre et de mariage, ainsi que des enfants. Mais pourquoi six dates? Je fus alors prise d'une légère angoisse. Je craignais le pire pour cette famille et j'ai donc imaginé que peut-être il y avait eu un quatrième enfant mais qu'à cause de leurs fonctions... Ils n'étaient plus que trois. Le comportement d'Eva m'avait fait comprendre que la questionner serait mal venu alors je suis repassée sur l'autre sujet.

- Je peux vous poser une question ? demandai-je soudainement.

- Évidemment... Et tu peux me tutoyer si l'envie t'en prend, me fit Eva avec un sourire.

- Cela fonctionnerait avec quelqu'un qui a subi un lourd contrecoup ? demandai-je alors.

- Je pense que tu parles pour ton amie... Malheureusement non, cela n'est efficace que pour les contrecoups récents.... Comme le tien, me répondit gentillement Eva même si j'en fus frustrée.

- Merde..., grommelai-je alors.

- Et tu veux bien que je t'en pose une? demanda Eva.

- Bien sûr, lui ai-je répondu.

- Tu ressens quelque chose pour Matthew ? demanda alors Eva.

- Je ne sais pas si on peut appeler cela quelque chose, même si bizarrement cet effet me laisse un doute, ai-je justifié. Mais... Je me sens bien en sa compagnie. Il est différent des mecs de notre âge et pas uniquement parce qu'il a une tendance à se gratter derrière l'oreille, dis-je avec un clin d'œil.

- Je vois... C'est déjà bien. Je l'ai donc bien élevé, me fit Eva. Tu désires sans doute rentrer?

- Oui... Je veux vérifier que cela fonctionne, dis-je alors.

Ce fut ensemble que nous retournâmes vers la ferme des Wilder. Plus j'avancais, plus je me rendais compte que j'allais désormais devoir affronter son regard après mes propos gênant. J'espérais qu'il ne m'en tiendrait pas rigueur. Je suis rentrée dans le corps de ferme par la porte avant de me rendre compte que la petite était de retour sur son dessin. D'un petit coup d'œil suspicieux je me suis rendue compte qu'effectivement Pablo Picasso avait bien du soucis à se faire pour sa notoriété. Je me demandais même si il était possible de se tordre comme sur le dessin.

- Tam... Ton frère est où ? demanda Eva.

- En haut Maman, répondit Tammy en attrapant un crayon orange, pour mon t-shirt sans doute.

Ce fut à cet instant que je me rendis compte que le décolleté devait toujours être plutôt avantageux et sacrément osé. J'ai refermé trois des boutons en me rendant compte du nombre d'ouvert. Je serai restée en soutien-gorge que cela aurait presque été pareil.

- Il n'y plus de danger alors si tu veux monter, me fit Eva. Cependant c'est porte ouverte.

- D'accord Eva... Je pense que c'est efficace, dis-je alors.

- Ha... Effectivement, fit-elle en observant mon t-shirt.

Il ne manquait plus qu'une jolie pancarte fille chaude à accrocher sur ma tête. Quelle honte putain ! Je devais en être rouge d'ailleurs. Je me suis dirigée vers l'escalier et j'ai escaladé ce dernier tranquillement pour arriver au palier. Je me suis approchée de la porte avec la petite pancarte.

- Entre Deb... Debrah, fit la voix de Matthew à l'intérieur.

- Tu peux conserver Deb, dis-je mal à l'aise en ouvrant la porte.

Je découvris alors pour la première fois sa chambre. Elle était plus petite que celle de ses sœurs, sachant pertinemment que cette dernière devait contenir deux personnes. Il avait un bureau et un grand lit fait au carré. Sa décoration était assez sommaire, principalement des posters de films et de séries ainsi que de groupes de rock. Aucun poster de fille à poil à l'horizon, un bon point. Je remarquai également la quantité impressionnante de livres et manga en tout genre, une petite pile posée à côté d'un pouf plutôt osé. J'ai avancé pour observer les titres assez differents de sa pile fe mangas, choses assez rares dans un pays qui ne vit que de comics d'habitude. Sans mentir, je n'en connaissais pas beaucoup. Il y avait une sacrée liste en tout cas: Berserk, Lovely Love Lie, Battle Royale, Death Note, Get Backers, Sun Ken Rock, et j'en passe. Et un que je connaissais et qui me fit sourire: Card Captor Sakura. J'étais légèrement étonnée mais bon, on a le droit d'être éclectique.

- Matthew... Je...

- Je suis désolé, m'interrompit immédiatement Matthew me surprenant. Je ne savais pas comment réagir mais je veux t'assurer que je n'allais pas en profiter.

- Je pense que je le sais, dis-je alors. Je m'excuse de... t'avoir allumé, dis-je gênée.

- C'était...

- C'était gênant oui, on peut laisser tomber le sujet..., dis-je alors.

- Tu... Tu ne m'en veux pas? demanda Matthew.

- Je pense que tu ignorais les conséquences... En tout cas celles là non? Alors je ne peux pas t'en vouloir, l'ai-je rassuré.

- Ok... Donc c'est ça, fit-il en posant deux mangas sur le bureau.

- Tu n'en as que deux? demandai-je surprise.

- Le livre n'en a que donné que deux, ils se sont contenté d'une adaptation simple, m'expliqua Matthew.

- Je peux les lire ici? demandai-je.

- Bien sûr, installe toi..., fit-il en se rendant compte qu'il n'y avait pas grand choix.

- Je te rassure, ta mère m'a donné une infusion de feuilles de Sephiroth... C'est ça ? demandai-je avant de le voir répondre par l'affirmative. Je peux m'asseoir sur ton lit?

- Si tu préfères ça au pouf, me fit Matthew.

- Ok, pas de soucis, dis-je en m'asseyant dessus.

Je pris alors les mangas et je me suis mise à lire le premier. Je n'arrivais pas à savoir comment me mettre et j'étais mal à l'aise. Lui était plongé dans la lecture également d'un roman d'Anne Rice: Lestat. Pas plus joyeux mais un grand classique. Peut-être étions nous désormais mal à l'aise d'être seuls. J'ai quand même commencé à enlever mes bottes avant de le fixer.

- Je peux? demandai-je par acquis de conscience.

- Oui, pas de problème, me répondit Matthew.

La situation était gênante mais je pouvais lire plus tranquillement en allongeant mes jambes. Je jetai des coups d'œil à lui et j'avais bien remarqué qu'il me regardait de temps en temps. Sa mère avait raison, je devais lui plaire. Cela me fit un peu sourire et me poussa à me gratter la joue en tournant la tête. Et là, je vis un cahier d'écriture ouvert sur la table de chevet. J'ai commencé à me pencher pour regarder attentivement.

- Qu'est-ce que c'est ? demandai-je.

- Ho, fit-il en avançant extrêmement rapidement vers moi au point de poser un genou sur le lit pour récupérer le cahier. C'est rien.

Je regardai Matthew gênée de la situation, nous étions désormais tous les deux sur le lit et il s'en rendit compte vu sa vitesse pour se lever.

- Cela n'a pas l'air de rien, dis-je avec un petit sourire. Tu tiens un journal ? Le Journal d'un Loup? demandai-je en référence au Journal d'Un Vampire.

- Très mesquin et non, dit-il avec un sourire amusé. Je... J'écris.

- Tu écris ? Des fictions ? demandai-je. Du Lemon?

- Non... Je ne serai pas à l'aise, marmonna Matthew. Un peu sur certains mangas ou sur Harry Potter... Mais principalement de l'original.

- Vas-y raconte m'en une cela m'intéresse, dis-je en refermant le manga.

- Ça t'intéresse les fictions ? demanda Matthew surpris.

- Je suis sur Wattpad et Fanfictions.net mais juste pour lire et commenter... T'as écrit quoi? demandai-je encore.

- Euh une fiction sur une geek qui joue à un MMORPG de guerre futuriste et qui se retrouve catapultée dans la dernière version du jeu où plusieurs joueurs sélectionnés sont dans le même cas... C'est pas extra..., fit Matthew.

- Je vais chercher cette histoire... Et c'est un chapitre ? demandai-je en montrant le carnet.

- Une nouvelle... J'essaye..., marmonna Matthew.

- Laisse moi lire..., dis-je alors.

- Je...

- S'il-te-plaît..., ai-je insisté.

- Bon... Mais ce n'est que le premier jet..., avoua Matthew.

- Ok... Pas de jugement... Et mets un peu de musique, j'aime lire en musique... Tiens mets des reprises de Rewind, ai-je conseillé.

Il le fit et c'était des reprises de Blondie, que j'aimais bien à l'origine.

- Alors... Curse of Bradford... Ça raconte quoi ? demandai-je quand même.

- Cela se passe dans l'époque victorienne, une jeune femme de chambre de quinze ans quitte Londres à la mort de sa maîtresse pour rejoindre le manoir Bradford sur recommandation, une famille noble qui tient également une sorte d'école pour jeunes filles de bonnes familles. Mais la famille cache un secret particulier...

- Des loups-garous ? demandai-je très amusée.

- Je ne sais pas encore mais cela aurait quelque chose à voir avec la démonologie, dit-il calmement en ignorant ma mauvaise blague.

- Pas mal... Ça m'intéresse, dis-je alors avant d'ouvrir le cahier.

Je me suis mise à lire tranquillement en remuant la tête en rythme sur la reprise de Wrong Way. Il avait un style assez précis et posé dans son écriture.

- J'aime bien ta formulation, dis-je alors.

- Ha bon? fit-il surpris.

- " Chaque cahot de la voiture hippotractée résonnait dans ses mollets comme des souvenirs de son passé dans la cité brumeuse de Londres. Nulle autre jeune fille aux yeux d'Ellaine n'avait eu sa chance et cela, elle en était bien sûre. Lady Hellington ne s'était pas contentée de la recueillir alors qu'elle était à peine en âge de tenir un seau d'eau, bien loin de là. Alors qu'elle aurait pû se résoudre à ne lui enseigner que les bases de la domesticité pour en faire une femme de chambre comme les autres bien qu'accomplie ; Lady Hellington lui avait également enseigné ce que l'on enseigne aux jeunes filles de la haute société. Les arts avaient eu sa préférence mais l'apprentissage de la lecture n'avait fait qu'attiser la flamme brûlante de son intérêt pour le monde, la rendant capable d'abreuver sa soif de connaissance des heures durant tout en touchant avec prudence les reliures en cuir qui avaient abrité ces si précieuses connaissances". Magnifiquement rédigé.

- Merci, me fit alors Matthew.

Et moi, j'étais déjà replongée dans la lecture de son texte manuscrit si intense et si mélancolique. J'adorais cela, cela respirait totalement les romans d'époque. J'arrivais rapidement au bout du premier chapitre et ce fut extrêmement déçue que je ne découvris aucune suite.

- Déjà fini... À quand la suite? demandai-je rapidement.

- Quand ce sera rédigé, me répondit Matthew avec mesquinerie.

- Non tu crois! Idiot! dis-je en lui lançant son oreiller à la tête.

Quelqu'un de normal l'aurait sans doute esquivé mais lui, il le rattrapa au vol. Contrariant au plus haut point.

- C'était franchement plaisant à lire, dis-je alors.

- Tu n'étais pas venue pour All You Need Is Kill? demanda-t-il surpris.

- Euh... Ben en fait..., dis-je gênée. Je crois que c'était juste une excuse...

- Ho d'accord..., dit-il simplement.

Et un silence gênant prit alors toute la place. Il s'en voulait d'avoir été responsable de mon état particulier. Moi je ne lui en voulais pas, il n'était pas responsable non plus, en tout cas je l'estimais. Je voulais trouver une conversation pour détendre l'atmosphère.

- Je commence vraiment à aimer Rewind, dis-je alors à la fin d'une chanson.

- C'est cool hein? Mais ce sont des classiques, dit-il simplement.

- Les classiques du rock sont quand même les meilleurs morceaux, j'aime bien Imagine Dragons en moderne mais les anciens sont bien plus purs, dis-je alors.

- Ils sont bientôt en concert à Fort Collins, me fit Matthew.

- C'est trop cool ça..., avouai-je.

Je le vis légèrement pensif et je me demandais bien à quoi il pouvait réfléchir. La suite, je ne m'y étais pas attendue.

- Tu veux aller au concert? demanda Matthew.

- J'aimerais bien c'est sûr, il reste des billets ? demandai-je.

- Euh... Je..., hésita Matthew.

- Quoi? C'est si cher que ça ? demandai-je méfiante et sachant que désormais avec Maman les fonds étaient restreints.

- Je... Tu veux venir avec moi? demanda soudainement Matthew.

J'ai écarquillé les yeux légèrement surprise avant de me souvenir de ce que m'avait dit Eva près de l'arbre. Il devait forcément y avoir une base et Matthew semblait désirer essayer.

- Tu... Tu m'invites? demandai-je étonnée.

- Ben... Oui... C'est pas un date, précisa rapidement Matthew.

- D'accord, dis-je intriguée.

- Enfin... On pourrait aussi aller manger un morceau ou... Autre chose, hésita Matthew.

Pas un date hein? Cela y ressemblait un tout petit peu quand même. Étonnamment, j'avais vraiment envie de lui laisser sa chance car après tout, sa mère me l'avait bien précisé, moi aussi je devais y voir une légère attirance. Mais après tout Matthew avait réellement pas mal de qualités et j'étais sûre à pratiquement cent pourcents qu'il ne serait pas du genre à mettre en péril ma chaste vertu de jeune fille, formulation volontairement digne de sa fiction.

- Matthew... Matie... Ce sera avec plaisir vraiment, surtout que désormais il n'y a aucune influence extérieure, dis-je alors avec un sourire.

- D'accord, tant mieux, fit-il un peu mal à l'aise.

Je souris de sa gène. Il n'était pas à l'aise mais il avait trouvé le courage de m'inviter et j'étais convaincue qu'il en avait eu l'idée depuis un moment. Mais en voyant sa gène, je ne pus que sourire un peu plus. J'avais en effet l'impression que pour lui, affronter ces ombres maléfiques et dangereuses devait être largement moins effrayant que d'inviter une fille et ce petit détail le rendait assez craquant. Je me rendis alors compte que même sans l'effet de sa transformation, j'avais une petite attirance. Je me demandais déjà ce que me réservait ce fameux date qui selon lui n'en était pas un. À voir.


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