Vampire Classroom

Chapitre 2 : CHAPITRE DEUX

5975 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a presque 4 ans

CHAPITRE DEUX


Cela fait déjà une semaine que la fameuse conseillère s'est pointée chez nous et que ma vie a officiellement basculé. Les premiers jours, ma sœur avait pris comme un jeu l'idée de faire mes cartons, mais depuis deux ou trois jours elle a enfin dû réaliser les implications de mon départ. Si j'en suis si sûr c'est parceque depuis deux nuits, ma porte s'ouvre discrètement et elle me rejoint dans mon lit. Elle croit que je ne l'ai pas remarqué car dès le petit matin elle repart. Ma mère pense que c'est la crainte du départ, une sorte de sentiment d'abandon. Je dois dire que moi je m'en veux également, j'ai vraiment l'impression de les laisser dans leurs problématiques diverses. Certes, ma mère touchera de l'argent mais Cassie n'est pas prête pour la séparation. Si j'avais pu aller à l'Université, on aurait été séparés évidemment mais elle aurait encore eu deux années pour s'y faire mais pas là. D'ailleurs, je la vois bien sa détresse psychologique pendant que ma mère m'emmène dans le Wisconsin. Je la vois dans le rétroviseur, elle a le regard perdu dans le vague. Elle a toujours eu un regard dans le vague vu qu'elle est aveugle mais quand elle donne l'impression d'observer ce qui se passe à travers la fenêtre, je sais bien qu'elle réfléchit. Elle a toujours fait cela. Et ce ne sont pas les regards que j'échange en silence avec ma mère qui me rassureront.

- Ça va ma puce? demande ma mère.

- Oui, répond ma sœur laconiquement.

- Tu n'es pas trop mal installée ? insiste ensuite Maman.

- Ça va.

Je regarde ma mère et j'esquisse une petite grimace, elle nous ment c'est sûr. Je me sens alors obligé de la rassurer de plus belle.

- Tu sais Cass... Je ne serai pas loin, dis-je alors.

- Je sais Ben, me répond Cassie sans quitter la fenêtre du "regard".

- On va se téléphoner, dis-je ensuite.

- Moui...

- Cass... Tu vas me manquer.

- Tu vas m'oublier, dit alors ma sœur.

Je me retourne comme je peux sur mon siège et j'essaye de tendre mon bras pour toucher sa jambe. Son genou, je l'effleure à peine du bout des doigts et elle réagit en tournant la tête. Je crois que si c'était possible, elle serait en train de me fusiller du regard.

- Je n'oublierai jamais ma petite sœur tu sais?

- Quand tu préfèreras être avec tes nouveaux amis, tu m'oublieras.

- Mais non ma grande, ton frère ne t'oubliera pas, dit ma mère.

- Qu'est-ce que tu en sais? fait méchamment ma sœur.

- Et si je te promettais un message tous les jours et un appel tous les deux ou trois jours? dis-je pour la rassurer.

- Tu le ferais ? me demande-t-elle comme pleine d'espoir.

- Évidemment, sauf si tu t'estimes bien trop grande pour cela...

Ma mère me sourit alors en se rendant compte de ce que je suis prêt à faire pour rassurer ma petite sœur.

- Non ça va, tu peux le faire, me dit ma sœur en donnant l'impression qu'elle me faisait une fleur.

- Et puis ne t'inquiètes pas, j'ai ton lapin, dis-je en riant.

- C'est une peluche Ben, me répond ma sœur.

Je regarde ma mère et à nouveau nous rions, décidément ma sœur était déjà plus que blasée et en nous entendant, elle rit également. Je préfère entendre ma sœur rire que de la voir triste. Je sens mon téléphone vibrer et je regarde l'écran, je viens de recevoir un message. Il s'agit de Meghan et cela me surprend un peu. Je fais très attention à celui-ci et il est assez drôle en soit. Elle me demande si mon départ dans ce nouveau lycée est lié à ce qu'il s'est passé. Je la rassure en lui disant que non. Elle n'est pas la raison même si l'affronter en face à face est assez compliqué depuis. Je suis alors surpris, elle m'en a envoyé un autre. Cette fois, elle s'excuse de sa réaction ce jour là et elle me demande pardon. Sauf que c'est peut-être un peu tard... Après tout je vais être coincé dans cet institut et c'est impossible de reprendre là où nous en étions, ce serait malsain et sans doute trop compliqué. En réalité, je pense que cela risque de créer plus de problèmes mais je lui souhaite quand même de passer une bonne année scolaire avant de ranger mon téléphone et de fixer la fenêtre. J'ai encore une chance avec elle en fait. Si j'avais su avant de signer... Ma mère touche alors mon bras et je la regarde étonné. Elle sait pour notre rupture, je lui ai demandé conseil. Tant pis.

- Selon le GPS, c'est par là, fait ma mère.

Je regarde alors par le pare-brise et effectivement, au loin, se dessine une grande construction. Il s'agit étonnement d'un immense mur d'enceinte coupé par une grille devant la route. Ça a l'air sacrément gigantesque, il doit réellement y avoir beaucoup d'infrastructures.

- Et ben, fait alors ma mère.

- Plutôt grand hein? dis-je.

- D'après les documents, ça s'apparente à un petit campus. Le fondateur ne doit plus savoir quoi faire de son argent.

- Clair... Je n'aurais pas pu intégrer ce genre d'établissement sans réussir un concours.

- Je n'aurais jamais pu payer cela surtout, fait ma mère.

- Vas-y suis les voitures devant.

Elle se place tranquillement derrière une voiture après avoir bifurqué à gauche, la seule route menant à cet endroit. Vu la voiture devant, ce sont également des membres de la future Blue Class, des pauvres comme moi. Vu la voiture, une véritable épave familiale qui ferait passer notre vieux break Volkswagen de plus de quinze ans pour une voiture de luxe. Je soupire en attendant qu'on puisse avancer.

- C'est dommage que tous les élèves rentrent le même jour, dit ma mère en tapotant le volant.

- Pour?

- Ben, pour emménager, j'espère que les parkings sont grands, me répond ma mère.

- Je suppose qu'ils ont tout prévu.

Nous poireautons bien trente minutes dans la voiture avant d'arriver devant un petit box. Il s'agit sans doute d'un abri de gardien vu qu'il est placé entre les deux allées. Ma mère se gare devant le petit box. Soudain, un homme un peu en surpoids et à la tête peu engageante s'adresse à nous.

- Bonjour, je suis John Murray, le gardien de l'Institut Alguieri.

- Bonjour Monsieur, fait ma mère poliment.

- Blue Class je suppose, dit-il en regardant la voiture.

Bon d'accord, il est pas inspecteur, c'est facile à deviner. Énoncer les évidences, je déteste cette habitude mais bon.

- Oui, Benjamin Trenton, répond ma mère en m'indiquant du doigt.

Je me penche et je vois le gardien farfouiller dans un grand meuble avec plein de petits tiroirs, un peu comme ces vieux meubles d'apothicaire ou de vieux bureaux de poste. Il y a pas mal de boîtes à vu de nez et je le regarde fouiner. Tout à coup, il sort une petite boîte du tiroir et la tend à ma mère.

- À l'intérieur se trouvent le pass d'accès, qui sert également de carte d'étudiant mais également la clef de la chambre. Suivez l'allée et dirigez vous vers le bâtiment du fond à droite, fait le gardien.

- Merci à vous, bonne journée, fait ma mère en me tendant la boîte.

Je la prends sur mes genoux tandis qu'elle redémarre et je l'ouvre. Il y a bien une clef avec un petit porte-clef qui indique le chiffre deux suivit d'un tiret et du chiffre sept. Il ne faut pas avoir fait de hautes études pour comprendre qu'il s'agit du deuxième étage et de la chambre sept.

- Je pense que vous serez bien surveillés, fait ma mère.

- Il a la tronche d'un porte bonheur, dis-je en riant.

- On juge pas un livre à sa couverture Ben, je te l'ai déjà dit.

- Si tu veux un rendez-vous, je peux insister, dis-je en riant.

- Hmmm je ne suis pas si désespérée, fait alors ma mère en me faisant un clin d'œil.

- Et je juge...

Je tombe sur ma carte étudiant, il y a le logo de l'école, une sorte de bâtiment carré entouré de chaînes, digne d'une prison, et je remarque rapidement qu'il y a une puce comme sur les cartes de crédit. Super, la cantine, visiblement on est filé. Je prends alors plus attention à ce qui se déroule devant moi. Il y a avant tout un bâtiment avec une arche sous laquelle nous passons. J'ai eu le temps de voir le panneau à la porte de ce dernier. Il contient donc l'infirmerie et les bureaux de l'administration, sans doute celui du directeur également. À ce que je vois, tout est neuf, même le bitume tant il est lisse. Dans le prolongement du bâtiment principal, se trouve un grand bâtiment en forme de U dont la base est tout au fond et le haut vers nous. Ce sont clairement les classes. Nous le contournons, ou plutôt ma mère le contourne vu qu'elle conduit. Nous passons par la droite et suivons le chemin bitumé. Je vois clairement un bâtiment qui, selon ce que j'en discerne par les grandes fenêtres, semble abriter une piscine d'intérieur et peut-être des salles de sports au dessus, difficile à dire. L'allée se poursuit et nous guide lentement derrière ce bâtiment. Je vois que de l'autre côté du U se trouve sans doute les infrastructures sportives vu que j'arrive à remarquer la couleur orangée si caractéristique des pistes d'athlétisme. C'est clairement un équipement haut de gamme. Je vois tout au fond, deux bâtiments. Celui de gauche possède un style assez particulier, presque victorien et ressemble à un grand manoir. Celui de droite semble plus d'inspiration coloniale, comme les maisons de Louisiane, enfin les très vieilles maisons avec leurs beaux balcons d'inspirations espagnoles. C'est assez hétéroclite, surtout avec la modernité des bâtiments scolaires. Je me demande où est la bibliothèque mais je pense que cela doit être dans le bâtiment des cours.

- Ha le parking... Il y a de la place, fait ma mère.

- Est-ce que c'est joli ? demande ma sœur.

- C'est pas mal, dis-je en réponse. Un peu étrange mais c'est neuf.

- Tant mieux si tu es bien installé, dit-elle alors.

Je remarque que la plupart des balcons montrent des portes fenêtres ouvertes, des élèves s'installant sans aucun doute dans les chambres contiguës de ces mêmes balcons. Il y a sur le fronton du bâtiment un carré bleu, entouré de chaînes, symbole de la Blue Class. Je tourne la tête vers le bâtiment opposé, celui de style victorien et je comprends que le symbole de la Red Class est un rond rouge. Rien de très folichon. Par contre, je vois des élèves sur les balcons et d'après ce que je discerne du bâtiment de la Blue Class, les deux premiers étages sont des chambres pour garçons et les deux autres sont des étages réservés aux filles. Nous serons donc intégralement séparés. D'après ce que j'avais compris, et déduis également, le rez-de-chaussée devait être constitué des espaces détentes et des petites cuisines pour les occupants. Ma mère se gare entre deux voitures et j'ouvre ma portière avant de sortir. Je la referme et j'ouvre à ma sœur qui descend.

- Reste près de moi d'accord ? dis-je alors.

- Promis, de toute façon je ne vais pas m'éloigner, je ne connais pas l'endroit.

Et effectivement, elle reste près de moi, tant mieux. Je sors tout de même ma clef de sa boîte avant d'ouvrir le coffre pendant que ma mère me rejoint.

- Je peux t'accompagner tu penses? me demande ma mère.

Je bouge alors ma tête pour regarder ce qui se passe autour de moi et effectivement, la plupart des parents semblent aider leurs progénitures à emménager donc je hoche la tête. J'essaye de caler la portière du coffre, dont l'attache est cassée depuis longtemps et j'arrive à le fixer.

- Je veux porter quelque chose, dit ma sœur désireuse de participer à mon emménagement.

- D'accord attends, dis-je.

Je regarde ce qu'elle peut porter, rien de trop lourd vu son handicap, elle pourrait tomber. Je sors alors rapidement mon matériel de dessin qui tient dans un sac à dos, ainsi que le grand cahier de dessins. J'aide ma sœur à enfiler le sac à dos avant de lui tendre le cahier qu'elle prend délicatement. Elle sait à quel point je tiens à ce matériel.

- Je prends ton sac de vêtements, me fait ma mère en saisissant l'immense sac.

En réalité, il n'en contient pas tant que ça vu que nous serons en uniforme mais il contenait des vêtements dits civils. Il ne me reste donc que la caisse en plastique opaque. Cette caisse est lourde, voir très lourde et je comptais la porter de toutes façons. Elle contient des livres, beaucoup de livres, principalement des romans. J'ai toujours été un gros dévoreur de livres et là j'ai fait une petite sélection contenant de nombreux auteurs que j'adore personnellement. Il y du Tolkien, du Anne Rice, du GRR Martin, du Jane Austen, du Tolstoï, du Dostoïevski, j'en passe et des meilleurs, j'aime beaucoup trop d'auteur. J'ai dû me limiter alors j'ai opté pour emmener le reste de ma bibliothèque sous forme numérique, dans mon téléphone portable. Ce n'est pas là que va ma préfèrence, j'aime l'odeur du papier mais cela fera l'affaire. Il y a également de quoi réviser, quelques cadres photos, des décorations pour ma chambre, principalement Star Wars dont je suis fan et deux magnifiques statuettes une de

Simon Belmont¹ avec son célèbre fouet et une autre d'Alucard² avec ses armes et son long manteau rouge. Elle sont en résine donc peu fragile. J'espère que mon camarade de chambre n'aura pas des goûts trop bizarres. Je soulève la caisse à bout de bras en soupirant.

- Ho putain, dis-je en soufflant.

- Ton langage devant ta sœur, me réprimande ma mère.

- Ouais, ouais, désolé, dis-je alors. Cassie attrape mon t-shirt et avance tout doucement.

- D'accord... fait ma sœur en le cherchant avant de l'aggriper.

Nous progressons lentement vers la porte tandis que j'ouvre le chemin. J'avance lentement vu que ma sœur est accrochée à mon t-shirt.

- Ça va mon chéri ? demande ma mère.

- Hmph... Oui, j'aurais dû emmener moins, la vache...

- Il faut bien que tu te sentes chez toi quand même.

Nous passons alors l'arche d'entrée du bâtiment de la Blue Class, je le vois par dessus la caisse vu que je ne vois rien devant moi. Nous avançons dans le couloir devant nous.

- Ha il y a un ascenseur, fait ma mère.

- Ho tant mieux... dis-je à moitié essoufflé.

J'avance donc tout droit, à l'aveuglette un peu. Soudain j'entends le BING caractéristique de l'ascenseur et je sens un choc. Heureusement que mes deux pieds étaient au sol sinon je me vautrais comme une merde. Je suis à deux doigts de m'énerver quand j'entends une voix féminine.

- Ho non, excusez moi.

Je tourne alors la caisse et je tombe nez à nez avec une jeune fille de mon âge, petite et très mince, mais surtout asiatique.

- Je ne vous ai pas fait mal? demande-t-elle avec un accent épouvantable.

Je me rends compte alors qu'elle doit être japonaise, parce que j'ai dû lire quelque part que les japonais apprenaient les langues étrangères en phonétique.

- Non ça va... Et vous? dis-je par politesse.

- Ça va. Tu es de la Blue Class alors... Moi aussi, Mitsuko Hirano. Enchantée.

Je la regarde un peu étonné.

- Benjamin Trenton, Ben... Ils ont recruté des candidatures à l'étranger ?

- Ho à cause de mon accent ? Non, mes parents ont emménagé à Madison l'année dernière. J'ai juste passé le concours. Ho tu as une petite sœur, bonjour, fait-elle en touchant le bras de ma sœur.

Ma sœur a réagit comme à son habitude et a sursauté, provoquant la situation gênante et je vois une gêne énorme sur la japonaise. Je remarque alors son aspect physique : elle porte un short assez court et un débardeur noir qui laisse en réalité peu de place à l'imagination. Cela lui va bien.

- Ma sœur est aveugle, elle ne s'attendait pas à ce que tu la touches.

- Je suis vraiment désolée, excuse moi, fait-elle en multipliant les courbettes.

- Tu es dans quelle classe ?

- Onzième degré³, me répond la japonaise.

- On aura peut-être des cours en commun alors.

- J'espère, je vais vous laisser et encore désolée de t'avoir percuté, Ben-san.

- C'est rien, dis-je en la voyant s'éloigner quelque peu gênée.

Je l'observe un peu longuement et je sens la main de ma sœur.

- Tu as mal quelque part ? demande ma sœur.

- Hein? dis-je sorti de ma rêverie. Non ça va...

- Humhum, fait juste ma mère.

Je la regarde méchamment, comme si j'étais un dragueur avétéré, des fois elle me voit différent de ce que je suis. Après cet interlude gênant, nous montons dans l'ascenseur et nous nous dirigeons vers le deuxième étage. Tout le long du couloir, je croise les doigts pour tomber sur un mec sympa. Ce serait mieux après tout. Allez un mec cool, pas un gros lourd... Ma mère passe devant et m'indique une chambre dont la porte est ouverte. Je l'entends frapper à la porte, elle doit déjà être occupée.

- Bonjour Madame, font deux voix distinctes.

Moi j'avance et je pose ma caisse en soupirant. Mes yeux se relèvent alors sur mon voisin de chambrée. Je découvre un jeune homme mince, métis afro-américain et portant des cheveux très courts, plus que les miens, et des lunettes carrées; il est vêtu d'une chemise à carreaux rouge et noire, sur un jean bleu clair. Il est avec un homme, son père sans doute, ils ont un air de famille. Je me rends compte alors que mon colocataire a posé ses affaires au milieu de la pièce. Tout à coup, poliment et avec le sourire, il s'approche de moi et me tend la main.

- Salut, moi c'est Deacon Miles.

- Ben Trenton, content de te connaître.

- T'as l'air sympa, tant mieux.

- Deac... marmonne l'homme.

- Ho pardon, mon père Marcus.

Je serre la main de son père puis présente ma mère, qui sympathise assez vite avec l'homme. Trop vite à mon goût, mais bon elle est encore très belle. Je regarde enfin ce qui va devenir mon pied à terre durant les deux prochaines années. La chambre fait une trentaine de mètres carrés maximum, avec du parquet au sol. Deux lits sont situés de part et d'autre d'une grande porte fenêtre qui mène sur un petit balcon, contre les murs. Au dessus de chacun de ces lits se trouvent des tablettes en bois. Au bout des lits, il y a également des petits bureaux individuels installés contre de grands placards. Il y a vraisemblablement des tiroirs sous nos lits pour ranger nos affaires. Je peux voir une porte également, cela doit être la petite salle d'eau avec lavabo normalement, ainsi que les toilettes. Je sais déjà qu'il y a des douches spacieuses dans le couloir, brochure oblige. J'espère juste qu'elles ne sont pas communes. C'est déjà ça. Je n'ai pas envie de me ballader à poil devant tous les mecs. Je remarque alors au centre de la pièce deux grandes malles anciennes, faisant penser à celle dans les films de la franchise Harry Potter et je comprends qu'il doit y avoir les uniformes et les affaires scolaires.

- Tu veux quel lit? me demande Deacon. J'ai attendu si tu avais une préférence.

- Euh je prends celui-là, c'est pareil...

J'aide ma sœur à s'asseoir le temps de poser mes affaires. Je la vois sautiller sur le lit doucement.

- C'est confortable, dit-elle.

- J'espère... Tu es d'où Deacon?

- Ho Des Moines, et toi ?

- Chicago. Pas trop loin.

- Tu m'étonnes, fait-il alors.

Nous sommes tous les deux assez proches du Wisconsin même si l'Iowa est un peu plus loin. On ne sera pas dépaysé. Je remarque que ma mère fixe la malle attentivement.

- Ça va Maman? dis-je alors.

- J'ai envie de voir ton uniforme, me dit-elle d'une voix très enfantine.

- Bon... Regardons...

J'ouvre la caisse et je découvre un tas de chemise à ma taille. Elles sont toutes d'un blanc immaculé. Je sors alors des pantalons bleus foncés en toile. Il y a également de magnifiques vestes bleu marine assez longues, elles doivent tomber à mi-cuisse. Les revers des manches et du pantalon font à peu près quatre centimètres. Il y a deux choses que je déteste déjà sur cet uniforme : la première c'est le col marin sur chaque chemise, et la seconde ce sont les boutons de la veste, ils sont tous à l'emblème de l'école.

- Merde... Cravate obligatoire, dit Deacon.

- Tu ne sais pas faire les nœuds ?

- Je mets des cravates à pinces, répond-t-il.

- Je t'aiderai.

On a rapidement sympathisé et au bout d'une demi-heure nos parents respectifs décident de nous laisser tranquilles. La séparation avec ma sœur est compliquée, comme je l'avais prévu et cela finit par un câlin extrêmement long. Avant de partir, elle me pose son petit lapin sur l'oreiller, ça me fend le cœur. Je m'y suis habitué à ma petite sœur, j'y tiens et surtout je m'inquiète pour les deux femmes de ma vie. J'essaye en fait de ne pas montrer ma propre détresse quand je leur dis au revoir par le balcon. D'ailleurs celui-ci est assez grand, on pourra réviser dessus. J'agite le bras pour dire au-revoir. Je remarque que ma mère échange son numéro de téléphone avec le père de Deacon et je regarde, très surpris, qu'elle semble très contente d'être vaguement draguée.

- Mon père est quelqu'un de gentil, me fait Deacon que je soupçonne de vouloir me rassurer.

- Tu crois que ton père drague ma mère ? dis-je consterné.

- Bah... Possible... Si ça peut te rassurer, ce n'est pas un dragueur. Depuis la mort de ma mère, il n'est sorti avec personne.

Je regarde alors Deacon étonné, il me révèle déjà des choses sur lui et quelque chose d'assez important surtout.

- Mes condoléances pour ta mère, dis-je alors.

- Merci, je ne l'ai pas connue, elle est morte en me mettant au monde, explique Deacon en saluant son père.

- Merde... Je suis vraiment désolé, dis-je avec sincérité.

- C'est rien... Et toi ton père ? me demande-t-il.

- Un sale con, dis-je simplement. Divorcés...

- Ok sujet sensible j'ai l'impression...

- Plutôt oui.

Ma mère monte enfin dans sa voiture avant de redémarrer. J'entends alors ma petite sœur hurler depuis la fenêtre.

- Je t'aime Grand Frère !!!!

- Moi aussi!!!

Qu'importe la discrétion, je m'en moque alors j'ai hurlé ma réponse. Elle va me manquer. Je m'allume une cigarette en tendant le paquet à Deacon.

- Je ne fume pas, me dit-il.

- Ha... Pas de problème ?

- Tant que tu fumes sur le balcon, me répond Deacon.

- Aucun souci...

Après ma petite pause tabagique, je m'attèle à ranger mes affaires en comparant avec celles de Deacon. Ce dernier semble avoir une grosse passion pour l'automobile, et les voitures de sports. On discute pas mal et on compare nos cas. Lui, c'est un scientifique, vu ses résultats dans ces matières. Nous comprenons que nous avons été associés dans cette chambre pour s'entraider vu que je suis surtout un littéraire. Deacon est également passionné d'astronomie, preuve en est le télescope qu'il installe sur le balcon. Pendant que j'installe tous mes livres, les seuls siens étant des livres d'astronomie, il m'interpelle.

- La reine des damnés ? C'est... osé ?

- Pas du tout, enfin légèrement vu que c'est le tome trois des chroniques des vampires mais bon...

- Tu lis vraiment de tout... Dostoïevski ?

- C'est un grand auteur russe, Crimes et Châtiments ou les Frères Karamazov, c'est assez lourd à lire mais très bien écrit.

- Je te crois, me fait alors Deacon.

- Toi qui es plus scientifique je pense que tu préfèrerais cela, dis-je en tendant un livre.

- Les Robots par Isaac Asimov... Science fiction ?

- Évidemment... Si tu aimes, j'ai la suite en ebooks sur mon téléphone.

- Cool...

Et il retourne dans son coin. Je commence alors à décorer mon côté de la chambre avec des photos de ma famille surtout ma mère et ma sœur. Je finis même pas accrocher la seule photo que j'apprécie avec mon enfoiré de paternel. Sur cette photo, il est installé près de moi une main sur ma tête avec un grand sourire et moi j'enlace ma sœur et ma demi-sœur, celle-ci pour la forme, et je suis fier de moi. Je faisais encore plaisir à mon père à l'époque et j'avais accepté de m'inscrire dans un club pour pratiquer un sport de combat, et j'avais gagné un tournoi. Mon père avait rêvé de cela plus jeune et il m'avait assez poussé à faire de la boxe. Pour lui, c'était un sport d'hommes, connard... Les femmes aussi savent boxer et en plus, ce n'est pas parce que tu sais boxer que tu n'es pas une "femmelette", crétin de père.

Tandis que je poursuis mon installation, je commence à remarquer deux détails qui me chiffonnent pas mal. Le premier est assez futile mais Deacon ne parle pas de conquêtes amoureuses, je m'y étais attendu à ces conversations qui au final étaient absentes mais au moins je n'avais pas à justifier la raison pour laquelle j'étais toujours puceau, nous les mecs sommes des gros lourds sur ce sujet. Le second détail étrange est bien plus surprenant et c'est surtout parceque je fais des pauses clopes que je l'ai remarqué. Il n'y a en effet aucune activité de l'autre côté du parking. C'est bizarre quand même... Tandis que le bâtiment de la Blue Class est plus ou moins en effervescence perpétuelle avec les allées et venues des élèves, il n'y en a littéralement aucune dans celui de la Red Class. Leur côté du parking est vide et il n'y aucune lumière, il est totalement vide de vie. Ils emménagent quand eux? Normalement c'était prévu comme pour nous. J'ai enfin fini et je pose la dernière touche à mon côté de la chambre : mon livre de chevet. J'ai fait simple, j'ai choisi Orgueil et Préjugés de Jane Austen, un de mes livres préférés. Je lis si souvent les aventures d'Élisabeth Bennett et Monsieur Darcy qu'il est plus qu'écorné. Dans ma bibliothèque, il n'y a qu'un seule livre dans le même état : Les Quatre filles du Docteur March, par Louisa May Alcott. J'adore ces deux auteures capables de dénoncer toutes les dérives de leur monde et du traitement des femmes. Tout à coup, j'entends du bruit, des sortes de cris, par la fenêtre du balcon et je regarde Deacon.

- Il y a de l'animation, me dit-il.

Je sors alors lentement sur le balcon et j'avise ce qu'il se passe. Je suis assez aidé par les cris du balcon supérieur.

- Je crois que c'est la Red Class, fait une voix féminine avec un accent prononcé.

Je lève alors la tête sur le balcon supérieur et je vois la jeune fille asiatique qui m'a percuté.

- Bonjour voisine! dis-je alors.

- Ben-san! Tu es mon voisin du dessous ? C'est surper...

J'avise la rouquine un peu ronde mais très jolie malgré tout, l'un n'empêchant nullement l'autre malgré les normes de beauté, fichu dictact, qui se trouve juste à côté d'elle.

- Je te présente Karen-Chan elle est de New York.

- Bonjour, me fait la rousse.

- Et lui c'est Deacon de Des Moines, dis-je en présentant mon comparse.

- Salut les filles, fit-il alors.

Je me retourne sous le bruit des moteurs et je vois débarquer par la route opposée tout un tas de voiture de luxe, alignées comme une colonie de fourmis. Je remarque que plein d'élèves de la Blue Class se sont rendus sur leurs balcons pour observer le ballet luxueux. Il y a effectivement de tout, de la Ferrari, de la Porche, de l'Aston Martin, de la Lamborghini mais également des modèles moins sportifs comme la Rolls-Royce et la Bentley. Ils ont du fric c'est sûr. Je remarque que la conseillère d'orientation et médecin de l'établissement, Phoebe Prescott, s'est postée devant le bâtiment.

- T'as vu ces voitures ! fait Deacon tandis qu'ils se garent tous.

Je remarque que ce féru de voitures de sport a attrapé son télescope et pointe ce dernier sur les voitures. Je suis immédiatement interpellé par des commentaires féminins provenant de l'étage supérieur.

- Ho Mon Dieu, on dirait des mannequins !!!

Je regarde attentivement vers la réunion des bourgeois et, de là où je suis, c'est également l'impression que j'ai. Je m'approche de Deacon qui me regarde avec un grand sourire.

- C'est clair que ce sont de sacré beaux gosses, fiait il simplement.

Tiens... Il parle des mecs... Bah je m'en fous. Je ne juge pas les gens immédiatement selon leur genre, leur ethnie ou leurs orientations sexuelles, mais cela est peut-être la raison pour laquelle il ne me parlait pas des filles. Il ne remarque pas que j'ai relevé le propos.

- Je peux? dis-je alors en pointant le télescope.

- Ouais vas-y ! fait il en me laissant la place.

Je place mon œil sur le télescope et j'observe la Red Class. Des garçons et des filles baignant dans le luxe. Je n'y connais pas grand chose mais ça ressemble à du costard Armani ou des robes Dior ou Gucci, plus chers que le salaire annuel maternel. Et ils sont clairement aptes à faire du mannequinat. Que ce soit ce grand blond aux cheveux en catogan, ce petit brun au cheveux gominés ou cette fille noire aux cheveux parsemés de mèches roses dans sa robe verte moulante, ils ont tous l'air de sortir de magazines de mode ou de la presse people. Je peux remarquer par le télescope que la conseillère discute déjà avec le grand blond. Je vois une voiture dont les occupants ne sont pas encore sortis et bizarrement je reste dessus. Tout à coup, les portières de la Bentley s'ouvrent doucement. Sortant de la place du conducteur, je découvre un grand chapeau blanc et une robe blanche moulante sur le corps d'une fille aux cheveux blonds foncés tendant vers le brun. Elle tient son chapeau et a un grand sourire. Je la vois parler à l'autre occupant de la voiture avant de faire le tour et de s'approcher de cette personne avec un grand sourire enjoué. Le deuxième occupant, la deuxième en l'occurrence, sort alors. Je découvre une robe rouge vaporeuse arrivant aux genoux de la jeune fille qui est plus petite que la première. Immédiatement, je remarque de longs cheveux noirs de jais, arrivant au milieu du dos de la jeune fille. Elle a un corps longiligne et fin, presque frêle à ce que je vois mais qui est loin d'avoir quelque chose à envier aux autres filles de la Red Class. Je la vois alors passer doucement ses mains dans ses cheveux dans un geste très posé et calme pour se recoiffer. Elle bouge légèrement la tête et me permet de découvrir un visage presque parfait. Des lèvres roses, sans doute avec du gloss, un nez fin sur un visage au sérieux presque impérial. Et surtout, détail surprenant, je remarque des yeux d'un gris acier. Elle est littéralement sublime, comme les autres, mais son regard est tellement sérieux que c'est surprenant, presque impressionnant. Elle bouge encore la tête et je vois ses yeux qui observent le bâtiment de la Blue Class. Non, elle ne regarde pas le bâtiment, elle regarde le télescope. Je lève la tête surpris pour l'observer sans celui-ci. Impossible, elle ne peut pas avoir remarqué que nous l'observons... À moins qu'il y a eu un reflet lumineux sur la lentille, ce qui n'est pas impossible avec le soleil couchant. Je remarque par contre qu'elle s'approche du grand blond et semble lui parler calmement. Et c'est ce dernier qui semble indiquer aux autres de progresser vers les portes de leur dortoir.

- Et bien, je savais qu'ils étaient loin d'être boursier mais à ce point, fait Deacon.

- Ils sont clairement différents.

- Hein? fait-il interloqué.

- Tu sens la différence d'éducation dans leur façon d'être, dis-je pour m'expliquer.

Je les vois se diriger vers la porte et je serai prêt à jurer que celle aux cheveux noirs de jais se retourne à nouveau, pour sans doute pour nous observer de son regard supérieur. Cette année risque d'être particulière. Nous n'appartenons décidément pas au même monde...






______________________________________________

N.d.A.:

¹ Premier personnage de la famille Belmont, héros des premiers opus du célèbre jeu video Castlevania par les studios Konami.

² Personnage principal du manga Hellsing de Kōta Hirano. À noter que "Alucard" n'est autre que l'anacyclique de "Dracula ".

³ Aux États-Unis, les classes sont numérotées du First Grade au Twelveth Grade, de un à douze donc. Comparativement au lycée français, cela donne la Première.


Laisser un commentaire ?