Fairy Big 4 : La légende des quatre saisons

Chapitre 9 : Rencontre fortuite

5208 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 04/05/2024 17:29

 [Printemps]

 

Le départ était pour bientôt. Dans le royaume aux senteurs florales, l’effervescence régnait en maître pour finir à temps les préparatifs et rattraper le retard causer par la fée désinvolte de l’Automne.

 

Sur son chariot, Harold tenait les rênes d’un magnifique chinchilla poivre et sel dodu qui trottinait au pas. A ses côtés, Varian relisait les commandes tout en notant ses illuminations dans son carnet à « idées personnelles » qui ne le quittait jamais. Çà et là le nouveau Bricoleur admirait les fées voleter et crier des ordres en s’affairant telles des fourmis. Prenant une grande inspiration il profita de l’air doux d’un après-midi de Printemps dans la vallée, admirant les fleurs multicolores et les vaillantes jeunes pousses vertes. C’était une saison plaisante même si la chaleur estivale lui manquait. Il était plus adapté aux trente-degrés qu’au quinze et quelques.

 

- C’est là, tourne à droite, commanda l’aîné sans lever les yeux de son carnet.

 

Son collègue prit le virage entre les herbes hautes et les tulipes en fleurs pour se diriger vers une colline baignée de lumière du soleil. Une grande fée des jardins, probablement leur chef, volait juste au-dessus de lui en comptant le nombre de bulbes qui sortaient de terre pour le grand jour. Elle avait de beau cheveux blond clair attaché en chignon et une aura royale dans sa posture. Sa beauté le subjugua un instant, oubliant de conduire. Le Chinchilla en profita pour aller grignoter des graines entassées plus loin en frétillant de la queue.

 

- Hé ! Mes bébés fleurs !!! OUSTE !!

 

Harold revint sur terre de même que Varian qui haussa un sourcil. Son élève se gratta l’arrière de la tête, gêné. Une magnifique fée tout aussi blonde que la précédente se posta sur leur chariot, les mains sur les hanches. Ses yeux améthystes la rendait encore plus envoûtante que la précédente.

- Euh désolé … euh… petite erreur d’inattention… Balbutia Harold timidement.

Aurore soupira mais décoléra rapidement en allant caresser le Chinchilla.

- Fais plus attention la prochaine fois ! On a beaucoup de semis à faire dans le monde des hommes. Surtout depuis qu’ils détruisent et déforestent tout.

- Pourquoi font-ils cela ?

- Pour bâtir leurs royaumes et leurs châteaux ridiculement énorme. Les humains se multiplient tellement vite que l’espace manque alors ils n’arrêtent pas de construire. Mais pour ce faire ils détruisent Dame-Nature et empêche la faune d’avoir une maison. Enfin, ils ne sont pas tous comme cela, heureusement.

- C’est horrible…, commenta le nouveau en reprenant les rênes en main. Si cela continue… Ils détruiront tout ce que nous plantons et faisons ?

- Non ne t’en fais pas, Mère-Nature régule les êtres vivants à sa manière. Elle sait se défendre. Mais pour le moment, on a du pain sur la planche !

- Je suis bien d’accord, répliqua Varian. On a encore dix livraisons à faire ! HOP HOP !

Harold s’excusa à nouveau et reprit la route, les joues rosie. Aurore les salua amicalement tout en retournant à ses tâches.

 

Varian se mit à sourire le reste du trajet. Son collègue l’observa en biais.

- Quoi ? Pourquoi tu me regardes comme ça ?!

- Oh rien, rien… Tu as l’air de la trouver jolie, Rose.

- C’est son prénom ?

- Son surnom. Elle s’appelle Aurore mais tout le monde la surnomme Rose. C’est vrai qu’elle est gracieuse et sa voix est douce.

- Elle est aussi belle qu’une fleur, approuva Harold les yeux brillants. Comme Giselle. Une fée des jardins de mon royaume.

- Quel romantique. Tu veux que je t’arrange un coup ?

- Un coup ?

Harold le questionna du regard, perplexe.

- Tu n’as pas envie de te rapprocher d’elle ? De la prendre dans tes bras ? Le regarda-t-il en haussant plusieurs fois les sourcils. D’être à ses côtés pendant le travail ?

- Je… Euh…

Il sembla sincèrement perdu. Varian rit en le voyant ainsi.

- Tu as encore beaucoup à apprendre sur l’Amour !

- L’Amour ? C’est quoi ?

- C’est compliqué à expliquer… Surtout qu’il en existe de toute sorte. Mais disons que c’est quelque chose qui te prend de l’intérieur et qui fais exploser tes sentiments. Tu veux rester aux côtés de la personne pour toujours. Tu veux être l’unique être existant dans son regard ! Ce genre de chose.

 

Un silence s’installa. Harold chercha à assimiler le concept pendant que Varian l’asticotait du regard. Il finit par le lâcher après un dernier rire.

- J’arrête de t’embêter, tu auras bien le temps avant de comprendre ce genre de chose.

- Je ne saisis pas trop, avoua ce dernier. Et toi tu connais l’Amour ?

- Non. Cela ne m’est jamais arrivé.

- BAH ! Pourquoi tu m’embêtes avec ça alors ?!

- Parce que tu me faisais rire en regardant Aurore comme une part de tarte appétissante !

 

Le nouveau grommela sous l’hilarité de son voisin tandis qu’il tira sur les rênes pour stopper le chinchilla à destination.

- Allez, trêve d’amusement, je m’occupe de livrer la cargaison aux fées des eaux. Va voir les Lumineuses.

Obéissant à son supérieur, le jeune Bricoleur prit une brouette faite maison, entassa les commandes et se rendit sur le sommet de la colline où des fées jaunes orangées s’activaient. De la lumière s’illuminait de partout, l’aveuglant par ci par là tandis que Varian repartit avec le chariot vers la rivière.

 

- Excusez-moi… Où pourrais-je trouver la fée appelée Eilonwy s’il vous plait ?

- Au terrain d’entrainement, vers la forêt.

- Merci.

Poussant sa chariote de métal et de bois, il dénicha le lieu quelques mètres plus bas, proche d’un sous-bois. Un violent éclat aveuglant le priva soudain de sa vue ! Il dut fermer les yeux et buta devant lui. Son chariot et lui-même dégringolèrent la butte avant de finir leur course contre un rocher dans un bruit de casse.

 

Les pieds en l’air Harold grimaça douloureusement, la tête en vrac.

- Est- ce que ça va ?!!

- Ça… Va…

Lorsqu’il rouvrit les yeux, les prunelles sapin se posèrent sur de douce iris émeraude. Le bricoleur se figea, subjugué par l’étrange chevelure en or qui se balançait dans le vent. Il se saisit ensuite de la main offerte et se remit sur ses pieds.

- Je m’entrainais à mon bouclier de protection mais j’y suis allée un peu fort… J’espère que tu n’as rien !

Harold s’examina, ses ailes étaient sales mais bien en place. Il les fit battre pour se dépoussiérer avant de sourire à l’inconnue.

- Tout va bien, ce n’est pas grave. Je suis toujours couvert de saleté de toute façon.

- Un vrai bricoleur, sourit la blonde.

 

Il haussa ses lèvres à son tour tout en contemplant son vis à vis. Les deux se fixèrent comme si tout à coup le temps s’était figé. Eilonwy les rejoignit en les regardant tendre leurs doigts l’un en face de l’autre.

- C’est toi !! / - AH !! Je te connais !!

 

Ils s’immobilisèrent puis rirent de bon cœur.

 

Eilonwy les regarda sans comprendre.

- Raiponce ?

La blonde se posta à côté d’Harold en le désignant.

- C’est mon ami de naissance ! * Elle se tourna en prenant ses mains* Tu es dans quelle saison ? Tu es celui qui à prit le marteau ?! Que fais-tu ici ?! C’est quoi ton nom ?!

Elle sautillait de joie. Son homologue semblait lui aussi euphorique de rencontrer un « des trois autres » ! 

- Euh, je viens de l’Eté. Je travaille avec les Bricoleurs pour votre départ imminent. Et je m’appelle Harold.

- Génial ! Tu as rencontré Varian ? Il est si doué !

- Oui, c’est mon mentor ! Je confirme il est très doué.

- N’est-ce pas ?! Oh, je suis si heureuse de te rencontrer ! Je voulais venir te voir, et les autres aussi, mais…

- Trop de travail ?

- Exactement !

- Je n’en doutes pas, je croule aussi sous les commandes.

 

La Lumineuse la plus âgée poussa un petit cri avant de retourner la brouette tombée.

- Ah ! C’est justement ce que j’avais demandé ! Mais… C’est tout cassé…

- Mince…

- Pas grave, je vais rafistoler tout ça. Laissez-moi faire.

- Je peux te regarder travailler ? Demanda Raiponce en s’illuminant.

- Bien sûr.

- Dans ce cas apportez-les moi dès que ce sera fait, j’ai vraiment besoin de ses caisses de transports hermétiques. Et des poulies qui vont avec. En tout cas, je suis enchantée de te rencontrer, Harold ! Merci pour le déplacement.

 

Eilonwy les salua, retournant à ses affaires. Le bricoleur se posa à l’ombre d’un buisson et sorti aussitôt ses outils pour réparer les morceaux brisés et resserrer les vis. Pendant tout son travail il fut d’une extrême concentration sous les yeux émerveillées de Raiponce. Elle savourait le moindre de ses gestes. Il fut précis et efficace. Terminant par un peu de sa magie pour renforcer les pièces recollées et ce fut comme neuf.

 

- Incroyable, applaudit la Lumineuse. Du travail d’orfèvre !

- Oh ce n’est pas grand-chose, mais merci.

Il prit une pause et la regarda de nouveau.

- Raiponce, c’est ça ?

- Tout à fait.

- Est-ce que tu te plait toi aussi dans la vallée et dans ton travail ? Pour ma part je suis comblé et je me sent chez moi.

- C’est la même chose pour moi ! J’ai vite prit mes marques et apparemment je fais du bon travail ! Mais j’ai surtout hâte de partir dans deux jours !!! Le monde des hommes n’attends que moi !!

- … Tu n’as pas un peu peur de ce qui t’attends là-bas ?

- Un peu, avoua la blonde en repensant aux fées noires. Mais ça ne m’arrêtera pas pour autant !

- Tu es bien courageuse.

Harold se prit le bras droit, la mine basse. Il observa son travail puis de nouveau son amie.

- Je me sent à l’aise ici et dans mes tâches, mais… dans le reste du monde… Je ne sais pas si j’aurai eu le courage d’y aller. Ce qui, de toute façon, ne me concerne pas.

- Pourquoi ?!

- Les bricoleurs ne partent pas. C’est interdit.

- Oh je ne savais pas…

- Ça m’arrange.

- Tu ne rêves pas de voir plus loin qu’ici ?

- Non, mentit-il aussi bien à Raiponce qu’à lui-même. Je suis bien ici. Ça me suffit.

- Tant mieux dans ce cas… Moi c’est l’inverse, je trépigne !

 

Il lui sourit un peu tristement. Harold avait une peur bleue de ne pas se sentir à la hauteur, d’être le plus faible de tous. En regardant Raiponce il se sentit envieux à la fois de son courage, sa confiance que de son talent. Il savait bien qu’il serait le mouton noir des quatre nouveaux… Heureusement, son bon travail le revalorisait à ses yeux.

 

- Bon, je dois retourner livrer les commandes.

- Et moi à mon entraînement. Mais… j’aimerai te revoir. Il y a plein de choses dont j’aimerai parler avec toi. Tu es un des seuls qui peux me comprendre.

Harold lui sourit et opina.

- Pourquoi pas ce soir ? Après le travail ?

- Je termine assez tard…

- Moi aussi !

- Dans ce cas, j’en serai ravie ! Parce qu’après je pars pendant trois mois…

- Je viendrai chez toi. Si tu me dis où c’est…

 

La blonde lui fit un rapide plan sur une de ses feuilles. Ils retournèrent ensuite à leurs devoirs respectifs tout en se saluant chaleureusement de la main. Ils avaient hâte de se retrouver, l’un comme l’autre.

 

**

[Automne]

 

Quelques jours plus tôt, Merida avait dut faire amende honorable auprès des Printanières. Elle s’excusa envers celles qu’elle venait aider puis se mit au travail pour les épauler dans leurs travaux. Elle se mit à voleter partout dans le royaume, transportant des choses, aidant d’autres dans leurs préparatifs, comptant les sacs qui allaient partir, nettoyant les alentours pour un environnement plus propre, apportant de la poussière de fée ou de la nourriture aux ouvrières…

 

Fatiguée, la rousse regretta amèrement son escapade avec les ours. Les journées étaient éreintantes alors que normalement elle aurait dut aller se la couler douce en explorant… Mais elle prit son mal en patience, sachant que sa punition se terminerait dès le départ des Printanières. Dans sa tête, elle planifiait déjà les zones à aller visiter et les fées à aller rencontrer. Notamment son ami de l’été puisque la Printanière serait partie et que l’Hivernale était inaccessible…

 

Un soir, tout à sa longue traversée des royaumes pour rentrer chez elle, quelle ne fut pas sa surprise quand un oiseau lui fonça dessus en piqué. Un air de déjà-vu lui offrit le réflexe d’esquiver les serres de l’animal tout en tournoyant sur elle-même.

- Hé ! Je suis pas en zone d’attaque normalement !

Se trouvant sous la frondaison, elle vit l’animal pousser un cri tout en s’agrippant à une branche près d’elle. Le visage de l’Animalière s’illumina.

- C’est toi ! Mon amie la Buse!!

La noble créature ébouriffa ses ailes de prestance.

- Tu es venue me voir ?! Comme c’est gentil ! Mais fais attention, ici, les fées pourraient t’attaquer avec leur pouvoir. Viens, allons plus loin.

 

Comprenant la situation, la buse suivit Merida qui volait avec aisance entre les arbres. L’animal ne fut pas en reste et tous deux firent une course poursuite à travers les bois en s’amusant. Une fois éloignée du territoire des ouvrières, Merida se posa sur un gros chêne, son amie en faisant de même. Elle la prit dans ses bras en sautant sur son plumage, s’agrippant avec force pour la câliner. Une aura magique les enveloppa.

- Comme je suis heureuse de te revoir !! Je savais que tu étais gentille au fond !

Le rapace se pencha pour poser sa tête sur la fée en fermant les yeux. Merida était aux anges. Elle lui caressa le bec tandis que l’oiseau observait les ailes de Mérida, guéries, et sembla en être content.

- Merci d’être venue. Puis-je te donner un nom ?

L’animal opina.

 

La rousse réfléchit un petit moment. Elle avait compris que c’était un mâle en sentant son aura. Elle se mit à sourire après délibération.

- Je sais, tu t’appelleras Angus ! Cela signifie « Celui qui est choisi » en vieux langage de fée. J’ai vu cela écrit sur l’autel de l’Arbre-Monde !

Angus sembla en être ravit. Il bomba son plumage tout en battant des ailes. Elle rit à cela et le câlina à nouveau.

 

Ils partirent ensuite vagabonder une partie de la nuit, l’animal lui montrant son nid et ses endroits préférés de la vallée. Puis elle le salua en lui caressant la tête, assise sur son cou avec aisance, avant de rentrer chez elle, s’endormant d’une traite.

Le lendemain fut dur tant elle était épuisée mais elle ne regretta pas un seul instant sa balade nocturne. Le soir de ce nouveau jour, elle recommença sans se douter que Jane la surveillait au loin avec une grande stupeur. Elle lui en parla aussitôt le lendemain avant de promettre de garder le secret tant que Merida assurait que la Buse ne viendrait jamais semer la discorde dans la vallée. La rousse le lui garantit sans hésiter. Angus était maintenant son ami ! Jane n’en revenait pas !

 

Le jour du départ pour le monde humain, la rousse fut assignée par Elinor, sa supérieure, à la préparation finale des commandes sur la grande place de l’Arbre-Monde. C’est motivée à aider qu’elle se rendit sur les lieux pour terminer sa punition.

Tandis qu’elle portait une lourde caisse à elle-seule -alors qu’on lui avait bien dit qu’elle n’y arriverait pas sans aide! - la rouquine bascula en arrière. Juste à temps, une fée vint la sortir de ce mauvais pas en attrapant l’autre côté de la boîte. Merida la remercia tout en portant le coffre jusqu’à destination. L’aide de la fée fut la bienvenue tant ce fut éprouvant.

 

Une fois la caisse posée dans un râle de délivrance, Merida releva ses cheveux en bataille tout en s’épongeant le front. Elle se bloqua sur place en voyant sa sauveuse. Et son vis-à-vis en fit de même !

 

**

[ Hiver]

 

 

Plus tôt.

 

Bien que songeur, Jack profita des jours suivants son arrivée pour vagabonder et découvrir un peu mieux les fées de son royaume. Tout était totalement calme, comme endormi ici-bas.

 

Il retrouvait Elsa tous les matins pour discuter et flâner autour d’un grand lac gelé, entouré de forêts, qui était un de leur lieu préféré. Il se restaurait toujours là-bas avec Blanche pour compagnie. Ils pouvaient l’écouter parler pendant des heures tant elle était un puit de science. Elsa avait même réussi à parler de sa rencontre avec les fées noires à la plus ancienne des fées sous les encouragements de Jack. Tous trois devisaient sur les ténébreux et leurs origines… Mais également sur le monde en lui-même et leur isolement dans le royaume féérique.

 

Après plusieurs discussions, Jack avoua avoir VRAIMENT hâte de partir découvrir le monde des hommes malgré le danger ! Il avait une obsession de voyages et de découvertes qui lui broyait le ventre de frustration. Sans compter celui de voir les autres royaumes interdits. Il se refusait à y penser mais… Chaque soir, il ouvrait ses yeux en grands, incapable de dormir tant son cerveau lui rappelait ses envies. Il fut heureux de partager cela avec Elsa en parlant d’Anna et des trois autres fées de sa naissance.

 

Il aimait ne pas se sentir seul, c’était sa hantise.

 

Pendant les après-midi jeux et flâneries, Jack se rendait parfois dans la bibliothèques des Givrées, en haut d’une tour gelée digne d’un château de conte de fée. Il se plongeait des heures durant dans des écrits de ses prédécesseurs sur tous les sujets qui l’intéressait. La priorité étant celui de voyager dans les royaumes interdits, mais il ne trouva que peu de chose concrète à ce sujet… Hormis Verna ainsi que la reine des fées avec leurs magies, et de quelques fées qui moururent ou furent blessées pendant les tentatives, il n’y avait aucune solution. Et au fond, il le savait… Mais il ne pouvait s’empêcher de chercher un moyen qui n’existait pas. Comme si les livres allaient répondre à son problème !

 

D’un soupir il retourna voir Blanche qui mangeait un morceau de pomme chez elle, dans le creux d’un arbre blanc qui abritait sa chaumière fait main. Elle fut ravie de le revoir et l’invita à goûter. Il la remercia et se servit.

- Tu n’arrives pas à l’accepter, je me trompe ? Déclara la plus âgée en souriant tristement.

- Non… Mais il va bien falloir où je vais finir par devenir fou.

- Malheureusement, c’est inévitable. Mais toutes les fées d’ici comprennent ton envie, crois moi.

Jack opina avec peine. Il se laissa glisser dans son siège en bois et en coton d’un soupir.

- Cela dit… Peut-être que tu trouveras un moyen qui n’existait pas avant.

Il se redressa.

- Tu crois ? Ne me fais pas espérer en vain.

- Je dis juste que tu n’es pas comme les autres. Et que de ce fait, tu peux peut-être accomplir des « miracles » que d’autres ne peuvent pas. Après tout, toutes les fées de la vallée ont des dons uniques. Que ce soient des passions ou des travaux secondaires à leur tâche innée.

- Qu’entends-tu par-là ?

- Eh bien, vois-tu, il existe un nombre incalculable de talent dit « secondaire ». En dehors de ceux de la cérémonie de naissance. Il existe par exemple des fées qui se passionnent pour les arts comme : la peinture, l’écriture, le chant, la musique… D’autres encore qui développent des dons de guérisons et deviennent infirmières en plus de leur devoir. Et même parfois certaines qui se spécialisent dans un de leur domaine de base comme… Hum, par exemple, les Voltigeuses qui peuvent devenir « Fées des tempêtes ». Dans les Jardinières, certaines sont devenues spécialisées dans les Arbres et d’autres les fleurs. Toutes les fées sont uniques et développent leurs propres dons, cultivent leur unicité et leurs talents. Ce serait bien triste que nous soyons réduit à juste une seule chose. Tu comprends ?

 

Tout ouïe, le nouveau opina vivement, fasciné par la profondeur de l’endroit où il venait de naître. Cela lui offrit la porte d’espoir qu’il espérait tant.

- Donc… on a tous des dons et des spécialités particulières ? C’est nous qui choisissons et développons nos pouvoirs ?

- C’est tout à fait ça ! Cela vient avec le temps et l’expérience. Toi aussi tu trouveras autres chose dans ta vie que juste faire de la neige et de la glace. Et peut-être que tu sauras, par tes envies, trouver un moyen de briser ton isolement. Mais je te prie de faire attention. Je ne voudrais pas qu’à cause de moi tu tentes le Malin et finissent par périr…

Un air inquiet se posa sur son visage poupon. Jack la rassura d’un sourire chaleureux en prenant ses mains dans les siennes.

- Je te le promet. Merci Blanche, avec toi, j’ai toujours l’impression de grandir.

- Ça me fais plaisir à entendre ! J’aime que mon expérience soit partagée et voir grandir mes confrères et consœurs.

- J’espère devenir comme toi un jour.

Blanche rougit à ses mots tandis que Jack fixait déjà l’horizon avec espoir.

 

**

[Printemps]

 

En pleine nuit, l’avant-dernière soirée avant le départ, la fée estivale se rendit chez sa consœur de naissance, le plan dans les mains, cherchant du regard la bonne route. Il trouva la maisonnette avec ravissement, au cœur d’un bosquet fleurit.

 

La blonde l’attendait devant chez elle, sur sa terrasse en bois de cerisier. Il se posa doucement à ses côtés, sourire aux lèvres. Ils se regardèrent et se sentirent tout de suite apaisés.

- Désolé, j’ai dû finir deux trois projets en urgences pour demain.

- Moi j’ai eu le temps d’affiner mes pouvoirs. Regarde !

Elle lui montra son orbe de lumière qui voltigea autour d’eux. La sphère s’agrandit ensuite pour former un bouclier autour d’eux avant de reprendre sa forme initiale et de luire juste au-dessus telle une veilleuse.

- Je crois que je suis prête pour après-demain. Je suis tellement excitée que je ne pense pas fermer l’œil de la nuit !!

- Fais quand même attention… Le danger est omniprésent là-bas.

Il se tortilla les mains. Elle lui sourit en s’asseyant en bord de terrasse avec vue sur les prés recouverts de lucioles. Par intermittence elles montraient leur présence d’une lumière apaisante.

 

Harold prit place à ses côtés tout en l’écoutant.

- Ne t’en fais pas, je suis au courant pour les fées noires et tout ça. Mais je n’ai pas peur et je suis prête. Je resterai en sécurité.

- Alors tu sais… J’avais peur qu’ils ne t’aient pas informés.

- Oh si bien sûr ! Au départ je n’étais même pas sensée partir mais j’ai tout fait pour !

- … J’envie ta confiance.

- Mon désir surpasse ma peur. Mais je te mentirais si je te disais que j’étais complètement sereine. J’espère ne jamais les croiser… Seulement, j’ai besoin de partir. C’est au fond de moi ! Je ne peux résister à l’appel. Tu n’as pas ce genre d’envie ?

- Non. * une pause* Enfin, peut-être un petit peu…, avoua-t-il en mimant le geste avec deux doigts. Mais je n’ai de toute façon pas le choix que de rester donc la question ne se pose pas.

- Hmm, c’est vrai.

 

Elle battit des jambes dans le vide. Puis elle se tourna à nouveau vers son compagnon de naissance.

- À ton avis, pourquoi sommes-nous né à quatre ? Il parait que c’est inédit.

Il haussa les épaules.

- Peut-être pour pallier au manque de naissance ? Je me le demande aussi…

- Possible. Il parait que je possède un pouvoir puissant. Et toi ?

- J’ai également un don affûté selon Geulfor et Varian.

- Ça nous fais déjà plusieurs points communs, sourit-elle avec intérêt. Tu as raison on doit être là pour combler le manque et pour aider aux mieux nos amies.

- J’espère qu’on sera à la hauteur de la tâche.

- Mais oui ! On apportera notre pierre à l’édifice quoiqu’il arrive. Au fait, tu connais le lien de gémellité ?

- Non ?

 

Raiponce lui expliqua pour Anna et sa sœur Elsa. Harold fut vraiment surprit.

 

- Comme quoi ça existe en dehors de notre naissance, se rassura l’Estivale. Mais je me demande pourquoi on est de chaque saison différente. Il y a tant de mystères que j’aimerai résoudre !

- Moi aussi !! Et surtout le fait qu’on ne pourra jamais voir notre ami de l’Hiver.

- Aussi… C’est vraiment dommage…

- Tu as rencontré celle de l’Automne ?

- Non, et toi ?

Elle secoua la tête.

- Je n’ai pas eu le temps.

- De même, mais j’aimerai bien le faire. Peut-être dans les prochains jours.

- Tu le feras pour moi dans ce cas.

- C’est vrai que tu vas disparaître pendant trois mois…

 

Pour toute réponse, la blonde lui sourit, fixant l’étoile la plus brillante du ciel.

 

- Tu la vois ? L’étoile tout à droite de la polaire ?!

Harold leva les yeux vers l’espace infini, se couchant en même temps que Raiponce sur le dos.

- Oui, elle est si brillante. Je me demande qu’elle est son nom.

- Moi aussi. Mes amies n’ont même pas réussi à la trouver ! Pouffa-t-elle.

- Pourtant c’est dur de la rater !!

 

Ils restèrent un moment ainsi, discutant de tout ce qu’ils avaient appris en ces quelques jours de vie dans la vallée. Ils partagèrent leurs expériences et leurs questionnements. C’était si simple de se parler et de se comprendre entre eux. Ils ne virent pas le temps passer et durent se résoudre à se relever quand l’aube pointa le bout de son nez.

 

- Mince, je n’avais pas remarqué qu’il était si tard… Enfin si tôt, soupira Raiponce. Travailler sans avoir dormi ça va être ardu pour mon dernier jour dans la vallée !

J’aurais aimé que ça dure encore !

- C’est fou je n’ai pas vu le temps passer ! Approuva Harold avec tristesse.

Quel dommage…

 

Ils se redressèrent d’un même ensemble quand leurs ailes se frôlèrent. Soudain, une magnifique lumière multicolore s’illumina depuis leurs ailes respectives jusqu’à leur aura. Médusés, ils se fixèrent avant de se rapprocher d’avantage. La lumière fut de plus en plus vive. Tout autour d’eux, les ombres encore présentes se vêtirent d’une parure arc-en-ciel comme une myriade de points de couleur mouvants. Cela ressemblait au soleil filtrant par les branches d’un arbre sur le sol d’une forêt. Un spectacle aussi envoûtant que surprenant.

 

Ils en furent sans voix.  

 

- Est-ce que cela t’étais déjà arrivée ? Questionna Harold après plusieurs minutes de contemplation.

- Non…, souffla Raiponce, ébahie. C’est d’une telle beauté… Il faut que j’en parle à mes amies.

- De même !

 

Quand ils s’éloignèrent, leurs ailes s’illuminèrent encore un peu avant de reprendre leur teinte normale. L’un et l’autre ne purent s’empêcher de recommencer une deuxième fois. Laissant l’aube glisser sur la vallée tandis qu’ils furent dans leur bulle colorée. 


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