Les liens du sang

Chapitre 6 : Chapitre 3

Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 07:47

Chapitre 3



Une odeur de feu de cuisine et de feu de bois flottait aux abords du restaurant. Conan en huma les arome avec plaisir et son estomac se manifesta bruyamment. Les discours de Madame Tanaka sur les bienfaits des algues et du tofu lui avait donné des envies sournoises de steack bien saignant accompagnés de frites croustillantes et comme dessert, une tarte aux pommes recouverte d'une boule de glace à la vanille. Kojiro avait recommandé l'endroit comme étant favori des notables du coin et il comprit pourquoi dès qu'ils eurent poussé la lourde porte. C'était un peu tape-à-l'oeil, mais le feu qui brulait dans la cheminée au fond du bar incitait vivement à entrer. Koguro commanda une bière tandis que les filles et lui optèrent pour un coca. Leur verre à la main, ils allèrent se rechauffer dos au flammes. Le diner pouvait être remis à quelques minutes.

La soirée de dimanche était calme; il n'y avait pas grand monde au bar. Conan dégusta sa boisson en observant ce qui l'entourait. Quelques habitués discutaient avec le barman des courses hippiques du lendemain.

_ Papa, tu devrais ralentir avec l'alcool. Ce n'est que le début de la soirée et je trouve que tu es déjà bien joyeux.

_ Ne joues pas les rabajoies Ran, nous sommes en vacances, laisse-moi en profiter.

_ D'accord, fait comme tu veux, mais ne comptes pas sur moi pour t'aider à rentrer.

_ Ne t'inquiètes pas, ce n'est que de la bière.

_ Vous consommez autant d'alcool en buvant une dose de whishy et une de vingt cinq centilitres de bière, expliqua Aï en dégustant son coca.

_ Et comment tu sais çà ? repliqua Koguro

_ J'ai du voir...

Elle ne termina pas sa phrase. A l'autre bout de la pièce, une femme était assise à une table. Lunettes perchées sur le bout de son nez, elle étudiait la carte. Elle reconnut Akané Nanasé. Kojiro avait réussi à les présenter pratiquement à tout le monde sauf à Akané qui s'était esquivée et seule. Absorbée par sa lecture, elle ne les avait pas vu.

_ Tu connais cette femme, questionna Conan en voyant Aï la fixer avec insistance.

_ Non, pas du tout. C'est la personne que Kojiro nous a présenté comme étant une scientifique. Je ne sais pas pour vous mais je trouve qu'il n'y a rien de plus déprimant que de diner seul. Peut être que...

_ C'est une excellente idée que tu as là. Si nous allions nous présenter à elle, rencherit Ran.

Akané Nanasé leva les yeux, surprise quand ils se présentèrent à sa table. Ils se nommèrent et pour réponse leur elle leur sourit. Conan avait-ol vu une brève lueur de déception poser dans son regard ? C'était si fugitif qu'il mit cela sur le compte de son imagination. Akané ota ses lunettes qu'elle fit prestement disparaitre dans son sac.

_ Petite vanité, s'excusa-t-elle. C'est l'age qui impose les lunettes, je n'y suis pas encore habitué. Voulez-vous vous asseoir.

_ Vous souffrez d'astigmatisme, n'est ce pas ? demanda Aï en s'asseyant.

_ Bien vu, jeune fille. Comment as-tu deviné ?

_ Vous portez des lunettes dont les verres sont cylindriques et toriques n'ayant pas la même puissance pour les différents méridiens. Cela permet à l'image de se reporter parfaitement sur la rétine.

Ran et Kogoro la regardèrent avec des yeux ronds. Conan se pencha alors vers elle et lui chuchotta à l'oreille.

_ Aï, n'oublies pas que tu n'es qu'une enfant. L'optique n'est pas au programme du cours moyen.

_ Je sais, désolée. Puis se tournant vers Akané, elle continua :

_ J'ai raison, n'est ce pas ?

_ Je n'aurais pas mieux expliqué !

_ J'avais lu dans une revue scientifique du professeur Agassa, expliqua-t-elle à l'intention de Ran et son père.

_ Le professeur Agassa, répéta Akané, le célèbre inventeur ?

_ Oui, c'est bien lui.

_ J'ai assisté à l'une de ses conférences il y a quelques années C'était vraiment très interessant. Alors, dites-moi, c'est votre premier séjour ?

_ Oui, commença Ran et nous le devons à l'un des clients de ma mère qui est avocate.

_ Moi aussi je suis arrivée ce matin. C'est une bonne idée, j'imagine...

Elle s'interrompit une fraction de seconde et Conan crut qu'elle allait dire tout autre chose.

_ ... d'essayer un autre genre de vacances. J'ai toujours trouvé...

_ Excusez-moi, madame, intervint une serveuse, votre table est prête. Ces messieurs dames vont-ils se joindre à vous.

Elle jeta à Kogoro et aux enfants un regard. Le detective se leva alors. Il le senta complètement maladrois.

_ Ecoutez, on ne voudrait surtout pas...

Akané tendit la main vers lui

_ Allons, ce serait plus agréable de partager une table. Je serais ravie de votre compagnie, vraiment.

_ Si cela ne vous dérange pas, prostesta-t-il faiblement. Nous acceptons avec grand plaisir.

Le pavé de rumsteack répondit à toute ses attentes. Tendre comme du beurre, accompagné d'une onctueuse sauce aux poivres, il fondait littéralement dans sa bouche. De quoi épouvanter Madame Tanaka, pensa Conan avec satisfaction.

Kogoro avait dévoré la spécialité de la maison, la tourte aux rognons de boeuf. La croute était dorée à souhait, l'intérieur cuisiné au vin et bourré de champignons. Les filles, quant à elles, avaient choisi la truite en papillote. Akané, son plat terminé, disposa ses couverts parallèlement sur son assiette, au millimètre près.

_ Alors, Monsieur Mouri, dites-moi, vous êtes marié , s'informa Akané en regardant le détective par-dessus le bord de son verre de vin.

_ Divorcé, répondit-il en jetant un coup d'oeil à sa fille pour voir sa réaction. Il savait que sa fille souffrait encore de la situation et espérait toujours que son ex-femme et lui se remettrait ensemble un jour ou l'autre.

_ Et donc, ce sont vos enfants ? lui demanda-t-elle en souriant tour à tour à Ran, Aï et Conan.

_ Ran est ma fille. Quant à Conan, il habite avec nous en attendant que ses parents rentre de l'étranger. Aï est une amie de Conan. Et qu'en est-il pour vous ?

_ Je suis célibataire. Un vieux terme administratif pour décrire une vieille fille

_ Dans votre cas, commença Ran, il ne correspond pas. Il évoque une demoiselle flétrie aux cheveux gris, ce qui ne s'applique pas à vous.

Pourquoi une femme aussi séduisante ne s'était pas mariée ? se demanda Conan. Elle lui répondit sans qu'il ait formulé la question.

_ J'aime mon travail plus que tout. Et pour être parfaitement honnête, je chéris mon indépendance. Ces deux raisons m'ont paru suffisantes jadis.

Tout en parlant, elle tirait machinalement sur un anneau qu'elle portait à la main droite. Aï, qui se tenait en face d'elle, s'interrogea sur l'emploi de ce "jadis".

_ Kojiro nous a dit que vous êtiez une scientifique.

_ Oui, biogénéticienne. Je dirige un laboratoire privée de recherches sur les maladies rares d'origine virale. L'épouse de notre patron est décédée d'un CJ. Depuis, il se consacre à trouver le remède.

_ Qu'est ce qu'un CJ ? s'interrogea Ran. Je suis peut être censé le savoir.

Akané n'eut pas le temps de répondre, Aï la devança :

_ Ce sont les initiales de la maladie de Creutzfeld Jacob. Perte de l'équilibre, atteinte musculaire, démence précoce et mort inéluctable. Elle est provoquée par une particule virale que l'on appelle un prion. Le prion est un sous-virus, une protéine pure qui ne possède pas d'ADN propre. Pour se reproduire, il se sert des protéines qu'il trouve dans les cellules de l'organisme qui l'héberge. Il parait résulter de l'altération d'une protéine humaine appelée PrP qui... euh, c'est bien ça, Mademoiselle Nanasé.

_ Excellente définition. J'imagine que tu as lu ça également dans un magasine.

_ J'ai une très bonne mémoire visuelle. Cela m'aide beaucoup pour les poèsies que la maitresse nous donne à apprendre.

_ Oui, il n'y a pas meilleur qu'elle en récitation, renchérit Conan. A propos, votre laboratoire se trouve à Tokio ?

_ Non, à Yokohama. C'est une petite unité vous savez. Jun habite le dernier étage, au dessus de la clinique.

_ Jun ?

_ Jun Misugi. C'est la clinique Aya Misugi, du nom de sa femme. Elle était encore très jeune quand la maladie l'a frappée. Le choc a été terrible pour lui. Il ne s'en ai jamais remis tout à fait et recemment, sa santé a paru décliner plus vite. Le médecin a diagnostiqué plusieurs attaques minutes.

Elle se tut, pensive, et but un peu de vin. Ran suivit son regard. Elle contemplait une gravure de chasse accrochée près de la cheminée. Les ombres jouant sur la musculature étirée des chevaux lui rappelèrent une peinture rupestre qu'elle avait vu un jour.

Akané reposa son verre, sourit et changea de sujet.

_ Et vous, que faites-vous dans la vie, Monsieur Mouri ? Sanaé Misaki m'a dit que vous êtiez dans la police.

_ Je suis détective privé. J'ai résolu de très nombreuse affaires vous savez.

_ Je savez bien que votre nom ne m'était pas inconnu. J'aurais eu besoin de vous, il y a peu.

_ Comment cela ? l'interrogea Conan, soudainement interessé par la conversation.

_ La porte de mon appartement a été forcée il y a environ six mois. On ne m'a pas pris grand chose, ma montre, un appareil photo sans valeur, quelques bijoux fantaisies...Mais tout à été exploré, mon bureau, tout mes tiroirs. Cela m'a fait une impression épouvantable. J'étais dans une colère noire et en même temps, malade de dégout à l'idée qu'on avait fouillé dans mes affaires. Jusqu'à mes sous-vétements. C'est trop bête, ajouta-t-elle

_ C'est une réaction courante, commenta Kogoro. La plupart des gens sont furieux dans ce cas et se sentent aussi victimes d'un viol. Et ils mettent du temps à oublier.

A ses débuts, il avait surtout traité des affaires de cambriolage et beaucoup consolé la détresse des victimes qui souffent plus du viol de leur intimité que du vol de leurs biens.

Akané le regarda d'un air curieux, une question sur les lèvres.

_ Je passe une soirée vraiment agréable, finit-elle par dire, et ce grace à vous quatre. J'avais des doutes sur ces vacances, je me disais que ce projet était... inadéquat. Je ne vous dirais pas pourquoi, c'est trop compliqué, mais tout à coup je suis sur que tout ira bien.

Elle riait. En un geste d'abandon plutot surprenant, elle tendit les bras au dessus de se tête. Conan se demanda ce qui motivait cet accès d'euphorie chez Akané, quel évenement, ou quelle personne ? Il pressentait que ce n'était pas seulement à eux qu'en revenait le mérite.




Le concert des oiseaux la réveilla. Par la porte fenêtre entrouverte de leur chambre, le son en était entré avec le premier rayon de soleil et variait d'intensité selon les modulations de leur chant. Aï se retourna et enfouit sa tête sous son oreiller. Puis elle s'étira, regarda sa montre.. Sept heures. Sur le lit à coté, Ran dormait profondément, aussi fit-elle en sorte de ne pas faire de bruit.

Après avoir souhaité bonne nuit à Akané Nanasé sur le pas de sa porte, ils étaient immédiatement allés se coucher et pour être franche, elle se sentait étonnament reposé. Une nuit sans cauchemar, une première depuis un long moment. Ses vacances commençaient vraiment bien. Elle avait juste le temps de faire quelques brasses dans la piscine et de prendre une douche avant le petit dejeuner. Ensuite la journée s'annoçait idéale pour découvrir les paysages vallonnés de ce petit coin de paradis. Une fois son maillot enfilé sous un peignoir, elle sortit pieds nus de la chambre.

A sa grande surprise, elle trouva Conan endormi sur le canapé. Surement avait-il renoncé de dormir avec Monsieur Mouri dont les ronflements raisonnaient jusque dans le salon. Sa couverture trainait sur le sol. Aï la ramassa pour le recouvrir. Si était-elle pris brusquement, toujours est-il que Conan sursauta avant d'ouvrir les yeux.

_ Désolée de t'avoir réveillé ! Je voulais éviter que tu prennes froid.

_ Aï Haibara qui s'inquiète pour moi, plaisanta Conan. Je me trouve dans un univers parallèle, ce n'est possible.

_ Très drole. Je viens de soudainement me rappeler la raison pour laquelle je n'aime pas être gentil. Enfin, tu as de la chance, je suis d'excellente humeur ce matin.

_ Tu as bien à ce que je vois.

_ Comme un bébé, lança Aï en souriant.

_ Tant mieux. Tu vas à la piscine à ce que je vois;

_ Oui. J'ai envie de me dépenser un peu. J'étais une très bonne nageuse, petite. Je suis certaine que je suis plus rapide que toi.

_ Donnes-moi cinq et je te prouve le contraire. Le temps d'enfiler mon short de bain.

Conan disparut dans la salle de bain. Aï profita de ce laps de temps pour un mot à Ran et son père les prévenant qu'ils étaient à la piscine. Enfin près tout les deux, ils sortirent de l'appartement.

La maison était plongée dans le silence. Derrière les portes closes, pas de rumeurs de conversations, pas d'effluves de café ni de cacao. Ils s'arrêtèrent un moment dans le vestibule pour savourer la paix du matin et retrouver son bien être intérieur. Conan poussa la porte du balcon. Ils auraient peut être la piscien pour...

Un cri aigu leur parvint, une sorte de vagissement strident que Conan attribua d'abord à un animal en perdition, chiot ou chaton. Mais cette première impression s'effaça très vite et il réalisa que ce cri pitoyable était humain. Il échangea un regard de stupeur avec Aï et ils dévalèrent l'escalier d'un bond avant de s'engouffrer dans la porte.

Les deux enfants Tanaka était blottis l'un contre l'autre, juste derrière, à quelques pas du jacuzzi. Le corps nu de Kojiro Ryoga dansait doucement sur l'eau. Les remous bouillonnants du bain le maintenait près du bord.

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