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Chapitre 14 : Chapitre 13 - Le désastreux destin d'Amélie Belpois

4442 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 05/12/2016 16:31

Chapitre 13: Regarde-moi

Amélie


J’ai toujours été la dernière.


D’abord la petite dernière de la famille, juste après les phénomènes qu’avaient été mon frère et mon cousin. Comment aurais-je pu me démarquer après eux ? C’était perdu d’avance. Pourtant, j’étais la première fille. Cela aurait dû me donner une place spéciale auprès de mes proches. Ce ne fut pas le cas.


Mon frère, c’était la tornade. Le grand rebelle. L’anarchiste, même. Celui qui disait merde à l’autorité. Celui qui disait merde à la vie, et à ses règles bidons. C’était quelqu’un d’inoubliable, qui marquait tout ceux qui croisaient son chemin. Que ce soit en bien ou en mal, ça n’avait pas d’importance. On se souvenait de lui. On parlait de lui. Même quand il n’était pas là, il était tout de même présent dans les esprits des uns et des autres. Son prénom était sans cesse à la bouche de mes parents. Plus souvent que le mien, alors que j’étais leur unique fille et qu’après son départ, je vivais seule chez eux…


Quand je commençai à faire une crise d’adolescence, je passais inaperçue. Ce n’était rien face à la tempête qui était passée avant moi. Immédiatement, on affirma que j’essayais de « faire comme lui ». C’était insupportable. Je ne voulais pas « faire comme lui », je voulais faire comme « moi ». Si le rôle du révolté était déjà prit, peut-être pouvais-je être l’enfant modèle et studieuse ? Ah,mais là aussi je sombrais dans le déjà-vu.


C’était sans compter sur mon cousin. Mon fabuleux cousin, et ses notes parfaites. Celui qui réussissait tout ce qu’il entreprenait. Qui épatait les adultes aux repas avec ses conversations réfléchies. Alors que moi, tout ce dont je pouvais parler, c’était de mon 11/20 de moyenne, de mes quelques cours de guitare qui ne menaient nul part et de mes sorties entres amies. Autant dire que ça n’intéressait personne. Le pire dans tout ça, c’est que je faisais réellement des efforts. Mais ça ne changeait rien. Je n’avais pas le moindre talent. Pas la moindre particularité. Je tombais dans la triste case de la banalité.


J’étais la fille à qui on offrait une carte cadeau à Noël, parce qu’on ne savait pas quoi lui offrir d’autre. Celle dont on ne parlait jamais. Celle dont les professeurs avait du mal à se rappeler le prénom. Même avec mes amies, j’étais une suiveuse. Et c’était ça la fabuleuse destinée qui m’attendait, celle d’être un mouton parmi les autres.


En quatrième, je commençai une dépression. Personne ne s’en rendit compte. J’allais voir un psychologue scolaire sans en parler à quiconque. Je voulais savoir. Savoir pourquoi je me sentais aussi mal. Je vivais dans une famille modeste, j’avais tout ce que je voulais mais pourtant je me sentais malheureuse. Ce fut une très grave erreur. Je tombai sur un vieux con qui m’interrompit au bout d’une demi-heure, déclarant que tout ce que je recherchais, c’était de l’attention et qu’en réalité j’allais bien. Enfin, il n’avait vraiment prononcé mes mots, mais je suis resté persuadé que c’était ce qu’il avait pensé.


En seconde, je redoublai. « Ne sois pas comme ton frère, sois comme ton cousin ! » me répétait-on alors que je décrochai peu à peu du système scolaire. Toujours des comparaisons, toujours. Ne pouvais-je pas être juste… moi ? Juste Amélie ? Apparemment… non.


Et ma vie continua à être un long échec sans que quiconque ne le relève. Dans l’ombre, toujours dans l’ombre des autres. J’enchaînais les déceptions amoureuses, où je tombais sur des types qui me donnaient l’impression d’exister pendant quelques semaines avant de m’abandonner. Trop redondante, je suppose. Je finis par avoir mon bac sans mention, par je ne sais quel miracle. Le tout pour pouvoir me planter en beauté dans le supérieur.


Alors que j’étais animatrice dans une école merdique et sans la moindre perspective d’avenir, quelque chose dont j’avais longtemps rêvé était arrivé. J’ai toujours énormément honte mais ça ne sert plus à rien aujourd’hui de me voiler la face. Lorsque j’apprenais le décès de Patrick Belpois, mon frère, j’étais heureuse. Patrick et moi n’avions jamais été proche. Je sais que je n’aurais jamais dû me réjouir de sa mort mais… Mais tout était tellement vide, que je devenais presque incapable de tristesse. Cette joie sadique était l’une des rares émotions que je ressentais.


Sans lui pour me bloquer, j’allais pouvoir montrer à tout le monde qui j’étais. Mes parents allaient enfin prêter attention à moi Si je pleurais à l’enterrement, c’était uniquement pour cette raison, et certainement pas pour pleurer cet inconnu dont j’avais tant entendu parler. Bien évidement, je me trompais. Il fut plus que jamais sur les lèvres, encore plus de son vivant. J’étais désormais dans l’ombre d’un mort. Quand les gens venaient me parler, c’était uniquement pour parler de lui. Enfin… presque. Une seule personne fit attention à moi. Une seule.


Jérémie Belpois. Le petit génie. L’autre personne qui brillait dans les yeux des gens. Je le détestais. Je le détestais tellement. Et quand il commença à vouloir m’aider, je le détestais d’autant plus.


« Ça doit pas être facile pour toi… Si tu veux, on peut t’héberger. »


Il croyait quoi ? Que j’avais besoin de sa pitié ? Mais le peu de fierté que je possédais ne m’empêcha pas d’accepter sa proposition. J’avais des problèmes financiers. Alors j’emménageai chez le petit génie. Aelita, sa femme, ne m’aimait pas. Ce n’était pas grave, je ne l’aimais pas non plus. Jérémie était aux petits soins avec moi. Et j’en abusais. Je faisais ma petite princesse. C’était la première fois que je pouvais le faire, je n’allais pas me priver. Il gagnait un bon salaire. Je ne savais pas exactement ce qu’il faisait, il refusait d’en parler, et honnêtement je m’en foutais complètement. J’existais à travers mes caprices.


Bon, lors de la naissance de ses gamins, il me fit comprendre que je ne pouvais pas rester, mais « qu’il serait toujours là pour moi », bla bla bla. Je le haïssais toujours autant, et tout ce qu’il faisait pour moi ne faisait qu’augmenter ce sentiment. J’étais heureuse lors de son divorce. J’étais heureuse quand il m’appelait pour me demander des conseils parce qu’il allait mal, mais uniquement parce qu’il allait mal. Cependant quand j’avais un souci, il répondait toujours présent.


Contrairement à celle de mon frère, sa mort fut une déception. J’avais espérer le dépasser un jour. Le terrasser. L’écraser. Lui renvoyer sa pitié en pleine figure. Pouvoir lui montrer que je valais mieux que lui. Et maintenant que mes parents étaient séniles, qui allait pouvoir me donner la reconnaissance dont j’avais toujours eu besoin ? Personne.


Jérémie et Patrick. J’étais la dernière de la famille, derrière vous. J’étais la dernière dans la tête des gens. J’étais la dernière… partout. Mais j’étais aussi la dernière à être en vie. N’était-ce pas une victoire en sorte ? Mais était-ce vraiment une vie ? Qu’est-ce qui me maintenait, au final ? Je ne trouvais pas de réponse à cette question et ça m’horrifiait.


Le comble fut lorsqu’on vint me demander si je voulais accepter de prendre la garde de son fils. J’hésitai un long moment. Sa fille avait disparu dans la nature. Avec la mort de Patrick et de Jérémie, il n’y avait plus que deux Belpois encore valides : ce gosse et moi. Je ne sais pas ce qui me motiva à accepter. Cette idée qu’Antoine allait être aussi seul que moi ? Une envie de repayer la dette que j’avais envers son père ? Ou était-ce un sentiment pervers de pouvoir me venger sur lui ? Un peu des trois, je le crains. Et au cours du temps, la dernière option écrasa les deux autres.


Avec le recul, je m’en veux terriblement. J’étais abjecte avec cet enfant. Je découchais sans cesse, le laissant seul pour pouvoir aller voir des hommes qui n’allait m’aimer que pour une nuit. Et quand je le pouvais, je lui envoyai des petits pics. Lui rappelant qu’il était laid comme son père, qu’il était idiot comme son père et qu’il n’accomplirait jamais rien. Comme son père. Il était un fardeau, un poids dans mon existence. Je lui reprochais d’avoir gâcher ma vie, justifiant ainsi ma condition. Ce n’était vrai. Pour qu’il puisse gâcher ma vie, il aurait fallu que j’en aie une pour commencer, ce qui n’avait jamais été le cas.


« Regarde-moi ! » hurlait un soir ce sale gosse, alors que je lui annonçais sans lui adresser un regard que je sortais encore. Ces mots que j'avais toujours voulu prononcé face à mes parents, il osait me les dire. C’est à ce moment que tout changea. Ma main partit toute seule. Je le giflai, mais pas une petite claque. Non, c’était violent. En même temps que je le frappai, je frappai tout ce que je détestais et que j’avais identifié à lui. C’était presque jouissif. Je continuai. Et je ne m’arrêtai pas là. Alors qu’il m’observait sans comprendre, je criai à mon tour.


« Tu crois que je suis contente de t’avoir ? Tu me fais chier ! Pas un jour ne passe sans que tu ne fasses chier ! Toujours à faire le malin ! Mais j’vais te rassurer mon petit Antoine, tu n’es pas malin ! Tu es un gamin complètement con, comme ton connard de père ! Alors maintenant, tu vas remonter dans ta chambre et aller te coucher !


C’est ce que je crois me souvenir avoir dit, mais je pense que c’était plus long, plus insultant. Et beaucoup plus rabaissant. Je ressentais sur le coup un certain plaisir à pouvoir l’écraser. J’avais enfin le droit à ma revanche. J’avais enfin le droit de me sentir puissante. Il ne répondit rien. Il ne pleura pas non plus.Il hocha la tête, et exécuta ce que je lui avais demandé. Il claqua la porte de sa chambre, et seulement à ce moment là, il se mit à pleurer. Pleurer tellement fort que je l’entendais aussi bien que s’il avait été en face de moi. Déjà, je commençai à me sentir mal. Ça ne m’empêchai pas de sortir pour autant.


Dans les bras de l’homme avec qui j’avais rendez-vous, je fondais en larmes. J’expliquai à mon rancart les raisons de ma détresse et sa compassion se changea aussitôt en colère. Il se mit à m’insulter. J’étais à la place d’Antoine cette fois. Il utilisa les termes « maltraitance ». « Salope » aussi, je crois. J’avais dû réveiller des souvenirs de sa propre enfance. Je partais de chez lui, mais même pas parce que je le voulais. C’est lui qui me ficha dehors. Alors j’allais me saouler dans un vieux bar.


Alors que j’étais éblouie par l’alcool, je réalisais ce qui clochait chez moi. Ce qui avait toujours cloché. Je n’étais pas seulement une ratée, j’étais aussi un monstre. J’avais eu une vie de merde, mais cela n’excusait rien. J’avais mérité ce qui m’était arrivé. Peut-être avais-je payé dans mon enfance ce que j’avais accompli en tant qu’adulte.


Le lendemain, je ne rentrai pas directement chez moi. J’avais eu une idée. J’allais à la tombe de Jérémie. Je n’y avais jamais été avant. Je n’y avais jamais emmené Antoine. Ça ne m’avait même pas traversé l’esprit.


« Je suis désolée. Sincèrement désolée. Aha… je parle à une pierre maintenant… Tu sais que je t’en ai toujours voulu ? Toi qui était si doué, j’avais l’air d’une pauvre conne à côté de toi. Je ne te l’ai jamais dit. J’aurais peut-être dû. Je ne t’ai jamais dit merci non plus. »


Cette fois je m’écroulai.


« J-J’ai… J’ai été horrible. Horrible avec toi. Horrible avec ta femme. Et maintenant horrible avec l’unique survivant de cette petite famille... »


Qu’est-ce que j’attendais ? Que Jérémie revienne à la vie pour me serrer fort contre lui, me chuchoter que ce n’était pas grave, qu’il me pardonnait. Que j’étais quelqu’un de bien, comme il me l’avait si souvent dit. Il ne se passa rien. Personne n’allait venir me réconforter. Et pour cause : je n’étais pas quelqu’un de bien, je ne l’avais jamais été. Il s’était trompé en me faisant confiance.


Alors, je fis de mon mieux pour réparer ce que j’avais fait. Mais c’était trop tard. J’avais brisé quelque chose en Antoine ce jour là. Il se renferma, et commença à me haïr, d’une haine encore plus forte que celle que j’avais pu ressentir. De mon côté, je ne lui en voulais pas, ce n’était que justice. Et puis… au cours du temps, je me mis à vieillir. Je devenais laide. Plus personne ne voulait de moi, même pas pour un soir. Quand je me regardais dans le miroir, j’avais envie d’hurler. Puis je finis par m’y habituer. On s’habitue à tout, il faut croire. Même à la solitude.


J’essayais d’être là pour Antoine, mais il ne voulait pas de moi. J’avais envie de l’aider, de l’empêcher de prendre le même chemin de moi. Mais je ne pouvais rien faire. Petit à petit, je m’enfonçais dans cette inaction. J’arrêtais de travailler. Je touchais des aides, suffisamment pour faire vivre mon ado convenablement. Une once de fierté qui avait survécu en moi m’empêchait de lui avouer que j’étais au chômage, et je mis un point d’honneur à ne plus parler en mal de son père. De toute façon, il ne voulait rien savoir de lui. Ainsi, je ne lui parlai pas non plus de sa mère. Ni de sa sœur. Il n’y avait aucune photo d’eux chez nous.


Quel jour on est déjà ? Ah oui. Mardi. Faire les courses. Préparer à manger. Je ne crois pas qu’il mangera, mais on ne sait jamais. Il y a quoi à la télé ce soir ? Faudrait que je fasse le repassage. Je le ferai plus tard. Les pâtes sont trop cuites, tant pis. Quel jour on est, déjà ? Ah oui. Mercredi. Jeudi. Vendredi. Ça ne change pas grand-chose.


Courses. Cuisine. Télé. Antoine n’a pas été en cours aujourd’hui, il est malade ? Cuisine. Télé. Peut-être devrais-je appeler un médecin. Ou de nouveau le psy. Non. Non, mauvaise idée, ça va le mettre en colère. Il me demandera s’il a besoin d’un certificat médical, il est grand, il saura se débrouiller.


Il y a quoi à la télé ce matin ?


Antoine


Je sorti de ma chambre. Mon idiote de tante m’avait préparer un petit déjeuner. Je vérifiai qu’elle n’était pas dans les parages pour rapidement l’engloutir. Je devais être rapide, je n’avais pas le temps de lambiner. Il fallait que je passe à la pharmacie aussi. Avec Alpha, on avait trafiqué des ordonnances pour pouvoir me procurer certains médicaments. D’après l’I.A., ils allaient me permettre de moins dormir, de travailler plus vite et ce n’était pas dangereux.


Et même si c’était dangereux… Tant pis ! Je sentais que je commençai à ralentir. J’avais au moins une bonne douzaine d’heures de sommeil en retard, et réfléchir devenait une activité de plus en plus difficile. Cela faisait quelques jours déjà que le rythme était devenu aussi soutenu. Depuis qu’Alpha m’avait révélé que celui qui contrôlait XANA était l’assassin de mes parents. Et de me répéter encore une fois que cette même personne voulait me tuer, car je représentais un danger pour lui.


Il ne fallait pas que je perde cet objectif de vu. Je n’avais pas le temps de me reposer, je devais avancer, préparer la grande offensive qui allait terrasser notre adversaire. J’en étais capable, je le savais. Alpha aussi le savait. Le seul souci était que j’avais plus beaucoup de temps. Je n’avais jamais effectué des travaux aussi complexes. Alpha m’accompagnait comme il le pouvait, mais j’aurais eu besoin d’au moins une bonne semaine supplémentaire pour être au point. Hors, tout pouvait basculer d’une seconde à l’autre.


La prochaine attaque de notre ennemi allait être décisive. Car c’était lorsqu’il allait sortir les griffes qu’il allait révéler une faille que je comptais bien exploiter. Le seul soucis était que premièrement, il m’était totalement impossible de connaître exactement la date de la prochaine agression et que deuxièmement, pour l’instant je n’étais pas du tout prêt.


Alors que je rentrai dans ma chambre, je m’exclamai :


« Tu as confiance en moi, Alpha ? »


La réponse ne se fit pas attendre.


A: Oui.


Mais moi, est-ce que j’ai confiance en toi ? Telle était la question qui me brûlait les lèvres. L’intelligence restait un mystère, et je devais absolument rester sceptique. Rien ne me prouvait qu’il me disait la vérité. Rien ne me prouvait qu’il avait véritablement été programmé par mon père. De plus et pour ne rien arranger, il refusait toujours de répondre à la plupart de mes questions. Son argument principal était que si j’en apprenais trop, j’allais me déconcentrer. C’était horriblement frustrant. Ainsi, je savais ce que mon père avait fait pendant sa jeunesse, cependant sa vie d’adulte restait brumeuse. Et Alpha était encore plus vague quand il s’agissait de ma mère, à croire qu’il ne l’avait jamais connu.


A : J’ai été programmé dans le but de détruire définitivement XANA. Après je serai à ton service. Je répondrai à toute tes interrogations.


C’était ce qu’il m’avait dit. Je n’avais pas eu le temps d’y penser, mais que voulait-il dire par « à mon service » ? Et dans les rares moments de pause que je m’accordai, j’imaginais tout ce qui pouvait être possible avec une telle invention. Avec les tours de Lyoko qui pouvait influer sur le monde réel.


A : Antoine.


« Oui ? » répondis-je distraitement à mon écran.


Puis la fenêtre où je discutai avec lui disparu, laissant place à un fichier vidéo. Était-ce encore un de ces fameux journaux vidéos que mon père avait fait ? Oui… Oui, c’était lui à l’écran, mais âgé cette fois !


« Antoine, Ambre, dites bonjour à la caméra ! » fit-il en montrant deux bébés dans une poussette.


La vidéo s’arrêta subitement, aussi rapidement qu’elle avait commencé. Mes idées allaient à toute vitesse. Deux bébés ? Antoine et… Ambre ?


« Alpha, qu’est-ce que ça veut dire ?! »


A : Tu me demandes souvent des informations sur ton père. Vu l’avancée de tes travaux, te montrer cette vidéo ne risquait plus de faire baisser la cadence.


« Mais… Mais je m’en fiche de ça ! » commençai-je à rugir.


Pourquoi est-ce qu’il y avait un deuxième nourrisson avec moi ? Je n’avais pas de frère, pas de sœur ! Et… elle s’appelait « Ambre » ! C’était une bien trop grosse coïncidence !


« Qui… qui était la petite fille sur la vidéo ? »


A : Il s’agissait d’Ambre, ta sœur.


« Ne te fous pas de moi, je n’ai pas de sœur. »


A : Tu as probablement trop travaillé Antoine. Si tu t’accordes une pause d’une heure, cela n’aura pas de conséquences irréversibles.


Je bouillonnai. Je ne comprenais pas ce qui se passait, et ça m’horripilait. Je détestais ne pas avoir le contrôle.


« Alpha, je n’ai pas de sœur ! »


A : Négatif. Elle était avec toi. Je ne l’ai pas identifié de suite, mais tu l’as appelé par son prénom.


Mon sang se glaça. Ambre ? Ambre que j’avais rencontré il y a peu ? Ambre la blonde, Ambre la cruche ?


A : Tu l’ignorais ?


Ce n’était pas possible. Alpha se jouait de moi. J’ignorai pourquoi il faisait cela, mais il n’y avait pas d’autre explication. De toute façon, j’avais un moyen de vérifier. Je quittai ma chambre à toute vitesse. J’allais tellement rapidement que je manquai de me casser la figure dans les escaliers. J’ouvrai la porte du salon, là où cette vieille morue regardait son feuilleton.


« Tu as pris ton petit déjeuner ? » me demanda t-elle de sa voix lente et insupportables


« Amélie, réponds moi. » commençai-je.


« Qu’est-ce qui se passe ? Tu veux aller chez le médecin ? »


« Putain, mais laisse moi parler ! »


Elle baissa les yeux, comme à chaque fois que je m’énervais sur elle. Qu’est-ce qu’elle était pathétique…


« Que... »


Je ne lui laissai pas le temps de poser une autre question à la noix. J’enchaînai immédiatement.


« Est-ce que j’ai une sœur prénommée Ambre ? »


« P-Pardon ? »


« Je parle français, non ? Est-ce que j’ai une sœur, bordel ?!»


Elle baissa à nouveau les yeux, n’osant pas affronter mon regard. Je crois qu’elle pleurait, mais ce n’était pas inhabituel. Pas de réponse… bonne réponse ? Il fallait croire. J’essayai de me calmer. Mon père avait bien prononcé ce prénom. Ça ne voulait pas dire que l’enfant de la vidéo était la même Ambre que je fréquentais. En revanche…


« Pourquoi tu ne m’en as jamais parlé ? » dis-je d’un ton glacial à cette vieille conne que j’avais en face de moi.


« Je… Je ne voulais pas te faire de la peine… Elle… Elle a disparu en même temps que tes parents...»


Et à nouveau des sanglots. Je l’abandonnai là, elle ne m’intéressait pas. Il y avait un point d’interrogation dans mon histoire, et ça ne me plaisait vraiment, mais alors vraiment pas. J’interrogeai Alpha, mais il n’en savait pas plus sur ce sujet. Il savait que j’avais une sœur de ce prénom, et en rencontrant Ambre, il avait tout de suite assimilé les deux personnes. Mais était-ce vraiment deux personnes distinctes ? Ambre la disparue et Ambre la blonde ? Ou était-ce une seule et même jeune fille ?


Non. Tout n’était qu’un fâcheux concours de circonstances. Il y avait eu la méprise de l’I.A., il y avait eu les cachotteries de ma tante. Ce n’était pas parce que deux filles s’appelaient de la même manière que… Merde, et voilà que je doutais. Quand on avait essayé de décoder l’ordinateur de mon père ensemble, j’avais ressenti quelque chose. J’avais… Je ne saurais pas mettre de mots dessus. Certes, elle était nunuche mais je ne la connaissais pas tellement. Et je ne lui avais pas prêté trop d’attentions jusque là. En même temps, avec l’autre crétin de Jean qui lui tournait autour…


Et si c’était vrai ? Et… Et si je n’étais pas seul ? Et si ce n’était pas Antoine contre le monde, mais Antoine et Ambre ? Non. Non, je n’avais besoin de personne. Je n’avais jamais eu besoin de personne. Enfin… C’était ce dont j’essayais de me convaincre. C’était ce que je me répétais, en espérant que ça devienne vrai. La vérité était différente. La vérité était que… Je divaguais. Déjà, ce n’était probablement pas la même Ambre, cela aurait été une coïncidence bien trop grosse. Et comme je venais de le dire, je m’en sortais très bien tout seul. Je m’en étais toujours sorti tout seul, je pouvais parfaitement continuer comme ça !


J’avais beau essayé de chasser cette idée de ma tête, elle ne me quittait plus. Il n’y avait pas d’autres options, j’avais besoin d’en avoir le cœur net. Il y avait de grandes chances pour que je me fasse des idées. Et dans le cas contraire… Et dans le cas contraire, j’aviserai.


Je devais parler à Ambre.




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