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Chapitre 6 : Chapitre 5 : Après l'exploration
9134 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour 08/11/2016 18:21
Chapitre Cinq : Après l’exploration
*Ambre*
Je m’étais levée de très bonne humeur pour mon deuxième jour de cours. Ma vie d’avant était déjà de l’histoire ancienne, ainsi que tout ce qu’elle avait contenu. Après tout, je n’étais plus une enfant mais une adolescente. Je m’étais dépêchée de partir pour éviter de croiser Maman qui se levait toujours un peu plus tard. Commencer la journée par un affrontement avec elle ne m’enchantait vraiment pas. Je n’avais qu’une seule hâte : revoir mes deux nouveaux amis.
Le ciel était magnifique aujourd’hui. Comment avais-je pu passer toute ma vie à le contempler depuis une fenêtre ? Et respirer cet air si pur, rien de ce que j’avais vécu “autrefois” ne pouvait égaler ça. J’arrivais déjà à Kadic, et sortais mon emploi du temps pour savoir où aller. Mais l’organisation avait l’air d’être très compliquée et je n’y comprenais pas grand chose ! Fort heureusement, le surveillant que j’avais déjà rencontré la veille était près de l’entrer, à guetter les élèves.
“Ambre Delmas ! Qu’est-ce que je peux faire pour toi ?” demanda t-il avec un sourire en la voyant arriver.
“Et bien…” débutais-je avant d’être interrompue.
“Tu t’en sors ? Est-ce que tu t’es fait des amis ?”
J’étais déconcertée. Il ne me laissait même pas le temps de lui répondre !
“A vrai dire…”
“Tu n’as pas eu de soucis j’espère ? Depuis que c’est monsieur Poliakoff qui tire les rennes, Kadic n’est plus du tout ce que c’était ! Non, vraiment, à l’époque de monsieur Delmas…”
Il s’arrêta brutalement, et me fixa la bouche ouverte. Il devait s’être rendu compte que je portais le même nom de famille que l’ancien directeur dont il parlait. Est-ce que… maman et lui était relié ? Elle ne m’avait jamais vraiment parlé de sa famille. La seule fois où elle avait évoqué ce sujet, c’est quand elle était saoul dans le salon à trois heures du matin.
Je l’avais surprise en train de pleurer, avachie dans son fauteuil, une bouteille de vin bon marché à la main, et plusieurs vides à ses pieds. J’avais essayé de la calmer, mais ça ne faisait qu’empirer son état.
“Maman… retourne te coucher.” avais-je commencé en essayant de lui prendre sa boisson.
C’était à la période où j’étais censée lui faire la guerre, mais je ne pouvais pas la laisser comme ça. Même si je n’étais pas d’accord avec elle et que je lui en voulais, elle restait ma mère. Enfin, c’était ce que je croyais jusqu’au moment où elle s’écria :
“Je ne suis pas ta mère, d’accord ? C’est un… Un mensonge. Ce ne sont que des mensonges…!”
Sur le moment, je ne réagis pas. J’étais trop préoccupée par le danger de la situation. Je ne savais pas en combien de temps elle avait ingurgité tout cet alcool, mais elle était plutôt fine, à la limite de l’anorexie. Le risque de coma éthylique n’était pas nul. Je l’aidais à marcher jusqu’à sa chambre, alors qu’elle hurlait en pleurant et se débattait :
“J’ai fait une promesse !! … Je fais ce que je peux, Ambre… Tu le sais ? Dis moi, Ambre tu le sais…? Je fais ce que je peux, n’est-ce pas… ?”
“Oui maman. Je le sais.”
Elle se hissa dans son lit et s’allongea, toujours en larmes. Je l’entendis passer la nuit à hurler un nom. “Ulrich” il me semble. Le lendemain matin, je fis comme ci de rien était, et il devint vite évident qu’elle ne se souvenait de rien.
“Eh petite, tu rêve ?” me fit le surveillant en me tapotant sur l’épaule.
Je me mis à rougir. J’avais encore eu un de ces moments d’absences, j’en faisais pleins étant petite. Je m’excusais rapidement avant de lui expliquer mon problème en lui tendant mon emploi du temps.
“Voyons voir… Tu as cours d’allemand, en B37 avec madame Boulanger.”
En voyant l’air perdu qui était apparu sur mon visage, il décida d’exceptionnellement m’accompagner. L’occasion de me faire visiter, selon lui. Mais au moment de se lever, il posa sa main sur son dos en gémissant. Il n’était pas vraiment jeune, il fallait l’admettre…
“Indiquez moi juste où ça se trouve, et je me débrouillerai !” dis-je en ne pouvant m’empêcher de rire un peu.
Après avoir écouté ses instructions, je le remerciais et me mettait en route. Par peur d’être en retard, j’étais même arrivée en avance. Il n’y avait qu’un groupe de filles dans la salle. Elles me dévisagèrent quand je m’approchai d’elles. Finalement, je n’essayais même pas de leur parler et m’installais au troisième rang. Le cours ne débutait que dans dix minutes, il fallait patienter. Quelqu’un vint s’asseoir à ma table, et j’entendis une voix horriblement familière me dire :
“Alors la te-pu ? On a pas peur de se ramener en cours toute seule ?”
C’était Steve. Il me souriait avec un immense côté malsain. Il avait encore des bleus au visage datant de notre confrontation de la veille. Il avait raison : cette fois, j’étais vraiment toute seule. Non seulement Antoine et Jean n’étaient pas là, mais Ombre, qui l’avait affronté à ma place, n’était elle aussi plus là pour m’aider. Et encore, elle avait pu profiter d’un immense avantage lié à la surprise. Avantage que je n’avais pas. Cependant il y avait un détail qui pouvait me sauver ! Les quatre filles au fond ! Steve n’allait jamais oser s’en prendre à moi en présence de…
“Vous quatre là, les pouffiasses. Allez voir ailleurs si j’y suis pas !” cracha l’immonde individu dans leur direction.
Et le firent. Sans faire un bruit, elles se levèrent et s’en allèrent. Pas une d’entre elles ne nous lança un regard. Je pouvais voir à la façon dont elles s’en allaient qu’elles étaient terrorisées. Peut-être que je n’étais pas sa première victime… Cette pensée était effrayante, mais elle me semblait être proche de la réalité. Il alla fermer la porte et poussa le bureau contre elle, de façon à ce qu’on ne puisse pas l’ouvrir normalement. Dans ses yeux, je pouvais voir une rage telle que je compris que la situation dans laquelle je me retrouvais était loin d’être ordinaire.
“A nous deux maintenant. J’ai pas mal de coups à te rendre, mais t’inquiète, à la fin t’en redemandera.”
“Steve… je suis… d-désolée pour hier… Tu es sûr de vouloir.... vouloir aller aussi loin ?”
Quoi qu’il arrivait, on allait tôt ou tard venir à ma rescousse. Mais si c’était tard, je préférais ne pas penser dans quel état je serais. En tout cas, Steve était fichu. Il avait dépassé les bornes. S’il ne s’arrêtait pas maintenant, il allait obligatoirement finir en prison.
“J’en ai absolument rien à foutre ! Fallait y réfléchir deux fois avant de me frapper !”
Il était fou. C’était la seule solution. Quelqu’un toqua à la porte et j’entendis une vieille voix, sans doute l’enseignante. Cela ne perturba pas du tout Steve, qui se rapprochait de moi. Qu’est-ce que je pouvais faire ? En temps normal, Ombre aurait prit le relais et m’aurait sorti de cette situation mais… mais elle n’était plus là ! Il n’y avait que moi !
Que moi… Mais Ombre avait été une partie de moi avant que je ne la chasse. Ce dont elle avait été capable, j’en étais capable ! Ces coups dévastateurs que je l’avais vu faire, c’était ce même corps ! La seule chose qui changeait, c’était la motivation, la volonté de se battre ! Avant, j’étais celle qui se cachait, alors que ma seconde moitié s’occupait de faire front. Maintenant… C’était mon tour ! J’avais déclaré ne plus avoir besoin d’elle, il fallait que j’assume ce choix !
“Steve… Ce ne serait pas plus agréable si… j’étais consentante ?” demandais-je en essayant d’avoir l’air un peu plus naturel.
Il éclata de rire, jusqu’à en pleurer et hocha la tête en s’écriant :
“Parfait, parfait ! Je savais que tu comprendrais que t’as pas d’autre solution ! Allez, approche toi salope !”
Je m’avançais vers lui. Il ouvrit les bras et les tendit sur les côtés en fermant les yeux. Je ne savais pas à quoi il s’attendait, et je ne voulais vraiment pas le savoir. Une chose était sûre en revanche : il avait totalement baissé sa garde. Maman m’avait indiqué un endroit où frapper si un jour je devais me faire agresser.
“AOUCH !” hurla t-il alors que mon genoux atteignait son entre-jambe.
Son visage se contracta sous l’effet de la douleur. Je devais agir vite. Une fois encore, c’était l’effet de surprise qui m’avait sauvé, mais maintenant je l’avais perdu. J’essayais de me souvenir du coup que mon corps lui avait envoyé hier sous les directives d’Ombre. Je sortais rapidement le même manuel de cours. Quand il l’aperçut, il paniqua et essaya de se lever.
“Espèce de petite…”
Il n’eut pas le temps de finir. Je lâchai tout de suite mon arme improvisée et courrai vers la porte. J’eus tout juste le temps de pousser le bureau avant que quelqu’un ne défonce l’entrée. La personne se releva en toussant :
“Qu’est-ce qui vous prend les jeunes de vous enfermer là dedans ?”
C’était le vieux pion que j'appréciai tellement. J’allais tout lui expliquer mais Steve fut plus rapide :
“Elle m’a agressé ! Avec son livre ! Elle est folle !”
L’homme leva un sourcil. Puis il nous pointa l’un après l’autre du doigt avant de s’écrier :
“Vous deux, avec moi chez le sous-directeur !”
Steve me lança un regard noir en quittant la salle. Mais pas le simple regard qu’on donne à quelqu’un qui nous énerve, non. Le sien voulait clairement dire : “je vais te faire la peau”. Et maintenant que je commençais à le connaître, je savais que ce n’était pas simplement de la provocation.
*Antoine*
D’habitude, le mercredi soir je quittais tôt et j’allais chez Melvin pour jouer à un des jeux vidéos qu’il avait déniché. C’était sa spécialité, toujours en trouver des nouveaux. Ce n’était pas très intellectuel comme activité, mais il fallait bien parfois laisser à mes puissants neurones le temps de se reposer. Hors, j’étais toujours puni… Je n’avais même pas de date limite, c’était “jusqu’à nouvel ordre”. Ça pouvait aussi bien être dans une semaine que dans deux mois ! Adieu détente, et adieu recherches ! J’avais certes exploré l’usine la veille, mais cela m’avait énormément fatigué et j’avais passé la journée à somnoler. Ce n’était pas quelque chose à reproduire si je voulais rester en capacité de réfléchir proprement.
Nettoyer la cantine aussi était une activité bien trop physique pour être répétée tous les jours, et pourtant c’était bien encore une fois ma mission. Heureusement, Jim le surveillant ne s’était pas rendu contre de notre escapade hier soir. Il était décidément vraiment trop vieux pour faire correctement son travail ! Bon, je n’allais pas m’en plaindre, cela m’évitait d’autres ennuies. Ce dont je pouvais me plaindre en revanche, c’était d’être une nouvelle fois seul avec Jean.
Notre petite aventure dans ce monde étrange et virtuel avait brisé un mur entre nous, et être dans la même pièce ne nous était plus insupportable comme ça pouvait l’être, mais nous étions toujours comme le jour et la nuit. Même en cherchant, on ne pouvait pas se trouver de points communs, alors encore moins de sujets de conversations ! Pourtant, il essaya tout de même.
“Dis moi Antoine… Tu la connais depuis longtemps Ambre ?”
Évidemment. Une seule chose l’intéressait, et c’était d’ailleurs ce qui l’avait motivé à m’accompagner dans l’usine : le sourire niais de la blondasse. Ou peut-être son postérieur, je ne savais pas, et je ne voulais pas savoir. D’ailleurs, je ne comprenais pas ce qu’il lui trouvait. C’était probablement parce que je ne m’intéressais pas aux relations amoureuses, ou autres bêtises du même genre.
“Je l’ai rencontré hier. Donc non.” répondis-je rapidement.
Je réalisais que j’évitais inconsciemment de croiser le regard de mon ancien adversaire. Est-ce que je m’en voulais encore pour notre altercation qui avait failli lui coûter la vie ? Non. Je m’en fichais totalement de lui. Qu’il vive ou qu’il meure, cela m’était totalement égal. Ce qui me faisait hésiter, c’était que ce sentiment allait à l’encontre de toutes les valeurs et les morales qu’on m’avait transmises et toutes celles qui semblaient faire fonctionner la société. Et puis être responsable du décès de quelqu’un était autre chose que simplement être indifférent à son trépas. Ce raisonnement tourbillonnait dans ma tête, et me renvoyer toujours à cette question : est-ce que tout cela faisait de moi un potentiel assassin ?
“C’était chelou hier quand même.” déclara Jean, comme pour relancer la conversation.
“Ouais.”
“T’as dit que ça avait un rapport avec tes parents.”
“Je l’ai dit, oui.”
Notre relation était restée froide à l’extrême. En même temps, nous n’allions pas devenir meilleurs amis du jour au lendemain, et je n’avais aucune raison de lui révéler mes raisons pour m’intéresser à cette vieille usine et au laboratoire secret qu’elle contenait. Finalement, il aurait sans doute mieux valu que j’y ailles seul. Désormais, Ambre et Jean étaient aussi impliqués, et leur curiosité avait sans doute été piqué à vif.
Bref, tout cela m’occupait l’esprit, et j’étais trop fatigué pour continuer la tâche ingrate qu’on m’avait imposé, et je me laisser tomber sur une chaise.
“Eh tu fais quoi là ?”
“Je me repose.”
Il m’envoya le balais à la figure et je dû le rattraper pour ne pas me le prendre à la figure. Qu’est-ce qui lui prenait maintenant ? Il ne pouvait pas me laisser tranquille ?
“On doit tous les deux nettoyer la cantine. Je compte pas faire ta part du travail.”
Sans me lever, ni même le regarder, je lui répondais avec un petit sourire :
“Et bien ne la fait pas, ce n’est pas grave.”
“Si la cantine est pas impeccable, on devra continuer demain !
Mon sourire s’élargie.
“Rend la impeccable dans ce cas.”
Je levais enfin mon regard pour confronter le sien. Il ne semblait pas vraiment content de ma réponse. Cet aspect de colère lui donnait encore plus un aspect de primate que d’habitude. Finalement, il en était déjà fini de notre collaboration. En même temps, s’il n’était pas capable de comprendre qu’il valait mieux qu’il s’occupe de l’aspect physique de notre punition, je ne pouvais rien pour lui. N’avait-il pas compris que mon existence entière était liée aux missions intellectuelles ?
Il me lança soudainement son balais à la figure. Il s’écrasa sur ma tête, me laissant une grosse bosse. Mais il était malade ?
“Tu te prends pour qui là ?”
Pour qui je me prenais ? J’avais envie de lui répondre : “pour quelqu’un qui t’es infiniment supérieur. Pour quelqu’un dont la destinée est totalement opposée à la tienne. Toi tu balaieras de vieilles cantines, moi je révolutionnerais le monde.” Parce que c’était la vérité. L’univers n’attendait que moi, moi et moi ainsi que mon immense génie. Avec les anciennes recherches de mon père, j'allais achever quelque chose. J’allais changer des choses. Mon nom n’allait pas être oublié.
Mais là, nous n’étions que tous les deux dans la cantines. J’avais un bleu et je ne voulais pas en avoir d’autres. Alors je fis un effort, je pris sur moi et je me remis au travail.
Nos rapports étaient redevenus aussi décrépis qu’avant. Le facteur Ambre ayant disparu, nous n’avions finalement aucune raison de nous apprécier, ou de nous parler. Et même en sa présence, pourquoi me forcerais-je ? Ni l’un ni l’autre n’avait la moindre valeur à mes yeux. C’était par hasard qu’ils m’avaient accompagnés, et ça n’irait pas plus loin. Ils pouvaient aller roucouler dans leur coin, ça m’était égal.
La première heure passa lentement, sans que le moindre début de conversation refasse surface. Le silence fut brisé par la porte. Jim pénétra dans la cantine et renifla bruyamment.
“Ça sens bien le propre ! De vrais fées du ménages tous les deux ! Je vous emmène de la main d’oeuvre supplémentaire, que les tables brillent bien.”
Il se tourna vers la personne qui allait nous rejoindre et qu’on ne pouvait pas encore voir.
“Je te le répète, c’est temporaire, le temps qu’on découvre ce qui c’est vraiment passé. Mais honnêtement, tout va dans ton sens, donc ce sera quelques retenues pour la forme et c’est tout.”
“Je comprends.” fit la nouvelle venue. Je reconnu immédiatement la voix. C’était Ambre.
Elle rentra à son tour dans la cantine, laissant le vieux surveillant s’en aller. Quand elle nous aperçu, un immense sourire se dessina sur son visage.
“Antoine ! Jean ! Vous êtes punis vous aussi ?”
Je ne savais pas comment je devais vivre son arrivée. Allais-je recommencer à jouer le rôle insupportable de la troisième roue ? Tout de suite, le pseudo-chevalier servant alla à sa rencontre, lâchant sa brosse en route.
“Et bien ! Qu’est-ce que t’as fait pour te retrouver là ?”
Elle baissa la tête, un peu honteuse. Quoi ? Elle avait pas fait son exo de math ou était arrivée en retard en cours ?
“Je me suis battue avec Steve ce matin.”
“Tu t’es battue avec… Sérieusement ?”
“Oui… il va sans doute se faire renvoyer d’après Jim, mais en attendant j’ai des heures de colles. Mais si c’est avec vous deux, tout va bien !”
Ils pouvaient pas se la fermer ? J’avais pu profiter du calme pour beaucoup réfléchir et maintenant leur voix faisaient interférences avec mes pensées.
“Antoine, tout va bien ?”
La niaise était venue vers moi. Elle avait toujours son air à la fois innocent et agaçant. Le cliché typique de la fille frêle, sans défense. Elle s’était “battue” avec Steve. Tsss… elle avait dû lui marcher sur le pieds sans faire exprès.
“Non.” lui dis-je sans la regarder, espérant la faire fuir dans les bras de son protecteur et me laissant ainsi en paix.
“Qu’est-ce qui se passe ?” insista t-elle. Elle était plus déterminée à me parler que je le pensais. En levant la tête, je pouvais voir que cela déplaisait à Jean. Était-il jaloux ? Jaloux de moi ? C’était la meilleure, c’était vraiment la meilleure ! C’était même excellent !
“J’ai des problèmes d’informatiques avec l’ordinateur de mon père. Et je suis persuadé qu’il nous permettrait de mieux comprendre ce qu’on a découvert à l’usine.” développais-je avec une fausse tristesse dans la voix.
Elle hocha la tête. L’autre abruti s’impatientait derrière. Une vision presque paradisiaque. Lui qui pouvait normalement avoir l’attention de toutes les filles qu’il croisait, voilà que c’était moi qui lui volait la première place. Si seulement Melvin pouvait voir ça ! Évidement, je ne pensais pas Ambre capable de m’aider, la seule raison qui me poussais à continuer la conversation était de prolonger cette magnifique situation.
“Tu sais, je t’avais dit que je m’y connaissais un peu.... Donc si je peux t’aider, ce serait avec plaisir hein…”
“Boarf, c’est plus un soucis technique. L’ordi est vieux et j’ai pas de chargeur adapté.”
En repensant à ce bâton dans ma route vers la gloire, je recommençais à bouillonner intérieurement et le plaisir d’agacer Jean se dissipait petit à petit. C’était idiot d’être bloqué à cause de quelque chose d’aussi simple ! Cette petite pièce d’équipement qui me faisait défaut était rare, trouvable uniquement dans les bas-fonds de la vaste toile d’internet et le plus souvent à des prix équivalent à un an d’argent de poche, voir plus. La technologie avait certes ralentie son avancée depuis les dernières décennies, cela faisait longtemps que ce genre de matériel était obsolète et avait été remplacé par un nouveau système bien plus pratique et performant.
J’étais perdu dans mes pensées, et j’avais oublié la présence d’Ambre en face de moi. En même temps, il était facile de l’oublier vu le niveau de sa conversation. Mais quant elle m’interpella à nouveau, je ne pu m’empêcher de sursauter.
“J’ai des vieux chargeurs chez moi. Peut-être que l’un d’eux fonctionnera.”
“De vieux chargeurs ? Vieux comment, d’il y a quelques années ?” m’empressais-je de demander.
Pour la plupart des utilisateurs casuel, quelque chose d’ancien n’était en réalité âgé que de deux ou trois ans. J’avais déjà entendu certains de mes camarades se plaindre de leur téléphone qui datait simplement de l’été précédent en les traitant de totalement dépassé.
“Oh non, ils sont vraiment anciens pour la plupart. Avec l’ancien système.”
Et elle se mit à détailler ce qu’elle appelait “l’ancien système” dans d’une manière très précise, que même moi j’avais du mal à comprendre. Est-ce qu’elle avait avalé une encyclopédie sur les PC du début du XXIème siècle ? En tout cas, c’était surprenant. Surprenant mais pas impressionnant : n’importe qui pouvait se passionner pour un domaine et cumuler des connaissances sur le sujet. Ca n’attestait de rien.
Enfin si, d’une chose : Ambre pouvait réellement m’aider. Elle était peut-être idiote, niaise et d’une naïveté affligeante, cependant il devenait probable qu’elle se révèle être le chaînon manquant pour atteindre le secret de mon père. Mais peut-être qu’en fait pas du tout, qu’elle n’avait pas l’équipement requis et que tout cela n’était qu’une immense fausse choix. Je devais rester sur mes gardes et ne pas crier victoire trop vite.
“Quand est-ce que tu pourrais les emmener ?”
Demain probablement. Mais cela signifiait que j’allais passer une nuit entre l’hésitation et l'excitation et que je n’allais pas fermer l’oeil.
“Ce serait possible ce soir ?” rajoutais-je sans lui laisser le temps de répondre.
“Et bien… oui... je suppose… Je te rejoins chez toi et on essaie d’allumer ce fameux laptop ensemble ?”
Si elle me proposait ça, c’est que ça ne devait pas être possible chez elle. Avec ma tante, ça allait sans doute poser problème, elle allait traîner dans les parages, surtout si je ramenais une fille à la maison ! Elle allait essayer de me “taquiner” sur le sujet devant Ambre, et je ne voulais pas que ce genre de situation se produise.
“C’est pas possible chez moi.” dis-je simplement.
“Les deux geeks, j’ai rien compris à votre conversation mais si vous avez besoin d’un endroit où vous réunir, j’ai de quoi faire.”
Jean devait avoir l’impression de “perdre” ses chances avec la blondasse, et c’était son moyen de les récupérer. D’un côté ça m’arrangeait si ça signifiait essayer les chargeurs de ma camarade de retenue dès aujourd’hui. Ainsi il fut convenu qu’une fois cette corvée terminée, on se rejoignait tous chez lui, le temps pour Ambre de récupérer ses affaires. Une soirée “décodage” s’annonçait, ou plutôt j’espérais qu’elle s’annonçait, car avec ce vieux laptop en état de marche, plus rien ne pouvait m’empêcher de découvrir ce que signifiait ce monde virtuel, et même comment mon père avait disparu.
*Ambre*
Je rentrais doucement dans la maison qui m’avait vu grandir, laissant la vieille porte de l’entrée grincer. Tout respirait le passé ici. Il y avait des photos de ma mère enfants sur les murs avec son père, quelques unes de moi petite aussi mais jamais aucune de récente. Les bibliothèques étaient couvertes de poussières et les livres qui y étaient entreposés n’avait pas été ouvert depuis longtemps. Ce n’était pas une atmosphère désagréable en soi, simplement pas adapté pour une enfant. Les crises de paniques de ma mère et “Ombre” étaient peut-être les symptômes dérivés de ce confinement.
Que ce soit une petite fille ou une adulte, personne n’était censé vivre seul avec comme unique compagnie des antiquités datant d’une époque largement révolue. J’avais réussit à m’extirper de ce mode de vie, mais sans doute parce que j’étais jeune. Pour maman, il était sans doute trop tard. Elle avait vécu toute sa vie dans cet endroit : de sa jeunesse à ma naissance. J’avais vu des photographies d’elle à mon âge. Elle était… très belle et paraissait heureuse. Je me demandais parfois ce qui avait pu la changer à ce point.
J’allais dans ma chambre chercher les chargeurs pour Antoine. Je les avais trouvé dans le grenier que j’explorais avec… Que j’explorais toute seule. J’avais l’impression que ma vie avait pris un immense tournant en deux jours, et j’en voulais à ma mère d’avoir essayé de me “préserver” selon elle de l’extérieur. Oui, l’extérieur c’était montré dangereux. Mais en si peu de temps, j’avais l’impression d’avoir déjà plus vécu que dans toutes mes années d’emprisonnement.
Je descendais les escaliers pour retourner au rez-de-chaussée, et je tombais nez à nez avec maman dans sa robe de chambre.
“Je peux savoir où tu vas, jeune fille ?” fit-elle froidement.
Lui faire face était toujours difficile. D’autant plus que je n’avais plus personne pour me soutenir à présent. Autrefois, Ombre m’inspirait une immense confiance qui me permettait d’avancer, sauf qu’elle n’était plus là désormais. Mince, il fallait que je garde en tête qu’elle n’avait jamais été là. Qu’elle n’avait été que ma propre invention pour me donner du courage, et que je n’avais plus besoin d’elle à présent. N’avais-je pas réussi à vaincre Steve toute seule ? A côté d’une personne ayant des intentions aussi malsaines et dérangés, maman ne me faisait finalement pas très peur. Ce n’était qu’une dame très solitaire. C’était triste pour elle, mais elle n’avait pas à m'entraîner avec elle dans son déclin.
“Je vais rejoindre des amis.” dis-je simplement.
“Sortir aussi tard en plein milieu de la semaine ? C’est ridicule ! Surtout après ce que j’ai appris à ton sujet !”
Le directeur adjoint avait dû la prévenir… Même si je ne m’étais que défendue, c’était Steve qui était à terre quand Jim était rentré dans la salle d’allemand. Bien évidemment, le surveillant était de mon côté mais monsieur Poliakoff ne l’avait pas entendu de cette oreille. Il avait exclu mon agresseur mais avait tenu à ce que je sois moi aussi punie, dans une moindre mesure.
“Te battre en classe, rentrer à des heures pas possible ! Ce n’est pas comme ça que je t’ai élevée ! Jamais je n’aurais dû t’inscrire à Kadic, cela a fait de toit une véritable petite dévergondée !” commença t-elle en rougissant de colère.
“Maman…”
“J’ai totalement échoué avec toi ! Je n’ai pas été capable de tenir promesse !”
Elle hurla et se laissa tomber sur le sol. Une fois à terre, elle fondit en larmes. Elle me faisait beaucoup de peine, mais je ne comprenais pas pourquoi elle se mettait dans des états pareils.
“Je rentrerais pas trop tard cette fois, promis.” dis-je en passant à côté d’elle et en me dirigeant vers la sortie.
Elle voulut dire quelque chose, mais j’étais déjà loin. J’avais pitié d’elle mais je ne comptais tout de même pas la laisser se mettre en travers de ma nouvelle vie. Parce que cette dernière me plaisait : en allant chez Jean, j’avais l’impression d’être heureuse comme jamais je ne l’avais été.
*Antoine*
J’avais du refaire un tour chez moi, le temps de laisser à Ambre le temps de récupérer le matériel dont j’avais tant besoin et surtout parce que je ne voulais pas me retrouver tout seul chez l’autre macaque. Ma tante n’était pas encore rentré, ce qui me laissait un peu plus de temps. Si elle avait été là, je me serais hâté pour ne pas la voir. Je ne partageais rien avec cette vieille idiote et je n’avais rien à lui dire. De plus, son absence me permettait de fouiller un peu les placards pour trouver de quoi manger, chose que je ne pouvais faire en sa présence.
“On ne grignote pas entre les repas !” me disait-elle toujours avec sa voix insupportable.
Dès que j’allais être majeur, j’allais partir de chez elle et vivre seul. Mais bon… je n’y étais pas encore. Après avoir été cherché l’ordinateur remplis de mystère, je me mis en route. J’étais dingue d’impatience. Si l’autre blonde n’avait pas raconté de sottises, j’allais pouvoir recommencer à farfouiller dans le passé. Reparler à “Alpha” et continuer notre conversation de l’autre jour.
Jean vivait dans un endroit à son image. Le rez-de-chaussée d’un HLM miteux. Les poubelles débordaient, avec le taux d’agression assez élevé dans les parages, les éboueurs ne venaient pas souvent. Ce n’était pas vraiment le genre de lieu où j’aimais me trouver, mais c’était nécessaire. J’espérais vraiment que ça allait mener quelque part et que tous ces efforts n’étaient pas en vain. En prenant une grande inspiration, je m’avançais vers la porte et cherchait le nom de famille de l’autre macaque.
“C’est Antoine, tu peux m’ouvrir ?” dis-je à l’interphone.
Après une petite sonnerie, je pu ouvrir la porte. Jean était à l’entrée et me conduisit dans son appartement. C’était tout petit, c’était sale, le sol était jonché de déchets, de papiers et de toute sorte d’objets. Comment pouvait-il vivre dans un bazar pareil ? Ambre y était déjà, assise sur un canapé à côté d’une petite fille rousse. Cette dernière me regarda rentrer avec une certaine appréhension et se tourna rapidement vers Jean.
“Il a une de drôle de tête ton ami.” lui chuchota t-elle doucement, mais pas assez pour que je ne puisse pas l’entendre.
Je montrais lui montrais les dents instinctivement. Je détestais les enfants. Il avait le droit de dire ce qu’ils pensaient sans qu’on le leur reproche.
“Ouais t’as raison.” fit le crétin en gloussant. “Antoine, j’te présente Léa, ma petite soeur.”
Elle restait collée à lui, et me fixait toujours craintivement. Ambre eut un petit rire.
“Ne t’en fais pas, il est pas méchant.” dit-elle à la rouquine.
Ambre était bien le genre de fille à apprécier le contact avec les mioches et à bien s’entendre avec eux. Et puis si Léa n’avait qu’un grand frère, elle n’avait pas de repère féminin et avait dû accueillir à bras ouvert la présence de l’autre blonde. En revanche, un autre garçon totalement différent de ce qu’elle connaissait, ça devait la chambouler. C’était quand même idiot les enfants.
“Bon, j’suppose que vous allez faire vos trucs de geeks. Je vais faire chauffer les pizzas, mettez vous à l’aise.” nous lança t-il avant de disparaître dans une autre pièce.
Je sortais le laptop de mon père de mon sac. Ma camarade avait apporté son chargeur et un autre ordinateur portable, ce qui me semblait être une bonne idée.
“Ouah vous en avez des choses !” s’exclama Léa qui était restée collée à Ambre.
“Oui, mais faut pas y toucher.” lui dis-je rapidement. Elle s’éloigna de moi et alla s’asseoir près de la blondasse.
Bon, il était temps de se mettre au travail, car à mon plus grand plaisir le chargeur était compatible. Le voyant orange de rechargement s’était allumé, il n’y avait plus qu’à patienter. C’était parfait, juste parfait !
“Excellent !” dis-je en voyant l’écran s’afficher. La satisfaction que je ressentais était telle que je ne faisais même plus attention aux deux demoiselles présentes avec moi sur ce vieux canapé. Les secrets de mon père allaient être miens d’ici peu de temps, je pouvais le sentir ! J’avais de nouveau accès au bureau étrangement vide, mais ce n’était pas ça qui m’intéressait…
“Et maintenant ?” me demanda ma camarade.
J’avais oublié sa présence dans mon excitation. Est-ce que je devais la laisser observer mes recherches ? Après tout, ça ne me concernait que moi. Néanmoins, elle m’avait bien aidé, et son ordinateur beaucoup plus moderne allait m’être bien utile. Autant lui mettre dans la confession. J’allais lui expliquer au sujet d’Alpha quand soudain :
A: Bonsoir, “fils de Jérémie”. Comment vas tu aujourd’hui ?
“Qu’est-ce que c’est que ça ?” demanda Ambre à côté de moi.
“Je ne sais pas trop. Pas encore.”
Je me hâtais d’écrire ma réponse.
J: Je vais bien, et toi ?
“Tu discutes avec quelqu’un ?” m’interrogea une nouvelle fois ma voisine.
“Je suis pas sûr que ce soit quelqu’un.”
A: Exact, je ne suis pas “quelqu’un”, je suis une intelligence artificielle. Et pour ton information, je vais bien.
“Il” avait réagit immédiatement, sans que je ne tape quoique ce soit dans la conversation. Se pourrait-il qu’il puisse… ?
“Il peut nous entendre ?!” s’exclama Ambre.
A: Évidemment, je peux vous entendre. Vous voir aussi, tous les trois.
Nous nous regardèrent quelques instants. Léa ne comprenait pas, Ambre était blême et je devais l’être aussi. Tout cela prenait un côté assez effrayant.
A: Tu es Antoine Belpois, je me trompe ? Quant aux deux demoiselles à tes côtés, j’ignore encore leur identité mais je fais mes recherches.
“Mais… comment tu sais ça ?”
Il était devenu évident qu’écrire ne servait à rien. Notre interlocuteur devait utiliser la webcam pour nous observer. Je fus tenté de prendre un but de gomme-fixe pour la rendre inutilisable, mais de toute façon il était trop tard.
A: Comme je l’ai dit, j’ai fait mes recherches. Je devais être sûr que tu sois qui tu prétendais être.
“Bon, maintenant tu sais qui je suis. Ce serait injuste que je ne sache rien de toi.”
A: Exact. Comme tu le sais, je suis Alpha. J’ai été conçu par Jérémie Belpois et Aelita Belpois.
“Dans quel but ?”
A: Tu n’as pas accès à cette information pour le moment.
“Et pourquoi ça ? Je suis le fils de ton créateur !”
A: Il est vrai. Mais je suis une entité indépendante, avec ma propre volonté. Je n’ai pas à obéir à qui que ce soit. Le fait que tu sois le fils de Jérémie ne change rien à cela.
Donc Alpha ne refusait pas de me donner ces informations à cause d’une sécurité quelconque mais bel et bien parce qu’il en avait pas envie… C’était encore pire ! Cet ordinateur devait regorger de dossiers et je n’avais pas le droit d’y toucher !
“Antoine.” murmura une voix dans mon oreille. C’était Ambre. “Si cet Alpha refuse de nous parler, il suffit de trouver ces données par nous même.”
“Tu crois que je n’y ai pas pensé ? Mais impossible de contrôler quoi que ce soit, c’est lui qui à le contrôle de ce laptop !” m’écriais-je avec une colère naissante.
“Aucun système n’est infaillible…”
A: Ne vous méprenez pas, je n’ai pas dit que je ne voulais rien vous dire.
“Alors dis moi…” commençais-je en me précipitant.
A: Cependant, ce n’est pas le bon moment. Venez à l’usine demain après-midi.
Et l’ordinateur s’éteint subitement et il se montra impossible à rallumer. Au final, je n’avais rien appris. Au contraire, j’avais davantage de questions sans réponses. Comment Alpha avait pu faire des recherches si l’ordinateur avait été éteint pendant tout ce temps ? Quel était son lien avec l’usine et ce qui s’y trouvait ? Qu’est-ce que mes parents avaient inventé ?
“Ça devient de plus en plus incroyable… Je savais que la vie serait plus palpitante à l’extérieur, mais pas à ce point !” murmura Ambre pour elle-même, avant de se dire à mon attention : “On doit aller à l’usine demain ! Oh s’il te plaît Antoine, il faut qu’on y aille !”
Elle était encore plus impatiente que moi… Et puis au final, elle avait raison. On avait pas appris grand chose ce soir, mais au moins on s’était rapproché de la vérité. Alpha avait beau rester très secret, on était sur la bonne voie.
“J’ai quatre-fromages ou margarita, qui veut quoi ?” fit une voix derrière nous. Jean était rentré avec les fameuses pizzas. “Il s’est passé quelque chose, vous en faites de ces têtes !” rajouta t-il.
“Comment dire…” sourit Ambre, avant de lui raconter.
Il réfléchit un instant et affirma vouloir nous accompagner, sûrement pour se rapprocher d’Ambre. Après nous mangeâmes les pizzas devant un vieux film de science-fiction datant de 2015 et je fini par m’endormir.
*???*
“J’ai confirmation que trois personnes se sont rendues dans l’usine, monsieur le Directeur.”
La voix du haut-parleur était celle de Mélissa, sans doute la seule personne au monde en qui il avait encore confiance. L’homme l’écoutait attentivement, depuis son bureau à la capitale. De sa main gauche il fumait une cigarette. Fumer était une vieille habitude qu’il pensait avoir disparu, mais qui refaisait surface de temps en temps. Dans les moments de stress. Sa main gauche tapotait sur la table à un rythme régulier, autre moyen d’évacuer la pression. Une chose était sûre : il avait bien fait d’augmenter sa vigilance !
“Je vois.” dit-il sans émotion. “Je suppose que ça devait arriver, un jour ou l’autre. As-tu leurs identités ?”
“Ce sont des élèves du lycée du secteur. Antoine Belpois, Ambre Delmas et Jean Schmitd.”
Il se crispa et lâcha sa cigarette dans son cendrier. Comment était-ce possible ? Tant de coïncidences, ce n’était pas réaliste ! Il avait comprit qu’il devait se méfier dès que le fils de Jérémie et Aelita lui avait été signalé par Nicolas… mais que tout aille aussi rapidement, c’était incroyable. Autre évènement surprenant : la présence de Ambre. Finalement, il devait peut-être y avoir un Destin. Certains évènements étaient impossibles à éviter.
“Monsieur le Directeur ? Tout va bien ?”
“Oui, merci Mélissa, ce sera tout.”
Et il coupa la conversation. Il savait qu’il aurait dû se débarrasser des jumeaux quand il en avait l’occasion… Mais il avait été faible à ce moment. Il avait eu des remords. La colère qui l’avait habité n’avait pas été telle qu’il aurait pu s’en prendre à des enfants. Mais maintenant… Maintenant, il était au sommet d’un véritable empire. Maintenant, il avait plein de choses à perdre. Maintenant, il ne pouvait plus prendre le moindre risque.
Mélissa était son bras droit et aussi ses yeux, mais pouvait-il lui confier une telle mission ? Il ne savait pas si malgré sa dévotion, elle n’allait pas se retourner contre lui. Personne n’était au courant de cette histoire et il doutait pouvoir ajouter des gens dans la confidence… Le secret de son pouvoir pouvait s’écrouler s’il n’était pas suffisamment prudent. Nicolas Poliakoff peut-être ? Non, c’était un imbécile heureux. Il restait… lui. Mais non, il refusait de faire appel à cet individu.
Le Directeur de Kadic devait se rendre à l’évidence : il allait devoir gérer ça seul. Enfin… pas tout à fait. Il lança un programme sur son puissant ordinateur. Un étrange logo apparut sur l’un des écrans.
“Bonjour XANA, ça fait longtemps que je n’ai pas fait appel à toi.”
Des grésillements électroniques lui répondirent de manière agressive. C’était toujours aussi plaisant de voir cet ancien virus informatique obligé d'obéir à chacune de ses volontés.
“Ne t’inquiète pas, je ne vais pas te demander de changer le cours de la bourse ou de pirater les ventes d’une autre compagnie. Non, aujourd’hui, on va refaire comme au bon vieux temps !”
Il sourit. Il s’était inquiété pour rien. Par la fenêtre, on pouvait voir le soleil qui commençait tout juste à se lever. Dans très peu de temps, tout ça n’allait être que de l’histoire ancienne !