Entretien avec un Chasseur
Chapitre 6 : Migraine, quand tu nous tiens !
4860 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour 17/01/2023 17:54
Nous avons omis de vous préciser que nous avons fait une petite présentation de cette fiction sur le forum : https://forum.fanfictions.fr/t/city-hunter-fanfiction-entretien-avec-un-chasseur/4687?u=angelane
Bonne lecture ^^
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- "Et là, vous ne devinerez jamais ce qui m'est arrivé ..."
- "Non ? Quoi ? Que s'est-il passé ? Qui était cette femme ?" Me demande mon binoclard préféré.
C'est rigolo. Avec lui, c'est très facile de le faire réagir. Il est bon public ...
- "Ce qu'il s'est passé ? Je ne sais pas vraiment, mais j'ai à nouveau perdu connaissance et cette fois, je ne trouvais aucune explication rationnelle à mon évanouissement. C'est un peu plus tard que j'ai compris que j'avais affaire à un véritable esprit frappeur, ou plutôt à une âme errante frappeuse pour être parfaitement exact… " Dis-je en riant.
Je me frotte la tête à l'endroit même où j'avais reçu le coup, la douleur encore présente à mon esprit.
- "Vous voulez dire que c'est Elle qui vous frappait ? Mais comment ? Pourquoi ?"
- "Comment ? Bah ma foi, les esprits peuvent parfois interagir avec leur environnement. Ils peuvent vous toucher, toucher certains objets, tout dépend de leur concentration et de leur volonté. Apparemment, à certains moments, elle avait une volonté hors norme et elle réussissait à prendre tout ce qui lui passait sous la main. En ce qui concerne le pourquoi ? ... Ca, c'est une bonne question ... je me demande souvent pourquoi il faut qu'elle tape comme ça ..."
***
Je me réveillai avec une douleur phénoménale derrière la tête. Ma migraine avait pris une nouvelle dimension, faisant battre mes tempes et chaque pulsation enfonçait une pique brûlante dans mon crâne depuis ma nuque jusqu'à l'arrière de mes yeux. Je voyais flou. Je voulus porter ma main à mes tempes pour les masser mais j'en fus incapable. Je me rendis alors compte que j'étais assis sur une chaise, les mains attachées dans le dos par une corde solide. J'étais toujours dans le plus simple appareil, avec le châle de Kaori sur les cuisses pour cacher ma virilité. Cette constatation finit de me réveiller totalement.
Je secouai la tête avant de grimacer tout en songeant :
- "Putain, c'est pas possible ! Manquait plus que ça !!"
Ça allait vraiment mal. Premièrement je n'avais pratiquement pas avancé depuis la veille au soir, à part que je savais maintenant que mon âme errante était jolie comme un cœur, hyper sexy quand elle rougissait et qu'elle s'appelait Kaori. Deuxièmement, voilà maintenant que je tombais tout le temps dans les pommes, pour des raisons inexpliquées, comme une jeune fille en fleur. Troisièmement, quand je rencontrai une jolie plante, je me retrouvai ficelé ... Bon, elle n'avait certainement pas résisté à la tentation de garder pour elle toute seule un étalon de ma trempe. Je me sentis rire bêtement quand je repensai à sa posture au moment où j'avais ouvert la porte ...
- "Héhéhéhé ... Normal, je ne peux pas lui en tenir rigueur, un homme comme moi ... Mais par contre, je ne la vois nulle part ! Dommage ..."
Une bonne odeur de café vint titiller mes narines. J'en avais laissé un petit fond dans ma tasse ... elle était encore sur la table basse. Il devait être froid maintenant. Bordel, je donnerais tout pour une bonne tasse de ce café. Déjà que je n'ai pas pu finir la première !
- "Fait chier !" Maugréai-je tout en me débattant car j'avais d'autres chats à fouetter. " Bon, allez Saeba, va falloir penser à te libérer quand même !"
Je repris peu à peu mes esprits et je tentai de me défaire de mes liens. Je grognai et m'agitai encore sur la chaise, la faisant rebondir sur le parquet. Elle ne semblait pas tellement solide et, à force de bouger, mes liens commençaient à se desserrer un peu.
Je m'imaginai déjà accuser les moqueries de l'autre guignol ailé :
-"Ben alors Ryo, on s'évanouit comme une pucelle ? Tu ne sais plus te battre ou j'ai tapé trop fort la dernière fois ? Tu ne fais pas le poids face à une Miss Mokkori ?"
Je m'énervais de plus en plus de cette situation, entendant presque distinctement la voix de mon acolyte à plumes si bien que je finis par grogner à voix haute :
- "Ohhh !!! Ta gueule l'emplumé !!"
A ma grande surprise, ce fut une voix féminine qui me répondit :
- "Eh ben alors, beau gosse ! C'est comme ça qu'on parle à une dame ?"
Je levai les yeux au ciel, furieux contre moi-même de ne pas m'être rendu compte de sa présence. Elle était juste derrière moi, immobile et silencieuse pendant tout ce temps. J'étais tellement pris par mes propres pensées que je n'avais même pas senti sa présence ou son aura. Elle savait donc la dissimuler ... Avais-je affaire à une pro ?
Mais qu'est-ce qui était en train de se passer, Bon Dieu ! Toute cette affaire me déroutait complètement, et en prime, j'entendais le rire moqueur d'un ange dans ma tête. J'avais plutôt intérêt à garder cette histoire pour moi et ne pas raconter tout ça au Professeur ... Il serait capable de vendre la mèche au Prince des Nuées …
Je pris une grande inspiration pour reprendre possession de mes sens alors que la jeune femme se déplaça, lentement, et vint se positionner devant moi. Il s'agissait bien de celle qui avait tenté de crocheter la serrure de l'appartement quelques instants plus tôt et mon radar personnel ne s'était pas trompé : elle était vraiment magnifique, un visage presque parfait, des cheveux longs, des courbes voluptueuses à peine dissimulées par un chemisier joliment décolleté et un pantalon qui suivait la rondeur exquise de ses hanches ... J'imaginais sans aucun effort les trésors que le tissu couvrait ...
Je sursautai quand elle traîna derrière elle une chaise de sa main libre alors qu'elle tenait de l'autre ma tasse de café à nouveau remplie. Elle positionna la chaise devant moi, à distance respectable, assez près pour empiéter sur ma zone de confort, mais suffisamment éloignée pour que je ne puisse pas l'atteindre avec mes jambes. J'avais bien affaire à une pro.
Elle s'assit à califourchon, appuyant un coude sur le dossier, toujours avec ma tasse à la main et me regarda de ses grands yeux bleus. Oui, elle était vraiment magnifique et d'après son regard charmeur et son assurance, elle avait l'habitude de se servir de ces atouts. J'allais devoir la jouer fine, surtout que c'était bien mon genre de me faire avoir par ce genre de beauté fatale. Je soupirai.
La jeune femme me regardait sans ciller et je lui rendais son regard, absolument pas gêné de ma tenue. Je souris même quand j'aperçus ses coups d'œil appréciateurs.
Comme elle ne disait rien, je décidai de rompre le silence :
- "Alors, mademoiselle, vous entrez souvent chez les gens en crochetant la serrure pour les attacher ensuite à leur chaise ?"
Elle éclata de rire :
- "Je sais de source sûre que vous ne vivez pas ici ... Et ça m'étonnerait que vous soyez là uniquement pour profiter de la douche ... A moins que vous aimiez particulièrement vous laver ailleurs que chez vous ?" Répliqua-t-elle en désignant du doigt mes cheveux encore humides.
- "Ça m'arrive parfois effectivement." Fis-je d'un ton suggestif, ponctué d'un clin d'œil. "Mais je suis rarement assommé par une jeune femme aussi belle que vous."
La jeune femme en question rejeta la tête en arrière, gracieusement, dans un mouvement calculé qui fit onduler sa chevelure lisse et parsemée de reflets auburn, tout en éclatant de rire.
- "Je n'ai absolument rien fait, joli cœur ! Vous vous êtes effondré tout seul ! Enfin tout seul ..." Elle se tourna et me désigna de la main un amas de ferraille et de câbles qui jonchait le sol et que je n'avais pas encore remarqué.
Je cillai à plusieurs reprises, constatant que je voyais encore flou. Il s'agissait d'un lustre. Un lustre très moche et vieillot, le genre volumineux, et solide, très solide ...
- "Ce truc devait être vraiment mal fixé pour tomber brusquement comme ça ... C'est vraiment pas de chance !"
- "Ouais, ça doit être ça ... vraiment pas de chance !" Maugréai-je à voix basse.
- "Ça m'étonne d'ailleurs que vous vous soyez fait cueillir de cette façon ! Mais, tant mieux pour moi !"
Nul besoin de préciser que je garderais pour moi le fait que même les éclairages semblaient avoir une dent contre moi ce jour-là. Vexé de m'être fait avoir de cette façon aussi peu héroïque, je trouvai cependant de quoi répliquer, sachant qu'afficher ma confiance en moi et la charmer serait la seule façon de m'en sortir :
- "Ooooh, je sais. J'ai dû être désarçonné par tant de beauté ! Vous m'excuserez mais c'est sans doute la première fois que je vois une femme aussi belle que vous ! Si vous voulez bien me détacher, je vous montrerai que je sais me faire bien plus vigoureux en d'autres circonstances. Je vous garantis qu'on ne m'appelle pas l'étalon pour rien ... Si vous voyez ce que je veux dire !" Ajoutai-je en fixant ostensiblement le tissu qui me couvrait le haut des cuisses.
J'avais à peine fini ma phrase, qu'un infime mouvement attira mon regard juste derrière la jolie brune. Une silhouette tout aussi jolie venait d'apparaître. Kaori était arrivée. Elle me regarda, ouvertement dédaigneuse, et s'enfonça deux doigts dans la gorge comme pour se faire vomir puis se tourna vers moi et leva les yeux au ciel avant de croiser les bras.
Je me concentrai à nouveau sur mon interlocutrice qui secoua la tête, faisant à nouveau onduler ses cheveux brillants, faisant parvenir à mes narines un doux parfum de monoï et de vanille. De quoi me mettre encore plus l'eau à la bouche. La maline savait exactement ce qu'elle était en train de faire.
Elle répliqua du tac au tac :
- "L'Etalon ... Et bien, et bien ... en voilà un surnom fort prétentieux ! Quoique ... en y regardant de plus près ... Je dois avouer que la proposition paraît tentante." Ajouta-t-elle avec une œillade appuyée et moqueuse.
Elle posa lentement sa tasse (ma tasse en l'occurrence) sur le sol avant de se redresser pour passer une main dans son dos. Elle en ressortit mon arme qu'elle pointa dans ma direction en ajoutant froidement :
- "Mais, tant que je ne saurais pas ce que vous faites ici, dans cet immeuble et dans cet appart, il ne se passera rien de plus que : vous, ficelé sur cette chaise ..."
Je ne pus me retenir de sourire quand elle saisit mon Python à deux mains. Même si elle savait manifestement manier une arme à feu, elle ne parvenait pas à tenir la mienne, particulièrement lourde, le bras tendu devant elle sans trembler. Je vis Kaori se crisper derrière elle mais je la rassurai du regard. Je n'allais certainement pas me laisser abattre par une femme, qui plus est, avec mon propre revolver. Non, j'étais le numéro un des Chasseurs de Nuit, je n'allais pas me faire avoir de cette façon. J'avais plus d'un tour dans mon sac.
Je minaudai, prenant soin d'ajouter des teintes chaudes dans ma voix :
- "Oh, si ce n'est que ça, je suis ouvert à toutes sortes d'expériences, moi ..."
Soudain, elle explosa, exaspérée :
- "LA FERME ! Arrêtez de jouer le mariole !" Elle toussota et reprit son calme pour ajouter : "Je considère cet endroit comme une scène de crime."
Ainsi elle était au courant, je jetai un œil à Kaori, qui avait repris son sérieux et s'approchait de la jeune femme, intriguée, curieuse.
- "Vous connaissiez les occupants de cet appartement ?"
- " Oui." Confirma la belle jeune femme d’une voix douce.
Je regardai discrètement mon âme errante. Elle semblait réfléchir, puis haussa les épaules. Elle avait besoin de plus de détails. Apparemment, le visage de mon interlocutrice de charme ne lui disait rien. Soit ...
- "… Du moins, ma sœur les connaissait davantage, j'ai dû les croiser une dizaine de fois. Le frère surtout. La petite sœur, un peu moins, peut-être deux ou trois fois, guère plus." Continua-t-elle tristement, le regard perdu dans le vague, plein de regrets.
Kaori la pointa soudain du doigt et opina du chef en ma direction. Elle se rappelait d'elle. Ma geôlière ne me mentait donc pas. Cette dernière me demanda :
- "Et vous ?"
- "Moi ? Quoi, moi ?" Je devais trouver une excuse pour être ici.
Je ne savais encore dans quelle case la ranger mais son assurance, sa gestuelle mesurée, ses regards appuyés, tout ça me disait qu'elle était certainement flic, détective, agent secret, ou éventuellement tueuse à gage. J'avais pensé à une journaliste, juste après voleuse professionnelle mais j'avais écarté cette éventualité par la suite.
Je continuai :
- "Moi, je suis littéralement tombé sous votre charme et plus rien d'autre n'existe que vous ... et ..."
- "Stop ! Répondez-moi. Vous les connaissiez ?" Reprit-elle en me fusillant du regard les sourcils froncés, mon arme toujours braquée sur moi.
Flic, elle était flic. J'en aurais mis ma main à couper. Y'a qu'un flic pour vous regarder comme ça avec cet air désapprobateur ... J'avais intérêt à faire gaffe aux mots que j'utilisais ...
- "Bah pas vraiment ... Enfin ..." Je toussai pour m'éclaircir la gorge. "Je suis un ami de fac de Kaori en fait."
Oui, voilà, c'était une bonne idée, ça.
La jeune femme me dévisagea :
- "Z'êtes pas un peu vieux pour aller encore à la fac ?"
Paf, dans tes dents, Saeba ... Je répliquai, vexé :
- "Vieux, vieux, c'est très relatif, ça, vieux ... En tous cas, sexuellement parlant, j'ai toujours vingt ans, moi et je peux vous le prouver si ..."
Je m'interrompis pour lever les yeux et je vis à nouveau Kaori qui levait les yeux au ciel d'un air désespéré. Elle me menaça de son index pointé et son regard me glaça le sang.
Je déglutis et m'adressai à ma fliquette :
- "Y'a pas d'âge pour se cultiver, Mademoiselle. Et je suis ... son ... enfin, bref, je ... Je suis venu lui rendre visite hier soir. Ca fait un moment qu'elle est pas venue et je venais lui apporter mes notes ..."
Elle se pencha vers moi et murmura :
- "Me prenez pas pour une truffe, beau gosse. Vous n'êtes pas étudiant. Vous êtes un pro et vos cicatrices parlent pour vous. Malgré vos airs de gros débile, vous ne m'aurez pas. Vous êtes détective ou yakusa ... "
Démasqué, je n'avais pas d'autre choix que de lui dire la vérité. Ou du moins, ce que je pouvais en dire. Je répondis alors très sérieusement :
- "Je n'appartiens à aucun clan et je veux juste aider Kaori."
Finalement, ça n'avait rien d'un mensonge, si bien que quand elle me sonda, elle ne trouva aucune trace de dissimulation. Elle braqua à nouveau un regard déterminé vers moi :
- "Bien ... Admettons. Alors, reprenons : comment êtes-vous entré ici ?"
- "Mais comme vous, ma chère ... Enfin, plus ou moins ..." Je n'avais aucune envie de lui avouer que j'avais les clefs. "Quoique je suis peut-être plus habile. Il paraît d'ailleurs que j'ai un doigté fort précis et délicat ... si jamais ça vous dit de tester ..."
La jeune femme rougit un peu, elle lâcha mon arme d'une main pour terminer son café avant de reposer la tasse au sol, me laissant lorgner dans son décolleté. Mais je n'eus pas le temps de profiter du spectacle : un air froid me balaya la tête et me fit craindre le pire.
Je tournai discrètement le regard vers mon âme errante qui arborait un regard furieux et je suivis son doigt du regard quand elle désigna, sur sa droite, le perfide lustre qui gisait lamentablement au sol.
Soudain, je réalisai ... Ma migraine, mes bosses et mes accidents répétés depuis la veille au soir… Tous étaient liés. Hier, je m'étais évanoui alors que j'avais la tête dans SA lingerie. Quand j'avais évoqué ce bon moment à haute voix ce matin, je m'étais étalé de tout mon long et quand mon mokkori s'était manifesté devant ma crocheteuse de serrure, j'étais tombé raide ...
Mon âme errante avait manifestement la main leste et tenait à ce qu'on respecte sa pudeur ! Me connaissant, moi et mes obsessions, j'étais dans de beaux draps ...
- "Oh putain !!" Sifflai-je entre mes dents, les mâchoires serrées de rage contenue en la fusillant du regard. "Mais j'y crois paaaaas ! Mais… Mais quelle ... Quelle ... Quelle mégère ! Tu crois que je vais me laisser faire, espèce de dragon ?"
La jeune femme sursauta et m'interpella :
- "Pardon ? Vous avez dit quelque chose ?"
- "Non, rien ..." Soufflai-je avant d'ajouter, provoquant : "Enfin, si ... Je me disais que je vous inviterais bien à faire un tour sur ma chaise avec moi ..."
Je regardai alors mon âme errante. J'avais pensé la provoquer un peu, histoire de la mettre vraiment mal à l'aise mais quand je croisai ses yeux, j'eus l'impression qu'une vague de glace s'abattait sur moi. Je me sentis déglutir tout en observant avec horreur Kaori se diriger d'un pas sûr vers le linteau de la cheminée pour me désigner un vase en cuivre, manifestement indestructible et aussi coriace, voire même plus, que mon ciboulot déjà tout cabossé ...
Debout comme ça, une main sur la hanche et un bras menaçant en l'air devant elle, on aurait vraiment dit que Kaori sortait tout droit des enfers. Elle avait beau être en noir et blanc, je percevais sans peine les flammes de fureur qui dansaient dans ses yeux. Je suppliai mon âme errante du regard.
- "Me regardez pas comme ça, joli cœur, je risquerais d'accéder à votre demande." Soupira la jeune femme, aguicheuse, en se penchant langoureusement vers moi.
Je reportai à nouveau mon regard sur elle alors qu'elle appuyait sa poitrine contre le dossier de la chaise sur laquelle elle était assise, rendant ainsi son décolleté parfaitement irrésistible alors que ses deux seins se rejoignaient et que l'ouverture de son chemisier me laissait entrevoir un morceau de dentelle.
Je déglutis, canalisant toute mon énergie pour résister à l'appel délicieux de ce corps de déesse. Mais, elle se pencha encore plus, soutenant mon regard et passant ses doigts sur ses lèvres qui devaient sentir le café. Je me sentis saliver ... Et soudain, la partie basse de mon anatomie en décida tout autrement, me donnant une énergie folle et je me défis de mes liens avec une facilité déconcertante, que même moi, je ne saurais expliquer.
Je m'élançai alors dans les airs, nu comme un ver, puisque le châle de Kaori avait bien sûr glissé au sol, ma fierté bien dressée, en direction de la jolie brune. Cette dernière se releva d'un bond et dans un mouvement rapide et déterminé, elle se servit de la chaise comme d'une raquette de tennis et joua avec ma tête comme d'une balle qu'elle renvoya d'un revers parfait et j'allais m'écraser contre le mur du salon.
Je m'affalai au sol, poussant un soupir mêlé de douleur et de frustration mais les idées remises en place.
J'ajoutai en tentant de retrouver un tant soit peu de dignité :
- "Dites, vous pourriez pas avoir un peu pitié de moi, non ? Je viens de me prendre un lustre, faudrait pas l'oublier !"
- "Oui, effectivement, je vais avoir pitié de vous ... Allez vous habiller que l'on puisse parler sérieusement. Je vous suis." Ajouta-t-elle en me menaçant de mon arme.
***
- "Non mais vous êtes impossible, vous ..." Fait mon compagnon à lunettes en secouant la tête de dépit.
- "Je vous demande pardon ?"
- "Franchement ? Vous pouvez pas vous retenir ?"
Je croise les bras :
- "Ouais, bah, cette fois-là, ça m'a quand même donné la force de me libérer. C'est utile, voyez ..."
Il secoua la tête :
- "Non, non, non. Vous ne m'enlèverez pas de l'idée que c'est pas des manières, ça, de sauter comme ça sur n'importe quelle jolie femme!"
- "Oh là là ! Vous dites ça parce que vous ne l'avez pas vue ... Attendez si vous la rencontrez un jour et vous verrez si elle n'arrive pas à vous mener par le bout du nez. Et sa sœur est pire encore ..."
- "Sa sœur ?"
- "Oui ... et figurez-vous qu'elles ne sont pas n'importe qui, ces deux-là ... Elles étaient les filles du Préfet de Police ..."
- "Oh ! Mais attendez, attendez …" Il fouille dans ses notes avant de s'exclamer : "Oui, voilà ! C'est ça ... La bombe de l'article de journal ? Celle de la photo, c'est ça ? C'est d'elle dont vous m'avez déjà parlé ?"
- "Exactement, c'est elle. La flic, c'est la grande sœur. Elle s'appelle Saeko. Celle qui a crocheté la serrure est sa jeune sœur, Reika. Elle est une ancienne flic, là, je ne m'étais pas trompé. Elle venait de se reconvertir en détective privé. Elle avait certaines entrées parmi la pègre aussi."
- "Oh ! Mazette ! C'est pas n'importe qui, alors ? Mais pourquoi est-ce qu'elle enquêtait sur Kaori et son frère ?"
- "Elle cherchait des infos mais pour aider sa sœur ..." Je soupire en repensant à toute cette histoire. "Saeko est l'ancienne partenaire du frère. Il s'appelait Hideyuki. Saeko et lui étaient même un peu plus que des partenaires ... Et Saeko a très mal pris son assassinat. Elle a commencé une enquête mais elle a vite été contrée. Le scandale qui s'était étalé dans les journaux n'était que de la calomnie mais son père avait été forcé de la suspendre. Depuis, elle tournait en rond dans son appartement, en "ruminant son impuissance" avait dit Reïka ..."
- "Oh ... A ce point ?"
Je ne peux me retenir de rire tristement :
- "Oui, à ce point ... Et vous ne pourriez même pas vous imaginer … Empêcher Saeko d'agir ? Oui, je crois que c'était la pire des choses qui pouvait lui arriver à ce moment-là."
- "Je suppose que vous êtes allé lui rendre visite ?"
- "Bien vu ! Vous êtes un malin vous !" Répliquè-je en riant.
***
Reïka m'avait suivi pendant tout le temps de mon habillage. J'avais laissé tomber le côté dragueur, mon crâne en avait assez pris pour son grade. J'avais pensé deux ou trois fois aller la désarmer pour récupérer mon précieux Magnum mais je n'en avais rien fait. Je ne voulais pas l'agresser ou lui prouver ma supériorité physique et technique. Sous la menace, elle aurait gardé le silence, ça j'en étais persuadé tout comme j'étais persuadé d'autre chose : elle n'allait pas me tuer. Je devais donc l'amener à me parler et à partager ses infos.
Ce ne fut pas chose facile et presque deux heures de négociations furent nécessaires à la convaincre de me faire confiance.
Apparemment, elle avait entendu parler des "Chasseurs de Nuit" mais n'y avait jamais porté attention, considérant notre existence comme une légende urbaine. Elle avait inspecté mon matériel qui se trouvait dans mon sac d'un œil dubitatif. Et puis, contre toute attente, elle m'avait rendu mon arme en disant :
- "Mon instinct me dit que vous ne me mentez pas. Et je fais toujours confiance à mon instinct. Vous avez l'air sincère quand vous parlez de Kaori et ça ... Ça me plait." Elle avait profondément soupiré en ajoutant : "De toutes façons, au point où j'en suis ... Je ne suis pas contre un peu d'aide ..."
Kaori, qui était restée en retrait, les bras croisés sur la poitrine pendant tout mon échange avec Reika, changea complètement d'attitude quand la détective évoqua le chagrin de sa sœur, Saeko. J'en déduisit qu'elle appréciait la partenaire de son frère.
- "Elle refuse que j'enquête de mon côté." Dit Reïka en s'asseyant sur le canapé à côté de moi, avec un soupir à fendre l'âme. "Et du coup, je tourne en rond. Comme elle est mise à pied, aucun ancien collègue n'a accepté de m'aider. J'ai l'impression que l'enquête a été bâclée. Il pleuvait la nuit de la mort d'Hideyuki et comme par hasard, la pluie aurait effacé toutes preuves ... Pas une douille sur le sol, pas un témoin ... que dalle ..."
Je tiquai. Effectivement, c'était étrange puisque mes petits vieux du rez-de-chaussée avaient bien dit avoir tout vu. Et, à aucun moment je n’avais eu l'impression qu'ils avaient été du genre à flipper et à ne rien dire aux flics. La preuve, Saeko était passée les voir ...
- "Vous êtes allée interroger les p'tis vieux du rez-de-chaussée ?"
- "Quels petits vieux du rez-de-chaussée ?"
- "Ceux qui habitent juste en dessous ?"
- "Ah ? Il y a d'autres occupants dans cet immeuble ? Je ne savais pas ... Ils ont des infos ?"
- "Oui et non. Enfin rien qui puisse vous faire avancer ..."
Elle garda un moment le silence avant de murmurer :
- "On va dire que je vais vous faire confiance sur ce point ..."
Elle soupira à nouveau et je vis de la colère briller dans ses prunelles bleues :
- "N'empêche, tout ça est très étrange. Mon instinct me dit qu'il y a un truc pas clair, là-dessous. Et je vous ai déjà dit : j'écoute toujours mon instinct. En plus, à ce moment-là, Hideyuki et Saeko étaient sur une grosse affaire. Enfin, c'est ce que j'en avais déduit parce que ma sœur était encore plus distante qu'à son habitude depuis un moment. L'enquête sur l'assassinat d'Hideyuki a conclu à un crime d'opportunité. Tout ça parce que son portefeuille avait disparu ... Conclusion hâtive, si vous voulez mon avis !"
J'acquiesçai :
- "Oui, facile de faire disparaître un portefeuille d'un cadavre ..."
- "Exactement... J'en ai déduit que des flics sont impliqués. C'est aussi pour ça que j'ai quitté la Police il y a presque trois ans maintenant ..." Ajouta-t-elle avec un soupir las. "Trop de corruption, trop de petits jeux, trop de pots de vin et de ... de ... pots cassés ... Trop d'iniquité."
Elle ne voulut pas en dire plus et je respectai son silence un moment avant de lui demander :
- "Et Kaori dans tout ça ?"
- "Je ne sais pas ... Elle n'est pas du genre à chercher les ennuis et Hideyuki la protégeait du mieux qu'il pouvait de son job d'après ce que me racontait ma sœur. Mais Kaori ne s'est pas volatilisée toute seule comme ça. J'ai fait le tour de tous les hôpitaux de la région, poussant jusqu'à une centaine de kilomètres aux alentours de Tokyo. Et rien ... Et comme je n'ai plus d'accès aux données de la Police, je ne peux pas vérifier les morgues. Et j'avoue que je refuse cette éventualité. Je préfère partir du principe qu'elle se cache quelque part. Sinon, ça veut dire que soit il lui est arrivé quelque chose, soit elle a été kidnappée, soit ... Je ... Mon dieu, j'espère qu'il ne lui est rien arrivé et qu'on la retrouvera ..."
Reïka poussa un profond soupir et Kaori tendit son bras vers elle. Elle effleura sa main, passant au travers. Je vis Reïka frissonner avant de se frotter les mains l'une contre l'autre comme pour les réchauffer avant de poursuivre :
- "Kaori ne mérite pas ça. Elle et son frère étaient des gens bien. Je refuse que des gens bien paient sans arrêt pour le bien-être de salopards qui abattent des flics de quatre balles dans le dos. L'assassinat d'Hideyuki ne doit pas rester impuni. Ma sœur ne s'en remettrait pas. Saeko en fait une affaire personnelle et j'ai peur qu'elle soit en train de sombrer ..." avait dit Reïka et cela avait suffi pour me convaincre.
Imaginer une belle femme comme Saeko se noyer dans le désespoir me révoltait ... Et, enfin, je tenais une piste sérieuse concernant mon problème d'âme errante brutalisante. Et si cela impliquait sauver une belle femme de son chagrin, j'avais bien l'intention de joindre l'utile à l'agréable, si vous voyez ce que je veux dire ...