C.H.C.H. ou Courtes Histoires de City Hunter
Chapitre 8 : Lumbago vs Mokkori, Deuxième round
1985 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 24/01/2023 14:52
Ryo venait enfin d'arriver au quatrième étage. Il ouvrit la porte de l'appartement en prenant soin de serrer les dents, se composant une expression adéquate et s'appuya maladroitement contre le chambranle. En le découvrant ainsi, blême et le regard perdu dans le vague, Kaori ne put retenir un cri et elle se précipita vers lui, inquiète. Il répondit en grognant :
- "Pas si grave. Pas si grave. Juste ... mal au dos ..."
Elle lui tendit immédiatement le bras et il s'y agrippa. D'une voix douce, elle demanda :
- "Comment tu t'es fait ça ?"
- "J'ai voulu changer la roue crevée de la Mini ... et en appuyant sur le cric ... "
- "Ça a fait crac, c'est ça ?"
- "Hahahaha ... Très drôle, Makimura ..."
- "Franchement ... Tu te bats contre une dizaine de types, pas un hématome. Tu affrontes un tueur à gages en duel, pas une égratignure. Tu plonges depuis un hélicoptère dans la mer, pas une bosse. Tu traverses un bâtiment en flammes, pas une brûlure. Tu te prends des tonnes de massues sur la tête, tu n'en gardes pas une seule séquelle ... enfin, je crois pas ... Et là ... Tu passes l'aspi, bam, te voilà bloqué. Tu changes une roue et re-bam, te voilà re-bloqué ? Admets que c'est comique."
Ryo resta muet. Il avait le souffle court, serrant toujours fortement les mâchoires et la main de Kaori dans la sienne. Il avançait petit à petit, sans geste brusque, laissant ses pieds glisser méticuleusement sur le parquet. Il murmura :
- "La semaine ... dernière ... la bagarre avec les yakuzas."
- "Sur le port ?"
Il hocha doucement la tête et reprit son opération escargot :
- "Oui. Y'en a un qui a ... réussi à me frapper dans le dos ... avec une rame."
- "Oh ! Comment ... Mais ... Mais ... Mais ..." Bredouilla Kaori, horrifiée de découvrir que son partenaire puisse être blessé par un quelconque yakuza armé d'une banale rame. "Pourquoi tu n'as rien dit ?"
- "Je pensais que ça allait ... passer tout seul. Comme les douleurs causées par tes massues."
Kaori ignora ouvertement la remarque, Ryo doutait même qu'elle l'ait entendue, inquiète comme elle était.
- "Mais pourquoi me cacher un truc pareil ?" Insista-t-elle.
- "C'est mon dos ... ça me regarde."
- "Hein ?"
- "Aïeuuu ! Bouge pas si brusquement, j'ai mal moi !"
- "Oh, pardon ... C'est que ... Enfin, merde, Ryo, je suis ta partenaire. J'aurais pu t'aider."
- "Et tu aurais fait quoi ?"
- "Je t'aurais conduit à la Clinique du Professeur pour qu'il te fasse une radio. Je t'aurais forcé à prendre un bain chaud et ... Enfin, j'aurais trouvé un truc !"
- "Ouais, bah j'ai fait tout ça. J'ai vu le Professeur ... et il a dit que ce n'était ... rien de grave et que ... je ne devais pas ... forcer ..."
- "Sans m'en parler ?"
- "Je ne vais pas te faire ... un rapport à chaque bobo quand même ..."
- "Bah si ..." Affirma Kaori, sûre d'elle.
- "Pourquoi ? Tant que ça n'affecte pas mes capacités ... professionnelles, je ne vois pas en quoi ... c'est important."
Kaori ne put s'empêcher de rire :
- "Alors, pour le coup, ne le prends pas mal mais je pense que là, en ce moment, tes capacités professionnelles sont très très très affectées."
- "Héééé !" S'écria brusquement Ryo, fâché que sa partenaire souligne sa faiblesse avec autant de désinvolture ; il se figea cependant immédiatement et grimaça. "Aïeuuu !"
Dans un souffle, il murmura :
- "C'est vrai ... Je ne suis pas en forme ... mais ... je peux encore tenir mon flingue. Tant que je ne suis pas mort ... je pourrais tenir ... mon arme et je veillerai sur toi ... partenaire."
- "Et bien moi aussi, je suis là pour veiller sur toi, partenaire."
Il se tourna vers Kaori et ne put se retenir de sourire en découvrant son regard franc et sincère. Elle lui rendit son sourire avant de baisser légèrement le nez, les joues délicatement rosies. Il serra un peu sa main entre ses doigts, regarda à nouveau devant lui et admit dans un souffle :
- "Je n'ai pas l'habitude qu'on veille sur moi."
Kaori garda les yeux rivés sur les pieds de Ryo qui avançaient lentement et répliqua d'une voix douce :
- "Tu sais ce qui est bien dans les habitudes ?"
- "Heuuu ... Non."
- "C'est qu'on peut les changer."
Il n'eut pas besoin de la regarder pour savoir que son sourire étincelait de douceur et que ses yeux pétillaient de détermination. Non, il n'avait plus besoin de croiser son regard pour sentir combien son aura chaude et bienveillante s'enroulait autour de la sienne tout comme il savait pertinemment que son cœur battait un peu plus vite ... et que leur petit rapprochement n'y 'était pas étranger.
Mais si elle, elle avait relevé les yeux à cet instant, elle aurait peut-être décelé une pointe de triomphe dans son sourire en coin. Cependant, elle n'en fit rien, le regard toujours fixé sur leurs pieds, les joues roses :
- "Du coup, la prochaine fois, tu me préviens quand tu es blessé. Ca évitera ce genre de choses."
- "Si tu veux ... Mais .... Je voyais pas l'intérêt."
- "Moi, je vois l'intérêt, donc, la prochaine fois, tu m'en parles, OK ?" Reprit-elle, visiblement très contrariée par le silence de Ryo sur son ancienne blessure. "Un partenaire aide à soigner les bobos, tu sais."
- "Heuuu, pas mes anciens partenaires, non ... Ton frère manquait de ... délicatesse pour ces trucs là ... la seule fois où il m'a soigné ... j'ai eu encore plus mal ... qu'en me blessant. Mick ne savait que faire ... des points de suture arrosés de whisky ... et mon père m'ajoutait un cocard supplémentaire ... si je me plaignais d'avoir ... mal. Donc ... j'ai pris l'habitude de ... de ne rien dire."
- "Et bien, je crois qu'il est vraiment temps qu'on change certaines de tes habitudes, tu ne crois pas ?"
- "Ok."
Kaori se tourna vers lui et le dévisagea, surprise d'avoir si facilement remporté la partie :
- "Ok ?"
- "Oui, oui, ok. Je changerai cette habitude là. Enfin, j'essayerai ..."
Ils arrivèrent enfin près du canapé où il s'allongea tant bien que mal sur le ventre tout en râlant, maugréant et jurant. Quand il fut installé, elle lui caressa doucement la joue et lui murmura :
- "Je vais te préparer une bouillotte et chercher de la pommade anti-inflammatoire. J'en ai acheté en prévision après ton premier lumbago. J'ai bien fait, on dirait. "
Ryo hocha la tête pour toute réponse et prit une grande inspiration pour tenter de reprendre son souffle, petit à petit. Il entreprit de défaire le bouton de son pantalon pour le descendre un peu, relevant l'arrière de son t-shirt, révélant ainsi la zone lombaire qui le faisait tant souffrir et qui attendait chaleur et massage.
Sa respiration était devenue régulière quand Kaori réapparut, triomphante, une bouillotte dans une main et un tube de pommade dans l'autre :
- "Oh tu as réussi à te préparer tout seul ? Tant mieux ... "
Elle posa délicatement la bouillotte sur le dos de Ryo et entreprit de lui lire ce qui était écrit sur le tube :
- "Anti-douleur, anti-inflammatoire, traitement d'appoint de contusions musculaires et ligamenteuses. Alors ... Appliquer deux fois par jour, en massage léger, sur la zone douloureuse." Dit-elle en dévissant le tube avant de le poser devant le nez de Ryo. "Je te laisse, je dois terminer la vaisselle."
- "Quoi !" S'indigna Ryo. "Tu ne me masses pas ?"
- "Heuuu." Dit-elle en se retournant, les joues teintées de rose. "Non. Je n'ai pas changé d'avis sur la question depuis la dernière fois."
- "Mais je fais comment, moi ?" Geignit Ryo.
- "Tu mets de la pommade dans le creux de ta main et tu passes le tout sur le dos, tu frottes un peu et voilà. Attends peut-être que la chaleur de la bouillotte ait fait un peu d'effet. La pommade agira plus vite. Si ça va pas mieux, j'essaierai de joindre l'ostéo ... en espérant qu'il accepte de revenir ..."
- "Non, non, non ! Kaori ! Reviens ici ! Tu ... Kaoriii !!!"
Kaori fit volte-face, gênée, les joues rouges, détournant le regard de la peau dénudée de son partenaire. Ryo remarqua son malaise et lança, moqueur :
- "Quoi ? Ne me dis pas que ça te gêne de me masser, quand-même !"
- "Non. Pas du tout." Mentit-elle.
- "Kaori ..." Insista-t-il, sûr de lui et il tenta de la déstabiliser. "J'ai mal. Tu es ma partenaire. Tu ne vas pas me laisser tomber maintenant ..."
- "C'est que ... J'ai pas l'habitude, moi ..."
- "Tu sais ce qui est bien dans les habitudes ?"
- "Nan ..."
- "C'est qu'on peut les changer." Dit-il d'une voix douce et chaude tout en lui tendant le tube.
La jeune femme commença à hésiter. Elle bredouilla :
- "Je ... Enfin, c'est que ... tu vois ... C'est un peu ... Comment dire ? C'est près de tes fesses quand même."
- "Pas ma faute. Mon dos est juste au-dessus de mes fesses, oui, comme tout le monde."
- "Oui mais ..."
- "Je laisse le pantalon comme ça, là, on ne voit rien."
- "Je ..."
Ryo sourit, amusé de la pudeur de Kaori :
- "Qu'est-ce qui se passe, Kaori ? C'est quoi le vrai souci ?"
Rougissante, hésitante, mal à l'aise, elle balbutia :
- "Tu ne feras pas un truc ... bizarre, hein ?"
Ryo répondit très sincèrement :
- "Kaori, je me tiendrai correctement. Promis."
La jeune femme fit un pas vers lui :
- "Juré, craché ?"
- "Allez ! Kaori ! Je n'arriverai jamais à faire ça tout seul !" S'exclama Ryo en montrant combien il était difficile pour lui de se passer la main dans le bas de son dos.
Une minute et douze secondes plus tard, Ryo se retrouvait enseveli entre les ressorts du canapé dans une position physiologiquement improbable et très certainement douloureuse.
- "Aïeuuu !!! Tu ne peux pas t'empêcher de me taper dessus, Kaori ! Je suis blessé, moi ! Tu ne peux pas changer tes habitudes ?"
- "Quoi ? Mais tu te rends compte que c'est vraiment pathologique, la perversité, chez toi !" Hurla Kaori en serrant les poings de colère, debout devant lui. "Tu ne peux donc pas te retenir !?!"
- "Mais j'ai rien fait !"
- "Si !" Répliqua la jeune en tapant du pied.
Ryo se fâcha aussi persuadé de ne vraiment avoir rien fait de travers :
- "J'ai juste dit que c'était très agréable et que tu avais des doigts de fée."
- "Tu l'as dit de façon bizarre ..." Argumenta Kaori.
Ryo n'en croyait pas ses oreilles :
- "Mais ... Mais ... Mais c'était un compliment !"
- "J'ai pas l'habitude !" S'écria la jeune femme, sincère.
Il répliqua :
- "Je sais ! Et tu sais quoi ? Tu as dit : les habitudes, ça se change ! Alors, j'essayais juste de changer !"
- "Et bien ... ne change pas, c'est moins gênant !" Hurla-t-elle en tournant les talons, claquant violemment la porte de la cuisine derrière elle.
Toujours emmêlé dans les reliefs de son sofa éventré, Ryo maugréa :
- "Pfff ... et l'Autre Vieux Débris de Professeur qui me conseillait de lui montrer que sa présence m'était indispensable ... que ça ferait évoluer les choses, qu'elle se sentirait revalorisée, que toutes les femmes aimaient jouer les infirmières, qu'on pourrait se rapprocher un peu, et bla-bla-bla et bla-bla-bla... Alors, j'le r'tiens, lui ... Tout ça pour pas avancer d'un pouce, j'te jure ..."