Shanshu - La suite des aventures d'Angel et Buffy
Chapitre 10 : Episode 10 - Voyage astral
3976 mots, Catégorie: G
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EPISODE 10 : VOYAGE ASTRAL
Quelques minutes plus tôt...
Willow se déplaçait dans cette immense salle, exclusivement réservée à sa personne. Elle considérait ce lieu comme son sanctuaire, un refuge où elle se plaisait à pratiquer toutes ses activités liées à la magie. Invocations, incantations, envoûtements, sortilèges et méditations, tout était prétexte à entreposer sur de grandes étagères un tas d'objets, tous plus loufoques les uns que les autres. Il y trônait des runes chamaniques, des poupées vaudous, des bocaux aux contenus étranges, ainsi que des pierres et bougies de toute sorte, promettant autant de nouvelles expériences en perspective.
Sa collection, complétée à l'autre bout de la pièce par d’autres étagères, contenait un nombre effarant de bouquins, couvrant un large panel de sujets, plus ou moins liés à la magie. En plus des grimoires de sorcellerie, des livres des ombres, et des recueils anciens, on y trouvait des ouvrages dédiés à la science, à la chimie, sans oublier la botanique.
Il aurait fallu bien plus d'une vie pour en faire le tour, mais Willow possédait des facultés hors norme. Ce qui demandait de longues heures de lecture pour le commun des mortels, ne requérait guère plus de quelques minutes pour la sorcière puissante qu'elle était devenue.
A l’intérieur de son propre périmètre, la salle se divisait en deux parties bien distinctes. La première, un espace de détente, contenait un canapé confortable au design arrondi, entourant une table basse en bois massif. Willow s'y plaisait, de temps à autre, à boire quelques collations en compagnie de Buffy, Alex, Dawn, et Leïna à qui elle enseignait les bases rudimentaires de la magie. Le reste de l'espace était entièrement voué à la méditation et à l'activité pratique de la sorcellerie. Le sol, recouvert de plusieurs rangées de tatamis soigneusement disposés, offrait un confort optimal pour ses séances, améliorant ainsi son efficacité. La concentration exigeait un relâchement total du corps et de l'esprit, aussi l'environnement immédiat y jouait pleinement son rôle.
Respectée au même titre que Buffy, Willow jouissait d'une réputation bien établie au sein de la résidence. Tous avaient eu vent de ses exploits lors de la bataille contre la force, et beaucoup avaient eu un aperçu de son talent sur le terrain. Si le pouvoir de la tueuse avait été transmis à toutes les potentielles de par le monde, c'était de son fait, même si elle n’en tirait aucune fierté particulière.
De temps à autre, il lui arrivait de fournir un appui sur certaines missions nécessitant des compétences spécifiques, ne trouvant pas leur résolution dans les aptitudes physiques. Lorsque Kennedy était encore parmi eux, Willow participait fréquemment à des chasses ne justifiant pas nécessairement sa présence. Ces derniers temps, elle avait déserté le terrain pour se consacrer essentiellement à sa méditation transcendantale. Cette pratique lui permettait d'entretenir un lien direct avec les forces mystiques et la magie débordante qui en émanait.
Dernièrement, elle avait constaté une anomalie susceptible de remettre en question l'ordre établi. Habituée à trouver la quiétude en se confondant avec les éléments, elle ne parvenait plus à établir de connexion. Elle n'en avait tenu informé personne jusqu'à présent, mais elle ne maîtrisait plus rien, comme si le contact avec les forces élémentaires avait été totalement chamboulé. Lorsqu'elle se décidait à faire léviter en apesanteur un simple crayon, la base pour n'importe quel novice en sorcellerie, l'objet échappait à son contrôle et allait percuter toutes les façades de la pièce, manquant de peu de la blesser. Après plusieurs tentatives avortées, elle commençait à douter de ses propres capacités. Ce n'était pas la première fois qu'elle rencontrait des difficultés, mais jamais avec une telle ampleur et une telle persistance. De plus, elle se sentait plutôt en forme et ne semblait pas couver une quelconque maladie capable d'affecter ses compétences. Dans l’attente de comprendre l’origine de ce désordre, Willow avait décidé de se retrancher du monde extérieur. En l’état, elle représentait un danger pour les autres, et elle ne se pardonnerait jamais un faux pas qui entraînerait l’échec d'une mission et ses conséquences dramatiques.
Animée par l'intention de percer à jour ce mystère, Willow se décida à arpenter le tatami, vêtue d'un blazer bleu marine et d'un pantalon blanc légèrement transparent. Elle prit soin de déployer une bâche de protection noire sur le sol, avant d'y répandre du sable fin, dessinant la forme d'un pentagramme étoilé. Après avoir disposé une bougie à chacune des extrémités, elle s'en alla quérir quatre runes qu'elle plaça autour d'elle, de façon à respecter les quatre points cardinaux. Tout étant prêt pour la méditation transcendantale, elle s'y attela, non sans une certaine appréhension.
Elle s'installa en position du lotus, les jambes croisées, la tête droite parfaitement alignée à la colonne vertébrale. Les yeux clos, elle inspira profondément et fit le vide dans son esprit de façon à éveiller ses sens. Cette quiétude, ce silence apaisant, n'allait pas tarder à être perturbé par des claquements brusques. Les fenêtres s'ouvrirent tour à tour, laissant pénétrer dans la pièce le vent froid et les sonorités extérieures. Les bougies, éteintes jusqu'alors, s'embrasèrent d'un feu ardent. La sorcière, en état de transe, murmura une incantation d'une voix ferme et puissante.
─ Je t'invoque, Esprit de la Terre, reviens à tes racines. Je t'invoque, Esprit de l'Air, transporte-moi de ton souffle, je t'invoque, Esprit de l'Eau, baigne-moi de ta pureté, je t'invoque, Esprit du Feu, consume-moi de ton ardeur. Nyekta zon kara zon lmarel ikum axia.
Aussitôt dit, qu'elle s'éleva lentement dans les airs, comme portée par un courant ascendant empreint d'une douce volupté. Une sérénité nouvellement retrouvée se lisait sur son visage, tandis que ses cheveux épais volaient au vent, dans la légèreté d'une brise printanière. Elle humecta l'air ambiant, s’imprégnant de la pureté de cette énergie positive qu'elle canalisa dans chaque fibre de son être. Willow ne se sentait jamais aussi bien que lors de ces moments de total abandon, où elle quittait son enveloppe charnelle pour se confondre avec les esprits de la nature.
La pression de l'air se stabilisa, laissant la sorcière dans un état statique, figée en apesanteur. Elle venait de passer à l'étape suivante. Désormais, le temps et l'espace n'avaient plus d’emprise sur sa personne, et son esprit s'échappa au-delà de son enveloppe corporelle, qu'elle apercevait désormais du haut de la pièce. En brisant les chaînes qui l’emprisonnaient dans le monde matériel, elle en était devenue pratiquement omnisciente, et avait acquis la faculté de se déplacer astralement, à quelque endroit que ce soit. Dès lors, plus rien ne lui semblait impossible. Elle était devenue le vent, l'eau, la terre et le feu.
Cet état transcendantal était la condition nécessaire pour accéder à un univers dépassant l'entendement, connu seulement de quelques initiés. Cet espace-temps permettait d'établir un lien direct avec la source de toute magie existante sur terre, la connectant ainsi à un pouvoir remontant à l’origine de la création.
La sorcière entrouvrit les portes intangibles de ce lieu transpirant de sérénité. Le décor prenait forme de par le subconscient de la personne qui le traversait. Pour Willow, il s'agissait d'un petit sentier d'herbes hautes et de fourrés, menant à une petite clairière. Cette dernière était baignée par un radieux soleil d'été, dont les rayons venaient se perdre dans le feuillage des arbres, créant un tableau scintillant de jeux d'ombre et de lumière.
La jeune femme se retrouvait vêtue d'une unique parure de tissu, si légère qu'elle en ressentait à peine la présence sur sa peau. Les arbres, formant une frontière infranchissable, s'inclinaient respectueusement sur son passage. S'y étant réfugiée maintes fois par le passé, une impatience fébrile la gagnait à l’idée de franchir le seuil de son jardin secret.
S'offrit alors à ses yeux, la vision paradisiaque d'un magnifique étang ceinturé de végétation luxuriante, dans lequel une cascade déversait une eau vert émeraude à la texture irréellement légère. Ce coin de paradis était peuplé de créatures en tout genre : on y trouvait des petits écureuils qui grimpaient agilement le long des arbres, une multitude de papillons virevoltant dans un balai incessant de fleurs en fleurs, quelques hirondelles qui se jetaient en piqué dans l'eau avant de remonter aussitôt, et un cerf d'une majestueuse ramure se désaltérant, bercé par le chant mélodieux des cigales. C'était son univers, modelé par son esprit, et elle en savourait chaque contour avec une intensité renouvelée, embrassant la perfection de ce tableau idéalisé.
Une douce bise lui caressait le visage, tandis que le vent s'engouffrant dans sa tunique, lui procurait une sensation de fraîcheur revigorante. La fine couche de vêtement dansait sur son corps svelte, effleurant sa peau et la chatouillant délicatement. Elle avança d'un pas léger en direction de la source. Ses pieds nus se posèrent sur un tapis de terre humide. Elle se sentait comme ancrée, enracinée dans ce sol fertile d’où elle puisait une énergie vivifiante.
Parvenue au bord de l'étang, elle plongea l’extrémité de ces jambes dans le liquide émeraude. Sa peau, pénétrée par le contact de l'eau, semblait se purifier. Pas à pas, la substance liquide l'enveloppa dans son sillage, puis l'attira dans ses profondeurs. Son corps se retrouva entièrement immergé dans une matière protectrice, plus légère encore que l'eau. Elle se laissa attirer lentement dans les bas-fonds, se mouvant dans l'espace comme en apesanteur. Willow sentit son épiderme se perler de gouttelettes d'oxygène, si bien qu'en totale immersion, elle n’éprouvait aucune difficulté à respirer comme à l'air libre. C'était une sensation étrange et tellement agréable qu'elle en était devenue accro. Elle touchait au but.
Une silhouette éthérée se matérialisa devant elle. Ne possédant ni visage, ni caractéristiques physiques autres que les contours grossiers d'un humain, la forme se mouvait avec une vitesse et une agilité faramineuse, sans suivre de trajectoire définie. Elle virevoltait et ondoyait autour de la jeune femme émerveillée.
Un rictus se dessina sur le visage de la sorcière qui, lentement, lui tendit sa main, dans l'attente d'une quelconque réaction. L'entité s’immobilisa et inclina la tête en donnant l'impression d'analyser innocemment son geste. L'être répondit à l'invitation en s'approchant lentement. Sa main, grossièrement dessinée, se calqua sur celle de la sorcière. Leurs deux paumes entrèrent en contact dans une symétrie parfaite.
Diverses émotions traversèrent la jeune femme, et des larmes coulèrent le long de ses joues. La peur, la colère, le désir, l'amour et la haine, la joie et la tristesse, toutes ces sensations contradictoires l'envahirent jusqu'à modifier son apparence. Ses yeux alternaient entre le brun clair et une noirceur chaotique. Son visage, tantôt sobre puis coloré de veines apparentes, ainsi que ses cheveux oscillants entre le roux et le noir, se modifiait au gré de ses émotions.
L'entité l'entoura de ses bras protecteurs, tandis que la sorcière, gagnée par un amour indicible, se laissa aller à l'étreindre également. Elle ferma alors les yeux et se laissa emporter par l'être minéral. Ce dernier la fit tournoyer lentement en l'accompagnant dans une danse ascendante, à l'image de deux amants inséparables. Blottie dans ses bras et entraînée inexorablement vers la surface, la sorcière redoutait que cet instant ne s'estompe.
Enfin, les deux amants émergèrent du lac et la sorcière ouvrit les yeux. Elle n'aurait jamais dû. Le tonnerre se mit à gronder, la terre à trembler, et la lumière à vaciller. Le ciel était devenu orage, et une pluie diluvienne se mit à tomber. Willow ne pouvait que contempler l’ampleur du désastre. Les animaux peuplant jusqu'alors cet oasis avaient disparu, remplacés par d'autres d'une nature sombre et menaçante. Les corneilles et les corbeaux croassaient du haut des arbres vacillants sous la tempête de vent. Des serpents infiltraient les rochers, guettés par le regard perçant des chouettes et des hiboux qui avaient investi les lieux. Les fleurs, autrefois épanouies sur le sol fertile, apparaissaient fanées, séchées, sur une terre aride et meurtrie.
Les larmes jaillirent de plus belle sur la peau cristalline de la jeune femme, bouleversée par le chant de la terre agonisante.
─ Qu'en est-il du lever du soleil, qu'en est-il de toute cette pluie ? Qu’en est-il de tout ce sang ? Qu'en est-il des mers et des océans, Qu'en est-il de cet immense tourment ? Qu'en est-il des enfants qui meurent, de cette vie sans sens ? Qu'en est-il des animaux, Qu'en est-il des champs fleuris ? Ne pouvons-nous voir ce monde que nous détruisons, ce monde qui hurle sa douleur, qu'en est-il de la terre qui pleure ?
L'entité ne s’exprimait pas dans un langage audible pour le genre humain, mais Willow comprenait parfaitement, avec une clarté insaisissable, la complainte de ce monde en perdition. L'heure du départ avait sonné, et la sorcière lui adressa un sourire empreint de tristesse.
─ Merci, lui dit-elle reconnaissante.
L'entité aquatique se déforma et prit la forme d'un tourbillon furieux qui s’élança dans les profondeurs du lac. Une explosion titanesque s'ensuivit, et toute la matière liquide s'évapora, ne laissant derrière elle qu’un trou béant et insubstantiel. La cascade s'effondra sur elle-même, anéantissant toute vie alentour. La sorcière, accablée, tomba alors à genou et poussa un cri de désespoir. Elle défia les éléments déchaînés avant de sombrer dans l’inconscience.
Lorsqu'elle reprit conscience, elle se retrouva allongée à même le tatami. Ses bras tremblaient et quelques secondes ne lui furent pas de trop pour qu'elle reprenne son souffle et maîtrise ses émotions. La trace d'une larme, marquée au fer rouge sur sa joue, lui fit prendre conscience que l'expérience vécue sur le plan psychique avait engendré des répercussions sur le monde matériel. La sorcière demeura un moment dans le vague avant d'être interpellée par une voix amicale.
─ Willow est-ce que ça va ?
Cette voix ne lui était pas inconnue. Elle acta un rapide tour d'horizon et remarqua autour d'elle, un amas de personnes qui la dévisagèrent, incrédules et inquiets. Buffy, Faith, Alex, Dawn et Leïna, se tenaient présents, entourés de toutes les tueuses épargnées par les récents événements. Le raffut causé par la sorcière avait résonné dans tout l'immeuble, et elle-même se demandait encore comment. Après tout, elle n'avait chuté que d'un ou deux mètres de haut, tout au plus. Toujours sous le coup de l'émotion, elle n'avait pas encore remarqué la façade totalement détruite, creusant un espace abyssal sur l'extérieur.
─ Bonjour le montant des travaux, ironisa Alex qui avait encore sur sa joue, la marque gravée de son oreiller.
Buffy s'empressa de soutenir son amie en l'aidant à se relever, tandis que Faith lui emboîta le pas. Les autres membres du groupe demeuraient dans l’expectative, suspendus à l’attente d’une quelconque explication. Le cercle intime de la sorcière se mit à sursauter simultanément sous le regard dubitatif du reste de la foule. La voix caverneuse de Willow s'était mise à résonner dans leur tête, par le biais d'une télépathie improvisée. La sorcière recourait à ce sortilège de temps à autre, lorsqu'elle souhaitait s'adresser à un nombre restreint de personnes, les extirpant ainsi de la masse sans éveiller le moindre soupçon.
─ Écoutez-moi, il s'est passé quelque chose et je préférerais qu'on soit entre nous pour en parler.
Alex prit alors l’initiative de dissiper tout ce joli monde.
─ Bon les filles, y a rien de grave, annonça-t-il tout innocemment. Voyez-vous même. Willow est tellement puissante qu'elle a du mal à se maîtriser parfois, mais elle va bien. Vous pouvez retourner à vos occupations, on va s'occuper d'elle.
Une tentative avortée puisqu'aucune des spectatrices ne se décida à quitter les lieux.
─ Faut vous le dire comment ? s'emporta Faith. Dégagez le plancher, y a rien à voir et que ça vous empêche pas de vous entraîner.
La tueuse, auréolée d'une autorité naturelle, dispersa la foule en moins de temps qu'il n’en fallu pour l’écrire. Alex, bien qu’un peu envieux, n'en était que plus admiratif.
─ Tu vois, c'est ça le charisme ! se moqua Leïna, n'hésitant pas à piquer son bien aimé lorsque l'occasion se présentait.
─ On monte à l'étage ? proposa Buffy. On sera plus tranquille là-haut.
***
Tous se réunirent dans cette pièce du bâtiment qu'ils aimaient à considérer comme leur sanctuaire intime et privé. Cet espace de vie, sans grande prétention, agrémenté d'une modeste cuisine, avait été aménagé par la force des choses, en une sorte de petit quartier général. En plus d'un canapé, une grande table arrondie trônait au centre, évoquant, selon les dires d'Andrew, les légendes arthuriennes auxquelles ce dernier ne manquait jamais l'occasion de s'y référer. Un petit bar dans le coin de la pièce proposait quelques bouteilles d'alcool et de jus de fruits. Tous les éléments étaient réunis pour passer quelques bonnes soirées entre amis, entre deux briefings.
Tandis que Buffy et Faith installaient, délicatement et le plus confortablement possible, leur amie sur le canapé, Leïna entreprit d'apporter un grand verre d'eau bien frais pour la soulager.
─ Merci ma belle, ajouta Willow en esquissant un sourire forcé, au vu de ce qu'elle s’apprêtait à dévoiler.
Elle se rinça la gorge de quelques gorgées, puis remit le verre pas tout à fait vide à sa disciple restée assise à ses côtés, prête à intervenir en cas de rechute. Ce qui préoccupait Leïna n'était pas tant les révélations à venir, que l'état de santé de la rouquine avec laquelle elle avait tissé quelques liens privilégiés.
─ Pour faire simple, je crois que nous avons un gros problème sur les bras, annonça solennellement Willow d'une voix grave.
─ Willow, s'il te faut plus de temps, s'inquiéta Buffy consciente de l'état de fatigue de sa meilleure amie.
─ Non, ne t'en fais pas. Ça va aller. Enfin, j'espère.
La sorcière paraissait un peu hésitante, gênée, et avait un mal de chien à trouver ses mots.
─ J'ai quelques explications à vous donner. Pour commencer, je suis vraiment désolée. Ces derniers temps, on ne peut pas dire que j'ai été très loquace.
─ Hé Will, intervint Alex. Ne t’excuse pas. On avait tous remarqué qu'il y avait quelque chose qui clochait. On a pensé qu'après le départ de Kennedy, tu avais besoin de te retrouver un peu seule. Et puis après tout ce que tu fais pour tout le monde ici, tu méritais bien un peu de repos. On s'était dit que si tu avais des problèmes, tu viendrais nous en parler quand tu le jugerais bon.
─ Et je vous en remercie ! continua Willow en tançant ses amis d'un regard plein de gratitude. Je vais vous le dire maintenant. Si je me suis retranchée et si je n'étais plus opérationnelle sur le terrain, c'était parce que j'avais perdu le contrôle de mes pouvoirs. Je ne maîtrisais plus rien.
─ Ça t'était déjà arriver avant ? questionna Faith, les bras croisés, en se tenant légèrement en retrait des autres.
─ Eh bien oui et non. J'ai déjà perdu le contrôle quelques fois, et j'ai failli détruire le monde à cause de ça, mais là, c'est différent. Je ne peux pas l'expliquer, c'est de l'ordre de l'intime.
─ Will, l'interpella Alex. On est tes amis. Pourquoi t'es pas venue nous en parler plus tôt ?
─ Et bien, je l'ai voulu mais ces dernières semaines n'ont pas été faciles. Tout le monde était sur le pied de guerre. Vous étiez tous exténués et je ne voulais vraiment pas rajouter un sujet d'inquiétude en plus. J'avais l'intention de tout vous dire mais avant, il me fallait des réponses. Il fallait que je comprenne pourquoi, et ça, j'étais la seule à pouvoir le faire.
─ Et ces réponses, tu les as ! considéra Buffy.
─ Oui, et c'est pire que ce que je pensais.
Toutes les personnes présentes dans la pièce échangèrent des regards inquiets, avant de se focaliser sur la sorcière dans l'attente d'en savoir plus.
─ Écoute Willow, s'impatienta Faith. Je ne veux surtout pas te brusquer mais si tu pouvais aller droit au but.
─ Oui bien sûr, acquiesça-t-elle. Quand je vous disais que j'avais perdu le contrôle de mes pouvoirs, et bien, je pensais que ça devait venir de moi. Alors, pour en avoir le cœur net, je suis passée par d'autres voies et j'ai établi un lien, un passage vers la source même de la magie présente sur terre.
L'assemblée, qui ne doutait pourtant pas du pouvoir incommensurable de leur amie, resta ébahie et décontenancée par l'air détaché avec lequel elle en parlait, comme s'il s'agissait d'une pratique banale.
─ Ben oui, ironisa Alex. Établir un passage avec la source magique de notre belle planète, une broutille pour notre petite Willow.
─ J'y suis parvenue, poursuivit-elle. Et ce que j'y ai vu, c'était... Je ne trouve même pas les mots pour décrire cette horreur. Tous les éléments, tout ce qui régulait les pouvoirs de la nature, toute cette énergie qui débordait de toute part, prête à exploser.
─ Et qu'est-ce que tu en conclu ? s’intéressa Buffy
─ En état, cette perturbation serait de nature à créer une véritable menace. La terre et ses barrières mystiques s'en trouveraient fragilisées. Il n'y aurait plus aucune protection, et les bouches de l'enfer pourraient s'ouvrir les unes après les autres. Je ne vous fais pas de dessin mais la dernière fois, Sunnydale a été rayée de la carte, et ce n'est rien en comparaison de ce qui risque d'arriver. Cette fois-ci, ça pourrait être bien pire. Les bouches de l'enfer ne seraient pas le seul problème, la barrière magique qui protège la terre des autres dimensions, ne remplirait plus vraiment son office, et je vous laisse imaginer ce qui se passerait si c'était le cas.
La prise de conscience générale fut accompagnée d'un lourd silence.
─ D'accord. Bon, il n'y a pas de quoi en faire toute une histoire, dédramatisa Buffy. Après tout, c'est juste la fin du monde. On commence à y être habitué. L'apocalypse, ça commence à devenir la routine.